ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"889"> qui parurent dans le iv. & le v. siecle, & qui prirent le nom de Jovinien, moine d'un monastere de Milan que saint Ambroise dirigeoit, & qui en étant sorti avec quelques autres, sous prétexte que la regle étoit trop austere, enseigna & soutint opiniâtrement diverses erreurs.

Les principales étoient, que ceux qui ont été régénérés par le baptême avec une pleine foi, ne peuvent plus être vaincus par le démon; que tous ceux qui auront conservé la grace du baptême aurontune même récompense dans le ciel; que les vierges n'ont pas plus de mérite que les veuves ou les femmes mariées, si leurs oeuvres ne les distinguent d'ailleurs: enfin qu'il n'y a point de différence entre s'abstenir des viandes, & en user avec actions de graces.

Jovinien & ses disciples nioient encore que la sainte Vierge fut demeurée vierge après avoir mis Jesus - Christ au monde, prétendans qu'autrement c'étoit attribuer à Jesus - Christ un corps phantastique avec les Manichéens. Ces hérétiques qui vivoient conformément à leurs principes, furent condamnés par le pape Sirice, & par un concile que saint Ambroise tint à Milan en 390. Saint Jérôme & saint Augustin écrivirent contre eux, & refuterent solidement leurs erreurs. Fleury, Hist. eccl. tom. IV. liv. XIX. n. 19.

JOUISSANCE (Page 8:889)

JOUISSANCE, s. f. (Gram. & Morale.) jouir, c'est connoître, éprouver, sentir les avantages de posséder: on possede souvent sans jouir. A qui sont ces magnifiques palais? qui est - ce qui a planté ces jardins immenses? c'est le souverain: qui est - ce qui en jouit? c'est moi.

Mais laissons ces palais magnifiques que le souverain a construits pour d'autres que lui, ces jardins enchanteurs où il ne se promene jamais, & arrêtons-nous à la volupté qui perpétue la chaîne des êtres vivans, & à laquelle on a consacré le mot de jouissance.

Entre les objets que la nature offre de toutes parts à nos desirs; vous qui avez une ame, dites - moi, y en a t - il un plus digne de notre poursuite, dont la possession & la jouissance puissent nous rendre aussi heureux, que celles de l'être qui pense & sent comme vous, qui a les mêmes idées, qui éprouve la même chaleur, les mêmes transports, qui porte ses bras tendres & délicats vers les vôtres, qui vous enlace, & dont les caresses seront suivies de l'existence d'un nouvel être qui sera semblable à l'un de vous, qui dans ses premiers mouvemens vous cherchera pour vous serrer, que vous éleverez à vos côtés, que vous aimerez ensemble, qui vous protégera dans votre vieillesse, qui vous respectera en tout tems, & dont la naissance heureuse a déja fortifié le lien qui vous unissoit?

Les êtres brutes, insensibles, immobiles, privés de vie, qui nous environnent, peuvent servir à notre bonheur; mais c'est sans se savoir, & sans le partager: & notre jouissance stérile & destructive qui les altere tous, n'en reproduit aucun.

S'il y avoit quelqu'Homme pervers qui pût s'offenser de l'éloge que je fais de la plus auguste & la plus générale des passions, j'évoquerois devant lui la Nature, je la ferois parler, & elle lui diroit. Pourquoi rougis - tu d'entendre prononcer le nom d'une volupté, dont tu ne rougis pas d'éprouver l'attrait dans l'ombre de la nuit? Ignores - tu quel est son but & ce que tu lui dois? Crois - tu que ta mere eût exposé sa vie pour te la donner, si je n'avois pas attaché un charme inexprimable aux embrassemens de son époux? Tais - toi, malheureux, & songe que c'est le plaisir qui t'a tiré du néant.

La propagation des êtres est le plus grand objet de la nature. Elle y sollicite impérieusement les deux sexes, aussi - tôt qu'ils en ont reçu ce qu'elle leur destinoit de force & de beauté. Une inquiétude vague & mélancholique les avertit du moment; leur état est mêlé de peine & de plaisir. C'est alors qu'ils écoutent leurs sens, & qu'ils portent une attention refléchie sur eux - mêmes. Un individu se présente - t - il à un individu de la même espece & d'un sexe différent, le sentiment de tout autre besoin est suspendu; le coeur palpite; les membres trésaillent; des images voluptueuses errent dans le cerveau; des torrens d'esprits coulent dans les nerss, les irritent, & vont se rendre au siége d'un nouveau sens qui se déclare & qui tourmente. La vûe se trouble, le délire naît; la raison eselave de l'instinct se borne à le servir, & la nature est satisfaite.

C'est ainsi que les choses se passoient à la naissance du monde, & qu'elles se passent encore au fond de l'antre du sauvage adulte.

