ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"34"> l'ébranlement de tout le corps, les efforts qui en sont la suite, rendent leur usage très - avantageux. Les bains chauds étoient fort usités chez les anciens dans le traitement de la manie. Galien, Aretée, Alexandre de Tralles, Prosper Alpin, &c. en vantent les heureux succès; on ne se sert plus aujourd'hui dans cette maladie que des bains froids; c'est Vanhelmont qui nous a fait connoître l'utilité de ce remede; le hasard la lui avoit apprise: on transportoit sur un chariot un artisan maniaque, qui ayant pu se débarrasser des chaînes dont il étoit garroté, se jetta dans un lac profond. On l'en retira le croyant mort; mais peu de tems après, il donna des signes de vie & de santé; il vécut ensuite assez long - tems sans éprouver aucune atteinte de folie; Van - helmont animé par cet exemple, essaya depuis ce remede sur plusieurs maniaques, & presque toûjours avec un succès complet, excepté, dit - il, lorsque craignant pour la vie du maniaque, on ne le laissoit pas assez long - tems dans l'eau. L'immersion dans la mer ou dans la riviere est indifférente; la seule attention qu'on doive avoir, c'est de plonger subitement & à l'improviste, les malades dans l'eau, & de les y soutenir très - long - tems; il n'y a rien à craindre pour leur vie. L'eau froide ou glacée appliquée ou versée de fort haut sur la tête, a produit le même effet; lorsqu'elle réussit, cette application est suivie d'un sommeil profond. J'ai connu une personne maniaque, qui s'échappant d'une prison où elle étoit retenue, fit plusieurs lieues avec une pluie violente sans chapeau & presque sans habits, & qui recouvra par ce moyen une santé parfaite. Voyez les mémoires de l'acad. roy. des Scienc. ann. 1734. histoir. pag. 56. Psychrolousia, ou the history of cold Bathings, &c. pag. 452. Quelques auteurs emploient dans ce cas - ci avec succès les essences aromatiques violentes, les spiritueux à haute dose, le musc, l'ambre, le camphre, &c. D'autres assurent que les humectans, rafraîchissans, calmans, les nitreux, &c. sont les remedes sur lesquels on peut le plus compter: mais ce ne sont pas des remedes curatifs; ils ne sont propres qu'à diminuer la violence des fureurs, propriété que possede éminemment le sucre de Saturne, donné depuis deux grains jusqu'à huit; ils sont préférables à l'opium dont ils ont les avantages sans les inconvéniens. La manie qui succede aux fievres intermittentes, demande un traitement particulier. Sydenham, le seul qui en ait parlé, remarque que les saignées & les purgatifs l'aigrissent & l'opiniâtrent; que les remedes les plus appropriés sont une diete analeptique, restaurante des legers cordiaux comme la thériaque, la poudre de la comtesse, &c. Il assûre avoir guéri par cette méthode plusieurs manies, qui devoient leur origine à cette cause. M. Menuret.

MANIEMENT (Page 10:34)

MANIEMENT, s. m. (Gramm.) l'action de toucher avec attention. Il y a plusieurs substances naturelles ou artificielles, dont la bonne ou mauvaise qualité se reconnoît au maniement.

Maniment (Page 10:34)

Maniment, s.m. (Hist. mod.) terme dont les Anglois se servent en parlant de leur combat de coq: il signifie l'action de mesurer la grosseur de cet animal, en prenant son corps entre les mains & les doigts.

Maniement (Page 10:34)

Maniement, (Commerce.) en termes de finances & de banque, signifie l'argent que les caissiers & autres employés dans les fermes du roi, dans le commerce & dans les affaires des particuliers, reçoivent, & dont ils sont comptables. On dit qu'un caissier, un receveur a un grand maniement, quand il a en caisse des sommes considérables. Dictionn. de commerce.

Maniement (Page 10:34)

Maniement d'épée, en fait d'escrime. On dit d'un escrimeur qu'il manie bien l'épée, lorsqu'il la tient de façon qu'il puisse faire tous les mouvemens de l'escrime sans être gêné, & sans que l'épée change de place dans sa main.

Pour bien tenir l'épée, il faut; 1°. placer le pommeau à la naissance de la main, entre le ténar & l'hypoténar; 2°. allonger le pouce & les muscles ténar sur le plat de la poignée, ou ce qui est le même alignés sur le plat de la lame; 3°. mettre le milieu de l'index dessous l'extrémité de la poignée, qui est du côté de la garde; 4°. placer les bouts du petit doigt & du doigt annulaire, sur le côté & à l'extrémité de la poignée qui est du côté du pommeau; 5°. presser avec ces deux doigts l'extrémité de la poignée, contre le ténar; 6°. observer de laisser un intervalle d'un travers de doigt au moins, entre la garde & l'extrémité du pouce, & qu'il ne faut serrer la poignée avec les doigts collatéraux, que dans l'instant d'une action, parce que les muscles ténar sont d'abord engourdis, & que le petit doigt & l'annulaire ne s'engourdissent jamais.

