RECHERCHE | Accueil | Mises en garde | Documentation | ATILF | ARTFL | Courriel |
LUNE (Page 9:726)
LUNE, s. f. (Astr.) est l'un des corps celestes que
l'on met ordinairement au nombre des planetes, mais
qu'on doit regarder plûtôt comme un satellite, ou
comme une planete secondaire. Voyez
La lune est un satellite de notre terre, vers laquelle elle se dirige toûjours dans son mouvement comme vers un centre, & dans le voisinage de laquelle elle se trouve constamment, de façon que si on la voyoit du soleil, elle ne paroîtroit jamais s'éloigner de nous d'un angle plus grand que dix minutes.
La principale différence que l'on apperçoit entre les mouvemens des autres planetes & celui de la lune se peut aisément conce voir: car puisque toutes ces planetes tournent autour du soleil qui est à peu près au centre de leur mouvement, & puisqu'il les attire, pour ainsi dire, à chaque instant, il arrive delà qu'elles sont toûjours à peu près à la même distance du soleil, au - lieu qu'elles s'approchent quelquefois considérablement de la terre, & d'autres fois s'en éloignent considérablement. Mais il n'en eft pas tout - à - fait de même de la lune, on doit la regarder comme un corps terrestre. Ainsi selon les lois de la gravitation elle ne peut guere s'éloigner de nous, mais elle est retenue à peu près dans tous les tems à la même distance.
Il est si visible que la lune tourne autour de la terre, que nous ne voyons point qu'aucun philosophe de l'antiquité, ni même de ces derniers tems, ait pensé à faire un système différent. Il étoit reservé au P. D. Jacques Alexandre, bénédictin, de soutenir le premier que ce n'est point la lune qui tourne autour de la terre, mais la terre autour de la lune. Il a avancé cette opinion dans une dissertation sur le slux & reflux de la mer, qui remporta le prix de l'académie de Bordeaux en 1727; & toute son explication du flux & reflux porte sur l'hypothese du mouvement de la terre autour de la lune. L'académie de Bordeaux, dans le programme qu'elle a fait imprimer à la tête de cet ouvrage, a eu grand soin d'avertir qu'en couronnant l'auteur, elle n'avoit pas prétendu adopter son système, & que si elle n'adjugeoit le prix qu'à des systèmes démontrés, elle auroit souvent le déplaisir de ne pouvoir le distribuer; M. de Mairan, membre de cette académie & de plusieurs autres, a cru qu'il étoit nécessaire de réfuter l'opinion de D. Jacques Alexandre, & il l'a fait par une dissertation imprimée dans les mémoires de l'académie des Sciences de Paris 1727. Il y démontre par des observations astronomiques que la lune tourne autour de la terre, & non la terre autour de la lune. Ceux qui voudront voir ces preuves en détail, peuvent consulter la dissertation dont nous parlons, ou l'extrait qu'en a donné M. de Fontenelle.
De même que toutes les planetes premieres se
meuvent autour du soleil, de même la lune se meut
autour de la terre; son orbite est à peu près une
ellipse dans laquelle elle est retenue par la force de
la gravité; elle fait sa révolution autour de nous en
27 jours, 7 heures 43 minutes, ce qui est aussi le tems
précis de sa rotation autour de son axe. Voyez
La moyenne distance de la lune à la terre est d'environ 60½ diametres de la terre, ce qui fait environ 80000 lieues.
L'excentricité moyenne de son orbite est environ > de sa moyenne distance, ce qui produit une variation dans la distance de cette planete à la terre, car elle s'en approche & s'en éloigne alternativement de plus d'un dixieme de sa moyenne distance.
Le diametre de la lune est à celui de la terre à peu
près comme 11 est à 40, c'est - à - dire, qu'il est d'environ
725 lieues, son diametre apparent moyen est de
31'. 16" ½. & celui du soleil de 32'. 12". Voyez
La surface de la lune contient environ 1555555 lieues quarrées, &c. La densité de la lune est à celle [p. 727]
Les Astronomes sont assez d'accord entre eux sur la plûpart de ces rapports, qui sont assez exactement déterminés par les observations. Celui qui jusqu'à présent est le plus incertain, est le rapport de la densité de la lune à celle de la terre ou du soleil; le rapport que nous venons d'en donner, est celui qu'a assigné M. Newton. Mais les observations & les calculs desquels il la déduit ne paroissent pas satisfaisans à M. Bernoulli dans sa piece sur le flux & reflux de la mer. Il est certain que la détermination de la densité de la lune est un des problèmes les plus difficiles de l'Astronomie; nous en parlerons à la fin de cet article, lorsque nous ferons mention des travaux des géometres modernes sur la lune.
Phénomenes de la lune. On distingue un grand
nombre de differentes apparences ou phases de la
lune: tantôt elle croît, tantôt elle décroît; quelquefois
elle est cornue, d'autres fois demi - circulaire,
d'autres fois bossue, pleine, & circulaire, ou plûtôt
sphérique. Voyez
Quelquefois elle nous éclaire la nuit entiere, quelquefois une partie de la nuit seulement; quelquefois elle est visible dans l'hémisphere méridional, & quelquefois dans le boréal; or comme toutes ses variations ont été d'abord découvertes par Endimion ancien grec, qui a été le premier attentif a observer les mouvemens de la lune, la fable à supposé par cette raison qu'il en étoit amoureux.
La cause de la plûpart de ces apparences, c'est que la lune est un corps obscur, opaque & sphérique, & qu'elle ne brille que de la lumiere qu'elle feçoit du soleil; ce qui fait qu'il n'y a que celle des deux moitiés qui est tournée vers cet astre, qui soit éclairée, la moitié opposée conservant toujours son obscurité naturelle.
La face de la lune qui est visible pour nous. c'est cette partie de son corps qui est tout - à - la - fois tournée vers la terre & éclairée du soleil, d'ou il arrive que suivant les différentes positions de la lune par rapport au soleil & à la terre, on en voit une plus ou moins grande partie éclairée, parce que c'est tantôt une plus grande portion, & tantôt une plus petite de son hémisphete lumineux qui nous est visible.
Phases de la lune. Pour concevoir les phases de
la lune, supposons que S (
Joignez les centres de la terre & de la lune par la ligne T L, à laquelle vous menerez par le centre de la lune un plan perpendiculaire P L O, ce plan donnera sur la surface de la lune le cercle qui sépare l'hémisphere visible, ou celui qui est tourné vers nous, de l'hémisphere invisible, cercle que l'on nomme par cette raison, cercle de vision.
Il s'en suit de - là que la lune étant en A, le cercle qui termine la lumiere & l'ombre, & le cercle de vision coincideront; de façon que toute la surface lumineuse de la lune sera tournée alors vers la terre; la lune en ce cas sera pleine par rapport à nous, &
Quand la lune arrive en B, le disque éclairé M P N
ne sera pas tourné en entier vers la terre, de façon
que la partie qui sera alors tout - à - la - fois éclairée &
visible, ne sera pas tout - à - fait un cercle, & la lune
paroîtra bossue comme en B. Voyez
Quand elle sera arrivée vers C, où l'angle C T S
est droit, il n'y aura plus qu'environ la moitié du
disque éclairé qui sera tournée vers la terre, & nous
verrons une demi - lune, elle sera dite alors dichotomisée, ce qui veut dire coupée en deux. Voyez
Dans cette situation le soleil & la lune ne sont
éloignés l'un de l'autre que d'un quart de cercle, &
on dit que la lune est dans son aspect quadral, ou
dans sa quadrature. Voyez
La lune arrivant en D, il n'y aura plus qu'une petite
partie du disque éclairé M P N qui soit tournée
vers la terre, ce qui fera que la petite partie qui
nous luira paroitra cornue, ou comme une faulx,
c'est - à - dire terminée par de petits angles ou cornes
comme en O. Voyez
Enfin la lune arrivant en E, elle ne montre plus à
la terre aucune partie de sa face éclairée comme en
O, & c'est cette position qu'on appelle nouvelle lune;
la lune est dite alors en conjonction avec le soleil,
parce que ces deux astres répondent à un même point
de l'écliptique. Voyez
A mesure que la lune avance vers F elle reprend
ses cornes, mais avec cette différence qu'avant la
nouvelle lune les cornes étoient tournées vers l'occident,
au - lieu qu'à présent elles changent de position
& elles regardent l'orient: lorsqu'elle est arrivée
en G, elle se trouve de nouveau dichotomisée; en
H elle est encore bossue, & en A elle redevient
pleine. Voyez la
L'angle S T L compris entre les lignes tirées des centres du soleil & de la lune, à celui de la terre, est nommée l'élongation de la lune au soleil, & l'arc P N, qui représente la portion du cercle éclairée M O N, laquelle est tournée vers nous, est par - tout presque semblable à l'arc d'élongation E L; ou ce qui est la même chose, l'angle S T L est presque égal à l'angle M L O, selon que les Géometres le démontrent.
Moyen de décrire les phases de la lune pour un tems
donné. Que le cercle C O B P (
Ceux qui voudront avoir la démonstration de cette pratique, la trouveront dans l'Introductio ad veram Astronomiam de Keill, qui a été traduite en françois par M. Lemonnier, avec beaucoup d'additions: c'est dans le chapitre ix. de cet ouvrage que cet auteur a donné la démonstration dont nous parlons.
Comme la lune éclaire la terre d'une lumiere qu'elle reçoit du soleil, de même elle est éclairée par la terre qui lui renvoye aussi de son côté par reflexion des rayons du soleil, & cela en plus grande abondance qu'elle n'en reçoit elle - même de la lune; car la surface de la terre est environ quinze [p. 728]
Quand la lune parvient en opposition avec le soleil, la terre vûe de la lune doit paroître alors en conjonction avec lui, & son côté obscur doit être tourné vers la lune; dans cette position la terre doit cesser d'être visible aux habitans de la lune, comme la lune cesse de l'être pour nous lorsqu'elle est nouvelle dans sa conjonction avec le soleil; peu après les habitans de la lune doivent voir la terre cornue, en un mot la terre doit présenter à la lune les mêmes phases que la lune présente à la terre.
Le docteur Hook cherchant la raison pourquoi la
lumiere de la lune ne produit point de chaleur sensible,
observe que la quantité de lumiere qui tombe
sur l'hémisphere de la pleine lune est dispersée avant
que d'arriver jusqu'à nous, dans une sphere 188 fois
plus grande en diametre que la lune, que par conséquent
la lumiere de la lune est 104368 plus foible
que celle du soleil, & qu'ainsi il faudroit qu'il y eût
tout à - la - fois dans les cieux 104368 pleines lunes,
pour donner une lumiere & une chaleur égale à
celle du soleil à midi. Voyez
On a même observé que la lumiere de la lune ramassée au foyer d'un miroir ardent ne produisoit aucune chaleur. Sans avoir recours au calcul du doctur Hook, on peut en apporter une raison fort simple, savoir que la surface de la lune absorbe la plus grande partie des rayons du soleil, & ne nous en envoie que la plus petite partie.
