ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"549"> aux membres, ou de quelques rapports déliés que nous attachons involontairement entre les passions de l'ame & l'habitude extérieure du corps. Si l'homme s'estime, a de la confiance en lui - même, ne se fait aucun reproche secret, & n'en craint point des autres, sent ses avantages naturels ou acquis, est résigné aux évenemens, & ne fait des dangers & de la perte de la vie, qu'un compte médiocre; il annoncera communément ce caractere par ses traits, sa démarche, ses regards & son maintien, & il nous laissera dans l'esprit une image qui nous servira de modele. Si la noblesse de l'air se trouve jointe à la beauté, à la jeunesse & à la modestie, qui est - ce qui lui résistera?

Les manieres sont ignobles, lorsqu'elles décelent un intérêt sordide; les sentimens, lorsqu'on y remarque la vérité, la justice & la vertu blessées par la préférence qu'on accorde sur elles à tout autre objet; le ton dans la conversation, & le style dans les écrits, lorsque les expressions, les comparaisons, les idées sont empruntées d'objets vils & populaires; mais il n'y en a guere que le génie & le goût ne puissent annoblir.

IGNOMINIE (Page 8:549)

* IGNOMINIE, s. f. (Gram. & Morale.) dégradation du caractere public d'un homme; on y est conduit ou par l'action ou par le châtiment. L'innocence reconnue efface l'ignominie du châtiment. L'ignominie de l'action est une tache qui ne s'efface jamais; il vaut mieux mourir avec honneur que vivre avec ignominie. L'homme qui est tombé dans l'ignominie est condamné à marcher sur la terre la tête baissée; il n'a de ressource que dans l'impudence ou la mort. Lorsque l'équité des siecles absout un homme de l'ignominie, elle retombe sur le peuple qui l'a flétri. Un l'égislateur éclairé n'attachera de peines ignominieuses qu'aux actions, dont la méchanceté sera avouée dans tous les tems & chez toutes les nations.

IGNORANCE (Page 8:549)

IGNORANCE, s. f. (Métaphysique.) l'ignorance consiste proprement dans la privation de l'idée d'une chose, ou de ce qui sert à former un jugement sur cette chose. Il y en a qui la définissent privation ou négation de science; mais comme le terme de science, dans son sens précis & philosophique, emporte une connoissance certaine & démontrée, ce seroit donner une définition incomplette de l'ignorance, que de la restreindre au défaut des connoissances certaines. On n'ignore point une infinité de choses qu'on ne sauroit démontrer. La définition que nous donnons dans cet article, d'après M. Wolf, est donc plus exacte. Nous ignorons, ou ce dont nous n'avons point absolument d'idée, ou les choses sur lesquelles nous n'avons pas ce qui est nécessaire pour former un jugement, quoique nous en ayons déja quelque idée. Celui qui n'a jamais vû d'huître, par exemple, est dans l'ignorance du sujet même qui porte ce nom; mais celui à la vûe duquel une huître se présente en acquiert l'idée, mais il ignore quel jugement il en doit porter, & n'oseroit affirmer que ce soit un mets mangeable, beaucoup moins que ce soit un mets délicieux. Sa propre expérience, ni celle d'autrui, dans la supposition que personne ne l'ait instruit là - dessus, ne lui fournissent point matiere à prononcer. Il peut bien s'imaginer, à la vérité, que l'huître est bonne à manger, mais c'est un soupçon, un jugement hasardé; rien ne l'assure encore de la possibilité de la chose.

Les causes de notre ignorance procedent donc 1°. du manque de nos idées; 2°. de ce que nous ne pouvons pas découvrir la connexion qui est entre les idées que nous avons; 3°. de ce que nous ne réfléchissons pas assez sur nos idées: car si nous considérons en premier lieu que les notions que nous avons par nos facultés n'ont aucune proportion avec les choses mêmes, puisque nous n'avons pas une idée claire & distincte de la substance même qui est le fondement de tout le reste, nous teconnoîtrons aisément combien peu nous pouvons avoir de notions certaines; & sans parler des corps qui échappent à notre connoissance, à cause de leur éloignement, il y en a une infinité qui nous sont inconnus à cause de leur petitesse. Or, comme ces parties subtiles qui nous sont insensibles, sont parties actives de la matiere, & les premiers matériaux dont elle se sert, & desquels dépendent les secondes qualités & la plûpart des opérations naturelles, nous sommes obligés, par le défaut de leur notion; de rester dans une ignorance invincible de ce que nous voudrions connoître à leur sujet, nous étant impossible de former aucun jugement certain, n'ayant de ces premiers corpuscules aucune idée précise & distincte.

