ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
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"664"> soutenue & bien dirigée, elle trouvera toujours en elle - même la consommation de ses retours que nous portons même déja chez nos voisins. Elle a la propriété de Ponticheri qui lui assure le commerce de la côte de Coromandel & de Bengale, les îles de Bourbon & Maurice, la quantité de fonds & de vaisseaux nécessaires, la représentation de ses actions sur la place qui lui font une seconde valeur réelle, circulante, & libre, des fondemens peut - être équivalens à ceux de la compagnie des Indes d'Angleterre, & des établissemens solides, quoique beaucoup moins étendus que ceux de la Compagnie des Indes orientales de Hollande. Enfin ses retours sont très - considérables, puisqu'ils vont présentement (1752) à plus de 24 millions par an. (D. J.)

Indes (Page 8:664)

Indes, (Compagnie Hollandoise des.) Commerce. Il y a en Hollande deux Compagnies des Indes, l'orientale & l'occidentale, dont je vais parler en peu de mots, bien fâché de ne pouvoir m'étendre.

De la Compagnie orientale. Le desespoir & la vengeance, dit M. Savary, & il dit bien vrai, furent les premiers guides qui apprirent le chemin des Indes aux Hollandois, cette nation née pour le commerce. L'Espagne leur ayant fermé tous ses ports, & sous le prétexte de la religion, les persécutant avec une rigueur, pour ne pas dire avec une barbarie extrème, ils entreprirent en 1595 d'aller chercher en Asie le commerce libre & assuré qu'on leur refusoit en Europe, afin d'acquérir des fonds pour entretenir leurs armées, & maintenir leurs privileges & leur liberté.

La nécessité inspira en 1594 à quelques Zélandois encouragés par le P. Maurice, le projet de se frayer une nouvelle route pour la Chine & les Indes orientales par le nord - est, comme on vient de le tenter tout récemment avec quelque vraissemblance de succès; mais d'un côté les froids extrèmes de la nouvelle Zemble, & de l'autre les glaces impénétrables du détroit de Weigatz, ruinerent & rebuterent les escadres qui y furent alors envoyées, de même qu'elles rebuterent les Anglois qui dès l'an 1553 avoient travaillé à la même recherche.

Cependant, tandis que les armateurs de Zélande tentoient inutilement & malheureusement ce passage, d'autres compagnies prirent avec succès en 1595 la route ordinaire des Portugais, pour se rendre en Asie. Cette derniere entreprise fut si heureuse, qu'en moins de sept ans divers particuliers armerent jusqu'à dix ou douze flottes qui presque toutes retournerent avec des profits immenses.

Les états généraux appréhendant que ces diverses compagnies particulieres ne se nuisissent, leurs directeurs furent assemblés, & consentirent à l'union, dont le traité fut confirmé par leurs H. P. le 20 Mars 1602, époque bien remarquable, puisqu'elle est celle du plus célebre, du plus durable, & du plus solide établissement de commerce qui ait jamais été fait dans le monde.

Le premier fonds de cette compagnie fut de 6 millions 600 mille florins (environ 13 millions 920 mille livres de notre monnoie) & les états généraux lui accorderent un octroi ou concession exclusive pour 21 ans. Par cet octroi déjà renouvellé cinq fois (en 1741), & qui coûte à chaque renouvellement environ 2 millions de florins à la compagnie, elle a droit de contracter des alliances, de bâtir des forteresses, d'y mettre des gouverneurs & garnisons, des officiers de justice & de police, en faisant néanmoins les traités au nom de leurs H. P. auquel nom se prêtent aussi les sermens des officiers tant de guerre que de justice. Soixante directeurs partagés en diverses chambres, font la régie de la compagnie, & l'on sait qu'il n'est rien de plus sage & de plus prudemment concerté que la police & la discipline avec laquelle tout y est réglé.

