ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

RECHERCHE Accueil Mises en garde Documentation ATILF ARTFL Courriel

Previous page

"739"> tandis que les matieres hétérogenes sont converties en scories, & nagent à sa surface. Ce plomb ainsi combiné avec l'argent, se nomme plomb d'oeuvre; on le verse dans des poellons de fer, où il refroidit & prend de la consistance. Voyez OEuvre. Ce plomb uni avec l'argent est en gâteaux, que l'on porte à la grande coupelle, où le plomb est converti en un verre que l'on nomme litharge, & l'argent seul reste sur la coupelle. Voyez Coupelle.

Lorsque les mines sont peu riches en argent, on tâche de rapprocher & de concentrer sous un moindre volume l'argent qu'elles contiennent, sans quoi on dépenseroit trop en plomb pour les mettre en fusion. Pour cet effet, on mêle ces mines d'argent avec des scories & avec des pyrites, & on les fait fondre au fourneau; c'est ce qu'on appelle dégrossir la mine. Ce travail produit un mélange ou une matte, que l'on fait passer par différens feux pour la griller; après quoi on joint ces mattes grillées avec des mines d'argent plus riches, ou avec du plomb ou des mines de plomb que l'on traite de la maniere indiquée ci - dessus, alors le produit s'appelle matte de plomb; elle nage au - dessus du plomb d'oeuvre & au - dessous des scories. Lorsque la matte de plomb a été grillée convenablement, on en fait l'essai en petit, pour savoir la quantite d'argent qu'il donne à la grande coupelle.

Lorsque des mines de cuivre contiennent une portion d'argent, on l'obtient en joignant du plomb au cuivre, opération qui se nomme liquation. Voyez cet article.

Dans les pays où l'on trouve beaucoup d'argent vierge, ou bien où le bois est trop rare pour qu'on fasse fondre ces mines, on les traite par l'amalgame, en les écrasant & en les triturant ensuite avec le mercure que l'on fait évaporer ensuite par le moyen du feu; c'est là ce qui se pratique au Pérou, au Potosi & dans les autres endroits de l'Amérique espagnole. Voyez Pignes.

Au sortir des travaux en grand, il est très - rare que l'argent soit d'une pureté parfaite: quand on veut l'avoir entierement pur, on est obligé de le faire passer par de nouvelles opérations; la principale est celle de la coupelle, voyez Coupelle. Elle est fondée sur la propriété que le plomb a de vitrifier tous les métaux, à l'exception de l'or & de l'argent; mais la coupelle n'a point toujours purisié l'argent aussi parfaitement qu'on le desire, alors pour achever de le rendre pur, on se sert du soufre. Pour cet effet, on prendra de l'argent de coupelle que l'on mettra dans un creuset avec du soufre; on donnera un feu assez fort pour que l'argent entre en fusion; lorsqu'il sera parfaitement fondu, on vuidera la matiere dans un mortier de fer; lorsqu'elle sera refroidie, elle aura la couleur du plomb & sera semblable à la mine d'argent vitreuse. On divisera cette masse & on la pulvérisera autant qu'il sera possible; on la mettra dans une écuelle de terre, où on la fera calciner pour en dégager le soufre; lorsqu'il sera entierement dissipé, on fera fondre l'argent avec du borax & de l'alkali fixe, & l'argent qu'on obtiendra sera parfaitement pur.

On peut encore purifier l'argent par le moyen du nitre. On n'a pour cela qu'à faire fondre de l'argent de coupelle avec ce sel, & le tenir en fusion jusqu'à ce qu'il n'en parte plus aucune vapeur. Alors l'argent sera aussi pur que l'on puisse le desirer; on jugera que ce métal aura été parfaitement purifié, lorsque les scories qui se forment à sa surface n'auront aucune couleur verte.

On purifie encore l'argent par le moyen de l'antimoine crud, dont le soufre s'unit aux métaux qui sont alliés avec l'argent, sans toucher à ce métal qui se combine avec la partie réguline de l'anti<cb-> moine. On le sépare ensuite de ce régule en le faisant détonner avec le nitre qui réduit l'antimoine en chaux sans décomposer l'argent.