S'il nous étoit possible de connoître par nos sens ces parties déliées & subtiles, qui sont les parties actives de la matiere, nous distinguerions leurs opérations méchaniques avec autant de facilité qu'en a un horloger pour connoître la raison pour laquelle une montre va ou s'arrête. Nous ne serions point embarassés d'expliquer pourquoi l'argent se dissout dans l'eau - forte, & non point dans l'eau régale; au contraire de l'or, qui se dissout dans l'eau régale, & non pas dans l'eau - forte. Si nos sens pouvoient être assez aigus pour appercevoir les parties actives de la matiere, nous verrions travailler les parties de l'eau - forte sur celles de l'argent, & cette méchanique nous seroit aussi facile à découvrir, qu'il l'est à l'horloger de savoir comment, & par quel ressort, se fait le mouvement d'une pendule; mais le défaut de nos sens ne nous laisse que des conjectures, fondées sur des idées qui sont peut - être fausses, & nous ne pouvons être assurés d'aucune chose sur leur sujet, que de ce que nous pouvons en apprendre par un petit nombre d'expériences qui ne réussissent pas toûjours, & dont chacun explique les opérations secrettes à sa fantaisie.

La difficulté que nous avons de trouver la connéxion de nos idées, est la seconde cause de notre ignorance. Il nous est impossible de déduire en aucune maniere les idées des qualités sensibles que nous avons des corps; il nous est encore impossible de concevoir que la pensée puisse produire le mouvement dans un corps, & que le corps puisse à son tour produire la pensée dans l'esprit. Nous ne pouvons pénétrer comment l'esprit agit sur la matiere, & la matiere sur l'esprit; la foiblesse de notre entendement ne sauroit trouver la connéxion de ces idées, & le seul secours que nous ayons, est de recoutir à un agent tout - puissant & tout sage, qui opere par des moyens que notre foiblesse ne peut pénétrer.

Enfin notre paresse, notre négligence, & notre peu d'attention à réfléchir, sont aussi des causes de notre ignorance. Nous avons souvent des idées complettes, desquelles nous pouvons aisément découvrir la connéxion; mais faute de suivre ces idées, & de découvrir des idées moyennes qui puissent nous apprendre quelle espece de convenance ou de disconvenance elles ont entr'elles, nous restons dans notre ignorance. Cette derniere ignorance est blâmable, & non pas celle qui commence où finissent nos idées. Elle ne doit avoir rien d'affligeant pour nous, parce que nous devons nous prendre tels que nous sommes, & non pas tels qu'il semble à l'imagination que nous pourrions être. Pourquoi regretterions-nous des connoissances que nous n'avons pû nous procurer, & qui sans doute ne nous sont pas fort nécessaires, puisque nous en sommes privés. J'aimerois autant, a dit un des premiers génies de notre siecle, m'affliger sérieusement de n'avoir pas quatre yeux, quatre piés, & deux aîles. [p. 550]

Ignorance (Page 8:550)

Ignorance, (Morale.) L'ignorance, en Morale, est distinguée de l'erreur. L'ignorance n'est qu'une privation d'idées ou de connoissance; mais l'erreur est la non - conformité ou l'opposition de nos idees avec la nature & l'état des choses. Ainsi l'erreur étant le renversement de la vérité, elle lui est beaucoup plus contraire que l'ignorance, qui est comme un milieu entre la vérité & l'erreur. Il faut remarquer que nous ne parlons pas ici de l'ignorance & de l'erreur, simplement pour connoître ce|qu'elles sont en elles - mêmes; notre principal but est de les envisager comme principes de nos actions. Sur ce pié - là, l'ignorance & l'erreur, quoique naturellement distinctes l'une de l'autre, se trouvent pour l'ordinaire mêlées ensemble & comme confondues, ensorte que ce que l'on dit de l'une, doit également s'appliquer à l'autre. L'ignorance est souvent la cause de l'erreur; mais jointes ou non, elles suivent les mêmes regles, & produisent le même effet par l'influence qu'elles ont sur nos actions ou nos omissions. Peut - être même que dans l'exacte précision, il n'y a proprement que l'erreur qui puisse être le principe de quelque action, & non la simple ignorance, qui n'étant en elle - même qu'une privation d'idées, ne sauroit rien produire.

L'ignorance & l'erreur sont de plusieurs sortes, & il est nécessaire d'en marquer ici les différences. 1°. L'erreur considérée par rapport à son objet est ou de droit ou de fait. 2°. Par rapport à son origine, l'ignorance est ou volontaire ou involontaire; l'erreur est vincible ou invincible. 3°. Eu égard à l'influence de l'erreur sur l'action ou sur l'affaire dont il s'agit, elle est essentielle ou accidentelle.

L'erreur est de droit ou de fait, suivant que l'on se trompe, ou sur la disposition d'une loi, ou sur un fait qui n'est pas bien connu. Ce seroit, par exemple, une erreur de droit, si un prince jugeoit que de cela seul qu'un état voisin augmente insensiblement en force & en puissance, il peut légitimement lui déclarer la guerre. Au contraire, l'idée qu'avoit Abimelec de Sara, femme d'Abraham, en la prenant pour une personne libre, étoit une erreur de fait.

