ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"666"> a été achevée, & se trouve aujourd'hui (1758) dans un très - bon état.

Après avoir pris tous ces arrangemens, pourvu à la sûreté de la colonie, & fait prêter le serment à Roland Crape & aux autres officiers, il mit à la voile avec le vaisseau l'Eléphant, resta quelque - tems sous Ceylon, arriva à la rade de Copenhague le 30 Mars 1622, & y fut suivi un mois après par le vaisseau le David, capitaine Niels Rosemkranz, chargé pour le compte de la compagnie.

Ce commerce naissant donna d'abord quelque jalousie aux Hollandois, & les états généraux défendirent à tous leurs sujets de s'y intéresser, sous peine de confiscation de leurs biens. Cependant, sur les représentations de M. Carisius, ministre du roi de Danemark, il fut sursis à l'exécution de ces ordonnances, & on lui déclara qu'on agiroit là - dessus d'accord avec les Anglois, & qu'on suivroit leur exemple. Le ministre résident du roi à Londres, le sieur Sinkler, soutenu par M. Carisius, qui y passa en 1619, firent si bien auprès du roi Jacques I. qu'il donna permission à tous ses capitaines expérimentés dans la navigation, aux pilotes & aux matelots de s'engager au service de la compagnie danoise lorsqu'elle pourra en avoir besoin.

Toutefois comme le fonds de la compagnie n'étoit encore en 1624 que de 189614 reichsdahlers, cette somme se trouva presque absorbée par les acquisitions & les établissemens aux Indes; de sorte que le roi soutint lui seul la dépense de ce commerce à ses propres frais pendant plusieurs années.

En 1639 il nomma quatre directeurs, du nombre desquels étoit Roland Crape & Guillaume Leyel, natif d'Elsenoër, qui avoit longtems parcouru la Perse & les Indes. Cette nouvelle direction expédia deux vaisseaux, le Soleil, commandé par Clans Rytter, & le Christianshaven par M. Leyel; mais l'un de ces deux vaisseaux périt aux Dunes à son retour en 1644, & l'autre fut jetté aux isles Canaries, où le gouverneur espagnol s'en empara.

Leyel ayant cependant trouvé le moyen de se rendre à Tranquebar, acheva les fortifications de Dansborg, continua avec les trois vaisseaux qu'il avoit, le commerce de Ceylon & autres endroits de l'Inde; accueillit les Portugais, qui, expulsés & pourchassés par les Hollandois, se réfugioient à Tranquebar, & leur permit d'y bâtir une église. Il manda ces petits succès en cour, & fit dans ses derniers rapports, datés du 15 Novembre 1646, des mémoires qui marquoient beaucoup de connoissances & de lumieres. Mais le roi Chrétien IV. décéda le 28 Février 1648, & les guerres occuperent trop le commencement de Fréderic III. pour qu'on pensât à Copenhague aux affaires de Tranquebar.

Leyel mourut peu de tems après. Ses successeurs se brouillerent avec le Naïck de Tanjour, qui en 1648, mit le siége devant Tranquebar, afin de venger un more employé à la douane, & chassé pour ses malversations. Cependant on trouva le moyen d'appaiser le Naïck; mais la colonie dépérissoit sans ressource faute de secours d'Europe, & ne se soûtenoit que par un petit commerce avec l'intérieur du pays, ayant des démêlés continuels avec les Indiens pour celui de Bellesor; en un mot, les Danois s'y éteignirent peu - à - peu, de sorte qu'en 1665, il n'en resta vivant qu'un seul homme, Eskild Andersen, qui de canonnier qu'il avoit été, fut proclamé commandant par les habitans. Celui - ci engagea un sergent, nommé Gert von Hagen, qui servoit alors à Nagapatnam, de porter en Danemark le triste tableau de leurs miseres; c'est ce qu'il exécuta fidellement.