Cours & mouvemens de la lune. Quoique la lune
finisse son cours en 27 jours 7 heures, intervalle que
nous appellons mois périodiques, elle emploie cependant
plus de tems à passer d'une conjonction à
la suivante, & ce dernier intervalle de tems s'appelle
mois synodique ou lunaison. Voyez
La raison en est que pendant que la lune fait sa
révolution autour de la terre dans son orbe, la terre
avec tout son système fait de son côté une partie de
sa révolution autour du soleil, de façon qu'elle &
son satellite, la lune, avancent l'un & l'autre de
presque un signe entier vers l'orient; le point de
l'orbite, qui dans sa premiere position répondoit
à la droite qui passe par les centres de la terre &
du soleil, se trouve donc alors à l'occident du soleil,
& par conséquent lorsque la lune revient à ce même
point elle ne doit plus se retrouver comme auparavant
en conjonction avec le soleil, ce qui fait que
la lunaison ne peut s'achever en moins de 29 jours
& demi. Voyez
C'est pourquoi le mouvement dont la lune s'éloigne
chaque jour du soleil n'est que de 12
Si le plan de l'orbite de la lune étoit coincident
avec celui de l'écliptique, c'est - à - dire si la terre &
la lune se mouvoient dans un même plan, le chemin
de la lune dans les cieux, vû de la terre, paroîtroit
précisément le même que celui du soleil, avec cette
seule différence que le soleil se trouveroit décrire
son cercle dans l'espace d'une année, & que la lune
décriroit le sien dans un mois: mais il n'en est pas
ainsi, car ces deux plans se coupent l'un l'autre dans
une droite qui passe par le centre de la terre, & sont
inclinés l'un à l'autre d'un angle d'environ 5
Supposons, par exemple, que A B (
Si la ligne des noeuds étoit immobile, c'est - à - dire
si elle n'avoit d'autre mouvement que celui par lequel
elle tourne autour du soleil, elle regarderoit
toujours en ce cas le même point de l'écliptique,
c'est - à - dire qu'elle resteroit toujours parallele à elle - même.
Mais ces observations prouvent au contraire
que la ligne des noeuds change continuellement de
place, que sa situation décline toujours de l'orient à
l'occident contre l'ordre des signes, & qu'elle finit
la révolution de ce mouvement rétrograde dans une
espace d'environ 19 ans, après quoi chacun des
noeuds revient au même point de l'écliptique dont il
s'étoit d'abord éloigné. Voyez
Il s'ensuit de - là que la lune n'est jamais précisément
dans l'écliptique que deux fois dans chaque
période, savoir lorsqu'elle se trouve dans ses noeuds.
Dans tout le reste de son cours elle s'éloigne plus
ou moins de l'écliptique, suivant qu'elle est plus ou
moins proche de ces noeuds. Les points F & E où elle
est le plus éloignée de ces noeuds, sont nommés ses
limites. Voyez
La distance de la lune à l'écliptique est nommée
sa latitude, & elle se mesure par un arc de cercle qui
va de la lune perpendiculairement à l'écliptique, &
qui est comprise entre la lune & l'écliptique, ayant
la terre pour centre; la latitude de la lune, même
lorsqu'elle est la plus grande, comme en E & en F,
ne passe jamais 5
Il paroit par ces observations, que la distance de la lune à la terre change continuellement, de sorte que la lune est tantôt plus proche & tantôt plus loin de nous. En effet, elle paroît tantôt sous un angle plus grand, tantôt sous un angle plus petit: l'angle sous lequel le diametre horisontal de la lune a été observé lorsqu'elle étoit pleine & périgée, excede un peu [p. 729]
L'espace de tems que la lune employe en partant de l'apogée pour revenir au même point, s'appelle mois anomalistique.
Si la ligne des apsides de la lune n'avoit d'autre
mouvement que celui par lequel elle est emportée
autour du soleil, elle conserveroit toujours une position
semblable, c'est - à - dire qu'elle resteroit parallele
à elle - même, qu'elle regarderoit toujours le
même point des cieux, & qu'on l'observeroit toujours
dans le même point de l'écliptique; mais on a
observé que la ligne des apsides est aussi mobile,
ou qu'elle a un mouvement angulaire autour de la
terre d'occident en orient selon l'ordre des signes,
mouvement dont la révolution se fait dans l'espace
d'environ neuf années. Voyez
Les irrégularités du mouvement de la lune & de
celui de son orbite sont très - considérables: car 1°.
quand la terre est dans son aphélie, la lune finit sa
révolution dans un tems plus court; au contraire,
quand la terre est dans son périhéiie, la lune rallentit
alors son mouvement; ainsi ses révolutions autour
de la terre se font en moins de tems, toutes choses
d'ailleurs égales, lorsque la terre est dans son aphélie
que lorsqu'elle est dans son périhélie, de sorte
que les mois périodiques ne sont point égaux les
uns aux autres. Voyez
2°. Quand la lune est dans ses syzygies, c'est - à - dire dans la droite qui joint les centres de la terre &
du soleil, ou, ce qui est la même chose, dans sa
conjonction ou son opposition, elle se meut (toutes
choses égales d'ailleurs) plus vîte que dans les quadratures.
Voyez
3°. Le mouvement de la lune varie suivant les
différentes distances de cet astre aux syzygies, c'est - à - dire à l'opposition ou à la conjonction dans le premier
quartier, c'est - à - dire depuis la conjonction jusqu'à la premiere quadrature, elle perd un peu de sa
vîtesse pour la recouvrer dans le second quartier, &
elle en perd encore un peu dans le troisieme pour la
recouvrer dans le quatrieme. Tycobrahé a découvert
le premier cette inégalité, & l'a nommée variation de la lune. Voyez
4°. La lune se meut dans une ellipse, dont l'un des foyers est placé dans le centre de la terre, & son rayon vecteur décrit autour de ce point des aires proportionnelles au tems, comme il arrive aux planetes à l'égard du soleil; son mouvement doit donc être plus rapide dans le périgée, & plus lent dans l'apogée.
5°. L'orbite même de la lune est variable, & ne conserve pas toujours la même figure, son excentricité augmentant quelquefois, & diminuant d'autres fois. Elle est la plus grande, lorsque la ligne des apsides coïncide avec celle des syzygies; & la plus petite, lorsque la ligne des apsides coupe l'autre à angles droits.
Cela est aisé à reconnoître par les diametres apparens que l'on observe. M. Picard est le premier qui ait découvert que la lune périgée au premier & au second quartier, paroissoit sous un angle d'environ une minute plus petit que lorsqu'elle étoit pleine & périgée; ce qui a fait connoître la loi sui<cb->
6°. L'apogée de la lune n'est pas exempt d'irrégularité; car on trouve qu'il se meut en avant, lorsqu'il coïncide avec la ligne des syzygies, & en arriere, lorsqu'il coupe cette ligne à angles droits. Ces deux mouvemens en avant & en arriere ne sont pas non plus égaux. Dans la conjonction ou l'opposition, le mouvement en avant est assez rapide; dans les quadratures, ou bien l'apogée se meut lentement en avant, ou bien il s'arrêre, ou bien il se meut en arriere.
7°. Le mouvement des noeuds n'est pas uniforme; mais quand la ligne des noeuds coïncide avec celle des syzygies, les noeuds s'arrêtent. Lorsque les noeuds sont dans les quadratures, c'est - à - dire que leurs lignes coupent celles des syzygies à angles droits, ils vont en arriere d'orient en occident, & M. Neuwton fait voir que c'est avec une vîtesse de 16" 19"'24"" par heure.
Le seul mouvement uniforme qu'ait la lune, est
celui par lequel elle tourne autour de son axe précisément
dans le même espace de tems qu'elle employe
à faire sa révolution autour de nous dans son
orbite, d'où il arrive qu'elle nous présente toujours
à - peu - près la même face: nous disons à - peu - près, &
non pas exactement; car comme le mouvement de
la lune autour de son axe est uniforme, & que cependant
son mouvement ou sa vîtesse dans son orbite
est inégale, il arrive de - là que quelque partie
du limbe de la lune s'éloigne quelquefois du centre
de son disque, & que d'autres fois elle s'en approche,
& que quelques parties qui étoient auparavant
invisibles, deviennent par - là visibles. Voyez
Si la lune décrivoit un cercle autour de la terre, & qu'elle décrivît ce cercle d'un mouvement uniforme dans le même tems qu'elle tourne autour de son axe, assurément ce seroit toujours le plan du même méridien lunaire qui passeroit par notre oeil ou par le centre de la terre, & l'on appercevroit exactement chaque jour le même hémisphere. Il suit de ces observations que si la lune est habitée, quelques - uns de ses habitans doivent tantôt voir la terre & tantôt ne la plus voir, que près de la moitié doivent ne la voir jamais, & près de la moitié la voir toujours. Cette espece d'ondulation ou de vacillation de la lune se fait d'abord d'occident en orient, ensuite d'orient en occident; de sorte que diverses régions qui paroissoient situées vers le bord occidental ou oriental de la lune, se cachent ou se montrent alternativement. On a donné à ce mouvement le nom de libration.
Cette uniformité de rotation produit encore une autre irrégularité apparente; car l'axe de la lune n'étant point perpendiculaire au plan de son orbite, mais étant un peu incliné à ce plan, & cet axe conservant continuellement son parallelisme dans son mouvement autour de la terre, il faut nécessairement qu'il change de situation, par rapport à un observateur placé dans la terre, & à la vue duquel il [p. 730]
Causes physiques du mouvement de la lune. Nous
avons déja observé que la lune se meut autour de la
terre suivant les mêmes lois & de la même maniere
que les autres planetes se meuvent autour du soleil;
& il s'ensuit de - là que l'explication du mouvement
lunaire en général retombe dans celle du mouvement
des autres planetes autour du soleil. Voyez
Quant aux irrégularités particulieres au mouvement
de la lune, & auxquelles la terre & les autres
planetes ne sont point sujettes, elles proviennent du
soleil qui agit sur la lune, & trouble son cours ordinaire
dans son orbite, & elles peuvent toutes se déduire
méchaniquement de la même loi qui dirige le
mouvement général de la lune, je veux dire de la
loi de gravitation & d'attraction. Voyez
Les autres planetes secondaires, par exemple les
satellites de Jupiter & de Saturne sont sans doute sujets
aux mêmes irrégularités que la lune, parce qu'ils
sont exposés à cette même force d'action du soleil
sur eux, qui peut les troubler dans leur cours; aussi
apperçoit - on dans le mouvement de ces satellites de
grandes irrégularités. Voyez
Astronomie de la lune. Premier moyen de déterminer la révolution de la lune autour de la terre ou le mois périodique, & le tems compris entre une opposition & la suivante ou le mois synodique.
