ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

RECHERCHE Accueil Mises en garde Documentation ATILF ARTFL Courriel

Previous page

"624"> sens aux ambassadeurs, aux ministres, aux grands & aux gens de lettres qui sollicitent cette grace, & à qui il est rare qu'on la refuse.

Imprimerie (Page 8:624)

Imprimerie de Constantinople, (Hist. turq.) elle a été dressée par les soins du grand - visir Ibrahim bacha, qui aimoit la paix & les sciences. Il employa tout son crédit auprès de Achmet I I I. pour former cet établissement, & en ayant eu la permission au commencement de ce siecle, il se servit d'un hongrois éclairé, & d'un juif nommé Jones pour diriger l'entreprise. Il fit fondre toutes sortes de caracteres au nombre de plus de deux cent mille, & l'on commença en 1727 par l'impression d'un dictionnaire turc, dont on a vendu les exemplaires jusqu'à 30 piastres. Cette imprimerie contient six presses, quatre pour les livres, & deux pour les cartes.

La révolution arrivée en 1730 par la déposition du grand - seigneur, & la mort de son visir qui fut sacrifié, n'a point détruit cet établissement, quoiqu'il soit contraire aux maximes du gouvernement, aux préceptes de l'alcoran, & aux intérêts de tant de copistes qui gagnoient leur vie à copier.

On sait aussi que les Juifs ont la liberté d'imprimer en Turquie les livres de leur religion. Ils obtinrent en 1576 d'avoir à Constantinople une imprimerie pour cet objet, & dès - lors ils répandirent en Orient les exemplaires de la loi qui y étoient fort peu connus. (D. J.)

Imprimerie (Page 8:624)

Imprimerie, c'est ainsi que les Tanneurs appellent une grande cuve de bois, dans laquelle ils mettent rougir les cuirs; c'est ce qu'on appelle aussi les mettre en coudrement. Voyez Tanneur.

IMPRIMEUR (Page 8:624)

IMPRIMEUR, ouvrier travaillant à l'imprimerie: le prote, le compositeur, & l'imprimeur à la presse, sont compris sous ce nom. Pour les opérations différentes de chacun d'eux, voyez au mot Imprimerie.

Le prote d'une imprimerie étant celui sur lequel roule tout le détail, & étant obligé de veiller également sur les compositeurs & les imprimeurs, il doit connoître parfaitement la qualité de l'ouvrage des uns & des autres, & sur - tout ne pas trop donner à l'habitude & aux préjugés d'état qui nuisent si fort aux progrès de tous les arts. Pour ce qui regarde la composition, il doit savoir sa langue, & être instruit dans les langues latine & greque; posséder à fond l'orthographe & la ponctuation; connoître & savoir exécuter la partie du compositeur, pour lui indiquer en quoi il a manqué, & le moyen le plus convenable pour réparer ses fautes. Quant à l'impression, il doit avoir assez de goût pour décider quelle est la teinte qu'il faut donner à l'ouvrage; avoir l'oeil à ce que les étoffes soient préparées convenablement; savoir par quel endroit peche la presse quand l'ouvrage souffre, & connoître assez toutes ses parties pour les faire réparer au besoin & comme il convient. Pour la lecture des épreuves, comme c'est sur lui que tombe le reproche des fautes qui peuvent se glisser dans une édition, il faudroit qu'il connût autant qu'il est possible, les termes usités, & savoir à quelle science, à quel art, & à quelle matiere ils appartiennent. Il y a de l'injustice à lui imputer les irrégularités, quelquefois même certaines fautes d'orthographe; chaque auteur s'en faisant une à son goût, il est obligé d'exécuter ce qui lui est prescrit à cet égard. En un mot on exige d'un prote qu'il joigne les connoissances d'un grammairien à l'intelligence nécessaire pour toutes les parties du manuel de son talent. Voyez Prote.

