ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS
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LIQUIDITÉ
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LIQUIDITÉ, (Chimie.) mode & degré de raréfaction.
Voyez l'article Raréfaction & Rarescibilité, Chimie.
La liquidité est un phénomene proprement physique,
puisqu'il est du nombre de ceux qui appartiennent
à l'aggrégation, qui sont des affections de l'aggrégé
comme tel (voyez à l'article Chimie, p. 411.
col. 2. & suiv.); mais il est aussi de l'ordre de ceux sur
lesquels les notions chimiques répandent le plus grand
jour, comme nous l'avons déja observé en général,
& du phénomene dont il est ici question, en particulier
à l'article Chimie. p. 415. col. 10. Pour nous
en tenir à notre objet présent, à la lumiere répandue
sur la théorie de la liquidité par la contemplation
des phénomenes chimiques; c'est des événemens ordinaires
de la dissolution chimique opérée dans le
sein des liquides, que j'ai déduit l'identité de la simple
liquidité & de l'ébullition, & par conséquent l'établissement
de l'agitation tumultueuse des parties
du liquide, des tourbillons, des courans, &c. qui
représente l'essence de la liquidité d'une maniere rigoureusement
démontrable. Voyez Menstrue, Chimie, & l'article Chimie, aux endroits déja cités.
Mais la considération vraiment chimique de la liquidité, est celle d'après laquelle Becher l'a distinguée
en liquidité mercurielle, liquidité aqueuse & liquidité ignée. Ce célebre chimiste appelle liquidité
mercurielle, celle qui fait couler le mercure vulgaire,
& qu'il croit pouvoir être procurée à toutes les substances
métalliques, d'après sa prétention favorite
sur la mercurification. Voyez Mercurification.
La liquidité aqueuse est selon lui, celle qui est propre
à l'eau commune, à certains sels, & même à
l'huile. Il la spécifie principalement par la propriété
qu'ont les liquides de cette classe, de mouiller les
mains ou d'être humides, en prenant ce dernier mot
dans son sens vulgaire.
Enfin, il appelle liquidité ignée, celles que peuvent
acquérir les corps fixes, & chimiquement homogènes
par l'action d'un feu violent, ou comme les Chimistes s'expriment encore, celle qui met les corps
dans l'état de fusion proprement dite. Voyez Fusion,
Chimie.
Quelque prix qu'attachent les vrais chimistes aux
notions transcendantes, aux vûes profondes, aux
germes féconds de connoissances fondamentales que
fournissent les ouvrages de Bécher, & notamment
la partie de sa physique souterraine, où il traite de
ces trois liquidités, voyez Physic. subter. lib. I. sect. 5.
c. iij. il faut convenir cependant qu'il étale dans ce
morceau plus de prétentions que de faits, plus de
subtilités que de vérités, & qu'il y montre plus de
sagacité, de génie, de verve, que d'exactitude.
Je crois qu'on doit substituer à cette distinction,
trop peu déterminée & trop peu utile dans la pratique,
la distinction suivante qui me paroît précise,
réelle & utile.
Je crois donc que la liquidité doit être distinguée
en liquidité primitive, immédiate ou propre, & liquidité sécondaire, médiate ou empruntée.
La liquidité primitive est celle qui est immédiatement
produite par la chaleur, dont tous les corps homogènes
& fixes sont susceptibles, & qui n'est autre
chose qu'un degré de raréfaction, ou que ce
phénomène physique, dont nous avons parlé au
commencement de cet article (voyez l'article Raréfaction & Rarescibilité, Chimie), n'importe
quel degré de chaleur soit nécessaire pour la produire
dans les différentes especes de corps; qu'elle ait lieu
sous le moindre degré de chaleur connue, comme
dans le mercure qui reste coulant sous la température
exprimée par le soixante & dixieme degré au - dessous
du terme de la congélation du thermometre
de Reaumur, qui est ce moindre degré de chaleur,
ou l'extrème degré du froid que les hommes ont observé
jusqu'à présent (voyez à l'article Froid, Physique, p. 317. col. 1. la table des plus grands degrés de
froids observés, &c.), ou bien que comme certaines
huiles, celle d'amande douce, par exemple, le
froid extrème, c'est - à - dire la moindre chaleur de nos
climats suffise pour la rendre liquide; ou que comme
l'eau commune, l'alternative de l'état concret & de
l'état de liquidité, arrive communément sous nos
yeux; soit enfin qu'une forte chaleur artificielle soit
nécessaire pour la produire, comme dans les substances
métalliques, les sels fixes, &c. ou même que
l'aptitude à la liquidité soit si foible dans certains
corps, qu'ils en ayent passé pour infusibles, & qu'on
n'ait découvert la nullité de cette prétendue propriété,
qu'en leur faisant essuyer un degré de feu jusqu'alors
inconnu, & dont l'effet fluidifiant auquel rien ne
résiste, est rapporté à l'article Miroir ardent,
voyez cet article. Car de même qu'un grand nombre
de corps, tels que toutes les pierres & terres pures,
avoient été regardées comme infusibles, avant qu'on
eût découvert cet extrème degré de feu; il y a très grande
apparence que le mercure n'a été trouvé jusqu'à présent inconcrescible, que parce qu'on n'a pu
l'observer sous un assez foible degré de chaleur; &
que si l'on pouvoit aborder un jour des plages plus
froides que celles où on est parvenu, ou l'exposer à
un degré de froid artificiel plus fort que celui qu'on
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a produit jusqu'à présent, le mercure essuyeroit enfin
le même sort que l'esprit - de - vin, long - tems cru
inconcrescible, & dont la liquidité trouva son terme
fatal à un degré de chaleur encore bien supérieur
au moindre degré connu. On peut poursuivre la même
analogie jusque sur l'air. Il est très - vraissemblable
qu'il est des degrés possibles de froid, qui le convertiroient
premierement en liqueur, & secondement
en glace ou corps solide. Voyez l'article Froid, Physique, à l'en droit déja cité.