Les Hollandois, après avoir été quelque tems sur la défensive, attaquerent au fond de l'Asie ces mêmes maîtres qui jouissoient alors des découvertes des Portugais, les vainquirent, les chasserent, & devinrent en moins de 60 ans les souverains de l'orient. La compagnie formée en 1602 gagnoit déjà près de 3 cent pour cent en 1620. Elle a choisi le cap de bonne Espérance pour le lieu des rafraichissemens de ses flottes; elle a établi dans les Indes orientales 40 comptoirs, bâti 25 forteresses, entr'autres en 1619, & pour le centre de son commerce, la ville de Batavia, la plus belle de l'Asie, dans laquelle résident plus de 30 mille Chinois, Javanois, Chalayes, Amboiniens, &c. & où abordent toutes les nations du monde.

De plus, cette compagnie a ordinairement dans les Indes plus de 100 vaisseaux depuis 30 jusqu'à 60 pieces de canon, 12 à 20 mille hommes de troupes réglées, un gouverneur qui ne paroît en public qu'avec la pompe des rois, sans que ce faste asiatique, dit M. de Voltaire, corrompe la frugale simplicité des Hollandois en Europe. Heureux! s'ils savent la conserver en rappellant le commerce général qui s'échappe tous les jours de leurs mains par plusieurs détours, passe dans le nord, ou se sait ailleurs directement sans leur entremise.

En effet il faut convenir que le commerce & cette frugalité sont l'unique ressource des provinces unies; car quoique leur compagnie orientale se trouve la seule qui ait eu le bonheur de se maintenir toujours avec éclat sur son premier fonds, sans aucun appel nouveau, ses grands succès sont en partie l'effet du hasard qui l'a rendue maîtresse des épiceries; trésors aussi réels que ceux du Pérou, dont la culture est aussi salutaire à la santé, que le travail des mines est nuisible, trésors enfin dont l'univers ne sauroit se passer. Mais si jamais ce hasard, ou plûtôt la jalousie éclairée, l'industrie vigilante, offre à quelqu'autre peuple la culture de ces mêmes épiceries si enviées, alors cette célebre compagnie aura bien de la peine à soutenir les frais immenses de ses armemens, de ses troupes, de ses vaisseaux, de la régie de tant de forteresses & de tant de comptoirs. Déjà depuis plusieurs années quelques nations de l'Europe sont en concurrence avec elle pour le poivre qu'elle ne fournit presque plus à la France en particulier. Déjà,... Mais qu'on jette seulement les yeux sur le sort de la compagnie occidentale.

De la compagnie occidentale. Elle commença en 1621, avec les mêmes lois, les mêmes privileges que la compagnie orientale, & même avec un fonds plus considérable, car il sut de 7 millions 200000 florins, partagés en actions de 6000 florins argent de banque, ce qui fit en tout 1200 actions, & les états généraux pour favoriser cette compagnie, lui firent présent de trois vaisseaux montés de 600 soldats. Ses conquêtes & ses espérances furent d'abord des plus brillantes. Il paroît par les registres de cette compagnie, que depuis l'an 1623 jusqu'en 1636, elle avoit équipé 800 vaisseaux tant pour la guerre que pour le commerce dont la dépense montoit à 451 millions de florins, & qu'elle en avoit enlevé aux Portugais ou aux Espagnols 545 qu'on estimoit 60 millions de florins, outre environ 30 millions d'autres dépouilles. Elle fut pendant les premieres années en état de faire des répartitions de 20, 25 & 50 pour cent. Elle s'empara de la baie de tous les Saints, de Fernanbouc, & de la meilleure partie du Brésil.

Cependant cette rapide prospérité ne fut pas de longue durée. Ces conquêtes même si glorieuses & si avantageuses l'engagerent à faire des efforts qui l'épuiserent: d'autres causes qu'il seroit inutile de rapporter, concoururent à son désastre: il suffira de dire qu'elle perdit ses conquêtes, qu'elle n'a jamais [p. 665] pû se relever, & qu'elle fut dissoute à l'expiration de son second octroi, le 20 Septembre 1674. Alors il se forma une nouvelle compagnie composée des anciens participans & de leurs créanciers; c'est cette compagnie qui subsiste aujourd'hui, mais seulement avec quelques médiocres établissemens en Afrique, une portion dans la société de Surinan, & le reste de son commerce est presque réduit à une traite de Negres dans le peu de terrein qu'elle possede en Amérique. (D. J.)