L'épée ainsi placée dans la main, elle ne doit jamais y changer de position; & lorsqu'on est obligé de faire un mouvement, soit pour attaquer ou pour se défendre, la main doit tourner & mettre l'épée où elle doit être.

MANIER (Page 10:34)

MANIER, v. act. (Gramm.) c'est ou toucher de la main, ou donner de la souplesse à une chose, en la faisant passer & repasser entre les mains, ou en éprouver la qualité par le toucher, ou toucher souvent, ou savoir faire un usage adroit, ou diriger. Voici différens exemples de ces acceptions: il n'appartient qu'au prêtre de manier les vases sacrés; il faut manier les peaux jusqu'à ce qu'elles soient tout - à - fait souples & douces; on connoît la qualité d'un chapeau en le maniant; les gens d'affaires manient beaucoup d'argent; l'expérience a appris aux supérieurs de communauté à manier les esprits. Cet homme sait bien manier un cheval, un fleuret, une épée, &c.

Manier à bout (Page 10:34)

Manier à bout, (Architect.) c'est relever la tuile ou ardoise d'une couverture, & y ajouter du lattis neuf avec les tuiles qui y manquent, faisant resservir les vieilles; c'est aussi asseoir du vieux pavé sur une forme neuve, & en remettre de nouveau à la place de celui qui est cassé.

Manier (Page 10:34)

Manier, (Maréch.) se dit du cheval de manége quand il fait son exercice avec grace & légereté. Un cheval peut manier bien ou mal. Manier de ferme à ferme, se dit du cheval que le cavalier fait manier sans sortir de sa place.

Manier (Page 10:34)

Manier, (Peinture) On dit, ce peintre manie le pinceau, manie la couleur comme il lui plaît, c'est - à - dire, qu'on lui reconnoît une main sûre. Manier la couleur, maniement des couleurs, manier le pinceau, maniement du pinceau.

Manier (Page 10:34)

Manier, (Vergetier.) Voyez Appréter.

MANIERE (Page 10:34)

MANIERE, s.f. (Gramm. Pol. Moral.) dans le sens le plus généralement reçu, sont des usages établis pour rendre plus doux le commerce que les hommes doivent avoir entr'eux. Elles sont l'expression des moeurs, ou seulement l'effet de la soumission aux usages. Elles sont par rapport aux moeurs, ce que le culte est par rapport à la religion; elles les manifestent, les conservent, ou en tiennent lieu, & par conséquent elles sont dans les sociétés d'une plus grande importance que les moralistes ne l'ont pensé.

On ne sait pas assez combien l'habitude machinale nous fait faire d'actions dont nous n'avons plus en nous le principe moral, & combien elle contribue à conserver de principe. Lorsque certaines actions, certains mouvemens se sont liés dans notre esprit avec les idées de certaines vertus, de certains sentimens; ces actions, ces mouvemens rappellent en nous ces sentimens, ces vertus. Voyez Liaison des idées. [p. 35]

A la Chine les enfans rendent d'extrèmes honneurs à leurs parens; ils leur donnent sans cesse des marques extétreures de respect & d'amour: il est vraissemblable que dans ces marques extérieures, il y a plus de démonstration que de réalité; mais le respect & l'amour pour les parens sont plus vifs & plus continus à la Chine, qu'ils ne le sont dans les pays où les mêmes sentimens sont ordonnés, sans que les loix prelerivent la maniere de les manifester. Il s'en manque bien en France, que le peuple respecte tous les grands qu'il salue; mais les grands y sont plus respectés, que dans les pays où les manieres établies n'imposent pas pour eux des marques de respect.

Chez les Germains, & depuis parmi nous dans les siéeles de chevalerie, on honoroit les femmes comme des dieux. La galanterie étoit un culte, & dans ce culte comme dans tous les autres, il y avoit des tiédes & des hypocrites; mais ils honoroient encore les femmes, & certainement ils les aimoient & les respectoient davantage que le caffre qui les fait travailler, tandis qu'il se repose, & que l'asiatique qui les enchaine & les caresse, comme des animaux destinés à ses plaisirs.

L'habitude de cettaines actions, de certains gestes, de certains mouvemens, de certains signes exterieurs maintiennent plus en nous les mêmes sentimens, que tous les dogmes & toute la Métaphysique du monde.

J'ai dit que l'habitude machinale nous faisoit faire les actions dont nous n'avions plus en nous le principe moral; j'ai dit qu'elle conservoit en nous le principe, elle fait plus, elle l'augmente ou le fait naitre.

Il a'y a aucune passion de notre ame, aucune assection, ancun sentiment, aucune émotion qui n'ait son effet sur le corps, qui n'éleve, n'affaisse, ne relâche ou ne tende quelques museles, & n'ait du plus au moins en variant notre extérieur, une expression particuliere. Les peines & les plaisirs, les desirs & la crainte, l'amour ou l'averson, quelque morale qu'en soit la cause, ont plus ou moins en nous des effets physiques qui se manifestent par des signes, plus ou moins sensibles. Toutes les affections se maiquent sur le visage, y donnent une certaine expression, font ce qu'on appelle la physionomie, changent l'habitude du corps, donnent & ôtent la contenance, font faire certains gestes, certains mouvemens. Cela est d'une vérité qu'on ne conteste pas.

