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LIENTERIE (Page 9:490)
LIENTERIE, s. f. (Medecine.)
Pour que cette maladie ait lieu, il faut absolument
qu'il ne se fasse aucune digestion dans l'estomac,
que les alimens éludent entierement l'action dissolvante
des sucs gastriques,
On a cru, & sans doute avec plus de raison, que
la digestion pouvoit être empêchée par quelqu'irritation
dans les intestins, par des ulceres, par exemple;
c'est un sentiment qu'Asclepiade a le premier
soutenu, que Galien a réfuté, que quelques modernes
ont renouvellé, & qui pourroit être appuyé,
1°. sur l'Aphorisme 72. liv VII. d'Hippocrate,
La polissure, loevitas, des intestins paroît par - là être une cause très - insuffisante & précaire de la lienterie, tout au plus pourroit - elle déterminer une passion coeliaque; il en est de même de l'obstruction des vaisseaux lactés, qui est aussi fort inutile dans cette maladie, & qui n'est propre qu'à occasionner le flux chyleux. La plûpart des auteurs admettent pour cause de la lienterie toute sorte d'abscès, de suppurations internes aux reins, aux poumons, les vapeurs noires, comme dit Menjot, qui s'échappent d'une vomique ouverte, parce qu'on a observé dans la même personne ces deux maladies en même tems. Ils raisonnent à - peu - près comme ceux qui attribuent à l'opération d'un remede la guérison d'une maladie aiguë, effet constant de la nature; post hoc, concluent-ils, ego propter hoc. L'excrétion des alimens inaltérés, le défaut en conséquence du nouveau chyle, pour
Il n'est pas possible de se méprendre dans la connoissance de cette maladie. Pour la différencier des autres flux de ventre avec lesquels elle a quelque rapport, il n'y a qu'à examiner la nature des excrémens; on la distinguera surement, 1°. de la passion coeliaque, qui n'en est qu'un degré, une demi lienterie, si l'on peut ainsi parler; parce que les alimens ont souffert l'action des menstrues gastriques, ils sont dans un état chimeux; 2°. du flux chyleux dans lequel on voit du chyle mêlé avec les excremens; 3°. du cours de ventre colliquatif, par l'odeur fétide, putride, cadavéreuse qui s'exhale des excrémens, par leur couleur, &c. &c. &c. Il est à propos pour la pratique de ne pas confondre les causes qui ont produit la lienterie: elles se réduisent à deux chefs principaux, comme nous avons dit; les unes consistent dans l'abolition absolue des fonctions digestives de l'estomac, les autres dans l'irritation du conduit intestinal. Lorsque la lienterie doit être attribuée à la premiere cause, la faim canine, ensuite le défaut d'appétit, quelquefois aussi la passion coeliaque précédent; il y a ptialisme, pesanteur d'estomac, &c. Lorsqu'elle dépend de l'irritation & sur - tout de l'éxulcération des intestins, elle succede à la dissenterie, n'est point précédée de passion coeliaque, de faim canine, &c. Le malade éprouve des ardeurs, des tranchées, un morsus formicans dans le bas - ventre; il y a soif, sécheresse dans le gosier, âpreté & rudesse de la langue, les excrétions sont sanieuses, &c.
La lienterie n'est jamais, comme quelques autres
cours de ventre, salutaire, critique; c'est une maladie
très - grave, sur - tout funeste aux vieillards: il est
rare qu'on en guérisse. Nicolas Pechlin raconte n'avoir
vu que trois personnes lientériques, dont aucune
ne put réchapper. C'est à tort que M. Lieutaud dit,
& sur - tout sans restriction, que la passion coeliaque
est plus dangereuse que la lienterie.
Le danger dans la lienterie est proportionné à la fréquence des selles, à la diminution des urines, à l'état des excrémens plus ou moins altérés. Le danger est pressant & la mort prochaine si le visage est rouge, marqueté de différentes couleurs, si le basventre est mol, sale & ridé, & sur - tout si dans ces circonstances le malade est âgé. Il y a au contraire espoir de guérison si les symptômes precédens manquent, si la quantité des urines commence à se proportionner à celle de la boisson, si le corps prend quelque nourriture, s'il n'y a point de fievre, si le malade rend des vents mêlés avec les excrémens. Hippocrate regarde comme un signe très - favorable s'il survient des rots acides qui n'avoient pas encore paru; il a vérifié ce prognostic heureux dans Demanéta: ce qui prouve un commencement de digestion; [p. 492]
Il est à présumer que la lienterie par irritation est moins dangereuse que l'autre qui marque un affaissement absolu, un anéantissement extrème de l'estomac.
Curation. Chaque espece de lienterie demande des remedes particuliers; il est des cas où il ne faut qu'animer, fortifier l'estomac & en reveiller le ton engourdi; les stomachiques astringens, absorbans, sont les remedes indiqués pour remplir ces vûes. Waldschimidius remarque que dans ce cas - là les stomachiques les plus simples, les plus faciles à préparer, sont les plus appropriés & réussissent le mieux. Les plus efficaces sont, suivant cet auteur, la muscade, le gingembre en conserve, le vin d'absynthe préparé avec le mastich & les sudorifiques, l'exercice, l'équitation, & comme dit un auteur moderne, le mariage, produisent dans ces cas - là de grands effets. Si les forces de l'estomac n'étoient qu'oppressées & non pas épuisées, l'émétique pourroit convenir; son administration pourroit avoir des suites fâcheuses, il est plus prudent de s'en abstenir. Hippocrate nous avertit d'éviter dans les lienteries les purgations par le haut, sur - tout pendant l'hiver, Aphor. 12. lib. II. Puisque les rots sont avantageux dans cette maladie, il seroit peut - être utile de les exciter par les remedes appropriés, comme l'ail, la rhue, que Martial appelle ructatricem. Ces remedes seroient plus goûtés en Espagne, où c'est une coutume & non pas une indécence de chasser les vents incommodes par les voies les plus obvies.
Si la lienterie dépend d'une irritation dans le conduit intestinal, il faut emporter la cause irritante, si on la connoît, sinon tâcher d'en émousser l'activité par les laitages affadissans les plus convenables, pris surtout en lavement; on ne doit pas négliger les stomachiques: l'émétique seroit encore ici plus pernicieux. Si l'on a quelques marques d'ulceres dans les intestins, il faut avoir recours aux différens baumes de copahu, de la Mecque, du Canada, &c. les lavemens térébenthinés peuvent être employés avec succès. (M)
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