ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"338"> tantes, ni les témoins ne mettoient aucune signature manuelle au - bas de l'acte; ils y apposoient seulement l'empreinte de leur cachet; chacun avoit alors son sceau ou cachet particulier appellé signum, sigillum, ou annulus signatorius. Mais l'apposition de ces sceaux particuliers étoit peu utile pour prouver l'authentieité de l'acte; car outre que c'étoient des sceaux particuliers qui pouvoient etre peu connus même dans le lieu où se passoit l'acte, on pouvoit sceller un acte avec le cachet d'autrui, & tous les témoins pouvoient sceller avec le même cachet, suivant ce que dit Justinien aux Institutes, lib. II. tit. x. . 5. ensorte que les différens cachets apposés sur un acte, ne dcnotoient point d'une maniere certaine quelles étoient les personnes qui avoient eu part à cet acte, & sur - tout n'y ayant alors aucun sceau public chez les Romains, ainsi que l'observe M. Charles Loyseau en son traité des offices, ch. iv. n. 10.

Les légalisations auroient donc été alors plus nécessaires que jamais pour constater l'authenticité des actes, puisqu'il n'y avoit aucune formalité qui cn fît connoìtre l'auteur d'une maniere certaine; mais encore une fois, on ne trouve rien dans le droit romain d'où l'on puisse induire que l'on pratiquât alors aucune espece de légalisation.

Il n'est point parlé non plus des légalisations dans le droit canon, quoique la plûpart des lois dont il est composé aient été faites dans un tems où les légalisations étoient déja en usage. En effet, le decret de Gratien parut en 1151; les décretales de Grégoire IX. l'an 1230; le sexte en 1298; les clémentines en 1317, & les extravagantes de Jean XXII. en 1334: or je trouve que les légalisations étoient dès - lors en usage.

Comme il n'y a aucune loi qui ait établi la formalité des légalisations, on ne sait pas précisément en quel tems on a commencé à légaliser. Mais il y a au trésor des chartes, regisire 80 pour les an. 1360, 1351, une copie des staluis des tailleurs de Montpellier, délivrée par deux notaires royaux de la même ville, au - bas de laquelle sont deux légalisations datées de l'année 1323; la premiere donnée par le juge royal de Montpellier; la seconde par l'osllcial de Maguelonne.

Il paroit même que l'asage des légalisatios étoit de a nequent, car on en trouve plusieurs de toute espece données dans les annees 1330 & suivantes, qui sont aussi au trésor des chartes; ce qui sait présumer que celles données en 1323 n'étoient pas les premieres, & que l'usage en étoit déja ancien.

Quelques docteurs ultramontains ont parlé des légallsations à l'occasion de ce qui est dit dans les lois romaines, des tabellions & de la soi dûe aux actes publies; tels sont Ange lialde sur la novelle 44 de tabillionibus; Paul de Castro en son conseil 394; Felin sur le chap. coram. versic. dubium, de officio delegati. Mathoeus de afflictis in decision. napolit. 251; & Alberic sur le tirre du code de side insirum. Ces auteurs proposent l'espcce d'un testament reçu dans un pays éloigné par un notaile dont on revoque en doute la qualite dans le lieu où le testament est présenté; ils demandent si la légalisation, qu'ils nomment litteram teslimonialem, donnce par l'ossicial ou par le juge qui atteste que celui qui a reçu l'acte est réellement notaire, est suffisante pour prouver sa qualité, & ils décident pour l'affirmative.

Alberic de Rosate, jurisconsuile de Bergame dans le Mllanois, qui vivoit au commencement du xje. siecle, dit au même endroit qu'il a toujours vû pratiquer en justice qu'on n'ajoutoit pas foi par provision à un acte pasle dans un endroit éloigné; mais que l'on s'adresse au juge du lieu où le tabellion qui a reou l'acte exerce ses fonctions, pour qu'il atteste si celui qui a requ l'acte est réelle ment tabllion, ou bien que s'on prouve sa qualisé de tabellion en représentant d'autles actés enanes de h

Pour prévenir l'embarras d'une legalisation Balde, au même endroit, conseille à cenx qui passent des actes qu'ils doivent envover dans des endros éloignls, de les faire écrire par un notaire, & de les faire signer par trois notaires, gens de piobité, asin qu'en quelqu'endroit que l'on presentc ces actes, on ne puisse point révoquer en doute qu'ils ont été reçus par un notaire.

Felin, sur le chap. posl cessionem de probutionibus & Coepola Vcrone canteia 34, proposent le même expedient, lequel, suivant Felin, est conforme à la 152e des nouvelles décisions de la Rote; mais Coepola indique aussi la voie de prendre une attestation du juge du heu où l'acte a été passe que celui qui l'a reçu étoit réellement notaire, & M. Boyer, dans sa décision 154, dit que cette voie est la plus sûre.

Voilà tout ce que ces docteurs ont dit des légalisations dont ils n'ont parlé qu'en passant. & sort légerement: nos auteurs srançois n'en ont parié en aucune maniere.