Puisque la lune, dans le milieu d'une éclipse lunaire
est opposée au soleil, voyez
Le même auteur, au moyen de deux autres éclipses observées, l'une à Cracovie, l'autre à Babylone, a déterminé encore plus exactement la quantité du mois synodique qu'il a trouvée par - là,
De 29 jours,......11heures 43'3" 10"'. Moyen mouvement du soleil en même tems,..29° 6'24" 18"'. Mouvement de la lune,. 389° 6'24" 18"'. Quantité du mois périodique, 27jours, 7heures 43'5".
D'où il s'ensuit 1°. que la quantité du mois périodique étant donnée, on peut trouver par la regle de trois le mouvement diurne & horaire de la lune, &c. & de cette sorte construire des tables du moyen mouvement de la lune.
2°. Si on soustrait le moyen mouvement diurne du soleil du moyen mouvement diurne de la lune, le restant donnera le mouvement diurne de la lune au soleil; ce qui fournira le moyen de construire une table de ce mouvement diurne.
3°. Puisqu'au milieu des éclipses totales, la lune se trouve dans le noeud, il s'ensuit de là que si on cherche le lieu du soleil pour ce tems, & qu'on y ajoûte six signes, la somme donnera le lieu du noeud.
4°. En comparant les observations anciennes avec les modernes, il paroît, comme nous l'avons déja dit, que les noeuds ont un mouvement, & qu'ils avancent in antecedentia, ou contre l'ordre des signes, c'est - à - dire, de taurus à aries, d'aries à pisces, &c. Si l'on ajoûte donc au moyen mouvement diurne de la lune le mouvement diurne des noeuds, la somme sera le mouvement de la lune par rapport aux noeuds; & on pourra conclure de là, au moyen de la regle de trois, en combien de tems la lune parcourt 360°, à compter du noeud ascendant, ou combien de tems elle met à revenir à ce point depuis qu'elle en est partie, c'est - à - dire la quantité du mois dracontique.
Moyen de trouver l'âge de la lune. Ajoûtez au jour du mois, l'épacte de l'année, & les mois écoulés depuis Mars inclusivement, la somme, si elle est au - dessous de 30, & si elle est au - dessus, son excès sur 30 sera l'âge de la lune; en supposant que le mois ait 31 jours, & si le mois n'a que 30 jours, sera l'excès sur 29.
La raison de cette pratique est 1°. que l'épacte de
l'année donne toujours l'âge de la lune au premier
Mars. 2°. Que comme l'année lunaire est plus courte
de 11 à 12 jours que l'année solaire (voyez
Pour trouver le tems où la lune passe au méridien,
on remarquera 1°. que le jour de la nouvelle
lune, la lune passe au méridien en même tems que
le soleil. 2°. Que d'un jour à l'autre, le passage de
la lune au méridien retarde d'environ trois quarts
d'heure (voyez
Quant aux éclipses de lune, voyez
Théorie des mouvemens & des irrégularités de la lune. Supposons qu'on demande, dans un tems donné, le lieu de la lune dans le zodiaque en longitude, nous trouverons d'abord dans les tables le lieu où la lune seroit, si son mouvement étoit uniforme, c'est ce qu'on appelle son mouvement moyen, lequel est quelquefois plus prompt, & quelquefois plus lent que le mouvement vrai. Pour trouver ensuite où elle doit se rencontrer en conséquence de son mouvement vrai, qui est aussi l'apparent, nous chercherons dans une autre table à quelle distance elle est de son apogée, car cette distance rend plus ou moins grande la différence entre le mouvement vrai & le mouvement moyen, & les deux lieux qui correspondent à ces deux mouvemens. Le vrai lieu trouvé de la sorte n'est pas encore le vrai lieu, mais il en est plus ou moins éloigné, selon que la lune est plus ou moins éloignée & du soleil, & de l'apogée du soleil; & comme cette variation dépend en même tems de ces deux différentes distances, il faudra les [p. 731]
Par toutes ces opérations & ces corrections, on arrive enfin au vrai lieu de la lune pour l'instant donné, mais il faut convenir qu'il se rencontre en tout cela des difficultés prodigieuses. Les inégalités de lune sont si grandes que c'a été inutilement que les Astronomes ont travaillé jusqu'au grand Newton à les soumettre à quelque regle. C'est à ce grand homme que nous devons la découverte de leur cause méchanique, ainsi que la méthode de les calculer & de les déterminer, de façon qu'on peut dire de lui qu'il a découvert un monde presque entier, ou plûtôt qu'il se l'est soumis.
Suivant la théorie de M. Newton, on démontre d'une maniere fort élégante les lois méchaniques d'où dépendent les mouvemens que l'on a reconnus tant à l'égard de la lune que de son orbite apparent. C'est une chose remarquable que l'astre qui est le plus proche de la terre, soit celui dont les mouvemens nous sont, pour ainsi dire, le moins connus. Au reste, quelque utilité que l'Astronomie ait retiré du travail de M. Newton, les mouvemens de la lune sont si irréguliers, qu'on n'est pas encore parvenu à découvrir entierement tout ce qui appartient à la théorie le cette planete, & cela faute d'une longne suite d'observations qui demandent beaucoup de veilles & d'assiduités.
M. Newton fait voir par la théorie de la gravité, que les plus grandes planetes, en tournant autour du soleil, peuvent emporter avec elles de plus petites planetes qui tournent autour d'elles, & il prouve à priori, que ces dernieres doivent se mouvoir dans des ellipses dont les foyers se trouvent dans le centre des plus grandes, & qu'en même tems leur mouvement dans leur orbite est différemment troublé par l'action du soleil. Enfin, il infere de - là que les satellites de Saturne sont sujets à des irrégularités analogues. Il examine d'après la même théorie quelle est la force du soleil pour troubler le mouvement de la lune, il détermine quel seroit l'incrément horaire de l'aire que la lune décriroit dans une orbite circulaire par des rayons vecteurs aboutissant à la terre, sa distance de la terre, son mouvement horaire dans une orbite circulaire & elliptique, le mouvement moyen des noeuds, le mouvement vrai des noeuds, la variation horaire de l'inclinaison de l'orbite de la lune au plan de l'écliptique.
Enfin, il a conclu de la même théorie que l'équation annuelle du mouvement moyen de la lune provient de la différente figure de son orbite, & que cette variation a pour cause la différente force du soleil; laquelle étant plus grande dans le périgée, allonge alors l'orbite, & devenant plus petite dans l'apogée, lui permet de nouveau de se contracter. Dans l'allongement de l'orbite, la lune se meut plus lentement, & dans la contraction elle va plus vîte, & l'équation annuelle propre à compenser cette inégalité est nulle, lorsque le soleil est apogée ou périgée: dans la moyenne distance du soleil, elle va suivant les observations à 11'50", & dans les autres distances elle est proportionnelle à l'équation du centre du soleil, on l'ajoute au moyen mouvement de la lune,
M. Newton ajoute que dans le périhélie de la terre les noeuds de la lune & son apogée se meuvent plus promptement que dans l'aphélie, & cela en raison triplée inverse de la distance de la terre au soleil, d'où proviennent des équations annuelles des mouvemens des noeuds proportionnelles à celui du centre du soleil; or les mouvemens du soleil sont en raison doublée inverse de la distance de la terre au soleil, & la plus grande équation du centre que cette inégalité puisse produire est de 1° 56'26", en supposant l'excentricité de 16> partie.
Si le mouvement du soleil étoit en raison triplée inverse de sa distance, cette inégalité donneroit pour plus grande équation 2° 56'9", & par conséquent les plus grandes équations que puissent produire les inégalités des mouvemens de l'apogée de la lune & des noeuds, sont à 2° 56'9", comme le mouvement diurne de l'apogée de la lune & le moyen mouvement diurne de ces noeuds sont au moyen mouvement diurne du soleil; d'où il s'ensuit que la plus grande équation du moyen mouvement de l'apogée est d'environ 19'52", & que la plus grande équation du moyen mouvement des noeuds est de 9'27". On ajoute la premiere équation, & on soustrait la seconde, lorsque la terre va de son périhélie à son aphélie, & dans l'autre cas on fait le contraire.
Il paroît aussi par la même théorie de la gravité, que l'action du soleil sur la lune doit être un peu plus plus grande, quand l'axe transverse de l'orbite lunaire passe par le soleil, que lorsqu'il coupe à angles droits la droite qui joint la terre & le soleil, & que par conséquent l'orbite lunaire est un peu plus grande dans le premier cas que dans le second; ce qui donne naissance à une autre équation du moyen mouvement de la lune, laquelle dépend de la situation de l'apogée de la lune par rapport au soleil, & devient la plus grande qui soit possible, lorsque l'apogée de la lune est à 45° du soleil; & nulle, lorsque la lune arrive aux quadratures & aux syzygies. On l'ajoute au moyen mouvement, lorsque l'apogée de la lune passe des quadratures aux syzygies, & on l'en soustrait, lorsque l'apogée passe des syzygies aux quadratures.
Cette équation que M. Newton appelle semestre, devient de 3'45", lorsqu'elle est la plus grande qui soit possible (c'est - à - dire à 45° de l'apogée) dans les moyennes distances de la terre au soleil; mais elle augmente & diminue en raison triplée inverse de la distance du soleil; ce qui fait que dans les plus grandes distances du soleil elle est environ de 3'34", & dans la plus petite, de 3'56"; mais lorsque l'apogée de la lune est hors des octans, c'est - à - dire a passé 45°, elle diminue alors, & elle est à la plus grande équation, comme le sinus de la distance double de l'apogée de la lune à la plus prochaine syzygie ou quadrature, est au rayon.
De la même théorie de la gravité il s'ensuit que l'action du soleil sur la lune, est un peu plus grande, lorsque la droite tirée par les noeuds de la lune, passe par le soleil, que lorsque cette ligne est à angles droits avec celle qui joint le soleil & la terre; & de - là se déduit une autre équation du moyen mouvement de la lune, que M. Newton appelle seconde équation semestre, & qui devient la plus grande possible, lorsque les noeuds sont dans les octans du soleil, c'est - à - dire à 45°. du soleil; & nulle, lorsqu'ils sont dans les syzygies ou quadratures. Dans [p. 732]
Lorsqu'elle est la plus grande qu'il est possible, c'est - à - dire dans les octans & dans la distance moyenne de la terre au soleil, elle monte à 45", selon qu'il paroît par la théorie de la gravité: à d'autres distances du soleil, cette équation dans les octans des noeuds est réciproquement comme le cube de la distance du soleil à la terre; elle est par conséquent dans le périgée du soleil de 45", & dans son apogée, d'environ 49".