Il arriva à Copenhague en 1668, & ses dépêches disposerent le roi Fréderic III. à faire équiper une frégate pour y transporter une centaine de personnes. Henri Eggers fut envoyé en qualité de commandant. La frégate mouilla heureusement devant Tranquebar en 1669, & y fut reçue avec une joie inexprimable; mais cette petite recrue ne put rétablir un commerce qui étoit éteint.

Cependant au commencement du regne de Chrétien V. il se forma une nouvelle compagnie des Indes, qui, le 28 Novembre 1670, obtint un octroi pour 40 ans. Le fonds de cette compagnie consistoit en vaisseaux & effets, dont S. M. lui fit présent, estimés 79073 reichsdahlers. Les intéressés y ajoûterent pour premier paiement la somme de 162800 écus de banque.

En 1673 la compagnie commença à expédier ses vaisseaux pour l'Inde. Les premieres années furent assez favorables. En 1680 on avoit partagé entre les intéressés, tous frais faits, 48840 écus; mais ensuite la perte du vaisseau le Dansborg, qui périt sous les isles de Ferroë, & qu'on n'avoit pas fait assurer, fit tomber ses actions: les intéressés augmenterent néanmoins leur fonds de 12 pour cent, 20963 écus de banque. Enfin leur commerce essuya un échec terrible en 1682, par la perte de la loge de Bantam, où les Hollandois avoient tellement gagné le dessus, qu'ils en avoient expulsé les Danois aussi bien que les Anglois.

Le roi, pour relever le courage abattu de la malheureuse compagnie, lui fit présent en 1685 de quatre frégates, & envoya à Tranquebar, en qualité de son commissaire, Wulff Henri de Callnein, lieutenant - colonel d'infanterie. Cet officier remporta de grands avantages dans la guerre que la colonie eut à soûtenir contre les Mores, & depuis 1688 jusqu'en 1698, les intéressés eurent un revenant - bon de 217747 écus. Dans la même année 1698, la paix se conclut avec les mores de Bengale; & le roi, pour animer le commerce de l'Inde, prolongea pour 40 ans l'octroi donné en 1670; ce qui fut confirmé par Fréderic IV.

Depuis 1699 jusqu'en 1709, le négoce de l'Inde rendit encore 189665 écus, ensuite il tomba totalement. La peste, la guerre, les troubles dans l'Inde, le second siége que le Naïck de Tanjour mit devant Tranquebar en 1698, la mauvaise conduite de plusieurs officiers & employés, la perte de 13 de ses vaisseaux, & sur - tout celle de la plûpart de ses établissemens, acheverent de ruiner la compagnie, au point que ne pouvant plus se soûtenir, & ne voyant pas de moyens de se relever, les intéressés abandonnerent entierement le négoce de l'Inde en 1729, & se séparerent en 1730, en remettant au roi son octroi, qui avoit encore 20 ans à courir. Fréderic IV. fut le seul qui ne perdit point courage. Il tenta de faire continuer un commerce qu'il ne voyoit abandonné par ses sujets qu'avec beaucoup de regret; & quelques particuliers s'étant associés de nouveau par ses pressantes sollicitations, il leur fit expédier une permission d'envoyer deux vaisseaux à Tranquebar, & les deux vaisseaux mirent à la voile.

Jusqu'ici la compagnie danoise s'étoit bornée au commerce de l'Inde, sans avoir essayé en droiture celui de la Chine, qui, depuis qu'il est connu, a toûjours passé pour le plus riche de tous ceux de l'Asie. Cette même année un nommé Pieter Baschers, natif de Bremen, qui avoit longtems vécu dans l'Inde, vint à Copenhague, & présenta un plan pour former ce commerce, & le réunir avec celui de Tranquebar. Ses propositions furent goûtées, & S. M. accorda à ceux qui s'y intéresseroient deux octrois, l'un du 10 Février, & l'autre du 15 Mars 1730. On dressa la maniere de former les souscriptions, & les associés de l'année précédente eurent la préférence d'y prendre telle part qu'il leur plairoit. [p. 667]

