ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS
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IMPUDENCE
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IMPUDENCE, s. f. (Morale.) manque de pudeur
pour soi - même, & de respect pour les autres.
Je la définis une hardiesse insolente à commettre de
gaieté de coeur des actions dont les lois, soit naturelles,
soit morales, soit civiles, ordonnent qu'on
rougisse; car on n'est point blâmable, de n'avoir
pas honte d'une chose, qu'aucune loi ne défend;
mais il est honteux d'être insensible aux choses qui
sont deshonnêtes en elles mêmes.
Ce vice a différens degrés, & des nuances différentes,
selon le caractere des peuples. Il semble que
l'impudence d'un françois brave tout, avec des traits
qui font rire, en même tems que la réflexion porte
à en être indigné: l'impudence d'un italien est affectueuse
& grimaciere; celle d'un anglois est fiere &
chagrine; celle d'un écossois est avide; celle d'un
irlandois est flatteuse, légere, & grotesque. J'ai connu,
dit Adisson dans le spectateur, un de ces impudens irlandois, qui trois mois après avoir quitté le
manche de la charrue, prit librement la main d'une
demoiselle de la premiere qualité, qu'un de nos anglois
n'auroit pas osé regarder entre les deux yeux,
après avoir étudié quatre années à Oxford, & deux
ans au Temple.
Mais sous quelque aspect que l'impudence se manifeste,
c'est toûjours un vice qui part d'une mauvaise
éducation, & plus encore d'un caractere sans pudeur,
en sorte que tout impudent est une espece de
proscrit naturellement par les lois de la société.
Voyez Effronté.
Impudence
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Impudence, (Antiq. greq.) l'Impudence, ainsi
que l'Injure ou l'Outrage, eurent dans la ville d'Athènes un temple commun, dont voici l'histoire en
peu de mots. Il y avoit à l'Aréopage deux especes
de masses d'argent taillées en siéges, sur lesquelles
on faisoit asseoir l'accusateur & l'accusé. L'une de
ces deux masses étoit consacrée à l'Injure, & l'autre
à l'Impudence. Cette ébauche de culte fut perfectionnée
par Epiménides, qui commença par élever à
ces deux especes de divinités allégoriques, des autels
dans les formes; & bien - tôt après, il leur bâtit
un temple, dont Ciceron parle ainsi dans son II. livre
des lois: illud vitiosum Athenis, quòd Cylonis
scelere expiato, Epimenide Cretensi suadente, fecerunt
contumelioe fanum & impudentiae. Virtutes, ajoute
l'orateur romain, non vitia consecrare decet. Sans
doute qu'il faut consacrer les vertus & non pas les
vices: mais, quoi qu'en dise Ciceron, ce que les
Athéniens firent ici, ne s'écartoit point de son principe;
ils en remplissoient parfaitement l'idée; leur
temple à l'Outrage & à l'Impudence, n'indiquoit point
qu'ils honorassent ces deux vices; il désignoit tout
au contraire, qu'ils les détestoient. C'est ainsi que
les Grecs & les Romains sacrifierent à la peur, à la
fiévre, à la tempête, aux dieux des enfers; ils n'invoquoient
en un mot toutes les divinités nuisibles,
& ne leur rendoient un culte, que pour les détourner
de nuire. Au reste, le temple dont il s'agit présentement,
répondoit à celui qu'Oreste avoit consacré
aux Furies, qui en l'amenant à Athènes, lui
procurerent la protection de Minerve, comme nous
l'apprenons de Pausanias, in Attic. (D. J.)
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