Mais il n'est pas moins vrai, que les mouvemens des museles & des nerfs qui sont d'ordinaire les effets d'une certaine passion, étant excités, répetés en nous sans le secours de cette passion, s'y reproduisent jusqu'à un certain point.

Les effets de la musique sur nous sont une preuve sensible de cette vérité: l'impression du corps sonore sur nos nerfs y excite différens mouvemens, dont plusieurs sont du genre des mouvemens qu'y exciteroit une certaine passion; & bien - tôt si ces mouvemens se succédent, si le musicien continue de donner la même sorte d'ébranlement au genre nerveux; il fait passer dans l'ame telle ou telle passion, la joie, la tristesse, l'inquiétude, &c. Il s'ensuit de cette observation, dont tout homme doué de quelque délicatesse d'organe, peut constater en soi la vérité, que si certaines passions donnent au corps certains mouvemens, ces mouvemens ramenent l'ame à ces pafsions; or les manieres consistant pour la plûpart en gestes, habitudes de corps, démarches, actions, qui sont les signes, l'expression, les effets de certains sentimens, doivent donc non seulement manifester, conserver ces sentimens, mais quelquefois les faire naître.

Les anciens ont fait plus d'attention que nous à l'influence des manieres sur les moeurs, & aux rapports des habitudes du corps à celles de l'ame. Platon distingue deux sortes de danse, l'une qui est un art d'imitation, & à proprement parler, la pantomime, la danse & la seule danse propre au théâtre; l'autre, l'art d'accoutumer le corps aux attitudes décentes, à faire avec bienséance les mouvemens ordinaires; cette danse s'est conservée chez les modernes, & nos maitres à danser sont professeurs des manieres. Le maitre à danser de Moliere n'avoit pas tant de tort qu'on le pense, sinon de se préférer, du moins de se comparer au maitre de Philosophie.

Les manieres doivent exprimer ie respect & la soumission des inférieurs à l'égard des supérieurs, les témoignages d'humanité & de condescendance des supérteurs envers les inférieurs, les sentimens de bienveillance & d'estime entre les égaux. Elles réglent le maintien, elles le prescrivent aux différens ordres, aux citoyens des différens états.

On voit que les manieres, ainsi que les moeurs, doivent changer, selon les différentes formes de gouvernement. Dans les pays de despotisme, les marques de soumission sont extrèmes de la part des inférieurs; devant leurs rois les satrapes de Perse se prosterncient dans la poussiere, & le peuple devant les satrapes se prosternoit de même; l'Asie n'est point changée.

Dans les pays de despotisme, les témoignages d'humanité & de condescendance de la part des supérieurs, se réduisent à fort peu de chose. Il y a trop d'intervalle entre ce qui est homme & ce qui est homme en place, pour qu'ils puissent jamais se rapprocher; là les supérieurs ne marquent aux infér eurs que du dédain, & quelquefois une insultante prtié.

Les égaux esclaves d'un commun maitre, n'ayant ni pour eux - mêmes, ni pour leurs semblables, aucune estime, ne s'en témoignent point dans leurs manieres; ils ont foiblement l'un pour l'autre, les sentimens de bienveillance; ils attendent peu l'un de l'autre, & les esclaves élevés dans la servitude ne savent point aimer; ils sont plus volontiers occupés à rejetter l'un sur l'autre le poids de leurs fers, qu à s'aider à les supporter; ils ont plus l'air d'implorer la pitié, que d'exprimer de la bienséance.

Dans les démocraties, dans les gouvernemens où la puissance législative réside dans le corps de la nation, les manieres marquent foiblement les rapports de dépendance, & en tout genre même; il y a moins de manieres & d'usages établis, que d'expressions de la nature; la liberté se manifeste dans les attitudes, les traits & les actions de chaque citoyen.

Dans les aristocratiques, & dans les pays où la liberté publique n'est plus, mais où l'on jouit de la liberté civile; dans les pays où le petit nombre fait les lois, & sur - tout dans ceux où un seul regne, mais par les lois, il y a beaucoup de manieres & d'usages de convention. Dans ces pays plaire est un avantage, déplaire est un malheur. On plait par des agrémens & même par des vertus, & les manieres y sont d'ordinaire nobles & agréables. Les citoyens ont besoin les uns des autres pour se conserver, se secourir, s'élever ou jouir. Ils craignent d'éloigner d'eux leurs concitoyens en laissant voir leurs défauts. On voit par - tout l'hiérarchie & les égards, le respect & la liberté, l'envie de plaire & la tranchise.

D'ordinaire dans ces pays on remarque au premier coup d'oeil une certaine uniformité, les caracteres paroissent se ressembler, parce que leur différence est cachée par les manieres, & même on y voit beaucoup plus rarement que dans les républiques, de ces caracteres originaux qui semblent ne

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