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IMPUISSANCE (Page 8:632)
IMPUISSANCE, s. f. (Med.) nom formé du mot puissance, & de la particule négative in ou im, qui désigne cette maladie, dans laquelle les hommes d'un âge requis ne sont pas propres à l'acte vénérien, ou du - moins ne peuvent pas l'accomplir exactement. Il faut pour une copulation complette non - seulement l'érection de la partie destinée à cette fonction, mais outre cela son intromission dans le vagin; & cet acte n'est qu'une peine inutile, s'il n'est pas suivi de l'éjaculation: ce qui constitue trois especes particulieres d'impuissance, & qui en établit les trois causes générales.
1°. L'érection est une suite & un effet assez ordinaire
de l'irritation singuliere occasionnée par la semence;
ainsi 1°. le défaut ou la rapidité de cette liqueur
peuvent l'empêcher; ce qui arrive à cette espece
d'homme que l'avarice ou la brutalité ont privé
du caractere le plus distinctif de la virilité. (Voyez
2°. Une des grandes causes d'érection est l'imagination
remplie d'idées voluptueuses, frappée de
quelque bel objet, bouillante de le posséder: le sang
& les esprits semblent alors agités par cette idée;
ils se portent avec rapidité à la verge, en dilatent
& distendent toutes les petites cellules, & la mettent
en état de remplir les desirs déja formés. Lorsque
cette cause vient à manquer, l'érection ne se fait
que mollement, ou même point du tout: ainsi un
mari sera impuissant vis - à - vis d'une femme laide,
dégoutante, libertine, gâtée, qui au lieu d'amour
excitera chez lui l'aversion, le mépris, ou la crainte.
La pudeur peut être aussi un obstacle à l'érection;
elle est gravée si profondément dans le coeur, que
les libertins les plus outrés ne pouvant la secouer,
il leur est impossible d'ériger devant beaucoup de
monde: c'est ce qui fait encore voir l'absurdité des
congrès établis autrefois pour constater la virilité.
L'étude trop forcée, des méditations profondes, un
état permanent de mélancolie, dissipent les pensées
amoureuses, semblent empêcher la génération
de la semence, rendent impuissant. Manget rapporte
une observation d'un jeune homme qui tomba dans
cette maladie après avoir passé plusieurs nuits à l'étude.
Biblioth. medic. pratiq. lib. IX. La crainte
d'un maléfice, l'imagination frappée des menaces
des noueurs d'éguillette, a eu très - souvent l'effet attendu
& n'a que trop accrédité ce préjugé dans
l'esprit du bas peuple, toûjours ignorant, & par
conséquent crédule. Il y a une foule d'observations
très - bien constatées de paysans, qui la premiere nuit
de leurs noces, quoique très - bien conformés, n'ont jamais
pû ériger malgré le voisinage, les caresses, les
attouchemens d'une femme jolie, aimable, & aimée,
parce qu'ils étoient, disoient - ils, enchantés, ensorcelés, parce qu'on leur avoit noué l'éguillette. Il est à remarquer
que ceux qui veulent s'amuser ou se venger
de ces gens - là par ce prétendu maléfice, ont
toûjours soin de les en avertir, de les en menacer;
ils pratiquent même en leur présence quelques - uns
des secrets qui passent pour avoir cette vertu: ce
qui leur frappe l'imagination, de façon que lorsqu'ils
veulent se joindre amoureusement à leurs femmes,
ils n'osent presque pas; ils sont tristes, abattus, languissans.
Ayant des causes aussi évidentes de ce fait,
il seroit ridicule de l'attribuer aux effets magiques,
ou à la puissance du démon: le seul magique ou miraculeux
tire son origine du secret des causes; mais
finissons, c'est une folie, dit un auteur ancien, de
s'arrêter trop à réfuter & approsondir les folles opinions.
3°. Une condition nécessaire à l'érection, est
le bon état & l'action des muscles qui vont de l'os
ischium sur le dos de la verge sous le nom d'érecteurs;
ainsi la paralysie de ces muscles est une raison suffisante
d'impuissance par défaut d'érection; elle peut
dépendre des causes générales de la paralysie, voyez
2°. La seconde cause d'impuissance est le défaut d'intromission qui arrive ordinairement par quelque vice de conformation, lorsque la verge manque tout - à - fait, lorsqu'elle n'est pas droite, lorsqu'elle est d'une grosseur monstrueuse, ou d'une extrème petitesse; quoiqu'elle entre alors dans le vagin, elle est incapable d'exciter une femme à l'éjaculation, & il est bien difficile que la matrice puisse recevoir comme il faut la semence qui en sort, quoiqu'elle s'abaisse ou s'allonge à un certain point pour la pomper & l'absorber entierement. D'ailleurs un homme si mal partagé manque de force, de chaleur, d'esprits, & de semence. L'intromission peut aussi être empêchée par la grosseur du ventre dans les hommes qui ont trop d'embonpoint, sur - tout s'ils ont affaire à une femme qui soit dans le même cas; si ce vice est considérable, c'est inutilement qu'on cherche des situations plus avantageuses & commodes, il est ordinairement suivi d'impuissance.