Mais lorsque la femme commença à discerner; lorsqu'elle parut mettre de l'attention dans son choix, & qu'entre plusieurs hommes sur lesquels la passion promenoit ses regards, il y en eut un qui les arrêta, qui put se flatter d'être préféré, qui crut porter dans un coeur qu'il estimoit, l'estime qu'il faisoit de lui - même, & qui regarda le plaisir comme la récompense de quelque mérite. Lorsque les voiles que la pudeur jetta sur les charmes laisserent à l'imagination enflammée le pouvoir d'en disposer à son gré, les illusions les plus délicates concoururent avec le sens le plus exquis, pour exagérer le bonheur; l'ame fut saisie d'une enthousiasme presque divin; deux jeunes coeurs éperdus d'amour se vouerent l'un à l'autre pour jamais, & le ciel entendit les premiers sermens indiscrets.

Combien le jour n'eut - il pas d'instans heureux, avant celui où l'ame toute entiere chercha à s'élancer & à se perdre dans l'ame de l'objet aimé! On eut des jouissances du moment où l'on espéra.

Cependant la confiance, le tems, la nature & la liberté des caresses, amenerent l'oubli de soi - même; on jura, après avoir éprouvé la derniere ivresse, qu'il n'y en avoit aucune autre qu'on pût lui comparer; & cela se trouva vrai toutes les fois qu'on y apporta des organes sensibles & jeunes, un coeur tendre & une ame innocente qui ne connût ni la méfiance, ni le remors.

Jouissance (Page 8:889)

Jouissance, (Jurisprud.) est ordinairement synonyme de possession; c'est pourquoi l'on dit communément possession & jouissance; cependant l'on peut avoir la possession d'un bien sans en jouir. Ainsi la partie saisie possede jusqu'à l'adjudication, mais elle ne jouit plus depuis qu'il y a un bail judiciaire exécuté.

Jouissance se prend donc quelquefois pour la perception des fruits.

Rapporter les jouissances, c'est rapporter les fruits. Ceux qui rapportent des biens à une succession, sont obligés de rapporter aussi les jouissances du jour de l'ouverture de la succession; le possesseur de mauvaise foi est tenu de rapporter toutes les jouissances qu'il a eues. Voyez Fruits, Possesseur, Possession, Restitution . (A)

JOUR (Page 8:889)

JOUR, s. m. (Chronol. Astron. & Hist.) division du tems, fondée sur l'apparition & la disparition successive du soleil.

Il y a deux sortes de jours, l'artificiel & le naturel.

Le jour artificiel qui est le premier qu'il semble qu'on ait appellé simplement jour, est le tems de la lumiere, qui est déterminé par le lever & le coucher du soleil.

On le définit proprement le séjour du soleil sur l'horison, pour le distinguer du tems de l'obscurité, [p. 890] ou du séjour du soleil sous l'horison, qui est appellé nuit. Voyez Nuit.

Le jour naturel, appellé aussi jour civil, est l'espace de tems que le soleil met à faire une révolution autour de la terre, ou pour parler plus juste, c'est le tems que la terre emploie à faire une révolution autour de son axe; les Grecs l'appellent plus proprement nicthemeron, comme qui diroit nuit & jour.

Il faut cependant observer que par ces mots de révolution de la terre autour de son axe, on ne doit pas entendre ici le tems qu'un point ou un méridien de la terre emploie à parcourir 360 degrés, mais le tems qui s'écoule depuis le passage du soleil à un méridien, & le passage suivant du soleil par ce même méridien; car comme la terre avance sur son orbite d'occident en orient, en même tems qu'elle tourne sur son axe, le soleil repasse par le méridien un peu avant que la terre ait fait une révolution entiere autour de son axe. Pour en sentir la raison, il n'y a qu'à imaginer que le soleil se meuve d'orient en occident autour de la terre pendant l'espace d'un an, comme il paroît le faire, & qu'en même tems la terre tourne sur son axe d'orient en occident, il est facile de voir qu'un point de la terre qui se sera trouvé sous le soleil, s'y retrouvera de nouveau un peu avant que d'avoir fait un tour entier.

L'époque ou le commencement du jour civil, est le terme où le jour commence, & où finit le jour précédent. Il est de quelque conséquence de fixer ce terme; & il est certain que pour distinguer les jours plus commodément, il faut se fixer à un moment où le soleil occupe quelque partie facile à distinguer dans le ciel; par conséquent le moment le plus propre à fixer le commencement du jour, est celui dans lequel le soleil passe par l'horison ou par le méridien. Or, comme de ces deux instans, le plus facile à déterminer par observation, est celui du passage par le méridien, il semble qu'on doit préferer de faire commencer le jour naturel à minuit ou à midi; en effet l'horison est souvent chargé de vapeurs; d'ailleurs le lever ou le coucher du soleil sont sujets aux réfractions: ainsi il est difficile de les observer exactement. Car les réfractions élevant le soleil, font qu'il paroît sur l'horison, dans le tems qu'il est encore au dessous, & par conséquent elles augmentent la durée du jour artificiel; on ne peut donc savoir exactement la durée du jour par cette méthode, sans connoître bien les réfractions, & sans pouvoir observer facilement le soleil à l'horison: deux choses qui sont souvent susceptibles d'erreur. Cependant comme le lever & le coucher du soleil sont d'un autre côté le commencement & la fin du jour artificiel; ils paroissent aussi être propres par cette raison à marquer le commencement & la fin du jour naturel ou civil.

