ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"618"> avoir pressé son éponge pour en faire sortir l'eau, il ramasse avec cette éponge toute l'eau qui peut être dans le tympan, met dedans les blanchets bien étendus, & le carton, & par - dessus le petit tympan pour les maintenir en état.

L'imprimeur leve son tympan & fait la marge. Nous continuons de supposer que la forme est in - 8°. Il prend une feuille de son papier, la plie en deux, en marque bien le pli, la porte bien au milieu sur un côté de la forme, de maniere que le pli de cette feuille se trouve au milieu de la barre du milieu du chassis, déplie la feuille & l'étend, & tâte avec son doigt si sa marge est égale tout - autour. Il porte ensuite légerement l'éponge sur le tympan, l'abaisse sur la feuille, passe la main sur le petit tympan en appuyant un peu afin que la feuille s'attache au grand tympan, & enleve la feuille. C'est cette feuille qui regle la marge de toutes les autres, c'est - à - dire que c'est sur cette feuille que l'on pose toutes les autres avant que de les imprimer en papier blanc ou du premier côté. Puis il déchire deux doigts de l'angle de cette feuille qui se trouve en bas du tympan sous sa main gauche, parce que cet angle l'empêcheroit d'enlever de dessus le tympan les feuilles à mesure qu'elles s'impriment.

Il pose ses pointures de façon que l'ardillon se rencontre juste sur le pli du milieu de la feuille, & réponde à la mortaise de la barre du milieu du chassis. Pour en être sûr, il couvre sa marge d'une mauvaise feuille, abaisse le tympan sur la forme, & appuie la main sur le petit tympan vers le bout des pointures: s'il ne trouve point de résistance c'est signe que l'ardillon répond juste à la mortaise du chassis. On arrête les pointures sur chaque côté du tympan au moyen d'une vis & d'un écrou. Elles servent au moyen des trous qu'elles font à chaque feuille qui s'imprime du premier côté, à faire rencontrer les pages de la seconde forme exactement sur les pages de la premiere forme tirée.

Il taille sa frisquette quand elle est seche. Il l'attache au tympan par le moyen des brochettes, & l'abaisse; puis après avoir touché la forme, il abaisse le tympan, roule la presse, & imprime le parchemin ou le papier collé sur la frisquette. Il déroule, leve le tympan, & avec des ciseaux découpe dans la frisquette ce qui doit être imprimé, & laisse tout ce qui doit être blanc. Puis il appuie le doigt tout autour des pages découpées, pour voir si rien ne mord, c'est - à - dire s'il a bien coupé tout ce qui doit être imprimé, & si quelque partie de la frisquette ne porte pas sur le caractere, ce qui l'empêcheroit de venir. Il doit aussi éviter de couper plus qu'il ne faut, car cela barbouilleroit, & il faudroit en collant la frisquette, y remettre ce qu'il en auroit ôté de trop. Au moyen de la frisquette, les feuilles passent sous la presse, & en reviennent sans avoir la moindre atteinte d'encre dans les marges.

Quand l'imprimeur a taillé sa frisquette, quelquefois même avant de la tailler, il fait son registre en papier blanc. Il prend une feuille de son papier, la marge, la couvre d'une mauvaise feuille, abaisse le tympan, & la fait passer sous presse pour l'imprimer, quoique la forme n'ait point été touchée. Il déroule la presse, leve le tympan, leve aussi la feuille, la retourne in - 8°., c'est - à - dire de haut - enbas & sens - dessus - dessous, la pointe ou la met dans les mêmes trous, la couvre de la mauvaise feuille, & la fait passer une seconde fois sous presse sans avoir été touchée; puis il déroule la presse, leve le tympan, & voit sur cette feuille, sur laquelle il n'y a des deux côtés que l'empreinte en blanc des caracteres, si les huit pages de cette même forme se rencontrent exactement les unes sur les autres. Si les pages se rencontrent exactement les unes sur autres, le registre en papier blanc est fait; & cela doit être quand le chassis est juste, quand les garnitures sont bonnes, & les pointures bien au milieu. Si les pages ne se rencontrent pas, il examine si le défaut vient du chassis, de la garniture, ou des pointures. Il remédie aux défauts du chassis & de la garniture en y ajoûtant quelques reglettes, & à l'égard des autres défauts, il y remédie aussi en faisant mouvoir les pointures. Après cela il tire une seconde feuille en blanc, pour être plus sûr de la rencontre juste des pages de sa forme les unes sur les autres. Quand l'imprimeur a bien fait son registre en papier blanc, sa forme est en train; & il lui est beaucoup plus facile de faire le registre de la retiration, c'est - à - dire de la seconde forme.

Il fait la tierce, jette avec l'éponge de l'eau sur le tympan, & desserre la forme. La tierce est la premiere feuille qu'il tire après avoir mis sa forme en train. Il porte cette feuille avec la derniere épreuve au prote, qui examine avec attention si rien ne mord ou si rien ne barbouille, si la marge est bonne, si toutes les fautes marquées par l'auteur ou le correcteur sur la derniere épreuve ont été exactement corrigées, & s'il n'y a point dans la forme des lettres mauvaises, dérangées, hautes ou basses, tombées, &c. S'il y a quelque chose à corriger, le prote le marque sur la tierce, & le corrige, après quoi il avertit les imprimeurs qu'ils peuvent aller leur train.

