ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

RECHERCHE Accueil Mises en garde Documentation ATILF ARTFL Courriel

Previous page

LIÉGE (Page 9:488)

LIÉGE, s. m. suber, (Hist. nat. Bot.) genre de plante qui differe du chêne & du chêne - verd, en ce que son écorce est épaisse, spongieuse & legere. Tournefort, inst. rei herb. Voyez Plante.

Liége (Page 9:488)

Liége, grand arbre toujours verd, qui croît en Espagne, en Italie, dans la Provence, le Languedoc, & sur - tout dans la Guienne, où il se trouve une grande quantité de ces arbres. Le liége prend une tige assez droite jusqu'à douze ou quinze piés; il donne peu de branches, & son tronc devient plus gros par proportion que celui d'aucun autre arbre d'Europe: son écorce, qui est très - épaisse, se détache de l'arbre au bout d'un certain nombre d'années: sa feuille est plus large ou plus étroite selon les especes de cet arbre: ses fleurs ou chatons mâles ressemblent à ceux de nos chênes ordinaires, & il en est de même du fruit qui est un gland, ensorte que le liege, dont la feuille a beaucoup de rapport avec celle du chêne verd, ne differe sensiblement de ce dernier que par la qualité de son écorce.

On peut élever des liéges dans différens terreins à force de soins & de culture; mais ils se plaisent singulierement dans les terres sablonneuses, dans des lieux incultes, & même dans des pays de landes. On a même observé que la culture & la bonne qualité du terrein étoient très - contraires à la perfection que doit avoir son écorce, relativement à l'usage qu'on en fait.

La seule façon de multiplier cet arbre, c'est d'en semer le gland aussi - tôt qu'il est en maturité; on pourra cependant différer jusqu'au printems, pourvu que l'on ait eu la précaution indispensable de le conserver dans de la terre seche ou dans du sable. Comme cet arbre réussit très - difficilement à la transplantation, il sera plus convenable de semer les glands dans des pots ou terrines, dont la terre soit assez ferme pour tenir aux racines, lorsqu'il sera question d'en tirer les jeunes plants. La trop grande humidité les fait pourrir, il faudra les arroser modérément. Les glands semés au commencement de Mars, leveront au bout de cinq ou six semaines, ils auront l'automne suivante huit à neuf pouces de hauteur la plûpart, & dans la seconde année ils s'éleveront à environ deux piés. Il sera tems alors de les transplanter en tournant le pot; & s'il y a plusieurs plants dans un même pot, comme cela arrive ordinairement, il faudra, en les séparant, conserver la terre autant qu'il sera possible autour des racines de chaque plant. Il n'aura pas fallu manquer d'avoir attention d'abriter les pots pendant les hivers contre les gelées. Si l'on a beaucoup de glands à semer, & qu'on se détermine à les mettre en pleine terre, il faudra de grandes précautions pour les garantir des fortes gelées; on pourra les lever au bout de deux ans, & même différer jusqu'à trois ou quatre; mais ce sera le plus long terme, encore faudra - t - il avoir eu l'attention de faire fouiller un an auparavant autour des racines pour couper les plus fortes, & même le pivot du jeune arbre, & l'obliger par ce moyen à faire du chevelu, afin qu'on puisse l'enlever avec la motte de terre. Le mois d'Avril est le tems le plus convenable pour la transplantation des jeunes liéges; & si on n'avoit pu les enlever en motte, il faudroit y suppléer en leur mettant au pié de la terre bien meuble & réduite en bouillie à force d'eau, ensuite les garnir de paille pour les garantir des chaleurs & des sécheresses, & leur conserver la fraîcheur des arrosemens, qu'il ne faut faire qu'une fois par semaine & avec ménagement; l'excès à cet égard en détruiroit plus que tous les autres accidens.

Cet arbre est délicat; on ne doit pas s'attendre qu'il puisse résister à tout âge en plein air aux hivers rigoureux, qu'on n'éprouve que trop souvent dans la partie septentrionale de ce royaume. Il ne faut donc exposer à toute l'intempérie des saisons que les plants qui seront forts, très - vifs, bien enracinés & bien repris, & les mettre à l'exposition la plus chaude, ou au moins parmi d'autres arbres toujours verds.