Suivant la même théorie de la gravité, l'apogée de la lune va le plus vîte, lorsqu'il est ou en conjonction ou en opposition avec le soleil, & il retrograde lorsqu'il est en quadrature avec lui. L'excentricité est dans le premier cas la plus grande possible, & dans le second, la plus petite possible. Ces inégalités sont trés considérables, & elles produisent la principale équation de l'apogée qui s'appelle semestre ou semimenstruelle. La plus grande équation semimenstruelle est d'environ 12'18", suivant les observations.
Horrox a observé le premier que la lune faisoit à - peu - près sa révolution dans une ellipse dont la terre occupoit le foyer; & Halley a mis le centre de l'ellipse dans une épicycle dont le centre tourne uniformément autour de la terre, & il déduit du mouvement dans l'épicycle les inégalités qu'on observe dans le progrès & la rétrogradation de l'apogée & la quantité de l'excentricité.
Supposons la moyenne distance de la lune à la
terre divisée en 100000 parties, & que T (
Voilà la théorie de la lune telle que M. Newton nous l'a donnée dans le troisieme livre de son bel ouvrage intitulé: Philosophioe naturalis principia mathematica: mais ce grand géometre n'a point démontré la plûpart des regles qu'il donne pour calculer le lieu de la lune. Dans le second volume de l'astronomie de Grégori, on trouve un autre ouvrage de M. Newton, qui a pour titre, Lunoe theoria Newtoniana, & où il explique d'une maniere encore plus précise & plus particuliere les opérations qu'il faut faire pour trouver le lieu de la lune dans un tems donné, mais toujours sans démonstration: dans le commentaire que les PP. Leseur & Jacquier, minimes, ont publié sur les principes de Newton, M. Calandrin, célebre professeur de mathématiques à Geneve, &
Au reste, quelles que soient les causes des irrégularités des mouvemens de la lune, les observations ont appris qu'après 223 lunaisons, c'est à dire 223 retours de la lune vers le soleil, les circonstances du mouvement de la lune redevenant les mêmes, par rapport au soleil & à la terre, ramenent dans son cours les mêmes irrégularités qu'on y avoit observées dix - huit ans auparavant. Une suite d'observations continuées pendant une telle période avec assez d'assiduité & d'exactitude, donnera donc le mouvement de la lune pour les périodes suivantes.
Ce travail si long & si pénible d'une période entiere bien remplie d'observations, fut entrepris par M. Halley, lorsqu'il étoit déja dans un âge si avancé, qu'il ne se flattoit plus de le pouvoir terminer. Ce grand & courageux astronome nous avertit que n'étant encore qu'à la fin d'une autre période qui ne contient que 111 lunaisons, & qui ne donne pas si exactement que celle de 223 le retour des mêmes inégalités, il pouvoit déja déterminer sur mer la longitude à 20 lieues près vers l'équateur, à 15 lieues près dans nos climats, & plus exactement encore plus près des poles.
Mais on n'aura rien à desirer, & on aura l'ouvrage le plus utile qu'on puisse espérer sur cette matiere, si le travail qu'a entrepris M. Lemonnier s'accomplit. Depuis qu'il s'est attaché à la théorie de la lune, il a fait un si grand nombre d'excellentes observations, qu'on ne sauroit espérer de voir cette partie de la période mieux remplie: & dans les institutions astronomiques qu'il a publiées en 1746, il a déja donné d'après la théorie de M. Newton, des tables du mouvement de la lune, plus exactes & plus complettes qu'aucune de celles qu'on a publiées jusqu'ici.
A la fin de ce même ouvrage, il donne la maniere de se servir de ces tables, & de calculer par leur secours quelques lieux de la lune. Nous parlerons à la fin de cet article de la suite de ses travaux par rapport à cet objet.
Nature & propriétés de la lune. 1°. De ce que la lune ne
montre qu'une petite partie de son disque, lorsqu'elle
suit le soleil prêt à se coucher; de ce que cette portion
croit à mesure qu'elle s'éloigne du soleil jusqu'à
la distance de 180
2°. La lune disparoît quelquefois par un ciel clair,
serein, de façon qu'on ne sauroit la découvrir avec
les meilleurs verres, quoique des étoiles de la 5
3°. L'oeil nud ou armé d'un télescope, voit dans
la face de la lune des parties plus obscures que d'autres,
qu'on appelle maculoe ou taches. A travers
le télescope, les bornes de la lumiere paroissent
dentelées & inégales, composées d'arcs dissemblables,
convexes & concaves. On observe aussi des
parties lucides, dispersées ou semées parmi de plus
obscures, & on voit des parties illuminées par - delà
les limites de l'illumination: d'autres intermédiaires,
restant toujours dans l'obscurité & auprès des taches,
ou même dans les taches: on voit souvent de ces
petites taches lumineuses. Outre les taches qu'avoient
observées les anciens, il en est d'autres variables,
invisibles à l'oeil nud, qu'on nomme taches
nouvelles, qui sont toujours opposées au soleil, &
qui se trouvent par cette raison dans les parties qui
sont le plutôt éclairées dans le croissant, & qui perdent
dans le décours leur lumiere plus tard que les
autres intermédiaires, tournant autour de la lune,
& paroissant quelquefois plus grandes & quelquefois
plus petites. Voyez
Or, comme toutes les parties de la surface de la lune sont également illuminées par le soleil, puisqu'elles en sont également éloignées; il s'ensuit delà que s'il y en a qui paroissent plus brillantes, & d'autres plus obscures, c'est qu'il en est qui réfléchissent les rayons du soleil plus abondamment que d'autres, & par conséquent qu'elles sont de différente nature: les parties qui sont le plutôt éclairées par le soleil, sont nécessairement plus élevées que les autres, c'est - à - dire qu'elles sont au - dessus du reste de la surface de la lune. Les nouvelles taches répondent parfaitement aux ombres des corps terrestres.
4°. Hévelius rapporte qu'il a souvent trouvé
dans un tems très - serein, lors même que l'on pouvoit
voir les étoiles de la 6
5°. Cassini a souvent observé que Saturne, Jupiter & les étoiles fixes, lorsqu'elles se cachoient derriere la lune, paroissoient près de son limbe, soit éclairé, soit obscur, changer leur figure circulaire en ovale; & dans d'autres occultations, il n'a point trouvé du tout d'altération; il arrive de même que le soleil & la lune se levant & se couchant dans un ho<cb->
Or, comme nous savons par une expérience certaine
que la figure circulaire du soleil & de la lune
ne se changent en elliptique qu'à cause de la réfractionque
les rayons de ces astres souffrent dans l'atmosphere,
il est donc permis d'en conclure que dans les
tems où la figure presque circulaire des étoiles est
changée par la lune, cet astre est alors entouré d'une
matiere dense qui réfracte les rayons que les étoiles
envoient; & que si dans d'autres tems on n'observe
point ce changement de figure, cette même
matiere ne se trouve plus autour de la lune. Voyez
6°. La lune est donc un corps opaque, couvert de montagnes & de vallées. Riccioli a mesuré la hauteur d'une de ces montagnes, & a trouvé qu'elle avoit 9 milles ou environ, 3 lieues de haut. Il y a de plus dans la lune de grands espaces, dont la surface est unie & égale, & qui réfléchissent en même tems moins de lumiere que les autres. Or, comme la surface des corps fluides est naturellement unie, & que ces corps entant que transparens transmettent une grande partie de la lumiere, & n'en réfléchissent que fort peu, plusieurs astronomes ont conclu de - là que les taches de la lune sont des corps fluides transparens, & que lorsqu'elles sont fort étendues, ce sont des mers. Il y a donc dans la lune des montagnes, des vallées & des mers. De plus, les parties lumineuses des taches doivent être par la même raison des îles & des péninsules. Et puisque dans les taches & près de leur limbe on remarque certaines parties plus hautes que d'autres, il faut donc qu'il y ait dans les mers de la lune des rochers & des promontoires.
Il faut avouer cependant que d'autres astronomes ont prétendu qu'il n'y avoit point de mers dans la lune; car si on regarde, disent - ils, avec un bon télescope les grandes taches que l'on prend pour des mers, on y remarque une infinité de cavernes ou de cavités très - profondes, ce qui s'apperçoit principalement par le moyen des oinbres qui sont jettées au - dedans lorsque la lune croît, ou lorsqu'elle est en décours. Or c'est, ajoutent - ils, ce qui ne paroît guere convenir à des mers d'une vaste étendue. Ainsi ils croient que ces régions de la lune ne sont point des mers, mais qu'elles sont d'une matiere moins dure & moins blanche que les autres contrées des pays montueux.
7°. La lune est entourée, selon plusieurs astronomes, d'un atmosphere pesant & élastique, dans lequel les vapeurs & les exhalaisons s'élevent pour retomber ensuite en forme de rosée ou de pluie.
Dans une éclipse totale de soleil, on voit la lune couronnée d'un anneau lumineux parallele à sa circonférence.
Selon ces astronomes, on en a trop d'observations pour en douter. Dans la grande éclipse de 1715, on vit l'anneau à Londres, & par - tout ailleurs; Kepler a observé qu'on a vu la même chose à Naples & à Anvers dans une éclipse de 1605; & Wolf l'a observé aussi à Leipsick dans une de 1706, décrite fort au - long dans les acta eruditorum, avec cette circonstance remarquable que la partie la plus voisine de la lune étoit visiblement plus brillante que celle qui en étoit plus éloignée, ce qui est confirmé par les observations des astronomes françois dans les mémoires de l'Académie de l'année 1706.
Il faut donc, concluent - ils, qu'il y ait autour de la lune quelque fluide dont la figure corresponde à celle de cet astre, & qui tout - à - la - fois réfléchisse & brise les rayons du soleil; il faut aussi que ce fluide soit plus dense près du corps de la lune, & plus rare au - dessus; or comme l'air qui environne notre terre [p. 734]
Cependant d'autres astronomes prétendent que quand des étoiles s'approchent de la lune, elles ne paroissent souffrir aucune réfraction, ce qui prouveroit que la lune n'a point d'atmosphere, du - moins telle que notre terre. Ils ajoutent qu'il y a beaucoup d'apparence que sur la lune il n'y a jamais de nuages, ni de pluies. Car s'il s'y trouvoit des nuages, on les verroit, disent - ils, se répandre indifféremment sur toutes les régions du disque apparent, en sorte que ces mêmes régions nous seroient souvent cachées: or c'est ce qu'on n'a point observé. Il faut donc que le ciel de la lune soit parfaitement serein. Cependant les nuages pourroient se trouver dans la partie de l'atmosphere qui n'est point éclairée du soleil: car la chaleur qui est très - grande dans la partie éclairée, l'unique hémisphere qu'il nous est permis d'appercevoir, cette chaleur, dis - je, excitée par les rayons du soleil qui éclairent sans discontinuer ces régions de la lune pendant près de quinze fois 24 heures, suffit, ce semble, pour raréfier l'atmosphere de la lune. De plus, au sujet de cette atmosphere, M. le Monnier dit avoir remarqué en 1736 & 1738, que l'étoile Aldebaran s'avançoit en plein jour un peu sur le disque éclairé de la lune, où cette même étoile disparut ensuite après avoir entamé très - sensiblement le disque, & cela vers le diametre horisontal de la lune.