Il ne faut pas confondre les légalisations avec les lettres de vidimus qui étoient anelennement usitées en France; ces sortes de lettres n'étoient autre chose que des expéditions ausnentiques tirées sur l'original d'un acte, ou des copies collationnées sur uno expédition: on les appelloit lettres de vidimus, parce qu'elles commençoient ordinairement par ces termés, vidimus quasdam litteras integras & non cancellatas, quarum tenor sequitur, ensuite on transerivolt l'acte: tel étoit alors le style des espédltions & copies collationnées, & c'est de là qu'en que ques provinces on dit encore copie vidimee pour copie colla tionnée; on sent assez la dissrence qu'il y a entre ces lettres de vidimus, & les lépalisations puisqne ces sortes de lettres n'etoient autre chose qu'une collation des expéditions ou copies avec l'original, laquelle collation se pouvoit faire par le même officier qui avoit reçu l'acte, & qui l'expédioit, ce qui par conséquent n'ajoutoit rien à l'authenticité de l'acte original ni de la copie; au lieu que les legalisations ont pour objet de faire mieux connoitre l'authenticite de l'expédition ou copie qui en a été tirée, en la munissant du témoignage & dn sceaa de quelque ossicier qui par son caractere soit plas connu que celui qui a reçu ou expédié l'acte.

Lorsqu'il s'agit de constater lo vérité des saits contenus dans les actes, on distingue ces actes qui sont d'écriture privée, de ceux qui sont émané, de quelque ossicier public.

Pour ce qui est des actes d'écriture privée, comme l'auteur n'en est pas certain, on n'y a point d'égard, jusqu'à ce que l'écriture en soit reconnue ou tenue pour telle avec celui contre lequel on veut s'en servir.

Quoique ces sortes d'actes ne forment qu'une preuve peu certaine des faits qui y sont mentionnés, néanmoins on ne les légalise point, parce que l'esset de la légalisation n'etant pas de donner l'authentieité à un acte, mais seulement de faite conneitre qu'll est authentique, & pour ainsi dire d'etendre son authenticité d'un lieu dans un autre; elle seroit inutile aux écritures privées, lesquelles dans leur principe ne sont point authentiques.

A l'égard des actes émanés des ossiciers publics, on les a appellés authentiques, du mot gree a os, qui veut dire, dont l auteur est connu, parce qu'en effet la signature de l'ossicier public est plus connue que celle des particuliers, & que son témoignage constate queile est la personne qui a passé l'acte: c'est pour cela que l'on ujoute soi par pro<pb-> [p. 339] vision à ces sortes d'actes, jusqu'à ce qu'ils soient inserits de saux, & c'est en quoi consiste l'effet de l'authenticité.

Mais les actes émanés des ossiciers publics, tels que les notaires, greffiers, procureurs, huissiers, ne sont par eux - mêmes authentiques que dans le lieu où les officiers ont leur résidence, parce que l'authenticité des actes n'est sondée que sur ce que l'auteur en est connu, & que le caractere public de ces sortes d'officiers n'est censé connu que dans le lieu où ils ont leur résidence.

C'est pour remédier à cet inconvénient, que l'on a introduit les légalisations, & afin d'étendre l'authenticité d'un acte d'un lieu dans un autre; car les légalisations sont une preuve de l'authenticité des actes, & tiennent lieu d'une enquête sommaire que l'on feroit pour constater la qualité & la signature de l'officier public qui a reçu l'acte dans les lieux où son authenticité ne seroit pas connue sans cette formalité.

Par exemple un acte reçu par un notaire au châtelet de Paris, n'est par lui - même authentique que dans le ressort du châtelet, parce que la signature de ce notaire n'est pas censée connue hors des lieux où il exerce ses fonctions; mais si le juge royal auquel ce notaire est soumis, légalise l'acte, en attestant que celui qui l'a reçu est réellement notaite au châtelet de Paris, que la signature apposée à l'acte est la sienne, & que l'on ajoute foi aux actes émanés de lui, alors la qualité de l'acte étant constatée par le certificat du juge royal, l'acte sera authentique par tout le royaume, & même dans les pays étrangers, parce que le sceau des juges royaux est censé connu par tout pays.

La légalisation ne donne à l'acte aucun droit d'hypotheque ni d'exécution parée, s'il ne l'a par lui - même; elle ne sert, comme on l'a dit, qu'à faire connoître son authenticité.

L'acte de légalisation est lui - même authentique en ce qu'il contient, dans le paysoù le caractere de l'officier qui l'a donné, est connu; & cet acte fait foi par provision, jusqu'à ce qu'il soit inscrit de faux.

Ce n'est pas seulement en France que les légalisations sont en usage; elles le sont pareillement chez toutes les nations policées; mais elles 'y pratiquent diversement.