Pour s'assurer si l'argent est pur, on n'aura qu'à le faire dissoudre dans de l'eau forte; pour peu qu'il donne une couleur verte à ce dissolvant, on aura lieu d'être convaincu que l'argent contenoit encore quelques portions de cuivre. C'est souvent le plomb qui a été joint avec l'argent dans la coupelle, qui lui communique du cuivre, & c'est ce cuivre qui est cause du déchet que l'on éprouve lorsqu'on fait fondre l'argent à plusieurs reprises, parce qu'alors l'action du feu calcine le cuivre, ce qui est cause du déchet dont on s'apperçoit. Si on verse de l'alkali volatil sur de l'argent, il se colorera en bleu, pour peu que ce métal contienne du cuivre.

Lorsque l'argent est parfaitement pur, il est fort mou, au point qu'il est difficile d'en faire des ouvrages d'orfévrerie, c'est pour cela qu'on l'allie communément avec du cuivre pour lui donner du corps. D'où l'on voit que les vaisseaux d'argent ainsi allié, peuvent avoir souvent les mêmes dangers que les vaisseaux ou ustensiles de cuivre. Si l'on vouloit avoir des pieces d'argent parfaitement pur, il faudroit les faire faire plus épaisses & plus fortes.

Les Orfévres pour donner de la blancheur & de l'éclat aux ouvrages d'argent, les font bouillir dans une eau où ils ont fait dissoudre du tartre avec du sel marin, auxquels quelques - uns joignent du sel ammoniac. On sent aisément que cette opération n'est point une vraie purification; elle ne pénetre point dans l'intérieur de l'argent, & n'enleve que les parties cuivreuses qui se trouvent à la surface.

Ce qu'on appelle le titre de l'argent, est son degré de pureté. Une masse d'argent quelconque se divise en douze parties, que l'on nomme deniers, & chaque denier en trente deux grains. Ainsi si une masse étoit composée de onze parties d'argent fin & d'une partie de cuivre, on diroit que cet argent est à onze deniers & ainsi de suite. En Allemagne l'argent eu égard à sa pureté, se divise en seize parties que l'on nomme loths ou demi - onces. La maniere dont les Orfévres jugent communément de la pureté ou du titre de l'argent est très - peu exacte; ils frottent la piece d'argent qu'ils veulent connoître sur une pierre de touche, sur la trace que ce métal a laissé sur la pierre, ils mettent de l'eau forte; si elle devient verte ou bleuâtre, ils jugent que cet argent contient du cuivre, mais ils ne peuvent point connoître par - là la quantité de cuivre que l'argent contient; d'ailleurs cette épreuve ne peut faire connoître si les morceaux qu'on leur présente ne renferment point quelque autre métal à leur intérieur.

Les Chimistes ont long - tems cru que l'argent non plus que l'or ne pouvoit point se calciner, c'est à - dire, que l'action du feu ne pouvoit point le décomposer ou lui enlever son phlogistique; maintenant on est convaincu de cette vérité. On n'a qu'à prendre de l'argent en limaille, ou ce qui vaut encore mieux, on prendra de l'argent, qui aura été dissout dans de l'eau forte, on l'exposera pendant deux mois à un seu de réverbere qui ne soit point assez fort pour le faire fondre, & l'on obtiendra une véritable chaux d'argent; d'où l'on voit que l'argent perd son phlogistique, quoique plus lentement que les autres métaux. Cette chaux d'argent vitrifiée donne un verre jaune.