Il faut au compositeur, pour exceller dans son état, une grande partie des qualités nécessaires dans le prote, puisque c'est parmi ses semblables que l'on choisit ce dernier. Il a besoin dans ses opérations d'une grande attention pour saisir le sens de ce qu'il compose, & placer la ponctuation à - propos; pour ne rien oublier, & ne pas faire deux fois la même chose, fautes dans lesquelles la plus légere distraction fait souvent tomber. Il doit éviter dans sa composition les mauvaises divisions d'une ligne à l'autre (on ne devroit jamais diviser un mot d'une page à l'autre); espacier également tous les mots de la même ligne, & tâcher qu'une ligne serrée ne suive ou ne précede pas une ligne trop au large; mettre de l'élégance dans ses titres, sans défigurer le sens; qu'il prenne garde, en corrigeant ses fautes, de rendre sa composition aussi belle & aussi bien ordonnée que s'il n'y avoit pas eu de fautes; en un mot, qu'il exécute ce qui lui est prescrit à l'article Imprimerie. Voyez aussi Compositeur.

Un imprimeur à la presse doit joindre à une grande attention sur la teinte & le bel oeil de l'impression, beaucoup de capacité pour juger d'où peuvent provenir les défauts de son impression, soit dans le dérangement de quelqu'une des parties de la presse, soit dans le mauvais apprêt de ses balles, de son papier & de ses étoffes, soit enfin dans la façon de manoeuvrer. Son talent est de faire paroître l'impression également noire & nette, non - seulement sur la même feuille, mais sur toutes les feuilles du même ouvrage, & de faire que toutes les pages tombent exactement l'une sur l'autre. Voyez Imprimerie.

Il faut pour une belle impression, qu'elle ne soit ni trop noire, ni trop blanche; elle doit être d'un beau gris: trop noire, elle vient pochée, le caractere paroît vieux, & son oeil est plein; trop blanche, elle vient égratignée, & fatigue les yeux du lecteur. Au reste on en juge mieux à la vûe que par raisonnement.

Il n'est peut - être pas inutile ici qu'un imprimeur fasse observer aux auteurs que c'est souvent leur faute si leurs livres ont besoin de si longs errata. Leur négligence à écrire lisiblement les noms propres & les termes de sciences ou d'arts qui ne peuvent être familiers à un compositeur, en est presque toujours la cause. Il est impossible qu'un imprimeur entende assez bien toutes les matieres sur lesquelles il travaille, pour ne pas se tromper quelquefois. On engage les gens de lettres à vouloir bien faire attention à cet avertissement, pour que leurs oeuvres ne soient pas deshonorées aussi souvent qu'elles le sont par des fautes grossieres.

A l'art d'exprimer & de communiquer nos pensées les plus abstraites, à l'art d'écrire, on ne pouvoit rien ajoûter de plus intéressant, que celui de répéter cette écriture avec promptitude, avec élégance, avec correction, & presque à l'infini, par le moyen de l'imprimerie. De - là vint que bien - tôt après sa découverte, les imprimeurs se formerent & se multiplierent en si grand nombre.

Mais nous devons parler ici principalement de ceux qui joignirent à la science de l'art une vaste érudition, & une grande connoissance des langues savantes; il y en a même plusieurs qui se sont immortalisés par d'excellens ouvrages sortis de leurs mains. Voici les noms des plus illustres, à qui tous les peuples de l'Europe doivent de la reconnoissance, car ils ont tous profité de leur savoir, de leurs travaux, & de leur industrie.

Amerbach (Jean) Amerbachius, Baslois, fleurissoit sur la fin du xv. siecle. Il publia divers auteurs, entre lesquels il corrigea lui - même les oeuvres de saint Ambroise qu'il mit au jour en 1492, & celles de saint Augustin qu'il n'acheva qu'en 1506, aidé des secours de son frere; ne desirant que la perfection de l'imprimerie, il fondit de nouveaux caracteres ronds, supérieurs à ceux qu'on connoissoit en Allemagne: & pour soutenir son art dans sa patrie, il y appella Froben & les Pétri. Il étoit extrèmement [p. 625] jaloux de la correction des livres qu'il publioit. Il eut des enfans qui se distinguerent dans la république des lettres, & il leur fit promettre en mourant de donner au public les oeuvres de saint Jérome, ce qu'ils exécuterent avec fidélité.