Ceux qui commencent le jour au lever du soleil, ont l'avantage de savoir combien il y a de tems que le soleil est levé; ceux qui commencent le jour au coucher, savent combien il leur reste de tems jusqu'à la fin du jour; ce qui peut être utile dans les voyages & les différens travaux: mais les uns & les autres sont obligés de calculer pour avoir l'heure du midi & celle de minuit.

Il n'est donc pas étonnant que les différens peuples commencent différemment leur jour, puisque les raisons sont à peu - près égales de part & d'autre.

Ainsi 1°. les anciens Babyloniens, les Perses, les Syriens, & plusieurs autres peuples de l'Orient, ceux qui habitent aujourd'hui les îles Baléares, & les Grecs modernes, &c. commencent leur jour au lever du soleil.

2°. Les anciens Athéniens & les Juifs, les Autri<cb-> chiens, les Bohémiens, les Marcommans, les Silésiens, les nations modernes & les Chinois, &c. le commencent au coucher du soleil.

3°. Les anciens Umbriens & les anciens Arabes, aussi - bien que les Astronomes modernes le commencent à midi.

4°. Les Egyptiens & les Romains, les François modernes, les Anglois, les Hollandois, les Allemans, les Espagnols & les Portugais, &c. à minuit.

C'étoit aussi à minuit que les anciens Egyptiens commençoient le jour, & même le fameux Hypparque avoit introduit dans l'Astronomie cette maniere de compter, en quoi il a été suivi par Copernic & par plusieurs autres astronomes; mais la plus grande partie des astronomes modernes a trouvé plus commode de commencer à midi.

Le jour se divise en heures, comme le mois & la semaine en jours. Voyez Heure, Mois, Semaine , &c.

Sur les différentes longueurs des jours dans les différens climats, voyez Climat & Globe.

Les Astronomes ont été divisés entr'eux sur la question, si les jours naturels sont égaux tout le long de l'année, ou non. Un professeur de Mathématiques à Séville, prétend, dans un mémoire imprimé parmi ceux des Transactions philosophiques, qu'après des observations consécutives pendant trois années, il a trouvé tous les jours égaux. M. Flamsteed dans les mêmes Tranfactions, réfute cette opinion, & sait voir que quand le soleil est à l'équateur, le jour est plus court de quarante secondes, que quand il est aux tropiques; & que quatorze jours tropiques sont plus longs que quatorze jours équinoctiaux de d'hcure, ou de 10 minutes. Cette inégalité des jours vient de deux différentes causes; l'une est l'excentricité de l'orbite de la terre, l'autre est l'obliquité de l'écliptique. La combinaison de ces deux causes fait varier la longueur du jour; & c'est sur cette inégalité qu'est fondée ce qu'on appelle équation du tems. Voyez Excentricité, Ecliptique & Equation du Tems. Wolf & Chambers. (O)

Jour (Page 8:890)

Jour, (Hist. rom.) les Romains commençoient le jour à minuit; ils partagerent l'espace d'un minuit à l'autre en plusieurs parties, auxquelles ils donnerent des noms pour les distinguer. Ils appellerent le minuit inclinatio; le tems de la nuit où les coqs ont accoutumé de chanter, gallicinium; le point du jour, diluculum; le midi, meridies; le coucher du soleil, suprema tempestas; le soir, vespera; la nuit, prima fax, parce que l'on allume des bougies, des lampes, des flambeaux, dès que la nuit commence; & la durée de la nuit, concubium.

Par rapport aux jours dont chaque mois est composé, ils les diviserent en fastes, néfastes, jours de fêtes, jours ouvriers & féries. Les jours fastes étoient comme nous disons aujourd'hui les jours d'audience, les jours de palais. Les jours néfastes étoient ceux pendant lesquels le barreau étoit fermé. Les jours de fêtes, ceux où il n'étoit pas permis de travailler; & tantôt c'étoit le jour entier, tantôt jusqu'à midi seulement; & les féries qui souvent n'étoient point jours de fêtes. Voyez Faste, Néfaste, Féries , &c.

Enfin pour ce qui regarde la vie privée des Romains pendant le cours de la journée. Voyez Vie privée des Romains. (D. J.)

Jour (Page 8:890)

Jour civil des Romains, (Hist. rom.) le jour civil des Romains étoit divisé en plusieurs parties, auxquelles ils donnoient différens noms. La premiere partie étoit media nox, minuit: après cela venoient medioe noctis inclinatio, gallicinium, le chant du coq; conticinium, qui étoit le tems le plus calme de la nuit;

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