L'auteur d'un ouvrage allemand fort estimé des Chimistes, qui a pour titre Alchymia denudata, indique un autre moyen pour calciner l'argent. Il dit de mettre l'argent en cementation avec de la craie, de la corne de cerf, &c. & de l'exposer ensuite à un feu de réverbere. Le même auteur donne encore un autre procedé; il consiste à dissoudre l'argent [p. 740] dans l'acide nitreux; on met cette dissolution dans une cornue, on y ajoute de l'acide vitriolique & du mercure. On pousse le feu fortement; d'abord il passe un peu de mercure dont une partie demeure unie avec les acides, mais il s'attache au col de la cornue un vrai cinnabre. En répétant plusieurs fois cette opération, la quantité du cinnabre qui s'attache au col de la cornue augmente, & à la fin on ne retrouve plus d'argent. M. Rouelle trouve que ce procedé démontre que l'acide vitriolique s'unit avec le phlogistique de l'argent, ce qui fait du soufre, & ce soufre en se combinant avec le mercure forme un vrai cinnabre.

De l'argent pur exposé à un feu très - violent pendant un mois n'a perdu qu'un de son poids; au lieu que l'or pur, exposé à ce même feu pendant trois mois, n'a souffert aucun déchet.

L'argent se dissout dans l'acide nitreux, dans l'acide vitriolique & dans l'acide du sel marin, mais ce métal n'est point attaqué par l'eau régale. Les acides tirés des végétaux agissent sur l'argent, pourvû que son aggrégation soit rompue, c'est - à - dire, pourvû qu'il soit dans un état d'atténuation & de division. Pour faire dissoudre ce métal dans l'acide nitreux, il faut le réduire en lames bien minces que l'on fera rougir pour les rendre plus nettes, & que l'on trempera dans de l'esprit de nitre étendu d'eau; il se fera une effervescence, & lorsqu'elle sera finie la dissolution sera faite; elle sera claire & un peu jaunâtre, si l'argent est parfaitement pur, mais elle deviendra verdâtre si l'argent contient du cuivre. Si l'argent contient de l'or, ce dernier métal tombera au fond du vaisseau sous la forme d'une poudre; c'est sur cette expérience qu'est fondée la maniere de séparer l'or d'avec l'argent. Voyez Départ & Quartation.

L'acide vitriolique & l'acide du sel marin ont plus de disposition à s'unir avec l'argent, que l'acide nitreux; ainsi lorsque l'argent a été dissout dans de l'eau forte, mêlée d'acide vitriolique & d'acide du sel marin; ces derniers acides s'emparent de l'argent & se précipitent sous la forme d'un sel, cela fournit un moyen de purifier l'eau forte des autres acides qui y sont mêlés, ce qui se fait en versant quelques gouttes de dissolution d'argent faite par l'acide nitreux, dans l'eau forte que l'on veut purifier, ce que l'on continue jusqu'à ce qu'il ne se précipite plus rien; alors l'eau forte s'appelle précipitée, & elle est beaucoup plus pure qu'auparavant.

L'argent dissout dans l'acide nitreux, versé dans une eau minérale, est très - propre à faire connoître si cette eau contient le sel appellé séléniteux, qui est une combinaison de l'acide vitriolique & d'une terre calcaire; si une eau contient de ce sel, elle se trouble & devient laiteuse aussi - tôt qu'on y verse quelques gouttes de dissolution d'argent, parce qu'alors l'acide vitriolique contenu dans la sélénite, quitte la terre calcaire pour s'unir avec l'argent.

L'argent dissout dans l'acide nitreux, noircit la peau. On peut s'en servir pour former des desseins sur l'agathe & le caillou; secret dont on se sert quelquefois pour tromper les curieux qui font des collections d'histoire naturelle sans connoissance de cause.

En faisant évaporer cette dissolution, on obtient des crystaux blancs, composés de lames qui s'unissent à angles droits, & qui, lorsque l'évaporation s'est faite doucement ressemblent assez à ceux du nitre quadrangulaire; c'est - là ce que quelques Chimistes ont nommé assez mal à - propos vitriol de lune, on les appelle avec plus de raison crystaux de lune. Lorsqu'avant de faire évaporer la dissolution, on y a joint un peu d'esprit de vin, ces crystaux se nomment hydragogue d'angelus sala ou fel metallorum, parce qu'ils ont un goût amer; ce remede qui est peu sûr, est corrosif & passe pour un puissant diurétique.