3°. La troisieme cause enfin dépend de l'éjaculation: si elle ne se fait pas du tout, ou si elle se fait autrement qu'elle ne doit, l'éjaculation manque totalement, 1°. par l'absence des arteres spermatiques, ainsi que l'a observé Riolan, Anthropogr. lib. II. cap. xxiij. 2°. par le défaut des resticules qui peuvent manquer, être obstrués, desséchés, relâchés, &c. 3°. par le vice des canaux deférens, qu'on a quelquefois trouvés nuls, dérangés, flétris, desséchés, racornis, Plater. Prax. lib. I. cap. xvij. Scholizius rapporte que dans un jeune homme mort impuissant & épileptique, les tuyaux déférens étoient à peine sensibles, les vaisseaux préparans ou spermatiques manquoient d'un côté, & les testicules étoient retirés dans le ventre. Journal des curieux, ann. 1671. observ. 62. 4°. par la foiblcsse, le relâchement des vésicules séminales, ou l'obstruction de leurs tuyaux excrétoires. Ces conduits qui donnent issue à la semence peuvent être bouchés par les cicatrices des ulceres qui se trouvent dans ces parties à la suite des gonorrhées, par des caruncules, par des calculs. Marcus Donatus dit avoir trouvé dans la prostate une pierre qui empêchoit l'élaboration de l'humeur prostatique, & l'excrétion de la vraie semence. Histor. mirab. lib. IV. cap. vj. Il y a une autre observation parfaitement semblable dans Frédéric Lossius, lib. I. observ. 33. II peut aussi arriver que la constriction dans laquelle sont ces parties durant l'acte vénérien, soit si forte qu'elle ferme totalement l'ouverture des conduits excréteurs; c'est ce qui fait que souvent le trop d'ardeur empêche l'éjaculation; c'est le cas d'un jeune homme bien constitué, dont le docteur Cockburne rapporte l'histoire, Essai & observat. d'Edimbourg. Lorsqu'il vaquoit aux devoirs & plaisirs conjugaux avec sa femme, il se tourmentoit inutilement sans pouvoir éjaculer; cependant en même tems il éprouvoit des pollutions nocturnes, ce qui donna lieu de penser au medecin que l'érection trop forte, la trop grande vivacité du jeune homme étoient la cause [p. 634]
On distingue l'impuissance de la stérilité ou infécondité de l'homme, en ce que celle ci ne suppose que le défaut de génération, peut dépendre de quelques vices cachés de la semence & existe souvent sans impuissance. Un homme très - vigoureux, très<-> puissant, peut être inhabile à la génération, au lieu que celui qui est impuissant ou peu propre au coït, à l'acte venérien, est toûjours stérile.
Cette maladie n'est accompagnée ordinairement d'aucune espece de danger; elle n'entraîne après elle que du desagrément; elle prive l'homme d'une fonction très - importante à la société, & très - agréable à lui - même; ce qui peut le rendre triste, le jetter dans la mélancolie; & il y a cependant tout lieu de croire qu'une impuissance subite sans cause apparente, & dans une personne qui n'est point accoutumée à cet accident, est l'avant - coureur de quelque grande maladie; la cessation de l'impuissance à la suite d'une maladie aiguë est un très - bon signe.
Curation. Il y a des cas où il n'est pas nécessaire de donner des remedes; comme par exemple, lorsqu'un homme n'est impuissant que dans certaines circonstances, au sortir d'une maladie aiguë, après des exercices violens, ou vis - à - vis d'une seule femme par crainte, par pudeur, par mépris, par haine, ou par excès d'amour; il seroit ridicule d'accabler, ainsi que le conseille un certain Louis Ranneman, le mari & la femme de saignées, de purgations, de pillules, d'aposèmes, de vins médicamenteux, de baumes, d'onguens, d'injections, &c. Il est d'autres cas où les remedes les plus propres à exciter l'appétit vénérien, les plus stimulans seroient parfaitement inutiles; tels sont ceux où l'impuissance dépend d'un défaut de conformation. Ces remedes seroient aussi insuffisans, lorsque l'imagination est vivement frappée par la crainte & la persuasion d'un sortilége. Je remarquerai seulement par rapport à ces gens - là, qu'il ne faut pas heurter leurs sentimens; les meilleures raisons ne font aucune impression sur ceux qui donnent tête baissée dans ce ridicule; l'opiniâtreté suit de près l'ignorance. Ainsi il est à propos quand on veut guérir ces imaginations, de flatter ces personnes, de paroître persuadés & touchés de leur accident, & leur promettre des secours immanquables pour le dissiper; les plus extraordinaires sont toûjours les plus efficaces; comme merveilleux, ils sont plus propres à gagner la confiance, ce qui est un point important; c'est une grande partie de la santé
Impuissance (Page 8:634)
Les lois canoniques ne distinguent que trois causes d'impuissance; savoir, la frigidité, le maléfice, & l'inhabileté qui vient ex impotentiâ coeundi.