Alors l'imprimeur prend le taquoir, taque la forme, la serre un peu moins que quand il faut la lever, & décharge le tympan, en mettant dessus deux ou trois mauvaises feuilles de papier sec, & les tirant comme pour les imprimer. Puis les deux compagnons partagent le travail: l'un prend le barreau, l'autre prend les balles, & cela pendant le tirage d'une rame, qui contient cinq cens feuilles; après quoi celui qui étoit au barreau prend les balles, & celui qui avoit les balles prend le barreau: quand la presse est rude, la mutation se fait plus souvent.

L'office de celui qui a les balles est de broyer de l'encre, d'en prendre, de distribuer les balles, de toucher & de veiller à l'ouvrage. Pour broyer de l'encre, il pose le bord du broyon sur le tas d'encre; il s'y en attache un peu qu'il étend sur le bord de l'encrier. Il vaut mieux en broyer peu à la fois & en broyer plus souvent. Quand on en broie peu à la fois, elle s'étend plus facilement sur l'encrier, & se distribue mieux. Il prend de l'encre en approchant le cuir d'une des balles du bord de l'encrier. Il en faut prendre plus ou moins souvent, en raison du format & du caractere; puis il distribue les balles, c'est - à - dire qu'il les passe & repasse plusieurs fois l'une sur l'autre en les tournant en sens contraire. C'est une fonction qu'il ne doit point se lasser de faire; car rien ne contribue plus à faire une impression égale, que de prendre peu d'encre à la fois, & de distribuer souvent les balles. Ensuite il touche la forme, c'est - à - dire qu'il empreint l'oeil du caractere d'une couche d'encre légere, en faisant passer & repasser les balles successivement sur toutes les parties de la forme, en observant de bien appuyer les balles sur le caractere, de ne presque point le quitter en touchant, & de toucher du milieu des balles en les tenant bien droites. Enfin après avoir touché, il doit regarder attentivement l'ouvrage, pour voir si la frisquette ne mord point, ou si rien ne barbouille, si tout vient également, & quand on est en papier blanc, si la marge est bonne. Quand il y a quelque ordure sur la forme, ce qui arrive souvent, aussi - tôt qu'il s'en apperçoit sur le papier, il doit la chercher sur la forme & l'enlever avec la pointe. S'il voit quelque défaut, il doit y remédier, en averttir son compagnon. Par exemple, s'il y a quelques en<pb-> [p. 619] droits sur la forme qui viennent plus foibles, on met sur le tympan quelques hausses de papier gris, précisément de la grandeur de l'endroit foible; on les fait tenir avec un peu de salive, & on les mouille avec l'éponge. Si au contraire il y a quelques endroits qui viennent trop fort, & qui fassent sur la feuille comme une espece de bouquet, il faut mettre un support, qui est une réglette plus ou moins forte, pour empêcher le trop de foulage.

L'ouvrier de la presse qui est au barreau est celui qui imprime. Il prend la feuille, la porte sur le tympan, la pose sur la marge le plus juste qu'il peut, en jettant un coup d'oeil tout - autour, abaisse la frisquette, abat le tympan, roule la presse à moitié de la main gauche, prend le barreau de la main droite, tire le premier coup, c'est - à - dire imprime la moitié de la forme, laisse le barreau s'en retourner sans le quitter, roule la presse tout au fond ou à peu - près, suivant le format de l'ouvrage, tire le second coup, c'est - à - dire imprime l'autre moitié de la forme; laisse le barreau s'en retourner seul & de son propre mouvement sous le chevalet, déroule la presse, leve le tympan & la frisquette, prend la feuille imprimée avec les deux mains, & la pose à côté du papier blanc; observant, quand il a bien réglé son coup, de ne point aller ni plus ni moins avant, & de veiller aussi à l'ouvrage.

Quand donc les compagnons sont en train, tout le travail se partage de façon qu'ils sont également occupés tous les deux, & que ni l'un ni l'autre ne perd un moment. Pendant que le second imprimeur touche, le premier prend une feuille, la marge & abaisse la frisquette. Après que la forme est touchée, il abat le tympan, roule la presse, tire son premier & son second coup, déroule la presse & leve le tympan. Aussi - tôt que le tympan est levé, le second imprimeur touche pour une autre feuille; & pendant qu'il touche, le premier leve la frisquette, prend la feuille imprimée, la met à côté du papier à imprimer, prend une feuille blanche, la marge, & abaisse la frisquette, & après que la forme a été touchée, abat le tympan, roule la presse, imprime la feuille, déroule la presse, & leve le tympan. Pendant que le premier imprimeur abat le tympan, roule la presse, imprime la feuille, déroule la presse, & leve le tympan, le second a alternativement le tems de broyer de l'encre, d'en prendre, de distribuer les balles, & de regarder l'ouvrage; car aussitôt que le tympan est levé, si rien n'arrête, le second imprimeur doit toucher, afin que son compagnon n'attende pas après lui. Cette manoeuvre se continue ainsi pendant tout le tirage d'une forme. Voyez au mot Presse, le détail & la description de toutes ses parties, & les Planches d'Imprimerie.