Badius (Josse), en latin Jodocus Badius, Ascensius, parce qu'il étoit d'Assche, bourg du territoire de Bruxelles, où il naquit en 1462. Il se rendit célebre par son savoir & par ses éditions: ayant été reçu professeur en grec à Paris, il y établit une belle imprimerie, sous le nom de proelum ascensianum, de laquelle sortirent entr'autres ouvrages, nos meilleurs auteurs classiques, imprimés en caracteres ronds, peu connus avant lui dans ce royaume, & qu'il substitua au gothique, dont on se servoit auparavant. Cependant ses caracteres n'ont pas l'agrément de ceux des Etiennes, mais ses éditions sont correctes. Il mettoit d'ordinaire ce vers latin à la premiere page de ses livres.

AEre meret Badius, laude auctorem, arte legentem.

Il mourut à Paris en 1535. Deux de ses filles épouserent de fameux imprimeurs, l'une Michel Vascosan, l'autre Robert Etienne. Cette derniere savoit très - bien le latin. Son fils Conrard Badius prit le parti de se retirer à Genève, où il fut à son tour imprimeur & auteur. Les fils, filles & gendre de Josse Badius, firent tous à l'envi prospérer avec zele l'art admirable de l'Imprimerie.

Bloeuv (Guillaume), dit Jansonius Coesius, né en Hollande dans le xvij. siecle avoit été ami particulier & disciple de Tycho - Brahé. Ses ouvrages géographiques & ses magnifiques impressions rendent sa mémoire honorable.

Bomberg (Daniel), natif d'Anvers dans le xv. siecle, alla s'établir à Venise, où après avoir appris l'hébreu, il s'acquit une gloire durable par ses éditions hébraïques de la bible, en toutes sortes de formats, & par les commentaires des Rabbins qu'il mit au jour. Il commença ce travail en 1511, & le eontinua jusqu'à sa mort arrivée vers l'an 1550. On fait grand cas de sa bible hébraïque publiée l'an 1525, en quatre volumes in - fol. Il a donné le Thalmud en xj. volumes in - folio: il imprima trois fois cet ouvrage, & chaque édition lui coûta cent mille écus. On dit qu'il dépensa quatre millions d'or en impressions hébraïques, & qu'il mourut fort pauvre. Alors l'imprimerie étoit glorieuse, aujourd'hui ce n'est qu'un art lucratif.

Camusat (Jean) se distingua dans le xvij. siecle à Paris, en recherchant par préférence à n'imprimer que de bons livres en eux - mêmes, sans en envisager le profit, de sorte qu'on regardoit comme une preuve de bonté pour l'ouvrage, lorsqu'il sortoit de son imprimerie.

Colines (Simon de), en latin Colinoeus, né au village de Gentilly près de Paris, dans le xvj. siecle; il épousa la veuve de Henri Etienne l'aîné, employa d'abord les caracteres d'Etienne, mais dans la suite il en fondit lui - même de beaucoup plus beaux. Il introduisit en France l'usage du caractere italique, avec lequel il imprima des ouvrages entiers; & son italique est préférable à celui d'Alde Manuce, qui en fut l'inventeur. Les éditions des livres grecs donnés par Colines, sont d'une beauté & d'une correction admirable. Il y a de lui une édition du testament grec, où le fameux passage de l'épitre de Saint Jean des trois témoins manque. J'ai une fois acheté par curiosité un petit testament latin dédié au pape, approuvé & imprimé à Louvain, où ce passage ne se trouvoit pas mieux. Colines mourut, à ce qu'on croit, vers l'an 1647; mais on ignore l'année de sa naissance.

Commelin (Jérome) né à Douay, s'établit & mou<cb-> rut à Heidelberg en 1597. Non - seulement ses éditions sont recherchées des curieux, mais il étoit lui - même très - savant dans la langue greque; nous en avons pour preuve des notes de sa façon sur Héliodore, Apollodore, & quelques autres auteurs.

