ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"795"> en traînant leur charge, & sans avoir seulement l'art d'echaffauder; pour y parvenir, ils n'avoient point d'autre méthode que de hausser la terre contre leur bâtiment à mesure qu'il s'élevoit, pour l'ôter après.

Machine hydraulique ou machine à eau, signifie ou bien une simple machine pour servir à conduire ou élever l'eau, telle qu'une écluse, une pompe, &c. ou bien un assemblage de plusieurs machines simples qui concourent ensemble à produire quelques effets hydrauliques, comme la machine de Marly. Dans cette machine le premier mobile est un bras de la riviere de Seine, lequel par son courant fait tourner plusieurs grandes roues qui menent des manivelles, & celles - ci des pistons qui élevent l'eau dans les pompes; d'autres pistons la forcent à monter dans des canaux le long d'une montagne jusqu'à un réservoir pratiqué dans une tour de pierre fort élevée au - dessus du niveau de la riviere, & l'eau de ce reservoir est conduite à Versailles par le moyen d'un aqueduc. M. Weidler, professeur en Astronomie à Wirtemberg, a fait un traité des machines hydrauliques, dans lequel il calcule les forces qui font mouvoir la machine de Marly; il les évalue à 1000594 livres, & il ajoute que cette machine éleve tous les jours 11700000 livres d'eau à la hauteur de 500 piés. M. Daniel Bernoully, dans son hydrodynamique, section 9. a publié différentes remarques sur les machines hydrauliques, & sur le dernier degré de perfection qu'on leur peut donner.

Les pompes de la Samaritaine & du pont Notre - Dame à Paris, sont aussi des machines hydrauliques. La premiere a été construite pour fournir de l'eau au jardin des Tuileries, & la seconde en fournit aux différens quartiers de la ville. On trouve dans l'ouvrage de M. Belidor, intitulé, architecture hydraulique, le calcul de la force de plusieurs machines de cette espece. Voyez la description de plusieurs de ces machines, au mot Hydraulique.

Les machines militaires des anciens étoient de trois especes: les premieres servoient à lancer des fleches, comme le scorpion; des pierres ou des javelines, comme la catapulte; des traits ou des boulets, comme la baliste; des dards enflammés, comme le pyrobole: les secondes servoient à battre des murailles, comme le bélier: les troisiemes enfin, à couvrir ceux qui approchoient des murailles des ennemis, comme les tours de bois, &c. Voyez Scorpion, Catapulte, &c.

Pour calculer l'effet d'une machine, on la considere dans l'état d'équilibre, c'est - à - dire dans l'état où la puissance qui doit mouvoir le poids ou surmonter la résistance, est en équilibre avec le poids ou la résistance. On a donné pour cela des methodes aux mots Équilibre & Forces mouvantes, & nous ne les répéterons point ici; mais nous ne devons pas oublier de remarquer qu'après le calcul du cas de l'équilibre, on n'a encore qu'une idée très - imparfaite de l'effet de la machine: car comme toute machine est destinée à mouvoir, on doit la considérer dans l'état de mouvement, & alors il faut avoir égard, 1°. à la masse de la machine, qui s'ajoute à la résistance qu'on doit vaincre, & qui doit augmenter par conséquent la puissance; 2°. au frottement qui augmente prodigieusement la résistance, comme on le peut voir aux mots Frottement & Corde, où l'on trouvera quelques essais de calcul à ce sujet. C'est principalement ce frottement & les lois de la résistance des solides, si différens pour les grands & pour les petits corps (voyez Résistance); ce sont, dis - je, ces deux causes qui font souvent qu'on ne sauroit conclure de l'effet d'une machine en petit à celui d'une autre machine semblable en grand, parce que les résistances n'y sont pas proportionnelles aux dimensions des machines. Sur les machines particulieres, voyez les dif<cb-> férens articles de ce Dictionnaire, Levier, Poulie, &c. (O)