Le feu roi de Danemark, alors prince royal, non - seulement s'intéressa dans ce commerce, mais, pour l'animer encore davantage, il s'en déclara le directeur. On tint une assemblée générale en sa présence, & on y élut du nombre des intéressés, huit syndics (committirse) pour avoir soin de l'intérêt de la société. Les souscriptions s'étant bientôt remplies, on fit partir pour la Chine le Prince Royal, commandé par le capitaine Tonder, aujourd'hui vice amiral, & pour Tranquebar les vaisseaux Fréderic IV. & le Lion d'or. Bientôt après on expédia deux autres vaisseaux pour Tranquebar; savoir, la Reine Anne - Sophie & la Wendela: tous ces vaisseaux revinrent heureusement à Copenhague, excepté le Lion d'or, qui échoua sur les côtes d'Irlande.

Ces premiers arrangemens ayant réussi, & leur retour ayant justifié les avantages qu'on pourroit tirer du commerce de la Chine, le prince royal devenu roi sous le nom de Chrétien VI, crut devoir former une compagnie plus étendue, & plus en état de continuer la navigation de l'Inde & de la Chine. Pour cet effet S. M. expédia le 12 Avril 1732, un octroi de 40 ans à la compagnie, lui accorda, avec le titre de compagnie royale des Indes, des prééminences, priviléges & franchises, & ordonna que les intéressés des sociétés de l'an 1729, 1730 & 1731 y seroient admis préférablement.

Ces anciens intéressés & les nouveaux s'unirent, & convinrent d'un réglement, qui prescriroit les opérations de la compagnie. Ensuite on tint une assemblée générale, dans laquelle on élut pour président Chrétien - Louis de Plessen, ministre d'état, & on lui adjoignit quatre directeurs & cinq hauts - participans pour former la direction, pourvoir aux besoins, & veiller au maintien, à la sûreté & aux avantages de la société.

C'est ainsi que se forma en 1732 la compagnie royale danoise des Indes orientales & de la Chine, continuée jusqu'à présent. Son commencement consista en 400 actions, chacune de 250 écus courans de Danemark, pour faire le fonds constant de la compagnie: ensuite les intéressés fournirent au prorata par action les frais nécessaires pour l'achat & l'équipement des vaisseaux qu'on avoit résolu de mettre en mer. Le produit du fonds constant fut employé en partie à l'acquisition des maisons, magasins & effets que les anciennes compagnies avoient, tant à Copenhague qu'à Tranquebar, & à faire passer dans l'Inde un fonds qui y resteroit toûjours, pour y soûtenir les fabriques. A mesure que le commerce a prospéré, la compagnie a ajoûté à ses bâtimens & magasins, & a augmenté le fonds continuel de Tranquebar.

Pour donner aux lecteurs une idée juste de l'état actuel de cette compagnie, je pourrois leur mettre devant les yeux les opérations d'année en année; mais comme ce détail seroit également long & ennuyeux, il suffira de dire que par le résultat que j'en ai tiré, il paroît que la nouvelle compagnie, depuis sa naissance en 1732 jusqu'en 1753 exclusivement, a expédié 60 vaisseaux, dont 28 pour Tranquebar, & 32 pour la Chine. Elle en a eu de retour 43; savoir, 19 de l'Inde, & 24 de Canton. Sept de ses vaisseaux se sont entierement perdus, six autres ont échoué, & quatre ont été abandonnés. Malgré ces malheurs, le prix des actions étoit en 1754, tout assuré & tout fourni, d'onze mille jusqu'à 11600 écus de Danemark. Le fonds roulant, c'est - à - dire ce que chaque action a contribué à l'achat, équipement & cargaison des vaisseaux arrivés en 1754, ou en mer, se montoit par vieilles actions à 7750 écus 2 marcs 6 schelings, qui ajoûtés au fonds constant, qui est de 750 écus, donne 8500 écus 2 marcs 6 schelings, prix intrinseque; le reste, savoir, 2499 écus 3 marcs 10 schelings, est pour l'assurance & le profit de ceux qui vendent des actions au prix de 11600 écus.