Indes Orientales (Page 8:665)

Indes Orientales, compagnie des....... en Danemark, (Commerce.) Je me propose de tracer ici l'établissement, les vicissitudes & l'état présent de la compagnie des Indes orientales en Danemark: ce sera l'extrait fort abrégé d'un mémoire très - curieux sur ce sujet, que M. le comte d'Eckelbath, cidevant ministre de S. M. D. en France, a bien voulu me communiquer, & pour lequel je lui renouvelle mes remerciemens.

Chrétien IV, roi de Danemark, voyant les avantages que des puissances voisines tiroient de la navigation de l'Inde, résolut d'encourager ses sujets à entreprendre ce même commerce: il y réussit, & il se forma sous ses yeux la premiere compagnie des Indes Orientales en Danemark, à laquelle il donna, par sa déclaration du 17 Mars 1616, un octroi pour 12 ans, lui accorda un privilege exclusif, lui fit présent des bâtimens nécessaires pour servir de magasins, lui permit d'employer des pilotes & des matelots de sa flotte, s'intéressa dans cette compagnie, & engagea les seigneurs de sa cour d'en faire autant, en assignant une part sur leurs appointemens pour être jointe au fonds de la compagnie.

Comme on s'occupoit à équiper trois vaisseaux, qui devoient partir pour les Indes sous la conduite de Roland Crape, & pour tenter d'obtenir de quelque prince indien la permission de fonder un établissement sur la côte de Coromandel; un évenement favorable augmenta les espérances de l'entreprise.

Jean de Wesseck, directeur du comptoir hollandois de Caliacatta & de la côte de Coromandel, envoya en 1611 Marcellus Bosckhouwer, son facteur, à Ceylon, muni de lettres de créance du prince Maurice d'Orange & des états généraux, pour y négocier un traité de commerce avec l'empereur de Candy, le premier & le plus puissant des rois de Ceylon. Sa négociation fut heureuse, il la termina favorablement; mais quand il voulut s'en retourner, l'empereur, qui l'affectionnoit, lui en refusa la permission, sous prétexte qu'il devoit rester en sa cour, en qualité de ministre ou d'otage, jusqu'à ce que sa nation eût rempli les conditions du traité, & fourni les troupes & l'artillerie stipulées pour chasser les Portugais de son empire. Cependant les Hollandois, déja assez occupés de leurs guerres dans l'Inde, négligerent cette affaire, & le secours promis n'arriva point.

Pendant ce tems - là Bosckhouwer s'avançoit toujours dans les bonnes graces de l'empereur Cenuwieraat Adascyn, qui l'élevoit aux plus grandes dignités. Il fut fait prince de Migomme, de Kokelecor, d'Anangepare & de Mivitigale, chevalier de l'ordre du soleil d'or, président du conseil de guerre, premier ministre de toutes les affaires, & amiral général des forces maritimes. Tel est le titre fastueux qu'il se donne dans sa lettre écrite au roi Chrétien IV, datée du cap de Bonne - Espérance le 27 Juillet 1619.

Bosckhouwer passa quatre années à la cour de Candy; mais voyant que les Hollandois ne pensoient plus à lui, & s'ennuyant d'un esclavage honorable, il persuada l'empereur de lui permettre d'aller lui - même hâter le secours promis, & au cas qu'il ne pût l'obtenir des Hollandois, d'en traiter avec d'autres nations. L'empereur lui fit expédier des pleins pouvoirs pour toutes les puissances avec lesquelles il jugeroit à - propos de négocier, & Bosckhouwer, chargé de ses lettres, partit de l'isle de Ceylon en 1615.