Machine de Boyle (Page 9:795)

Machine de Boyle, est le nom qu'on donne quelquefois à la machine pneumatique, parce qu'on regarde ce physicien comme le premier inventeur de cette machine. Cependant il n'a fait réellement que la perfectionner, elle étoit inventée avant lui: c'est à Othon de Guericke, bourguemestre de Magdebourg, que l'on en doit la premiere idée. Voyez Machine pneumatique, ou mot Pneumatique. (O)

Machines militaires (Page 9:795)

Machines militaires, ce sont en général toutes les machines qui servent à la guerre de campagne & à celle des siéges. Ainsi les machines militaires des anciens étoient le bélier, la catapulte, la baliste, &c. celles des modernes sont le canon, le mortier, &c. Voyez chacun de ces mots à leur article.

Il n'est pas rare de trouver des gens qui proposent de nouvelles machines ou de nouvelles inventions pour la guerre. Le chevalier de Ville rapporte dans son traité de Fortification, « qu'au siége de Saint Jean d'Angely il y eut un personnage qui fit bâtir un pont grand à merveille, soutenu sur quatre roues, tout de bois, avec lequel il prétendoit traverser le fossé, & depuis la contrescarpe jusque sur le parapet des remparts, faire passer par - dessus icelui 15 ou 20 soldats à couvert. Il fit faire la machine, qui coûta douze ou quinze mille écus; & lorsqu'il fut question de la faire marcher avec 50 chevaux qu'on avoit attelés, soudain qu'elle fut ébranlée, elle se rompit en mille pieces avec un bruit effroyable. La même chose arriva d'une autre à Lunel qui coûtoit moins que celle - là, & réussit ainsi que l'autre.

J'en ai vu, continue le même auteur, qui promettoient pouvoir jetter avec une machine 50 hommes tout - à - la - fois depuis la contrescarpe jusque dans le bastion, armés à l'épreuve du mousquet; d'autres de réduire en cendre les villes entieres, voire les murailles mêmes, sans que ceux de dedans y pussent donner remede, quand bien leurs maisons seroient terrassées. Enfin on ne voit aucun effet de ces promesses, & le plus souvent ou c'est folie ou malice pour attraper l'argent du prince qui les croit ». Le chevalier de Ville prétend & avec raison, qu'il ne faut pas se livrer aisément à ces faiseurs de miracles qui proposent des choses extraordinaires, à moins qu'ils n'en fassent premierement l'expérience à leurs dépens. Ce n'est pas, dit - il, que je blâme toutes sortes de machines: on en a fait, & on en invente tous les jours de très - utiles; mais je parle de ces extraordinaires qu'on juge par raison ne pouvoir être mises en oeuvre & faire les effets qu'on propose. Il ne faut jamais sur une chose si douteuse fonder totalement un grand dessein; on doit en faire l'épreuve à loisir lorsqu'on n'en a pas besoin, afin d'être assuré de leur effet au besoin. (Q)

Machine infernale (Page 9:795)

Machine infernale, (Art milit.) c'est un bâtiment à trois ponts chargé au premier de poudre, au second de bombes & de carcasses, & autroisieme de barils cerclés de fer pleins d'artifices, son tillac aussi comblé de vieux canons & de mitraille, dont on s'est quelquefois servi pour essayer de ruiner des villes & différens ouvrages.

Les Anglois ont essayé de bombarder ou ruiner plusieurs des villes maritimes de France, & notamment Saint Malo, avec des machines de cette espece, mais sans aucun succès.