Coster (Laurent), natif de Harlem, est celui à qui ses compatriotes attribuent l'invention de l'imprimerie. Ils disent qu'avant l'an 1440 il forma les premiers caracteres de bois de hêtre, qu'ensuite il en fit d'autres de plomb & d'étain, & qu'enfin il trouva l'encre dont l'Imprimerie se sert encore. En conséquence de cette opinion on grava sur la porte de la maison de cet homme ingénieux, l'inscription suivante: Memorioe sacrum, typographia, ars artium omnium conservatrix, nunc primùm inventa, circà annum 1440. On conserve encore soigneusement dans la ville de Harlem le premier livre fait par cet artiste, & qui porte pour titre, speculum humanoe salvationis; mais le lecteur peut voir ce qu'on a lieu de penser de la découverte de Coster, au mot Imprimerie.

Cramoisi (Sébastien), né à Paris dont il fut échevin. Il obtint par son mérite la direction de l'imprimerie du louvre, établie par Louis XIII. mourut en 1669, & eut pour successeur son petit - fils. Mais quoique plusieurs de leurs éditions méritent fort d'être recherchées, elles n'ont ni l'exactitude, ni la beauté de celles qui sont sorties des imprimeries des Etienne, des Manuce, des Plantin, & des Froben. Les Martin, Coignard & Muguet ont succédé aux Cramoisi, & ont à leur tour enrichi la république des lettres, d'éditions très - belles & très - estimées.

Crespin (Jean), en latin Crispinus, natif d'Arras au commencement du xvj. siecle, & fils d'un jurisconsulte, étoit fort versé dans le droit, le grec & les belles - lettres; fut reçu avocat au parlement de Paris; mais s'étant retiré à Genève vers l'an 1548, pour y professer en sûreté le calvinisme, il y fonda une belle imprimerie dans laquelle il publia entr'autres ouvrages un excellent lexicon grec & latin, infolio, dont la premiere édition vit le jour en 1560. Crespin mourut de la peste en 1572. Eustache Vignon son gendre continua & perfectionna l'imprimerie que son beau - pere avoit établie.

Dolet né à Orléans dans le xvj. siecle, imprimeur & Libraire à Lyon, a mis au jour quelques - uns des ouvrages recherchés d'Etienne Dolet, bon humaniste, & brûlé à Paris le 3 Août 1546, pour ses sentimens sur la religion. Il auroit encore imprimé la version françoise de la plûpart des oeuvres de Platon, du malheureux Etienne Dolet, s'il n'eût été prévenu par son supplice.

Elzévirs (les), bien des gens regardent les Elzévirs comme les plus habiles imprimeurs, non - seulement de la Hollande, mais de toute l'Europe. Bonaventure, Abraham, Louis, & Daniel Elzévirs, sont les quatre de ce nom, qui se sont tant distingués dans leur art. A la vérité, ils ont été fort au - dessous des Etiennes, tant pour l'érudition, que pour les éditions greques & hébraïques; mais ils ne leur ont cédé, ni dans le choix des bons livres qu'ils ont imprimés, ni dans l'intelligence du métier; & ils les ont surpassé pour l'agrément & la délicatesse des petits caracteres. Leur Virgile, leur Térence, leur Nouveau - Testament grec, & quelques autres livres de leur presse, où il se trouve des caracteres rouges, sont des chefs - d'oeuvres de leur art. Ils ont imprimé plusieurs fois le catalogue de leurs éditions, qui comprennent entre autres tous les auteurs classiques, dont les petits caracteres sont aussi jolis, que nuisibles à la vûe.

Etienne (les), je les regarde comme les rois de l'Imprimerie, tant pour l'érudition, que pour les éditions greques & hébraïques. On nomme huit

Next page


The Project for American and French Research on the Treasury of the French Language (ARTFL) is a cooperative enterprise of Analyse et Traitement Informatique de la Langue Française (ATILF) of the Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), the Division of the Humanities, the Division of the Social Sciences, and Electronic Text Services (ETS) of the University of Chicago.

PhiloLogic Software, Copyright © 2001 The University of Chicago.