8°. La lune est donc à tous égards un corps semblable à la terre, & qui paroît propre aux mêmes fins; en effet, nous avons fait voir qu'elle est dense, opaque, qu'elle a des montagnes & des vallées; selon plusieurs auteurs, elle a des mers avec des îles, des péninsules, des rochers & des promontoires, une atmosphere changeant où les vapeurs & les exhalaisons peuvent s'élever pour y retomber ensuite; enfin elle a un jour & une nuit, un soleil pour éclairer l'un, & une lune pour éclairer l'autre, un été & un hiver, &c.
On peut encore conclure de - là par analogie une infinité d'autres propriétés dans la lune. Les changemens auxquels son atmosphere est sujette, doivent produire des vents & d'autres météores, &, suivant les différentes saisons de l'année, des pluies, des brouillards, de la gelée, de la neige, &c. Les inégalités de la surface de la lune doivent produire de leur côté des lacs, des rivieres, des sources, &c.
Or comme nous savons que la nature ne produit rien en vain, que les pluies & les rosées tombent sur notre terre pour faire végéter les plantes, & que
Moyen de mesurer la hauteur des montagnes de la
lune. Soit E D,
Parmi les autres observateurs qui ont tâché de représenter la figure de la lune, telle qu'on l'apperçoit avec des lunettes ordinaires, on compte principalement Langrenus, Hevelius & Grimaldi. Ils ont surtout représenté dans leur sénélographie, ou description de la lune, les plus belles taches. Hevelius qui appréhendoit les guerres civiles qui se seroient élevées entre les Philosophes modernes, si on donnoit leurs noms aux taches de la lune, au lieu de leur distribuer tout ce domaine, comme il se l'étoit proposé, jugea à propos d'y appliquer des noms de notre Géographie. Il est vrai que ces taches ne ressemblent guere, tant par rapport à leurs situations qu'à leurs figures, aux mers & aux continens de notre terre, dont ils portent le nom; cependant on a recommandé jusqu'ici aux Astronomes, ces noms géographiques, qui ne sauroient leur devenir trop familiers, principalement à ceux qui veulent étudier dans Ptolomée la Géographie ancienne.
M. le Monnier prétend que de toutes les figures de la lune qui ont été publiées jusqu'ici, celles qui ont été gravées en 1635 par le fameux D. Mellan, par ordre de Peirese, sur les observations de Gassendi, & qui consiste en trois phases (dont l'une représente la pleine lune, & les deux autres le premier quartier & le décours), sont sans contredit les meilleures & les plus ressemblantes. Quoiqu'il n'y ait pas plus de vingt ans qu'elles sont devenues plubliques, ces mêmes phases sont néanmoins des plus anciennes, puisqu'elles ont précédé celles d'Hevelius & de Riccioli, qui sont celles qu'on a le plus imitées, & dont les Astronomes ont le plus fait d'usage jusqu'à ce jour.
M. le Monnier a donné dans ses institutions astronomiques, pag. 140, trois différentes figures ou phases de la lune. La premiere est celle qu'Hevelius a publiée en 1645, avec les termes de la plus grande & de la plus petite libration; la seconde a été publiée pour la premiere fois dans les mém. de l'académie royale des Sciences, pour l'année 1692; les termes de la plus grande & de la plus petite libra<pb-> [p. 735]
On a attribué autrefois beaucoup de puissance à la lune sur les corps terrestres, & plusieurs personnes sont encore dans cette opinion, que les Philosophes regardent comme chimérique. Cependant si on examine la chose avec attention, il ne doit point paroître impossible que la lune ne puisse avoir beaucoup d'influence sur l'air que nous respirons & les différens effets que nous observons. Il est certain que le soleil & la lune sur - tout, agissent sur l'Océan, & en causent le flux & le reflux. Or si l'action de ces astres est si sensible sur la masse des eaux, pourquoi ne le sera - t - elle pas sur l'atmosphere qui les couvre? Pourquoi ne causera - t - elle pas dans cette atmosphere des mouvemens & des altérations sensibles? Il est vrai que le vulgaire tombe dans beaucoup d'erreurs à ce sujet, & nous ne prétendons point adopter tous les préjugés sur la nouvelle lune, sur les effets de la lune, tant en croissant ou en décours, sur les remedes qu'il faut faire quand la lune est dans certains signes du zodiaque; mais nous croyons pouvoir dire que plusieurs vents, par exemple, & les effets qui en résultent, peuvent être attribués très - vraissemblablement à l'action de la lune; que par son action sur l'air que nous respirons, elle peut changer la disposition de nos corps, & occasionner des maladies: il est vrai que comme les dérangemens qui arrivent dans l'atmosphere ont encore une infinité d'autres causes dont la loi ne paroît point reglée, les effets particuliers de la lune se trouvant mélés & combinés avec une infinité d'autres, sont par cette raison très - difficiles à connoître & à distinguer; mais cela n'empêche pas qu'ils ne soient réels, & dignes de l'observation des Philosophes. Le docteur Mead, célebre medecin anglois, a fait un livre qui a pour titre, de imperio solis ac lunoe n corpore humano, de l'empire du soleil & de la lune sur les corps humains.
Jusqu'ici nous n'avons presque fait que traduire l'article lune tel qu'il se trouve à peu - près dans l'encyclopédie angloise, & nous y avons joint quelques remarques tirées de différens auteurs, entr'autres des institutions astronomiques de M. le Monnier. Il s'agit à présent d'entrer dans le détail de ce que les savans de notre siecle ont ajouté à la théorie de M. Newton.
Ce qu'on a lû jusqu'ici dans cet article contient
les phénomenes du mouvement de la lune, tels à
peu près que les observations les ont fait connoître
successivement aux Astronomes, & tels que M. Newton a tenté de les expliquer: nous disons a tenté, car
quelque estimable que soit l'essai de théorie que ce
grand homme nous a donné sur ce sujet, on a dû
voir, par ce qui précede, que cet essai laisse encore
beaucoup à desirer; la raison en est que M. Newton
n'avoit point résolu le problème fondamental, nécessaire
pour trouver les différentes irrégularités de
la lune; ce problème consiste à déterminer au moins
par approximation, l'équation de l'orbite que la
lune décrit autour de la terre; c'est une branche du
problème fameux connu sous le nom du problème des
trois corps. Voyez
La lune est attirée vers la terre en raison inverse
du quarré de la distance, suivant la loi générale de
la gravitation (voyez
M. Euler est le premier qui ait imaginé de donner
aux tables de la lune une nouvelle forme différente
de celle de M. Newton; au lieu de faire varier l'équation
du centre, il regarde l'excentricité comme
constante, & il ajoute à l'équation du centre une
autre équation qu'on peut appeller évection (voyez
M. Clairaut & moi avons aussi publié des tables de la lune suivant notre théorie; celles de M. Clairaut, qui sont moins exactes que celles de M. Mayer, ont encore l'inconvénient de demander beaucoup [p. 736]
Ces nouvelles tables sont dressées en partie sur les calculs que j'ai faits par théorie, en partie sur la comparaison que j'ai faite de mes premieres tables avec celles de Messieurs le Monnier & Mayer, qui ont été comparées jusqu'ici à un plus grand nombre d'observations que les autres, & qui ont l'avantage de s'en écarter peu, & d'être d'ailleurs les plus expéditives pour le calcul, & les plus familieres aux Astronomes. La raison qui m'a déterminé à ne pas dresser mes tables uniquement d'après la théorie, c'est l'épreuve que j'ai faite par mes propres calculs, & par ceux des autres, de la plûpart des coefficiens des équations lunaires, dont on ne peut, ce me semble, assurer qu'aucun soit exact à une minute près, & peut - être davantage. Cet inconvénient vient 1°. de ce que le nombre de petits termes & de petites quantités qui entrent dans chacun de ces coefficiens est si grand, qu'on n'est jamais assuré de n'en avoir point omis qui puisse produire d'effet sensible. 2°. De ce que plusieurs des series qui expriment les coefficiens sont assez peu convergentes. 3°. Enfin de ce qu'il y a des termes qui étant très - petits dans la différencielle, peuvent devenir très - grands, ou au moins beaucoup plus grands par l'intégration. On peut voir les preuves de tout cela dans mes recherches sur le système du monde, premiere & troisieme parties, & dans un écrit inséré à la fin de la seconde édition de mon traité de dynamique, en réponse à quelques objections qui m'avoient été faites sur ce sujet.
Une des preuves les plus frappantes de ce que j'avance
ici sur l'incertitude des coefficiens des équations lunaires, c'est l'erreur où nous avons été longtems
Messieurs Euler, Clairaut & moi, sur le mouvement
de l'apogée de la lune. Nous nous étions
bornés tous trois à calculer d'abord le premier terme
de la serie qui exprime ce mouvement, nous
avons trouvé que ce terme ne donnoit que la moitié
du mouvement réel de l'apogée, parce que nous supposions
tacitement que le reste de la serie pouvoit se
négliger par rapport au premier terme; de - là M.
Clairaut avoit conclu que la gravitation n'étoit pas
la raison inverse du quarré des distances, mais
qu'elle suivoit quelqu'autre loi; en quoi il faut
avouer que sa conclusion a été trop précipitée, puisque
quand même le mouvement de l'apogée trouvé
par la théorie ne seroit que la moitié de ce qu'il est
réellement, on pourroit sans changer la loi d'attraction
& y substituer une loi bisarre, attribuer cet effet
comme je l'avois imaginé, à quelque cause particuliere
différente de la gravitation, comme à la
force magnétique, dont M. Newton fait mention
expressément. On peut voir dans les mém. de l'acad.
des Sciences de 1745, la dispute de Messieurs Clairaut & de Buffon sur ce sujet. On peut aussi consulsulter
l'article
Une autre remarque qui m'est entierement dûe, & que je communiquai à M. Clairaut au mois de Juin 1748, c'est le calcul des termes, qui dans l'équation de l'orbite lunaire ont pour argument la distance du soleil à l'apogée de la lune. M. Clairaut croyoit alors, faute d'avoir calculé tous les termes essentiels qui entrent dans cette équation, qu'elle montoit à environ 35 ou 40 minutes; ce qui, comme M. Clairaut le croyoit alors, renversoit entierement la théorie & le système neutonien; je lui fis voir que cette équation étoit beaucoup moindre, & de deux à trois minutes seulement; ce qui rétablissoit la théorie dans tous ses droits.