Ces causes se subdivisent en plusieurs classes.
Il y a des causes d'impuissance qui sont propres aux hommes, comme la frigidité, le maléfice, la ligature ou nouement d'éguillette; les causes propres aux femmes sont l'empêchement qui provient ex clausurâ uteri, aut ex nimiâ arctitudine; les causes communes aux hommes & aux femmes sont le défaut de puberté, le défaut de conformation des parties nécessaires à la génération, ou lorsque l'homme & la femme ne peuvent se joindre propter surabondantem ventris pinguedinem.
Les causes d'impuissance sont naturelles ou accidentelles; celles - ci sont perpétuelles ou momentanées; il n'y a que les causes d'impuissance perpétuelles qui forment un empêchement dirimant du mariage, encore excepte - t - on celles qui sont survenues depuis le mariage. [p. 635]
On distingue aussi l'impuissance absolue d'avec celle qui est seulement respective ou relative. La premiere, quand elle est perpétuelle, qu'elle a précédé le mariage, le dissout, & empêche d'en contracter un autre. Au lieu que l'impuissance respective ou relative, c'est - à - dire, qui n'a lieu qu'à l'égard de deux personnes entr'elles, n'empêche pas ces personnes, ou celle qui n'a point en elle de vice d'impuissance, de contracter mariage ailleurs.
La frigidité est lorsque l'homme, quoique bien conformé extérieurement, est privé de la faculté qui anime les organes destinés à la génération.
Le défaut de semence de la part de l'homme est une cause d'impuissance: mais on ne peut pas le regarder comme impuissant, sous prétexte que sa semence ne seroit pas prolifique; c'est un my stere que l'on ne peut pénétrer.
La stérilité de la femme, en quelque tems qu'elle arrive, n'est pas non plus considérée comme un effet d'impuissance proprement dite, & conséquemment n'est point une cause pour dissoudre le mariage.
On met au nombre des empêchemens dirimans du mariage le maléfice, supposé qu'il provînt d'une cause surnaturelle (ce que l'on ne doit pas croire légérement), & qu'après la pénitence enjointe & la cohabitation triennale, l'empêchement ne cessât point & fût réputé perpétuel: mais si l'impuissance provenant de maléfice, peut être guérie par des remedes naturels, ou que la cause ne paroisse pas perpétuelle, ou qu'elle ne soit survenue qu'après le mariage: dans tous ces cas elle ne forme point un empêchement dirimant.
Quoique le défaut de puberté soit un empêchement au mariage, cet empêchement ne seroit pas dirimant, si la malice & la vigueur avoient précédé l'âge ordinaire de la puberté.
La vieillesse n'est jamais réputée une cause d'impuissance, ni un empêchement au mariage, soit qu'elle précede le mariage, ou qu'elle survienne depuis.
Il en est de même des infirmités qui seroient survenues depuis le mariage, quand même elles seroient incurables, & qu'elles rendroient inhabiles à la génération.
La connoissance des demandes en nullité de mariage pour cause d'impuissance appartient naturellement au juge séculier; & pendant les six premiers siecles de l'Eglise, les juges séculiers étoient les seuls devant lesquels ces sortes de causes fussent portées. Néanmoins, présentement les juges d'église sont en possession de connoitre de ces sortes de demandes, sauf en cas d'abus l'appel au parlement.
Les premieres auxquelles on a recours dans cette matiere, sont l'interrogatoire des parties, le serment des parens, la visite du mari & de la femme. On ordonne aussi la preuve du mouvement naturel, lorsque le mari est accusé de frigidité.
On ordonnoit aussi autrefois le congrès, ce qui a été sagement aboli.
On ordonne seulement encore quelquefois la cohabitation triennale pour éprouver les parties, & connoître si l'impuissance est réelle & perpétuelle.
Dans le cas où le mariage est déclaré nul pour cause d'impuissance, les canons permettent aux contractans la cohabitation fraternelle; mais alors ils doivent réellement vivre avec la même retenue que des personnes qui ne sont point mariées.
Voyez au code le titre de frigidis & castratis, & aux décrétales le titre de frigidis & maleficiatis, les conférences de Caseneuve, Hotman & Tagerau, traités de l'impuissance. Voyez aussi le traité de la dissolution du mariage pour cause d'impuissance, par M. Bouhier. (A)
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