Dans toute l'Italie, l'Allemagne, la Hollande, l'Angleterre, & l'Espagne, un acte reçu par un notaire devient authentique à l'égard de tous les pays de leur domination, par le certificat & la signature de trois autres notaires qui attestent la signature & la qualité du premier: j'ai vû quelques légalisations de cette espece, à la suite desquelles étoit une seconde légalisation donnée par les officiers municipaux des villes, & munies de leur sceau, lesquels attestoient la signature & la qualité des trois notaires qui avoient donné la premiere legalisation; mais cette seconde légalisation n'avoit été ajoutée que pour faire valoir l'acte en France, où l'on n'étoit pas obligé de connoîtrc la signature ni la qualité des trois notaires qui avoient donné la premiere légalisation.

J'ai vu pareillement plusieurs actes passés en Pologne; & que l'on faisoit valoir en France comme authentiques, lesquels n'étoient munis que d'nne seule légalisation, quelques - uns légalisés par les officiers municipaux des villes, d'autres par les officiers de la chancelierie du prince: je n'en ai vu aucun qui fût légalisé par des notaires, & je ne crois pas que cela y soit en usage.

En France on pratique diverses légalisations, & il y a plusieurs sortes d'officiers publics qui ont le pouvoir de légaliser, selon la qualité des actes; mais les notaires n'en légalisent aucun.

Il seroit trop long d'entrer dans le détail de tous les actes qui peuvent être légalisés, & des cas dans lesquels la légalisation est nécessaire; il suffit d'observer en général qu'à la rigueur tous actes émanés d'un officier public, tel qu'un notaire, commissaire, huissier, &c. quand on les produit hors du lieu où l'officier qui les a reçûs fait ses fonctions, ne sont point authentiques s'ils ne sont légalisés.

On exige sur - tout que les procurations soient légalisées, torsque l'on s'en sert hors du lieu de l'exercice des notaires qui les ont reçûes: cette formalité est expressément ordonnée par tous les édits & déclarations rendus au sujet des rentes viageres, qui portent que les procurations passées en province par les rentiers, seront légalisées par le juge royal du lieu de leur résidence; & ce sont - là les seules lois qui parlent des légalisations: encore n'est - ce qu'en passant, & en les supposant déja usitées.

Les officiers qui ont caractere pour légaliser, ne doivent faire aucune légalisation, qu'ils ne connoissent la qualité de l'officier qui a reçu l'acte, sa signature, & le sceau qu'il avoit coutume d'apposer aux actes qui se passoient par - devant lui: s'ils n'en ont pas une connoissance personnelle, ils peuvent légaliser l'acte suivant ce qu'ils tiennent par tradition, ou à la relation d'autrui, pourvù qu'ils s'informent des faits qu'il s'agit d'attester, à des témoins dignes de foi.

De - là suit naturellement, que l'on peut légaliser non - seulement les actes expédiés par des officiers qui sont encore vivans, mais aussi ceux qui ont été expédiés anciennement par des officiers qui sont morts au tems de la légalisation, pourvû que la qualité, la signature, & lè sceau de ces officiers soient connus par tradition ou autrement.

Pour connoître plus particulierement par quels officiers chaque espece d'actes doit être légalisée, il faut d'abord distinguer les actes émanés des officiers publics ecclésiastiques, d'avec ceux émanés des officiers publics séculiers.

Les actes émanés d'officiers publics ecclésiastiques, tels que les curés, vicaires, desservans, les vice - gérens, promoteurs, greffiers, notaires, & procureurs apostoliques, appariteurs, & autres officiers de cette qualitc, peuvent être légalisés par les supérieurs ecclésiastiques de ces officiers, soit l'évêque ou archevêque, ou l'un de ses grands vicaires, où son official; & une telle légalisation est valable non - seulement à l'égard des autres supérieurs ou officiers ecclésiastiques, mais aussi à l'égard de tous officiers séculiers royaux ou autres, parce que l'évêque & ses préposés sont compétens pour attester à toutes sortes de personnes l'authenticité des actes émanés des officiers eccléfiastiques, que personne ne peut mieux connoître que l'évêque, son officicial, ou ses grands vicaires.

Il faut seulement observer que si c'est l'official qui a fait la légalisation, & que l'on veuille la faire sceller pour plus grande authenticité, comme cela se pratique ordinairement, il faut la faire sceller ou par l'évêque ou par celui qui est préposé par lui pour apposer son seeau, car ordinairement les officiaux n'ont point de sceau même pour sceller leurs jugemens.

On peut aussi faire légaliser des actes émanés des officiers ecclésiastiques, par le juge royal du lieu de leur résidence, & sui - tout lorsqu'on veut produire ces actes en cour laie, ou devant des officiers séculiers, royaux ou autres, parce que le juge royal est présumé connoître tous les officiers qui exercent un ministere public dans son ressort; & une telle légalisation est valable même à l'égard des officiers ecclésiastiques auprès desquels on veut faire valoir l'acte, parce qu'ils ne peuvent méconnoître la léga<pb->

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