La liquidité empruntée est celle qui est procurée aux
corps concrets sous une certaine température, par
l'action d'un autre corps qui est liquide sous la même
température, c'est - à - dire, par un menstrue à un corps
soluble. Voyez Menstrue.
C'est ainsi que les corps qui ne pourroient couler
par leur propre constitution qu'à l'aide d'un extrème
dogré de chaleur, comme la chaux, par exemple,
peuvent partager la liquidité d'un corps qui n'a besoin
pour être liquide, que d'être échauffé par la
température ordinaire de notre athmosphere; le vinaigre
par exemple.
Tous les liquides aqueux composés & chimiquement
homogenes, tels que tous les esprits acides &
alkalis, les esprits fermentés, les sucs animaux &
végétaux, & même sans en excepter les huiles, selon
l'idée de Becher, ne coulent que par la liquidité
qu'ils empruntent de l'eau; car il est évident, en
exceptant cependant les huiles de l'extrème évidence, que c'est l'eau qui fait la vraie base de toutes ces
liqueurs, & que les différens principes étrangers qui
l'impregnent ne jouissent que de la liquidité qu'ils lui
empruntent. Il est connu que plusieurs de ces principes,
les alkalis, par exemple, & peut - être l'acide
vitriolique (voyez sous le mot Vitriol) sont naturellement
concrets au degré de chaleur qui les fait
couler lorsqu'ils sont réduits en liqueur, c'est - à - dire
dissous dans l'eau. On se représente facilement cet
état de liquidité empruntée dans les corps où l'eau se
manifeste par sa liquidité spontanée, c'est - à - dire dûe
à la chaleur naturelle de l'athmosphere; mais on ne
s'apperçoit pas si aisément que ce phénomene est le
même dans certains corps concrets auxquels on procure
la liquidité par une chaleur artificielle très - inférieure à celle qui seroit nécessaire pour procurer à
ce corps une fluidité immédiate. Certains sels, par
exemple, comme le nître & le vitriol de mer crystallisés,
coulent sur le feu à une chaleur legere & avant
que de rougir, & on peut même facilement porter
cet état jusqu'à l'ébullition: mais c'est - là une liquidité
empruntée; ils la doivent à l'eau qu'ils retiennent
dans leurs crystaux, & que les Chimistes appellent
eau de crystallisation. Ils ne sont susceptibles par eux - mêmes
que de la liquidité ignée, & même, à proprement
parler, le vitriol qui coule si aisément au moyen
de la liquidité qu'il emprunte de son eau de crystallisation,
est véritablement infusible sans elle, puisqu'il
n'est pas fixe, c'est - à - dire qu'il se décompose au grand
feu plûtôt que de couler. Quant au nitre, lorsqu'il
est calciné, c'est - à - dire privé de son eau de crystallisation,
il est encore fusible, mais il demande pour
être liquefié, pour couler d'une liquidité propre &
primitive, un degré de chaleur bien supérieur à celui
qui le fait couler de la liquidité empruntée; il ne
coule par lui - même qu'en rougissant, en prenant le
véritable état d'ignition. Voyez Ignition.
C'est par la considération de l'influence de l'eau
dans la production de tant de liquidités empruntées,
que les Chimistes l'ont regardée comme le liquide
par excellence. (b)
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