Je ne dois pas oublier d'ajouter 1°. que ma méthode pour déterminer le mouvement de l'apogée, est très - élégante & très - simple, n'ayant besoin d'aucune intégration, & ne demandant que la simple inspection des coefficiens du second terme de l'équation différencielle. 2°. que j'ai démontré le premier par une méthode rigoureuse, ce que personne n'avoit encore fait, & n'a même fait jusqu'ici, que l'équation de l'orbite lunaire ne devoit point contenir d'arcs de cercle; si on ajoute à cela la maniere simple & facile dont je parviens à l'équation differentielle de l'orbite lunaire, sans avoir besoin pour cela, comme d'autres géometres, de transformations & d'intégrations multipliées; & le détail que j'ai donné ci - dessus de mes travaux & de ceux des autres géometres, on conviendra, ce me semble, que j'ai eu plus de part à la théorie de la lune que certains mathématiciens n'avoient voulu le faire croire. Je ne dois pas non plus passer sous silence la maniere élégante dont M. Euler integre l'équation de l'orbite lunaire; méthode plus simple & plus facile que celle de M. Clairaut & que la mienne; & cette observation jointe à ce que j'ai dit plus haut des travaux de ce grand géometre, par rapport à la lune, suffira pour faire voir qu'il a aussi travaillé très utilement à cette théorie, quoiqu'on ait aussi cherché à le mettre à l'écart autant qu'on l'a pû. L'En<pb-> [p. 737]
Nous avons dit plus haut que M. Halley avoit commencé l'observation d'une période de deux cens vingt - trois lunaisons, & que M. le Monnier avoit continué ce travail; le public en a déja recueilli le fruit, M. le Monnier ayant publié deux volumes de ses observations, qui serviront à connoître l'erreur des tables; il continue ce travail avec ardeur & avec assiduité; & il espere publier successivement le résultat de ses observations à la sin de chaque période; au reste il ne faut pas croire, comme je l'ai remarqué & prouvé ce me semble le premier dans mes recherches sur le systeme du monde, troisieme partie, qu'au bout de la période de deux cens vingt - trois lunaisons, les inégalités reviennent exactement les mêmes; mais la différence n'est pas bien considérable, & au moyen d'une méthode facile que j'ai indiquée, on peut déterminer assez exactement l'erreur des tables pour chaque lieu calculé de la lune. Voyez l'article xxxj. de l'ouvrage cité.
Pour achever de rendre compte des travaux des
Géometres de notre siecle sur la lune, il ne nous
reste plus qu'à parler de leurs recherches sur la masse
de cette planete. M. Newton, par quelques phenomenes
des marées, avoit essayé de la déterminer.
Voyez
J'ajouterai ici que dans l'hypothese de la nonsphéricité
de la lune, la terre & le soleil doivent
produire dans l'axe de cette planete un mouvement
analogue à celui que l'action de la lune & du soleil
produisent dans l'axe de la terre, & d'ou résulte la
précession des équinoxes; sur quoi voyez mes recherches sur le système du monde, seconde partie, articles
cccxliij & suiv. voyez aussi l'article
Lune (Page 9:737)
Lune (Page 9:737)
Lune (Page 9:737)
Comme dans l'article
L'argent est un des métaux que l'on nomme parfaits, à cause de la propriété qu'il a de ne point s'altérer ni dans le feu, ni à l'air, ni dans l'eau. Il est d'un blanc brillant, dur, sonore; & c'est après l'or, le plus ductile des métaux. Sa petanteur est à celle de l'eau comme 11091 est à 1000. Son poids est à celui de l'or environ comme 5 est à 9. L'argent entre en fusion plus promptement que le cuivre. Il se dissout très - aisément dans l'acide nitreux; il se dissout dans l'acide vitriolique, lorsqu'on fait bouillir ce dissolvant. Il s'unit avec l'acide du sel marin qui le dégage & le précipite des autres dissolvans, & forme avec lui ce qu'on appelle lune cornée. Il a beaucoup de disposition à s'unir avec le soufre, & par cette union l'argent devient noir ou rougeâtre. Il s'amalgame très - bien avec le mercure. Il ne se dissout point dans le feu par la litharge ou le verre de plomb.
L'argent se montre sous un grand nombre de formes différentes dans le sein de la terre, ce qui fait que les Minéralogistes en comptent plusieurs mines différentes.
1°. Ce métal se trouve sous la forme qui lui est propre, c'est ce qu'on nomme argent - vierge ou argentnatif, alors il est très - aisé à reconnoitre; il se montre sous différentes formes, tantôt il est en masses compactes & solides, que les Espagnols nomment pepitas. Il y en a de différentes grandeurs; M. Henckel dans la préface de sa pyritologie nous apprend que l'on trouva autrefois dans les mines de Freyberg en Misnie une masse d'argent natif qui pesoit 400 quintaux. L'argent natif se trouve plus communément par lames ou en petits feuillets attachés à la pierre qui lui sert de matrice. Il forme souvent des ramifications semblables à des arbrisseaux ou à des feuilles de sapin, enfin il ressemble très - souvent à des fils ou à des poils. Cet argent natif n'est point parfaitement pur, il est souvent mêlé d'arsenic ou de soufre ou même de cuivre.
2°. L'argent est minéralisé avec du soufre seul, & forme la mine que l'on nomme mine d'argent vitreuse, parce qu'elle a quelque ressemblance avec du verre. Elle a à peu près la couleur du plomb, quoique cependant elle soit un peu plus noire que ce métal. Cette mine est si tendre, qu'on peut la couper avec un couteau; elle prend différentes formes, & se méle souvent avec des mines d'autres métaux. Cette mine d'argent est très - riche, & ne contient que peu de soufre.
3°. La mine d'argent rouge n'est composée que d'argent, de soufre & d'arsenic; tantôt elle est par masses compactes & irrégulieres, tantôt elle est en crystaux réguliers d'un rouge vif comme celui du rubis ou du grenat; tantôt elle est d'un brun noirâtre, & sans transparence, alors elle est - très - riche; quelquefois elle forme des especes de lames ou d'écailles. Cette mine se trouve fort abondamment dans les mines d'Audreasberg au Hartz. Cette mine d'argent écrasée donne une poudre rouge: exposée au feu, elle pétille & se gerse; après quoi elle entre aisément en fusion, & le seu en dégage l'arsenic.
4°. La mine d'argent cornée, en allemand horn - ertz; elle est extrèmement rare; c'est de l'argent qui a été minéralisé par l'acide du sel marin, suivant quelques auteurs; & par l'arsenic, suivant d'autres. Il y en a de la brune, & un peu transparente comme de la corne; ce qui lui a fait donner son nom; cette espece [p. 738]
5°. La mine d'argent blanche est composée d'argent, de cuivre, de soufre, d'arsenic, & quelquefois d'une petite portion de plomb. C'est improprement qu'on lui donne le nom de mine d'argent blanche, vû qu'elle est d'un gris clair. Plus elle contient de cuivre, plus elle est d'une couleur foncée, & alors on la nomme mine d'argent grise, en allemand fahl - ertz. C'est relativement à cette derniere que la premiere s'appelle blanche. Ces mines varient pour la quantité d'argent qu'elles contiennent; souvent elles en ont jusqu'à vingt marcs par quintal.
6°. La mine d'argent en plumes, en allemand feder - ertz; c'est une mine composée de petites houpes semblables à des poils ou aux barbes d'une plume; elle est légere & noire comme de la suie, & colore les doigts. C'est de l'argent minéralisé par le soufre, l'arsenic & l'antimoine. On pourroit soupçonner que cette mine est formée par la décomposition de celle que les Allemands nomment leber - ertz, ou mine de foie, qui n'est autre chose que l'argent minéralisé par le soufre & l'antimoine; elle est brune, & se trouve à Braunsdorf en Saxe.
7°. La mine d'argent de la couleur de merde d'oie, est un mélange de la mine d'argent rouge & grise, de l'argent natif dans une roche verdâtre ou dans une espece d'ochre. Elle est très - rare.
Telles sont les principales mines d'argent; mais
ce métal se trouve encore en plus ou moins d'abondance
dans les mines d'autres métaux; c'est ainsi
qu'il n'y a presque point de mine de plomb qui ne
contienne une portion d'argent; il n'y a, dit - on,
que la mine de plomb de Willach en Carinthie, qui
n'en contient point du tout. Voyez
M. de Justi, célebre minéralogiste allemand, assure avoir trouvé à Annaberg en Autriche, une mine dans laquelle l'argent se trouvoit minéralisé avec un alkali, & enveloppé dans de la pierre à chaux. Cette découverte seroit importante dans la minéralogie, vû que jusqu'ici on ne connoissoit que le soufre & l'arsenic, qui fussent propres à minéraliser les métaux. Cependant il y a lieu de douter de la réalité de la découverte de M. de Justi, qui demande des preuves plus convaincantes que celles qu'il a données jusqu'à présent au public.
Il est bon de remarquer que la plûpart des minéralogistes ont donné le nom de mines d'argent à des mines qui contenoient une très - petite quantité de ce métal, contre une beaucoup plus grande quantité, soit de cuivre, soit de fer, &c. On sent que ces dénominations sont vicieuses, & qu'il seroit plus exact de nommer ces mines d'après le métal qui y domine, en ajoutant qu'elles contiennent de l'argent; ainsi la mine d'argent grise pourroit s'appeller mine de cuivre tenant argent. Il en est de même de beaucoup d'autres.
Aucun pays ne produit une aussi grande quantité d'argent que l'Amérique espagnole; c'est sur - tout dans le Potosi & le Méxique que se trouvent les mines les plus abondantes de ce métal. L'Europe ne
Lorsque l'on a trouvé une mine d'argent, il faudra
s'assurer par les essais de la quantité de ce métal qui
y est contenu. Si c'est de l'argent natif, on n'aura
qu'à dégager ce métal de la matrice ou de la roche
qui l'enveloppe, après quoi on le fera fondre dans
un creuset avec du flux noir; ou bien on joindra la
mine pulvérisée avec du mercure, qui formera un
amalgame avec l'argent; on passera cet amalgame
par une peau de chamois, & on prendra la masse qui
sera restée dans le chamois, & on la placera sous
une moufle pour en dégager le mercure; par ce
moyen l'on aura l'argent seul que l'on pesera. Si la
mine d'argent que l'on voudra essayer est ou sulfureuse
ou arsenicale, ou l'un & l'autre à - la - fois, on
commencera par la pulvériser grossierement, on la
fera griller doucement pour en dégager les substances
étrangeres; après quoi on fera fondre huit parties
de plomb dans une écuelle placée sous une moufle;
on y portera une partie de la mine grillée & encore
chaude, que l'on aura mélée préalablement avec
partie égale de litharge; on augmentera le feu, on
remuera le mélange, afin que l'argent qui est dans
la mine puisse s'incorporer avec le plomb fondu;
lorsqu'il se sera formé une scorie semblable à du
verre à la surface, on vuidera le tout dans un cône
frotté de suif; le plomb uni à l'argent tombera au
fond, & formera un culot ou régule, à la surface
duquel seront les scories que l'on pourra en détacher.
