ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"424"> lettres étoient données par des lieutenans du roi, elles devoient être confirmées par lui & passées à la chambre des comptes, ainsi qu'il est dit dans des lettres du roi Jean du 2 Octobre 1354. Charles V. étant régent du royaume fit une ordonnance le 19 Mars 1359, portant défenses aux présidens du parlement commis pour rendre la justice, le parlement non séant, d'obéir à ces lettres, lorsqu'elles seroient contre le bien de la justice, quand elles auroient été accordées par le régent même ou par le connétable, les maréchaux de France, le maître des arbalétriers, ou par des capitaines; cette défense ne concernoit pas seulement les lettres de don, mais aussi celles de rémission & pardon. (A)

Lettres d'honoraire (Page 9:424)

Lettres d'honoraire, sont des lettres de grande chancellerie, par lesquelles le roi accorde les honneurs & privileges de vétéran à quelque magistrat.

Celles que l'on accorde à d'autres officiers inférieurs, s'appellent simplement lettres de vétérance.

On ne les accorde ordinairement qu'au bout de vingt années de service, à moins que le roi par des considérations particulieres ne dispense l'officier d'une partie de ce tems.

Elles sont nécessaires pour jouir des honneurs & privileges, & doivent être registrées.

On n'en donne point au chef de compagnies, parce qu'ils ne peuvent après leur démission, conserver la même place.

Ceux qui ont obtenu des lettres d'honoraire n'ont point de part aux émolumens; cependant en 1513, la chambre des comptes en enregistrant celles d'un auditeur, ordonna qu'il jouiroit de ses gages ordinaires pendant deux ans, en se rendant sujet au service comme les autres & à la résidence, & sans tirer à conséquence, & on lui fit prêter un nouveau serment contre lequel les auditeurs protesterent.

On trouve un exemple de lettres d'honoraire, accordées à une personne décedée; sçavoir, celles qui furent accordées le 18 Septembre 1671 pour feu messire Charles de la Vieuville, surintendant des finances. Voyez Tessereau, histoire de la chancellerie, & les mémoires de la chambre des comptes. (A)

Lettres d'hypoteque (Page 9:424)

Lettres d'hypoteque; c'est un écrit, contrat ou jugement, portant reconnoissance de l'hypoteque ou droit réel qu'un créancier ou bailleur de fond a sur un bien possedé par celui qui donne cette reconnoissance. On demande à chaque nouveau détenteur de nouvelles lettres d'hypoteque. (A)

Lettres d'innocence (Page 9:424)

Lettres d'innocence ou de pardon. On les appelle plus communément de ce dernier nom. Voy. ci - après lettres de pardon. (A)

Lettres d'intercession (Page 9:424)

Lettres d'intercession. V. ci - devant Lettres de déprecation.

Lettres de jussion (Page 9:424)

Lettres de jussion, sont des lettres du grand sceau, par lesquelles le roi ordonne à ses cours de procéder à l'enregistrement de quelque ordonnance, édit ou déclaration que les cours n'ont pas crû devoir enregistrer sans faire auparavant de très humbles remontrances au roi.

Lorsque le roi ne juge pas à propos d'y déferer, il donne des lettres de jussion sur lesquelles les cours font encore quelquefois de très - humbles représentations; & si le roi n'y defere pas, il donne de secondes lettres de jussion sur lesquelles les cours ordonnent encore quelquefois d'itératives représentations.

Il y a eu dans certaines occasions jusqu'à quatre lettres de jussion données successivement pour le même enregistrement, comme il arriva par rapport à l'édit du mois de Juin 1635, portant création de plusieurs officiers en la cour des monnoies.

Lorsque les cours enregistrent en conséquence de lettres de jussion, elles ajoutent ordinairement dans leur arrêt d'enregistrement du très - exprès commandement de S. M.

Il est parlé de jussion dans deux novelles de Justinien: l'une est la novelle 125 qui porte pour titre, ut judices non expectent sacras jussiones sed quas videntur eis decernant; l'autre est la 113 qui porte ne ex divinis jussionibus à principe impetratis sed antiquis legibus lites dirimantur; mais le terme de jussion n'est pas pris dans ces endroits dans le même sens que nous entendons les lettres de jussion; ces novelles ne veulent dire autre chose, sinon que les juges ne doivent point attendre des ordres particuliers du prince pour juger; mais qu'ils doivent juger selon les anciennes loix, & ce qui leur paroîtra juste. Voy. Parlement & Remontrances. (A)

Lettres de justice (Page 9:424)

Lettres de justice, sont des lettres de chancellerie qui sont fondées sur le droit commun, ou qui portent mandement de rendre la justice, & que le roi accorde moins par faveur que pour subvenir au besoin de ses sujets, suivant la justice & l'équité. Tels sont les reliefs d'appel simple ou comme d'abus, les anticipations, désertions, compulsoires, debitis, commission pour assigner, les paréatis sur sentence ou arrêt, les rescisions, les requêtes civiles & autres semblables, &c. (A)