Quand tout le papier blanc est tiré d'un côté, le premier imprimeur serre la forme, ôte trois coins de registre, ordinairement les deux d'en bas & un des côtés près de la platine, leve la forme, & la donne au second imprimeur qui la reçoit, & lui présente en même tems la retiration, c'est à - dire la forme du côté de la premiere. Le premier imprimeur couche cette forme sur le marbre de la presse, & doit avoir attention à la mettre dans la même position que l'autre. Ce qui se fait au moyen d'un clou qui est au coffre, & qui indique le milieu de la presse; & au moyen du compas, avec lequel il a dû prendre la hauteur de la premiere forme avant de la lever. Puis il voit si l'ardillon de ses pointures entre dans la mortaise du chassis en abaissant le tympan, & appuyant la main sur le bout des pointures. Ensuite l'imprimeur retourne son papier de haut - en - bas & sens - dessus - dessous, ensorte que le côté imprimé se trouve dessous, & le côté à imprimer dessus; puis il fait son registre en retiration. Il prend une feuille de son papier imprimé d'un côté, il la pointe, c'est - à - dire il la met dans les mêmes trous qui ont été faits en imprimant le premier côté, la couvre d'une mauvaise feuille, & la tire en blanc. Sur cette feuille il voit si les pages de la seconde forme se rencontrent justes sur les pages de la premiere forme. Si elles se rencontrent, le registre est fait: si elles ne se rencontrent pas, il faut y remédier, comme nous avons dit au registre en papier blanc, en ajoûtant au chassis ou à la garniture, &c en faisant mouvoir les pointures. Ensuite il fait la tierce du second côté, & la porte au prote qui la voit comme il a vu la tierce du premier côté, & qui la corrige s'il trouve quelque chose à corriger. Pendant que le prote voit la tierce, l'imprimeur met une feuille de papier de décharge ou de papier gris sur son tympan, par - dessous les pointures sans les remuer, la mouille avec l'éponge, & l'étend bien en passant le dos de la main par - dessus, déchire l'angle qui se trouve de son côté au bas du tympan, & arrête la feuille aux quatre coins avec un peu de colle, comme il a fait à la marge.

Pendant que le premier imprimeur fait les fonctions dont nous venons de parler, le second n'est pas oisif. D'abord il lave la forme qui sort de dessous la presse; puis si les balles sont seches, il les démonte, rafraîchit les cuirs, remonte les balles & les ratisse; ou bien il prépare du papier, soit en le trempant, soit en le remaniant, pour une autre feuille à tirer, après que celle qui est sous presse sera finie. Pour démonter les balles & rafraîchir les cuirs, il prend le pié - de - chevre, détache seulement quatre ou cinq clous de suite, ceux qui paroissent le moins bien attachés, sépare le cuir de la doublure, & passe, sans ôter le pain de laine, l'éponge mouillée sur l'envers du cuir & sur le côté de la doublure qui touche au cuir, puis remonte les balles & les ratisse.

Le premier imprimeur, dès que la tierce est corrigée, taque la forme, la serre, & décharge le tympan. Le second touche, & le premier tire; ils font tous deux la même manoeuvre qui a été expliquée au tirage de la premiere forme, & avec le même soin & la même attention. Toute la différence qu'il y a, c'est qu'au lieu de marger les feuilles, on les pointe, & qu'au lieu de prendre garde à la marge, on prend garde si le registre ne se dérange point, c'est - à - dire si les pages du premier & du second côté se rencontrent bien les unes sur les autres; en observant de retourner de tems en tems une feuille, pour voir la couleur de l'impression du premier côté, afin de donner au second côté la même teinte; au moyen de cette attention, l'impression sera égale & suivie des deux côtés. Il observera aussi de changer la feuille de décharge à chaque rame plus ou moins, à proportion que le premier côté décharge sur cette feuille; sans cela l'impression maculeroit.

Tous les soirs en quittant l'ouvrage, celui des deux imprimeurs qui est au barreau, décharge la forme, si le tirage n'en est pas fini, en mettant sur le tympan deux ou trois mauvaises feuilles seches & les tirant, il retourne ces feuilles & les tire une seconde fois: ou bien il trempe superficiellement la brosse dans la lessive, en donne quatre ou cinq tours à la forme, & la décharge comme nous venons de voir, ou bien, s'il y a encore beaucoup à tirer sur la forme, il la porte au bacquet, la lave, la laisse sécher pendant la nuit, & le lendemain matin la met sur la presse.

L'autre imprimeur démonte les balles, mais il y fait un peu plus de façon que pour les rafraîchir pendant la journée. Après avoir détaché cinq ou six clous, il ôte le pain de laine, le presse entre ses deux mains en tournant pour le desapplatir, sépare le cuir de la doublure, plie le cuir en deux du côté qu'il est encré; prend de l'eau nette dans une jatte, y

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