Il se rendit d'abord aux établissemens des Hollandois dans l'Inde; mais les trouvant par - tout en guerre, & par conséquent hors d'état de faire une nouvelle entreprise, il passa la même année en Europe, & arriva en Hollande. La métamorphose d'un facteur en prince, les airs qu'il se donnoit, & le cérémonial qu'il exigeoit, déplurent à la compagnie des Indes & à ses anciens maîtres. Il en fut piqué; & apprenant qu'on travailloit en Danemark à l'établissement d'une nouvelle compagnie des Indes, il partit pour Copenhague, & y arriva au mois de Juin 1617 avec sa femme, dite la princesse de Migomme.

Bosckhouwer fut bien reçu du roi de Danemark, qui accepta la proposition d'un traité avec l'empereur de Candy, & le signa le 2 d'Août 1618. En conséquence sa majesté fit armer deux vaisseaux de guerre, l'Elephant & le Christian, avec la Yacht l'Oresund, & en donna le commandement à Ove Giedde, alors âgé de 26 ans, qui mourut en 1661 amiral & sénateur du royaume. La compagnie arma de son côté le David, la Patience & le Copenhague. Tous ces vaisseaux partirent du Sond le 29 Novembre 1618, & firent route ensemble jusqu'au - delà du cap de Bonne - Espérance, où Roland Crape se sépara de M. de Giedde, & se rendit avec les trois vaisseaux de la compagnie, sur la côte de Coromandel, pour laquelle il étoit destiné.

Après une navigation fort pénible, M. de Giedde arriva le 16 Mai 1620 sur les côtes de Ceylon, & le 12 Juin il jetta l'ancre au port de Cotjares, situé dans la baie de Trinquemale. Les Portugais, qui vouloient encore faire les maîtres de la mer de l'Inde, lui avoient enlevé le Yacht l'Oresund. Mais ce qui dérangea le plus cette expédition, ce fut le décès de Bosckhouwer, qui, après avoir doublé le cap, mourut à bord de M. de Giedde.

L'empereur de Candy reçut d'abord assez bien les Danois, & fit rendre plusieurs honneurs à leur amiral; mais ayant appris la mort de son ministre, que selon les apparences on avoit eu soin de lui cacher en arrivant, il changea de sentiment, refusa de ratifier le traité, & accusa Bosckhouwer d'avoir passé les bornes de son pouvoir, & d'avoir promis au delà de ce qu'il étoit possible d'exécuter. Les Portugais de leur côté appuyerent sous main les sentimens de l'empereur, & lui offrirent leur assistance en cas que ces nouveaux hôtes voulussent entreprendre de le chagriner.

M. de Giedde, après être resté quatre mois sans fruit à Ceylon, partit du port de Cotjares, & arriva à Tranquebar, sur la côte de Coromandel, le 25 d'Octobre 1620. En quittant la rade, il eut le malheur de voir son vaisseau le Christian toucher & s'engrever tellement, qu'il fut obligé de l'abandonner. Les Portugais en profiterent, & garnirent des canons qu'ils tirerent de ce navire, un fort qu'ils construisirent dans la baie de Trinquemale immédiatement après le départ des Danois.

Roland Crape, pendant ce tems - là, avoit fait son trajet fort heureusement. Arrivé à la côte de Coromandel, il s'arrêta devant Carikal, ville maritime du Tanjour, y mit pié à terre, & se rendit auprès du Naïcke, ou prince Malabare, nommé Ragounade, duquel il obtint en propre pour la compagnie, le village de Trangambar, aujourd'hui Tranquebar, à un mille & demi au nord de Carikal. Il y fit bâtir des habitations & un comptoir en maçonnerie, qu'il assura du côté de la terre par deux bastions garnis de fauconneaux, & enferma la place d'un bon mur. Il jetta encore les fondemens d'une citadelle à quatre bastions, & lui donna le nom de Dansborg. Elle

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