Ces sortes de lettres sont ainsi appellées par opposition à celles qu'on nomme lettres de grace. Voy. ci - devant Lettres de grace. (A)

Lettres de légitimation (Page 9:424)

Lettres de légitimation, sont des lettres du grand sceau, par lesquelles le roi légitime un bâtard, & veut que dans tous les actes il soit réputé légitime, & jouisse de tous les privileges accordés à ses autres sujets nés en légitime mariage. Voy. ci - devant légitimation. (A)

Lettres de licence (Page 9:424)

Lettres de licence, sont des lettres expédiées par le greffier d'une des facultés d'une université, qui attestent qu'un tel, bachelier de cette faculté, après avoir soutenu les actes nécessaires, a été décoré du titre de licencié. Voyez Bachelier, Docteur & Licencié. (A)

Lettres lombardes (Page 9:424)

Lettres lombardes: on donnoit ce nom anciennement aux lettres de chancellerie qui s'expédioient en faveur des Lombards, Italiens & autres étrangers qui vouloient trafiquer ou tenir banque en France; on comprenoit même sous ce terme de lettres lombardes, toutes celles qui s'expédioient pour tous changeurs, banquiers, revendeurs & usuriers, que l'on appelloit tous Lombards, de quelque nation qu'ils fussent; on les taxoit au double des autres en haine des usures que commettoient les Lombards. (A)

Lettre lue (Page 9:424)

Lettre lue, en Normandie signifie un contrat de vente ou de fieffe à rente rachetable qui a été lecturé, c'est - à - dire publié en la forme prescrite par l'article 455 de la coutume. Voyez Clameur a droit de lettre lue , & Lecture. (A)

Lettres de majorité (Page 9:424)

Lettres de majorité, on appelle ainsi dans quelques provinces, & notamment en Bourbonnois, les lettres d'émancipation, ce qui vient de ce que l'émancipation donne au mineur la même capacité que la loi donne à celui qui est majeur de majorité coutumiere. (A)

Lettres de main souveraine (Page 9:424)

Lettres de main souveraine, sont des lettres qui s'obtiennent en la petite chancellerie par un vassal, lorsqu'il y a combat de fief entre deux seigneurs pour la mouvance, à l'effet de se faire recevoir en foi par main souveraine, & d'avoir main - levée de la saisie féodale. Voyez Foi & Hommage & Réception en foi par main souveraine (A)

Lettre de maitre ès Arts (Page 9:424)

Lettre de maitre ès Arts, sont des lettres accordées à quelqu'un par une université pour pouvoir enseigner la Grammaire, la Rhétorique, la Phi<pb-> [p. 425] losophie & autres Arts libéraux. Voyez Maitre ès Arts. (A)

Lettres de maitrise (Page 9:425)

Lettres de maitrise, sont des lettres de privilege que le roi accorde à quelques marchands ou artisans pour les autoriser à exercer un certain commerce ou métier, sans qu'ils aient fait leur apprentissage & chef - d'oeuvre, ni été reçus maîtres par les autres maîtres du même commerce ou métier.

Les communautés donnent aussi des lettres de maîtrise à ceux qui ont passé par les épreuves nécessaires. Voyez Maitre & Maitrise. (A)

Lettres de maitrise (Page 9:425)

Lettres de maitrise, (Police.) on nomme ainsi, dans ce royaume, des actes en forme que les maîtres & gardes, & maîtres jurés délivrent à ceux qu'ils ont admis à la maîtrise, après examen, chef d'oeuvre ou expérience qu'ils ont fait; c'est en vertu de ces lettres qu'ils ont droit de tenir magasin, ouvrir boutique, exercer le négoce ou métier, soit du corps, soit de la communauté dans laquelle ils ont été reçus; mais on ne leur expédie ces lettres qu'après qu'ils ont prêté serment & payé les droits de confrairie.

Exposons ici les réflexions d'un auteur moderne, à qui l'Encyclopédie doit beaucoup, & qui a joint à de grandes connoissances du commerce & des finances, les vues désintéressées d'un bon citoyen.

Il est parlé dans les anciens capitulaires de chef d'oeuvre d'ouvriers, mais nulle part de lettres de maîtrise; la raison ne favorise en aucune maniere l'idée d'obliger les artisans, de prendre de telles lettres, & de payer tant au roi qu'aux communautés, un droit de réception. Le monarque n'est pas fait pour accepter en tribut le fruit du labeur d'un malheureux artisan, ni pour vouloir astreindre ses sujets à un seul genre d'industrie, lorsqu'ils sont en état d'en professer plusieurs. L'origine des communautés est dûe vraissemblablement au soutien que les particuliers industrieux chercherent contre la violence des autres. Les rois prirent ces communautés sous leur protection, & leur accorderent des privileges. Dans les villes où l'on eut besoin d'établir certains métiers, l'entrée en fut accordée libéralement, en faisant épreuve, & en payant seulement une légere rétribution pour les frais communs.