L'écorce est la partie de cet arbre la plus utile. Dès que les liéges ont douze ou quinze ans, on les écorce pour la premiere fois: on recommence au bout de sept ou huit ans, & ainsi de suite pendant plus de cent cinquante ans, sans qu'il paroisse que ce retranchement leur fasse tort. L'écorce des vieux arbres est la meilleure, & ce n'est guere qu'à la troisieme levée qu'elle commence à être d'assez bonne qualité. Rien de plus connu que les différens usages que l'on peut faire de cette écorce que l'on nomme liége; entre autres on en fait le noir d'Espagne qui s'emploie dans les arts. Les glands peuvent servir à nourrir & à engraisser le bétail & la volaille, & on assure qu'il est assez doux pour que les hommes puissent en manger, en le faisant griller comme les châtaignes. Son bois est aussi d'une grande utilité; il est très - propre aux ouvrages du charpentier; il est bon à brûler & à faire le meilleur charbon: on peut en tirer le même service que du bois du chêne verd. On distingue deux especes de liége; l'un à feuilles larges, ovales & un peu dentelées, & les feuilles de l'autre espece sont longues, étroites & sans aucunes dentelures; son gland est plus petit. Du reste, il n'y a nulle différence essentielle entre ces deux especes. Article de M. d'Aubenton.

Cet arbre de moyenne hauteur que Tournefort appelle avec la plûpart des botanistes, suber latifolium, perpetuò virens, est une espece de chêne toujours verd; mais son tronc est plus gros, il est d'un tissu fort compact, & jette peu de branches. Son écorce est beaucoup plus épaisse que celle du chêne verd, fort légere, spongieuse, raboteuse, de couleur grise, tirant sur le jaune; elle se fend d'elle - même, creve & se sépare de l'arbre, si l'on n'a pas soin de l'en détacher, parce qu'elle est poussée par une autre écorce rougeâtre qui se forme dessous. Ses feuilles ont aussi la figure de celles de l'yeuse, vertes [p. 489] par - dessus, blanchâtres par - dessous; mais elles sont plus larges, plus longues, plus molles & plus vertes en dessus; quelquefois elles sont un peu dentelées par les bords, & piquantes, d'autres fois unies & sans dentelures. Ses chatons & ses glands sont pareillement semblables à ceux du chêne verd; mais le gland du liége est plus long, plus obtus, d'un goût plus désagréable que celui de l'yeuse. Il en part ordinairement deux d'un même pédicule, qui est ferme & court. Le calice du gland est aussi plus grand & plus velu que celui de l'yeuse.

Cet arbre croît dans les pays chauds, en Espagne, en Portugal, en Italie, en Provence, en Gascogne, vers les Pyrénées & en Roussillon. Il donne une écorce plus épaisse, & meilleure à proportion qu'il vieillit, & c'est de cette écorce inutile en Médecine, mais qu'on emploie à divers autres usages, que cet arbre tire tout son lustre. Son fruit sert à nourrir les cochons, & les engraisse mieux, à ce qu'on dit, que les glands des autres chênes. (D. J.)

Liege (Page 9:489)

Liege, (Mat. méd.) on trouve encore parmi le peuple des femmes qui croient à la vertu du liége porté en amulette pour faire perdre le lait sans danger. Les Médecins & les gens raisonnables n'ont plus de foi pour les propriétés de cette classe, quoiqu'ils attachent encore un collier de bouchons de liége enfilés au cou de leurs chiennes & de leurs chates qui ont perdu leurs petits. (b)

Liege (Page 9:489)

Liege, (Arts & Comm.) écorce extérieure de l'arbre qui porte le même nom.

Pour lever cette écorce, on fend le tronc de l'arbre depuis le haut jusqu'en bas, en faisant aux deux extrémités une incision coronale. On choisit ensuite un tems sec & assuré pour lever cette grosse écorce; car l'écorce inférieure, qui est encore tendre, se gâteroit & feroit périr l'arbre, s'il survenoit des pluies abondantes après la récolte du liége. Il est vrai que ce mal n'arrive guere dans les pays chauds, où le tems est en général fort constant. Quand on a dépouillé l'arbre, qui pour cela ne meurt pas, on met l'écorce en pile dans quelque mare, dans quelque étang, où on la charge de pierres pesantes pour l'applatir de toutes parts & la réduire en tables. On la retire ensuite de la mare, on la nettoie, on la fait sécher, & quand elle est suffisamment seche on la net en balles pour la commodité du transport.

On emploic le liége pour les pantoufles, pour des patins, mais sur - tout pour boucher des cruches & des bouteilles; les pêcheurs s'en servent aussi à faire ce qu'ils appellent des patenostres pour suspendre leurs filets sur l'eau. Enfin, le liége sert à divers autres usages. Les Espagnols, par exemple, le calcinent dans des pots couverts pour le réduire en une cendre noire, extrèmement légere, que nous appellons noir d'Espagne, qui est fort employé par plusieurs ouvriers. Aujourd'hui on fait ce noir par - tout, & mieux que sur les lieux.

On distingue dans le commerce, dit M. Savary, deux sortes de liége, le liege blanc ou de France, & le liége noir ou d'Espagne. Le liége blanc doit être choisi en belles tables unies, légeres, sans noeuds ni crevasses, d'une moyenne épaisseur, d'un gris jaunâtre dessus & dedans, & qui se coupent nettement. Le liége noir doit avoir les mêmes qualités, à la réserve de l'épaisseur & de la couleur extérieure; car le plus épais & le plus noir au dehors, est le plus estimé. (D. J.)