Celui qui les mit le premier en usage, fut un ingénieur italien, nommé Frédéric Jambelli. Durant le siége qu'Alexandre de Parme avoit mis devant Anvers, où les Hollandois se défendirent long - tems avec beaucoup de constance & de bravoure; l'Escaut est extraordinairement large au - dessus & au - dessous d'Anvers, parce qu'il approche - là de son em<pb-> [p. 796] bouchure; Alexandre de Parme, malgré cela, entreprit de faire un pont de 2400 piés de long au - dessous de cette place pour empêcher les secours qui pourroient venir de Zélande. Il en vint à bout, & il ne s'étoit point fait jusqu'alors d'ouvrage en ce genre comparable à celui - là. Ce fut contre ce pont que Jambelli destina ses machines infernales. Stradon dans cet endroit de son histoire, une des mieux écrites de ces derniers tems, fait une belle description de ces machines & de la maniere dont on s'en servoit. Je vais le traduire ici.

« Ceux qui défendoient Anvers, dit cet auteur, ayant achevé l'ouvrage qu'ils préparoient depuis long - tems pour la ruine du pont, donnerent avis de cela à la flotte qui étoit au delà du pont du côté de la Zélande, que le quatrieme d'Avril leurs vaisseaux sortiroient du port d'Anvers sur le soir; qu'ainsi ils se tinssent prêts pour passer avec le convoi des munitions par la breche qu'on feroit infailliblement au pont. Je vais, continue l'historien, décrire la structure des bateaux d'Anvers & leurs effets, parce qu'on n'a rien vu dans les siecles passés de plus prodigieux en cette matiere, & je tirerai ce que je vais en dire des lettres d'Alexandre de Parme au roi d'Espagne Philippe II. & de la relation du capitaine Tuc.

Frédéric Jambelli ayant passé d'Italie en Espagne pour offrir son service au roi, sans pouvoir obtenir audience, se retira piqué du mépris que l'on faisoit de sa personne, dit en partant que les Espagnols entendroient un jour parler de lui d'une maniere à se repentir d'avoir méprisé ses offres. Il se jetta dans Anvers, & il y trouva l'occasion qu'il cherchoit de mettre ses menaces à exécution. Il construisit quatre bateaux plats, mais très - hauts de bords, & d'un bois très - fort & & très - épais, & imagina le moyen de faire des mines sur l'eau de la maniere suivante. Il fit dans le fond des bateaux & dans toute leur longueur une maçonnerie de brique & de chaux, de la hauteur d'un pié & de la largeur de cinq. Il éleva tout à l'entour & aux côtés de petites murailles, & fit la chambre de sa mine haute & large de trois piés; il la remplit d'une poudre très - fine qu'il avoit fait lui - même, & la couvrit avec des tombes, des meules de moulin, & d'autres pierres d'une extraordinaire grosseur: il mit par - dessus des boulets, des monceaux de marbre, des crocs, des clous & d'autre ferraille, & bâtit sur tout cela comme un toît de grosses pierres. Ce toît n'étoit pas plat, mais en dos d'âne, afin que la mine venant à crever l'effet ne s'en fit pas seulement en - haut, mais de tous côtés. L'espace qui étoit entre les murailles de la mine & les côtés des bateaux, fut rempli de pierres de taille maçonnées & de poutres liées avec les pierres par des crampons de fer. Il fit sur toute la largeur des bateaux un plancher de grosses planches, qu'il couvrit encore d'une couche de brique, & sur le milieu il éleva un bucher de bois poissé pour l'allumer, quand les bateaux démareroient, afin que les ennemis les voyant aller vers le pont, crussent que ce n'étoient que des bateaux ordinaires qu'on envoyoit pour mettre le feu au pont. Pour que le feu ne manquât pas de prendre à la mine, il se servit de deux moyens. Le premier fut une meche ensoufrée d'une certaine longueur proportionnée au tems qu'il falloit pour arriver au pont, quand ceux qui les conduiroient les auroient abandonnés & mis dans le courant. L'autre moyen dont il se servit pour donner le feu à la poudre étoit un de ces petits horloges à réveils - matin, qui en se détendant après un certain tems battent le fusil. Celui - ci faisant feu devoit donner sur une traînée de poudre qui aboutissoit à la mine.

