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LOTERIE (Page 9:694)
LOTERIE, s. f. (Arithmétique.) espece de jeu de hasard dans lequel différens lots de marchandises ou différentes sommes d'argent sont déposées pour en former des prix & des bénéfices à ceux à qui les billets favorables échoient. L'objet des loteries & la maniere de les tirer, sont des choses trop communes pour que nous nous y arrêtions ici. Nos loteries de France ont communément pour objet de parvenir à faire des sonds destinés à quelques oeuvres pieuses ou à quelque besoin de l'état; mais les loteries sont très - fréquentes en Angleterre & en Hollande, où on n'en peut faire que par permission du magistrat.
M. Leclerc a composé un traité sur les loteries, où il montre ce qu'elles renferment de louable & de blâmable. Grégorio Leti a donné aussi un ouvrage sur les loteries, & le P. Menetrier a publié en 1700 un traité sur le même sujet, où il montre l'origine des loteries, & leur usage parmi les Romains; il distingue divers genres de loteries, & prend de - là occasion de parler des hasards & de resoudre plusieurs cas de conscience qui y ont rapport. Chambers.
Soit une loterie de n billets dans laquelle m soit le
prix du billet, m n sera l'argent de toute la loterie; &
comme cet argent ne rentre jamais en total dans la
bourse des intéressés pris ensemble, il est évident
que la loterie est toujours un jeu desavantageux. Par
exemple, soit une loterie de 10 billets à 20 livres le
billet, & qu'il n'y ait qu'un lot de 150 livres, l'espérance
de chaque intéressé n'est que de > liv. = 15l.
& sa mise est de 20 liv. ainsi il perd un quart de sa
mise, & ne pourroit vendre son espérance que 15l.
Voyez
Pour calculer en général l'avantage ou le desavantage
d'une loterie quelconque, il n'y a qu'à supposer
qu'un particulier prenne à lui seul toute la
loterie, & voir le rapport de ce qu'il a déboursé à ce
qu'il recevra: foit m l'argent déboursé, ou la somme
de la valeur des billets, & n la somme des lots qui
est toujours moindre, il est évident que le desavantage
de la loterie est [omission: formula; to see, consult fac-similé version]. Voyez
Si une loterie contient n billets & m lots, on demande quelle probabilité il y a qu'on ait un lot, si on prend r billets. Prenons un exemple: on suppose en tout 20 billets, 15 lots, & par conséquent 15 billets qui doivent sortir, & qu'on ait pris 4 billets: on représentera ces 4 billets par les quatre premieres lettres de l'alphabet, a, b, c, d, & les 20 billets
Donc en général la probabilité cherchée est exprimée
par le rapport de (n - m + 1. n - m
+ 2......n) - (n - r - m + 1. n - r - m
+ 2......n - r) à (n - m + 1. n - m + 2.....n)
D'où l'on voit que si n - r - m + 1 = 0 ou est négatif,
on jouera à jeu sûr. Si, par exemple, dans le cas
précédent au lieu de 4 billets on en prenoit 6, alors
on auroit n - r - m + 1 = 20 - 6 - 15 + 1 = 0; &
il y auroit certitude d'avoir un lot, ce qui est évident, puisque si de 20 billets on en prend 6 & qu'il
en doive sortir 15 de la roue, il est infaillible qu'il
en sortira un des 6, les autres ne faisant ensemble
que 14. Voyez
Loterie (Page 9:694)
Lorsque la partie est trop long - tems à finir, on double ou on triple les billets qu'on donne à chaque, mais toujours cependant l'un après l'autre: la grosseur des lots abrege encore beaucoup la partie. [p. 695]
Loteries (Page 9:695)
Les Romains imaginerent pendant les saturnales des especes de loteries, dont tous les billets qu'on distribuoit gratis aux conviés, gagnoient quelque prix; & ce qui étoit écrit sur les billets se nommoit apophoreta. Cette invention étoit une adresse galante de marquer sa libéralité & de rendre la fête plus vive & plus intéressante, en mettant d'abord tout le monde de bonne humeur.
Auguste goûta beaucoup cette idée; & quoique les billets des loteries qu'il saisoit consistassent quelquefois en de pures bagatelles, ils étoient imaginés pour donner matiere à s'amuser encore davantage; mais Néron, dans les jeux que l'on célébroit pour l'éternité de l'empire, étala la plus grande magnificence en ce genre. Il créa des loteries publiques en faveur du peuple de mille billets par jour, dont quelques - uns suffisoient pour faire la fortune des personnes entre les mains desquels le hasard les distribuoit.
L'empereur Héliogabale trouva plaisant de composer des loteries moitié de billets utiles & moitié de billets qui gagnoient des choses risibles & de nulle valeur. Il y avoit, par exemple, un billet de six esclaves, un autre de six mouches, un billet d'un vase de grand prix, & un autre d'un vase de terre commune, ainsi du reste.
Enfin en 1685 Louis XIV. renouvella dans ce royaume la mémoire des anciennes loteries romaines: il en fit une fort brillante au sujet du mariage de sa sille avec M. le Duc. Il établit dans le salon de Marly quatre boutiques remplies de ce quel'industrie des ouvriers de Paris avoit produit de plus riche & de plus recherché. Les dames & les hommes nommés du voyage, tirerent au sort les bijoux dont ces boutiques étoient garnies. La fête de ce prince étoit sans doute très - galante, & même à ce que prétend M. de Voltaire, supérieure en ce genre à celle des empereurs romains. Mais si cette ingénieuse galanterie du monarque, si cette somptuosité, si les plaisirs magnifiques de sa cour eussent insulté à la misere du peuple, de quel oeil les regarderions - nous? (D. J.)
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