Nous ne ferons pas l'énumération des petits établissemens & des comptoirs que la compagnie danoise possede actuellement dans l'Inde; nous dirons seulement que depuis peu elle a fait un fonds à Tranquebar pour renouveller le commerce du poivre, & bâtir une loge sur la côte de Travancoor.

Il est bien singulier qu'après tant de malheurs consécutifs éprouvés pendant plus d'un siecle, cette compagnie, cent fois culbutée, détruite, anéantie, se soutienne encore au milieu de la rivalité du même trafic par les trois puissances maritimes. Mais on ne doit pas douter que la protection constante des rois de Danemark, les soins que se sont donnés ceux qui successi vement en ont été les présidens; une direction économe, sage, attentive & desintéressée, une liberté entiere, exempte de gêne dans les assemblées générales & annuelles, où toutes les opérations se décident, ne soient les vraies sources de la subsistance & de la prospérité de cette compagnie, supérieure à ce que les intéressés oserent jamais s'en promettre. (D. J.)

INDE (Page 8:667)

INDE, s. m. (Commerce.) drogue fort employée dans la teinture pour le bleu, & qu'on nomme autrement indigo. Voyez Indigo. (D. J.)

Inde (Page 8:667)

Inde, rouge d'(Hist. nat.) Les Anglois nomment indiam red. ou rouge d'Inde, une espece d'ochre d'un beau pourpre, très - pesante, très - dure & compacte, remplie de particules luisantes, qui colore fortement les mains, s'attache à la langue, est d'un goût austere & astringent; elle fait une ébullition très - vive lorsqu'elle est jettée dans l'eau, mais elle ne s'y divise point; elle durcit dans le feu sans changer de couleur. On trouve une grande quantité de cette terre dans l'isle d'Ormus, dans le golphe persique, d'où on la transporte dans l'Inde, où l'on s'en sert pour peindre les maisons. C'est une très - bonne couleur. Voy. Mender d'Acosta, Hist. nat. des fossiles. ( - )

INDÉCENT (Page 8:667)

* INDÉCENT, adj. (Gram. & Morale.) qui est contre le devoir, la bienséance & l'honnêteté. Un des principaux caracteres d'une belle ame, c'est le sentiment de la décence. Lorsqu'il est porté à l'extrême délicatesse, la nuance s'en répand sur - tout, sur les actions, sur les discours, sur les écrits, sur le silence, sur le geste, sur le maintien; elle releve le mérite distingué; elle pallie la médiocrité; elle embellit la vertu; elle donne de la grace à l'ignorance.

L'indécence produit les effets contraires. On la pardonne aux hommes, quand elle est accompagnée d'une certaine originalité de caractere, d'une gaiété particuliere & cynique, qui les met au - dessus des usages: elle est insupportable dans les femmes. Une belle femme indécente est une espece de monstre, que je comparerois volontiers à un agneau qui auroit de la férocité. On ne s'attend point à cela. Il y a des états dont on n'ose exiger la décence: l'anatomiste, le médecin, la sage - femme sont indécents sans conséquence. C'est la présence des femmes qui rend la société des hommes décente. Les hommes seuls sont moins décents. Les femmes sont moins décentes entr'elles qu'avec les hommes. Il n'y a presqu'aucun vice qui ne porte à quelqu'action indécente. Il est rare que le vicieux craigne de paroître indécent. Il se croit trop heureux quand il n'a que cette foible barriere à vaincre. Il y a une indécence particuliere & domestique; il y en a une générale & publique. On blesse celle - ci peut - être toutes les fois qu'entraîné par un goût inconsidéré pour la vérité, on ne ménage pas assez les erreurs publiques. Le luxe d'un citoyen peut devenir indécent dans les tems de calamité; il ne se montre point sans insulter à la misere d'une nation. Il seroit indécent de se réjouir d'un succès particulier au moment d'une affliction publique. Comme la décence consiste dans une attention

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