Ces quatre bateaux ainsi préparés devoient être accompagnés de treize autres où il n'y avoit point de mine, mais qui étoient de simples brûlots. On avoit su dans le camp des Espagnols qu'on préparoit des brûlots dans le port d'Anvers; mais on n'y avoit nul soupçon de l'artifice des quatre bateaux, & Alexandre de Parme crut que le dessein des ennemis étoit seulement d'attaquer le pont en même tems au dessus du côté d'Anvers, & au - dessous du côté de la Zélande. C'est pourquoi il renforça les troupes qu'il avoit dans les forts des digues voisines, & sur tout le pont, & y distribua ses meilleurs officiers, qu'il exposoit d'autant plus au malheur qui les menaçoit, qu'il sembloit prendre de meilleures mesures pour l'éviter. On vit sortir d'abord trois brûlots du port d'Anvers, & puis trois autres, & le reste dans le même ordre. On sonna l'allarme, & tous les soldats coururent à leurs postes sur le pont. Ces vaisseaux voguoient en belle ordonnance, parce qu'ils étoient conduits chacun par leurs pilotes. Le feu y étoit si vivement allumé qu'il sembloit que les vaisseaux mêmes brûloient, ce qui donnoit un spectacle qui eut fait plaisir aux spectateurs qui n'en n'eussent eu rien à craindre: car les Espagnols de leur côté avoient allumé un grand nombre de feux sur leurs digues & dans leurs forts. Les soldats étoient rangés en bataille sur les deux bords de la riviere & sur le pont, enseignes déployées, avec les officiers à leur tête; & les armes brilloient encore plus à la flamme qu'elles n'auroient fait au plus beau soleil.

Les matelots ayant conduit leurs vaisseaux jusqu'à deux mille pas du pont, firent prendre, surtout aux quatre où étoient les mines, le courant de l'eau, & se retirerent dans leurs esquifs; car pour ce qui est des autres ils ne se mirent pas si fort en peine de si bien diriger leur route; ceux - ci pour la plûpart échouerent contre l'estaccade & aux deux bords de la riviere. Un des quatre destinés à rompre le pont, fit eau & coula bas au milieu de la riviere; on en vit sortir une épaisse fumée sans autre effet. Deux autres furent poussés par un vent qui s'éleva, & portés par le courant vers Calloo au rivage du côté de la Flandre; il y eut pendant quelque tems sujet de croire que la même chose arriveroit au quatrieme, parce qu'il paroissoit aussi tourner du côté de la rive de Flandre; les soldats voyant tout cela, & que le feu paroissoit s'éteindre sur la plûpart des bateaux, commencerent à se moquer de ce grand appareil qui n'aboutissoit à rien; il y en eut même d'assez hardis pour entrer dans un des deux qui avoient échoué au bord, & ils y ensonçoient leurs piques sur le plancher pour découvrir ce qu'il y avoit dessous; mais dans ce moment, ce quatrieme vaisseau, qui étoit beaucoup plus fort que les autres, ayant brisé l'estaccade, continua sa route vers le pont. Alors les soldats espagnols que l'inquiétude reprit, jetterent un grand cri. Le duc de Parme qui étoit aussi attentif à la flotte hollandoise qui étoit au - dessous du pont du côté de Lillo, qu'aux brûlots qui venoient d'Anvers, accourut à ce cri. Il commanda aussi - tôt des soldats & des matelots; les uns pour détourner le vaisseau avec des crocs; les autres pour sauter dedans & y éteindre le feu, & se mit dans une espece de château de bois, bâti sur pilotis à la rive de Flandre, & auquel étoient attachés les premiers bateaux du pont. Il avoit avec lui les seigneurs de Roubais, Caëtan, Billi, Duguast, & les officiers du corps - de - garde de ce château.

Il y avoit parmi eux un vieux enseigne, domestique du prince de Parme, à qui ce prince fut

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