Si on met des crystaux de lune dans du plomb fondu, & qu'on leur donne le tems de s'y incorporer par la fusion, tout l'argent passera dans le plomb. C'est une des fourberies des Alchimistes qui s'en servent pour persuader aux simples, qu'ils savent convertir le plomb en argent.

Si l'on joint du mercure à de l'argent qui a été dissout dans l'acide nitreux, on obtiendra une végétation métallique que l'on nomme arbre de Diane.

Les crystaux de lune unis avec de la dissolution de mercure, étendue dans une grande quantité d'eau, teignent les cheveux en noir. Si on fait évaporer jusqu'à siccité la dissolution d'argent par l'acide nitreux dans une capsule de verre, garnie de terre grasse que l'on place à feu nud; les crystaux de lune entreront en fusion: en versant la matiere fondue dans des moules, on aura ce qu'on appelle le caustique lunaire ou la pierre infernale. Il faut pour cela de l'argent très - pur, parce que s'il étoit mêlé de cuivre, la pierre infernale attireroit l'humidité de l'air. Cette méthode est celle de M. Rouelle.

Kunckel dit dans son laboratoire chimique, que si l'on fait fondre la pierre infernale dans un creuset, & que l'on y joigue de l'esprit d'urine avec de son sel, spiritum urinoe cum suo sale, en donnant un degré de chaleur convenable, il se fait une masse tenace d'un rouge de sang, & que l'on peut plier comme un fil autour du doigt.

L'argent qui a été dissout dans l'acide nitreux, se précipite par l'alkali fixe, par l'alkali volatil; mais il ne faut en mettre que ce qui est nécessaire pour saturer l'acide nitreux, sans quoi l'argent qui aura été précipité se dissoudra de nouveau. Cette précipitation se fait encore par les terres calcaires, par le zinc, le fer, le cuivre, le plomb, le bismuth, le mercure; par ce moyen on a de l'argent très atténué & très - pur que l'on pourra édulcorer avec de l'eau chaude, pour lui enlever l'acide nitreux qui lui est demeuré attaché, & ensuite avec du vinaigre pour en enlever les petites molécules de cuivre qui peuvent encore lui être jointes.

Cette dissolution de l'argent se précipite encore par le moyen de l'acide vitriolique, l'argent tombe sous la forme d'une poudre blanche. Quand on veut dissoudre l'argent dans l'acide vitriolique, il faut que ce dissolvant soit chauffé & que l'aggrégation de ce métal ait été rompue. Le sel produit par la combinaison de l'acide vitriolique & de l'argent est fusible, comme la lune cornée, dont nous allons parler.

Kunckel dit, que si on fait dissoudre de l'argent dans de l'esprit de nitre; qu'on précipite ce métal par le cuivre, qu'on édulcore & qu'on fasse sécher le précipité; qu'on y verse ensuite deux parties d'acide vitriolique concentré; on mettra le tout au bain de sable, & on donnera le degré de feu nécessaire pour faire bouillir le dissolvant & pour l'évaporer, jusqu'à ce que la matiere soit fluide comme de la cire. Si on joint à cette dissolution du mercure vif, elle prendra la consistence d'une pierre, & elle deviendra rouge & malléable. En ajoutant plus d'acide vitriolique, cette masse devient si solide, qu'il n'y a plus que le feu de fusion qui puisse la décomposer. Voyez le laborat. chimiq.

Si dans une dissolution d'argent par l'acide nitreux on verse de l'acide du sel marin, ou du sel marin dissout dans de l'eau, il se fait une effervescence, le mélange devient trouble & il se forme une espece de matiere coagulée, qui n'est autre chose que de l'argent combiné avec l'acide du sel marin; c'est ce qu'on nomme lune cornée, parce qu'elle entre en fu<pb->

Next page


The Project for American and French Research on the Treasury of the French Language (ARTFL) is a cooperative enterprise of Analyse et Traitement Informatique de la Langue Française (ATILF) of the Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), the Division of the Humanities, the Division of the Social Sciences, and Electronic Text Services (ETS) of the University of Chicago.

PhiloLogic Software, Copyright © 2001 The University of Chicago.