Ce régule est alors en état de passer à la coupelle.
Voyez
Les mines d'argent se traitent en grand de trois manieres; savoir 1°. par la simple fusion; 2°. en les joignant soit avec du plomb, soit avec de la litharge, soit avec des mines de plomb; 3°. en les amalgamant avec du mercure.
Lorsque les mines d'argent sont très - riches, telles que celles qui contiennent de l'argent vierge, les mines d'argent rouges & blanches, &c. on les fait griller pour dégager les parties sulfureuses & arsenicales qui pourroient y être jointes; après quoi on les fait fondre simplement dans le fourneau, & en leur joignant un fondant qui puisse vitrifier la pierre qui sert de matrice à la mine d'argent, par - là ce métal se dégage & tombe au fond du fourneau. On le purifie ensuite pour lui enlever les substances étrangeres qui ont pû se combiner avec lui.
Mais comme les mines d'argent vierge sont assez rares, & comme ce métal est plus communément joint en petite quantité avec un grand volume d'autres métaux, tels que le cuivre & le plomb, on est obligé de joindre du plomb ou de la mine de plomb, avec de la mine d'argent, après l'avoir grillée, afin que le plomb s'unisse avec ce métal, le sépare des autres métaux, & l'entraîne au fond du fourneau, [p. 739]
Lorsque les mines sont peu riches en argent, on tâche de rapprocher & de concentrer sous un moindre volume l'argent qu'elles contiennent, sans quoi on dépenseroit trop en plomb pour les mettre en fusion. Pour cet effet, on mêle ces mines d'argent avec des scories & avec des pyrites, & on les fait fondre au fourneau; c'est ce qu'on appelle dégrossir la mine. Ce travail produit un mélange ou une matte, que l'on fait passer par différens feux pour la griller; après quoi on joint ces mattes grillées avec des mines d'argent plus riches, ou avec du plomb ou des mines de plomb que l'on traite de la maniere indiquée ci - dessus, alors le produit s'appelle matte de plomb; elle nage au - dessus du plomb d'oeuvre & au - dessous des scories. Lorsque la matte de plomb a été grillée convenablement, on en fait l'essai en petit, pour savoir la quantite d'argent qu'il donne à la grande coupelle.
Lorsque des mines de cuivre contiennent une portion d'argent, on l'obtient en joignant du plomb au cuivre, opération qui se nomme liquation. Voyez cet article.
Dans les pays où l'on trouve beaucoup d'argent
vierge, ou bien où le bois est trop rare pour qu'on
fasse fondre ces mines, on les traite par l'amalgame,
en les écrasant & en les triturant ensuite avec le mercure
que l'on fait évaporer ensuite par le moyen du
feu; c'est là ce qui se pratique au Pérou, au Potosi
& dans les autres endroits de l'Amérique espagnole.
Voyez
Au sortir des travaux en grand, il est très - rare
que l'argent soit d'une pureté parfaite: quand on
veut l'avoir entierement pur, on est obligé de le
faire passer par de nouvelles opérations; la principale
est celle de la coupelle, voyez
On peut encore purifier l'argent par le moyen du nitre. On n'a pour cela qu'à faire fondre de l'argent de coupelle avec ce sel, & le tenir en fusion jusqu'à ce qu'il n'en parte plus aucune vapeur. Alors l'argent sera aussi pur que l'on puisse le desirer; on jugera que ce métal aura été parfaitement purifié, lorsque les scories qui se forment à sa surface n'auront aucune couleur verte.
On purifie encore l'argent par le moyen de l'antimoine crud, dont le soufre s'unit aux métaux qui sont alliés avec l'argent, sans toucher à ce métal qui se combine avec la partie réguline de l'anti<cb->
Pour s'assurer si l'argent est pur, on n'aura qu'à le faire dissoudre dans de l'eau forte; pour peu qu'il donne une couleur verte à ce dissolvant, on aura lieu d'être convaincu que l'argent contenoit encore quelques portions de cuivre. C'est souvent le plomb qui a été joint avec l'argent dans la coupelle, qui lui communique du cuivre, & c'est ce cuivre qui est cause du déchet que l'on éprouve lorsqu'on fait fondre l'argent à plusieurs reprises, parce qu'alors l'action du feu calcine le cuivre, ce qui est cause du déchet dont on s'apperçoit. Si on verse de l'alkali volatil sur de l'argent, il se colorera en bleu, pour peu que ce métal contienne du cuivre.
Lorsque l'argent est parfaitement pur, il est fort mou, au point qu'il est difficile d'en faire des ouvrages d'orfévrerie, c'est pour cela qu'on l'allie communément avec du cuivre pour lui donner du corps. D'où l'on voit que les vaisseaux d'argent ainsi allié, peuvent avoir souvent les mêmes dangers que les vaisseaux ou ustensiles de cuivre. Si l'on vouloit avoir des pieces d'argent parfaitement pur, il faudroit les faire faire plus épaisses & plus fortes.
Les Orfévres pour donner de la blancheur & de l'éclat aux ouvrages d'argent, les font bouillir dans une eau où ils ont fait dissoudre du tartre avec du sel marin, auxquels quelques - uns joignent du sel ammoniac. On sent aisément que cette opération n'est point une vraie purification; elle ne pénetre point dans l'intérieur de l'argent, & n'enleve que les parties cuivreuses qui se trouvent à la surface.
Ce qu'on appelle le titre de l'argent, est son degré de pureté. Une masse d'argent quelconque se divise en douze parties, que l'on nomme deniers, & chaque denier en trente deux grains. Ainsi si une masse étoit composée de onze parties d'argent fin & d'une partie de cuivre, on diroit que cet argent est à onze deniers & ainsi de suite. En Allemagne l'argent eu égard à sa pureté, se divise en seize parties que l'on nomme loths ou demi - onces. La maniere dont les Orfévres jugent communément de la pureté ou du titre de l'argent est très - peu exacte; ils frottent la piece d'argent qu'ils veulent connoître sur une pierre de touche, sur la trace que ce métal a laissé sur la pierre, ils mettent de l'eau forte; si elle devient verte ou bleuâtre, ils jugent que cet argent contient du cuivre, mais ils ne peuvent point connoître par - là la quantité de cuivre que l'argent contient; d'ailleurs cette épreuve ne peut faire connoître si les morceaux qu'on leur présente ne renferment point quelque autre métal à leur intérieur.
Les Chimistes ont long - tems cru que l'argent non plus que l'or ne pouvoit point se calciner, c'est à - dire, que l'action du feu ne pouvoit point le décomposer ou lui enlever son phlogistique; maintenant on est convaincu de cette vérité. On n'a qu'à prendre de l'argent en limaille, ou ce qui vaut encore mieux, on prendra de l'argent, qui aura été dissout dans de l'eau forte, on l'exposera pendant deux mois à un seu de réverbere qui ne soit point assez fort pour le faire fondre, & l'on obtiendra une véritable chaux d'argent; d'où l'on voit que l'argent perd son phlogistique, quoique plus lentement que les autres métaux. Cette chaux d'argent vitrifiée donne un verre jaune.
L'auteur d'un ouvrage allemand fort estimé des Chimistes, qui a pour titre Alchymia denudata, indique un autre moyen pour calciner l'argent. Il dit de mettre l'argent en cementation avec de la craie, de la corne de cerf, &c. & de l'exposer ensuite à un feu de réverbere. Le même auteur donne encore un autre procedé; il consiste à dissoudre l'argent [p. 740]
De l'argent pur exposé à un feu très - violent pendant un mois n'a perdu qu'un > de son poids; au lieu que l'or pur, exposé à ce même feu pendant trois mois, n'a souffert aucun déchet.
L'argent se dissout dans l'acide nitreux, dans l'acide
vitriolique & dans l'acide du sel marin, mais
ce métal n'est point attaqué par l'eau régale. Les
acides tirés des végétaux agissent sur l'argent, pourvû
que son aggrégation soit rompue, c'est - à - dire,
pourvû qu'il soit dans un état d'atténuation & de
division. Pour faire dissoudre ce métal dans l'acide
nitreux, il faut le réduire en lames bien minces que
l'on fera rougir pour les rendre plus nettes, & que
l'on trempera dans de l'esprit de nitre étendu d'eau;
il se fera une effervescence, & lorsqu'elle sera finie
la dissolution sera faite; elle sera claire & un peu
jaunâtre, si l'argent est parfaitement pur, mais elle
deviendra verdâtre si l'argent contient du cuivre.
Si l'argent contient de l'or, ce dernier métal tombera
au fond du vaisseau sous la forme d'une poudre;
c'est sur cette expérience qu'est fondée la maniere
de séparer l'or d'avec l'argent. Voyez
L'acide vitriolique & l'acide du sel marin ont plus de disposition à s'unir avec l'argent, que l'acide nitreux; ainsi lorsque l'argent a été dissout dans de l'eau forte, mêlée d'acide vitriolique & d'acide du sel marin; ces derniers acides s'emparent de l'argent & se précipitent sous la forme d'un sel, cela fournit un moyen de purifier l'eau forte des autres acides qui y sont mêlés, ce qui se fait en versant quelques gouttes de dissolution d'argent faite par l'acide nitreux, dans l'eau forte que l'on veut purifier, ce que l'on continue jusqu'à ce qu'il ne se précipite plus rien; alors l'eau forte s'appelle précipitée, & elle est beaucoup plus pure qu'auparavant.
L'argent dissout dans l'acide nitreux, versé dans une eau minérale, est très - propre à faire connoître si cette eau contient le sel appellé séléniteux, qui est une combinaison de l'acide vitriolique & d'une terre calcaire; si une eau contient de ce sel, elle se trouble & devient laiteuse aussi - tôt qu'on y verse quelques gouttes de dissolution d'argent, parce qu'alors l'acide vitriolique contenu dans la sélénite, quitte la terre calcaire pour s'unir avec l'argent.