Liege fossile (Page 9:489)

Liege fossile, (Hist. nat.) suber montanum: on nomme ainsi une espece de pierre extrèmement légere qui paroît composée de fibres ou de filets flexibles, & d'un tissu spongieux comme le liége. Wallerius le regarde comme une espece d'amiante, aussi - bien que la chair fossile, caro fossilis, qui se trouve en quelques endroits du Languedoc. Cette pierre entre en fusion dans le feu, & s'y change en un verre noir. Voyez Wallerius, minéralogie.

Liege (Page 9:489)

Liege, (Géog.) ville d'Allemagne dans le cercle de Westphalie, capitale de l'évêché du même nom, dont l'évêque est souverain, & suffragant de Cologne.

On nomme aujourd'hui cette ville en latin Leodium, Leodicum & Leodica; selon Boxhornius on la nommoit anciennement Legia, à cause d'une légion romaine que les habitans du pays défirent, de même que cinq cohortes commandées par Cotta & par Sabinus, comme le remarque César, liv. V. On l'appelle en allemand Luttich, & en Hollandois Luyk.

La plûpart des meilleurs écrivains prétendent que S. Hubert, originaire d'Aquitaine, qui florissoit en 700, fut le premier évêque de cette ville, qu'il la fonda, lui donna le nom de Legia, & qu'avant son tems ce n'étoit qu'un village.

Quoique cette ville soit soumise à son évêque pour le temporel & le spirituel, elle jouit de si grands privileges qu'on peut la regarder comme une république libre, gouvernée par ses bourgmestres, par ses sénateurs & par ses autres magistrats municipaux; car elle a trente - deux colléges d'artisans, qui partagent une partie de l'autorité dans le gouvernement, & portent l'aisance dans la ville; mais le nombre de ses églises, de ses abbayes, & de ses monasteres, lui font un tort considérable. Pétrarque en sortant de cette ville, écrivit à son amante: Vidi Leodium insignem clero locum; il diroit encore la même chose.

Son évêché renfermoit autrefois tout le comté de Namur, une grande partie du duché de Gueldres & de celui de Brabant. Il n'a plus cette étendue, cependant il comprend encore sous sept archidiaconés vingt & un doyennés ruraux, & en tout environ 1500 paroisses.

Le pays de Liege est divisé en dix drossarderies ou grands bailliages qui sont à la collation du prince, quelques villes, Liege, Tongres, Huy, Maseick, Dinant, Hassel, &c. plusieurs gros bourgs, baronnies & seigneuries, sur lesquelles l'évêque a la jurisdiction de prince ou d'évêque. Le terroir y est fertile en grains, fruits & venaison. Il se trouve dans le pays des mines de fer & quelques - unes de plomb, avec des carrieres d'une espece de charbon de terre, qu'on appelle de la houille.

La ville de Liege est située dans une vallée agréable, abondante, environnée de montagnes que des vallons séparent, avec des prairies bien arrosées, sur la Meuse, à 5 lieues N. E. de Huy, 4 S. de Mastricht, 14 N. E. de Namur, 25 S. O. de Cologne, 26 N. de Luxembourg, 30 N. O. de Mons, 77 N. E. de Paris. Long. selon Cassini, 26d. 6'. 30". latit. 50. 40.

« C'est ici qu'est décédé à l'âge de 55 ans, le 7 Août 1106, Henri IV, empereur d'Allemagne, pauvre, errant, & sans secours, plus misérablement encore que Grégoire VII, & plus obscurément, après avoir si long - tems tenu les yeux de l'Europe ouverts sur ses victoires, sur ses grandeurs, sur ses infortunes, sur ses vices & sur ses vertus. Il s'écrioit en mourant, au sujet de son fils Henri V: Dieu des vengeances, vous vengerez ce parricide! De tous tems les hommes ont imaginé que Dieu exauçoit les malédictions des mourans, & sur - tout des peres; erreur utile & respectable, si elle arrêtoit le crime ». Voltaire, Hist. universelle, tom. I. pag. 280. (D. J.)

Liege (Page 9:489)

Liege, c'est un morceau de bois en forme de petite aîle, qui est aux deux côtés du pommeau de la selle, & qui s'appelle batte, lorsqu'il est couvert de cuir & embelli de clous. On dit: ce liege est décollé. Ce mot vient de ce qu'autrefois la batte étoit de liége; mais on la fait aujourd'hui de bois. V. Selle. [p. 490]

Next page


The Project for American and French Research on the Treasury of the French Language (ARTFL) is a cooperative enterprise of Analyse et Traitement Informatique de la Langue Française (ATILF) of the Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), the Division of the Humanities, the Division of the Social Sciences, and Electronic Text Services (ETS) of the University of Chicago.

PhiloLogic Software, Copyright © 2001 The University of Chicago.