Henri III. voulant combattre le parti de la ligue, & étant trompé par ce même parti, ordonna le premier en 1581, que tous négocians, marchands, artisans, gens de métier, résidens dans les bourgs & villes du royaume, seroient établis en corps, maîtrise & jurande, sans qu'aucun pût s'en dispenser. Les motifs d'ordre & de regle, ne furent point oubliés dans cet édit; mais un second qui suivit en 1583, dévoilà le mystere. Le roi déclara que la permission de travailler étoit un droit royal & domanial; en conséquence, il prescrivit les sommes qui seroient payées par les aspirans, tant au domaine qu'aux jurés & communautés.

Pour dédommager les artisans de cette nouvelle taxe, on leur accorda la permission de limiter leur nombre, c'est - à - dire d'exercer des monopoles. Enfin, l'on vendit des lettres de maîtrise, sans que les titulaires fussent tenus à faire épreuve ni apprentissage; il falloit de l'argent pour les mignons.

Cependant le peuple en corps ne cessa de reclamer la liberté de l'industrie. Nous vous supplions, Sire, dit le tiers - état dans ses placets, « que toutes maîtrises de métiers soient à jamais éteintes; que les exercices desdits métiers soient laissés libres à vos pauvres sujets, sous visite de leurs ouvrages & marchandises par experts & prud'hommes, qui à ce seront commis par les juges de la police: nous vous supplions, Sire, que tous édits d'Arts & Métiers, accordés en faveur d'entrées, mariages, naissances ou d'autres causes, soient révoqués; que les marchands & artisans ne payent rien pour leur réception, levement de boutique, salaire, droits de confrairie, & ne fassent banquets ou autres frais quelconques à ce sujet, dont la dépense ne tend qu'à la ruine de l'état, &c».

Malgré ces humbles & justes supplications, il continua toujours d'être défendu de travailler à ceux qui n'avoient point d'argent pour en acheter la permission, ou que les communautés ne vouloient pas recevoir, pour s'épargner de nouveaux concurrens.

M. le duc de Sully modéra bien certains abus éclatans des lettres de maîtrise; mais il confirma l'invention, n'appercevant que de l'ordre dans un établissement dont les gênes & les contraintes, si nuisibles au bien politique, sautent aux yeux.

Sous Louis XIV. on continua de créer de nouvelles places de maîtres dans chaque communauté, & ces créations devinrent si communes, qu'il en fut accordé quelques - unes en pur don, indépendamment de celles qu'on vendit par brigue.

Tout cela cependant ne présente que d'onéreuses taxes sur l'industrie & sur le commerce. De - là sont venues les permissions accordées aux communautés d'emprunter, de lever sur les récipiendaires & les marchandises, les sommes nécessaires pour rembourser ou payer les intérêts.

Les seuls inconvéniens qui sont émanés de ces permissions d'emprunter, méritent la réforme du gouvernement. Il est telle communauté à Paris, qui doit quatre à cinq cent milles livres, dont la rente est une charge sur le public, & une occasion de rapines; car chaque communauté endettée obtient la permission de lever un droit, dont le produit excédant la rente, tourne au profit des gardes. Ces sortes d'abus regnent également dans les provinces, excepté que les emprunts & les droits n'y sont pas si considérables, mais la proportion est la même; ne doutons point que la multiplicité des débiteurs ne soit une des causes qui tiennent l'argent cher en France au milieu de la paix.

Ce qui doit paroître encore plus extraordinaire, c'est qu'une partie de ces sommes ait été & soit journellement consommée en procès & en frais de justice. Les communautés de Paris, grace aux lettres de maîtrise, dépensent annuellement près d'un million de cette maniere; c'est un fait avéré par leur registre. A ne compter dans le royaume que vingt mille corps de jurande ou de communautés d'artisans, & dans chacun une dette de cinq mille livres, l'un portant l'autre; si l'on faisoit ce dépouillement, on trouveroit beaucoup au - delà; ce sont cent millions de dettes, dont l'intérêt à cinq pour cent se leve sur les marchandises consommées, tant au - dedans qu'au dehors; c'est donc une imposition réelle dont l'état ne profite point.

Si l'on daigne approfondir ce sujet, comme on le fera sans doute un jour, on trouvera que la plûpart des autres statuts de M. Colbert, concernant les lettres de maîtrise & les corps de métiers, favorisent les monopoles au lieu de les extirper, détruisent la concurrence, & fomentent la discorde & les procès entre les classes du peuple, dont il est le plus important de réunir les affections du côté du travail, & de ménager le tems & la bourse.

Enfin, l'on y trouvera des bisarreries, dont les raisons sont inconcevables. Pourquoi, par exemple, un teinturier en fil n'a - t - il pas la permission de teindre ses étoffes? Pourquoi est - il défendu aux teinturiers d'avoir plus de deux apprentifs? Pourquoi leurs veuves sont - elles dépouilléés de ce droit? Pourquoi les chapeliers sont - ils privés en même tems de faire le commerce de la bonneterie? La liste des pourquoi seroit grande, si je voulois la continuer; on ne peut donner à ces sortes de questions d'autre réponse, si<pb->

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