L'argent dissout dans l'acide nitreux, noircit la peau. On peut s'en servir pour former des desseins sur l'agathe & le caillou; secret dont on se sert quelquefois pour tromper les curieux qui font des collections d'histoire naturelle sans connoissance de cause.
En faisant évaporer cette dissolution, on obtient des crystaux blancs, composés de lames qui s'unissent à angles droits, & qui, lorsque l'évaporation s'est faite doucement ressemblent assez à ceux du nitre quadrangulaire; c'est - là ce que quelques Chimistes ont nommé assez mal à - propos vitriol de lune, on les appelle avec plus de raison crystaux de lune. Lorsqu'avant de faire évaporer la dissolution, on y a joint un peu d'esprit de vin, ces crystaux se nomment hydragogue d'angelus sala ou fel metallorum,
Si on met des crystaux de lune dans du plomb fondu, & qu'on leur donne le tems de s'y incorporer par la fusion, tout l'argent passera dans le plomb. C'est une des fourberies des Alchimistes qui s'en servent pour persuader aux simples, qu'ils savent convertir le plomb en argent.
Si l'on joint du mercure à de l'argent qui a été dissout dans l'acide nitreux, on obtiendra une végétation métallique que l'on nomme arbre de Diane.
Les crystaux de lune unis avec de la dissolution de mercure, étendue dans une grande quantité d'eau, teignent les cheveux en noir. Si on fait évaporer jusqu'à siccité la dissolution d'argent par l'acide nitreux dans une capsule de verre, garnie de terre grasse que l'on place à feu nud; les crystaux de lune entreront en fusion: en versant la matiere fondue dans des moules, on aura ce qu'on appelle le caustique lunaire ou la pierre infernale. Il faut pour cela de l'argent très - pur, parce que s'il étoit mêlé de cuivre, la pierre infernale attireroit l'humidité de l'air. Cette méthode est celle de M. Rouelle.
Kunckel dit dans son laboratoire chimique, que si l'on fait fondre la pierre infernale dans un creuset, & que l'on y joigue de l'esprit d'urine avec de son sel, spiritum urinoe cum suo sale, en donnant un degré de chaleur convenable, il se fait une masse tenace d'un rouge de sang, & que l'on peut plier comme un fil autour du doigt.
L'argent qui a été dissout dans l'acide nitreux, se précipite par l'alkali fixe, par l'alkali volatil; mais il ne faut en mettre que ce qui est nécessaire pour saturer l'acide nitreux, sans quoi l'argent qui aura été précipité se dissoudra de nouveau. Cette précipitation se fait encore par les terres calcaires, par le zinc, le fer, le cuivre, le plomb, le bismuth, le mercure; par ce moyen on a de l'argent très atténué & très - pur que l'on pourra édulcorer avec de l'eau chaude, pour lui enlever l'acide nitreux qui lui est demeuré attaché, & ensuite avec du vinaigre pour en enlever les petites molécules de cuivre qui peuvent encore lui être jointes.
Cette dissolution de l'argent se précipite encore par le moyen de l'acide vitriolique, l'argent tombe sous la forme d'une poudre blanche. Quand on veut dissoudre l'argent dans l'acide vitriolique, il faut que ce dissolvant soit chauffé & que l'aggrégation de ce métal ait été rompue. Le sel produit par la combinaison de l'acide vitriolique & de l'argent est fusible, comme la lune cornée, dont nous allons parler.
Kunckel dit, que si on fait dissoudre de l'argent dans de l'esprit de nitre; qu'on précipite ce métal par le cuivre, qu'on édulcore & qu'on fasse sécher le précipité; qu'on y verse ensuite deux parties d'acide vitriolique concentré; on mettra le tout au bain de sable, & on donnera le degré de feu nécessaire pour faire bouillir le dissolvant & pour l'évaporer, jusqu'à ce que la matiere soit fluide comme de la cire. Si on joint à cette dissolution du mercure vif, elle prendra la consistence d'une pierre, & elle deviendra rouge & malléable. En ajoutant plus d'acide vitriolique, cette masse devient si solide, qu'il n'y a plus que le feu de fusion qui puisse la décomposer. Voyez le laborat. chimiq.
Si dans une dissolution d'argent par l'acide nitreux on verse de l'acide du sel marin, ou du sel marin dissout dans de l'eau, il se fait une effervescence, le mélange devient trouble & il se forme une espece de matiere coagulée, qui n'est autre chose que de l'argent combiné avec l'acide du sel marin; c'est ce qu'on nomme lune cornée, parce qu'elle entre en fu<pb-> [p. 741]
La volatilité de la lune cornée, la rend très - difficile à réduire, il faut pour cela recourir à des intermedes. On met de l'antimoine dans une cornue avec la lune cornée; on donne un feu très - violent, par ce moyen l'acide du sel marin s'unit à l'antimoine & forme du beurre d'antimoine, & l'argent reste au fond de la cornue uni avec un peu d'antimoine, dont on le sépare en le faisant détonner avec du nitre.
On peut encore faire cette réduction de la lune cornée, en mettant avec elle du plomb dans une cornue, la réduction est faite aussi - tôt que le plomb a été fondu. Il se forme au - dessus du plomb une scorie qui ressemble beaucoup à de la lune cornée, & qui en a le poids; expérience, qui suivant M. Zimmermann, mérite l'attention des Chimistes.
Le soufre s'unit avec l'argent, & le rend si fusible & si divisé, qu'il perce les creusets, & en mêmetems il devient si cassant, que l'on peut le pulvériser. C'est sur la disposition que le soufre a de s'unir à l'argent, qu'est fondée l'opération par laquelle l'on dégage l'or d'avec l'argent par la voie seche, parce que le soufre ne touche point à l'or. Voyez, séparation ou départ par la voie seche. Lorsque l'argent est uni avec le soufre, l'eau forte n'agit plus sur ce métal, parce qu'il est alors entouré d'une enveloppe grasse, qui le défend contre l'action de l'acide. On peut dégager l'argent du soufre, en le faisant fondre avec du cuivre, auquel on pourra joindre un peu de limaille de fer à la fin de l'opération. On peut encore dégager ce soufre par le moyen de l'alkali fixe, en prenant garde de ne point faire du foie de soufre qui dissoudroit l'argent: ce soufre se dégagera aussi, si on joint du mercure sublimé avec l'argent sulfuré, alors le soufre s'unira au mercure & fera du cinnabre, tandis que l'argent s'unira à l'acide du sel marin avec qui il fera la lune cornée.
Les Alchimistes, toujours occupés de mysteres, ont donné plusieurs noms différens à l'argent; ils ont désigné ce métal sous le nom de luna, lumen minus, regina, Diana, mater Dianoe, fermentum album. Ils ont cru que pour être de l'or, il ne lui manquoit qu'un soufre colorant, mais ils n'ont point jugé à propos de nous expliquer ce qu'ils entendoient parlà.
Les Chimistes disent, que l'argent est composé, 1°. d'une terre fine qui se démontre par sa fixité au feu, & par la difficulté qu'on a de le calciner, 2°. d'une terre inflammable qui est le phlogistique, 3°. d'une terre mercurielle qui lui donne la fusibilité.
A l'exception de la pierre infernale, l'argent n'est d'aucun usage dans la Médecine & dans la Pharmacie; les prétendues teintures lunaires dont parlent quelques auteurs, sont des remedes très - suspects, vû que l'argent par lui - même ne donne point de couleur, & lorsqu'il en donne une, elle est dûe au cuivre avec qui il est mêlé.
Les usages de l'argent dans les arts & métiers, sont très - étendus & très - connus de tout le monde, on ne s'arrêtera pas à les décrire ici, vû qu'il en sera parlé aux articles où l'on traite ces différens arts.
Quand on voudra argenter une piece à froid, on
Lune cornée (Page 9:741)
Il n'y a point de moyen plus sûr d'avoir un argent bien pur & dégagé de toute partie cuivreuse, que de le mettre en lune cornée. On peut ensuite en retirer ce métal ou le réduire, en mettant la lune cornée dans un creuset enduit de savon; on y joint la moitié de son poids de sel de tartre bien sec & pulvérisé, que l'on couvrira d'huile, de suif, ou de quelque matiere grasse, on placera le creuset dans un fourneau de fusion; on ne donnera d'abord qu'un degré de feu suffisant pour faire rougir le creuset; on l'augmentera ensuite, & l'on remettra de tems en tems de nouvelle matiere grasse; lorsqu'il ne partira plus de fumée du creuset, on le vuidera à l'ordinaire dans un cône de fer enduit de suif. Voyez la Chimie pratique de M. Maquer.
Lune (Page 9:741)
L'Ecriture - sainte parle souvent du culte que l'on rendoit à la reine du ciel, car le soleil en étoit le roi; & Macrobe a prétendu que toutes les divinités des payens pouvoient se rapporter à ces deux astres. Du moins il est sûr qu'ils firent l'un & l'autre les premiers objets de l'idolatrie chez la plûpart des peuples de la terre.
Les hommes frappés de ces deux globes lumineux [p. 742]
Dès - lors on commença à se prosterner devant eux, à leur bâtir des temples découverts, & à leur adresser mille hommages, pour se les rendre favorables.
Mais la lune ne paroissant que la nuit, inspira le plus de craintes & de frayeurs aux hommes; ses influences furent extrèmement redoutées; de - là vinrent les conjurations des magiciennes de Thessalie, celles des femmes de Crotone, les sortiléges, & tant d'autres superstitions de divers genres, qui n'ont pas encore disparu de dessus notre hémisphere.
César ne donna point d'autres divinités aux peuples du Nord, & aux anciens Germains que le feu, le soleil, & la lune. Le culte de ce dernier astre franchit les bornes de l'océan germanique, & passa de la Saxe dans la grande Bretagne.
Il ne fut pas moins répandu dans les Gaules; & si nous en croyons l'auteur de la religion des Gaulois, il y avoit un oracle de la lune desservi par des druidesses dans l'île de Saïn, située sur la côte méridionale de la basse - Bretagne.
En un mot, on ne vit qu'un petit nombre de philosophes Grecs & Romains, qui regarderent la lune comme une simple planete, & pour m'exprimer avec Anaximandre, comme un feu renfermé dans la conca vité d'un globe dix - neuf fois plus grand que la terre. C'est - là, disent - ils, que les ames moins legeres que celles des hommes parfaits, sont reçûes, & qu'elles habitent les vallées d'Hécate, jusqu'à ce que dégagées de cette vapeur qui les avoit empêchées d'arriver au séjour céleste, elles y parviennent à la fin. (D. J.)
The Project for American and French Research on the Treasury of the French Language (ARTFL) is a cooperative enterprise of Analyse et Traitement Informatique de la Langue Française (ATILF) of the Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), the Division of the Humanities, the Division of the Social Sciences, and Electronic Text Services (ETS) of the University of Chicago.