L'ignorance dans laquelle on se trouve par sa faute, ou l'erreur contractée par négligence, & dont on se seroit garanti, si l'on eût pris tous les soins dont on étoit capable, est une ignorance volontaire, ou bien c'est une erreur vincible. Ainsi le polithéïsme des Payens étoit une erreur vincible; car il ne tenoit qu'à eux de faire usage de leur raison pour comprendre qu'il n'y avoit nulle nécessité de supposer plusieurs dieux. Mais l'ignorance est involontaire, & l'erreur est invincible, si elles sont telles que l'on n'ait pû ni s'en garantir, ni s'en relever, même avec tous les soins moralement possibles. C'est ainsi que l'ignoranée où étoient les Américains de la religion chrétienne avant qu'ils eussent aucun commerce avec les Européens, étoit une ignorance involontaire & invincible.

Enfin, l'on entend par une erreur essentielle, celle qui a pour objet quelque circonstance nécessaire dans l'affaire dont il s'agit, & qui par cela même a une influence directe sur l'action faite en conséquence, ensorte que sans cette erreur, l'action n'auroit point été faire. C'étoit, par exemple, une erreur essentielle que celle des Troyens, qui, à la prise de leur ville, lançoient des traits sur leurs propres gens, les prenant pour des ennemis, parce qu'ils étoient armés à la greque.

Au contraire, l'erreur accidentelle est celle qui n'a par elle - même nulle liaison nécessaire avec l'affaire dont il s'agit, & qui par conséquent ne sauroit être considérée comme la vraie cause de l'action.

A l'égard des choses faites par erreur ou par ignorance, on peut dire en général que l'on n'est point responsable de ce que l'on fait par une ignorance in - vincible, quand d'ailleurs elle est involontaire dans son origine & dans sa cause. Si un prince traverse ses états, travesti & incognito, ses sujets ne sont point blâmables de ce qu'ils ne lui rendent pas les honneurs qui lui sont dûs. Mais on imputeroit avec raison une sentence injuste à un juge qui par sa négligence à s'instruire du fait ou du droit, auroit manqué des connoissances nécessaires pour juger avec equité. Au reste, la possibilité de s'instruire, & les soins que l'on doit prendre pour cela, ne s'estiment pas à toute rigueur dans le train ordinaire de la vie; on considere ce qui se peut ou ne se peut pas moralement, & avec de justes égards à l'état actuel de l'humanité.

L'ignorance ou l'erreur en matiere de lois & de devoirs, passe en général pour volontaire, & n'empêche point l'imputation des actions ou des omissions qui en sont les sultes. Mais il peut y avoir des cas particuliers, dans lesquels la nature de la chose qui se trouve par elle - même d'une discussion difficile, jointe au caractere & à l'état de la personne, dont les facultés naturellement bornées ont encore manqué de culture par un défaut d'éducation, rendent l'erreur insurmontable, & par conséquent digne d'excuse. C'est à la prudence du législateur à peser ces circonstances, & à modifier l'imputation sur ce pié - là.

IGUALADA (Page 8:550)

IGUALADA, (Géogr.) petite ville d'Espagne, dans la Catalogne, sur la riviere de Noa.

IGUANA (Page 8:550)

IGUANA, s. m. (Zoolog.) sorte de lézard amphibie, très - commun aux Indes occidentales. Sa couleur est dans quelques - uns mi - partie brune & mipartie grise; dans quelques autres elle est d'un beau verd, marqueté de taches noires & blanches. Du col à la queue regne une chaîne d'écailles vertes, applaties & dentelées dans les bords. Le cabinet du sieur Seba donne la description & la figure des plus beaux iguana. (D. J.)

IGUARUCU (Page 8:550)

* IGUARUCU. s. m. (Hist. nat. Zoologie.) animal du Brésil; c'est un amphybie. Il vit sous l'eau comme les poissons; il marche sur la terre comme les quadrupedes; il grimpe aux arbres comme quelques serpens. Il se retire dans les brossailles. Il a la forme du crocodile; il est de la grosseur du boeuf; sa peau est noire; il n'a point d'écailles dures comme le crocodile; son corps est uni, mais tacheté. Son dos est hérissé d'arrêtes en forme de peigne, depuis la tête jusqu'à la queue. L'ouverture de sa gueule est grande; ses dents d'une force médiocre, & plûtôt menues que grosses. Ses ongles, semblables aux serres des oiseaux, mais foibles & innocens; il pond des oeufs en grande quantité, & on les mange. Il souffre long - tems la soif & la faim. Sa chair est un mets délicat; les Espagnols s'y sont faits, & l'exemple des Américains leur a ôté la répugnance qu'ils en avoient d'abord.

IHNA (Page 8:550)

IHNA, (Géogr.) riviere d'Allemagne, dans la nouvelle Marche de Brandebourg. Elle prend sa source à Reetz; & après avoir traversé la Poméranie, se jette dans la mer Baltique.

IHOR (Page 8:550)

IHOR, (Géog.) ville d'un petit royaume de même nom en Asie, dans le continent de Malaca. Les habitans sont mahométans, & trafiquent le long des côtes dans leurs petites barques, qu'ils appellent procs, & que les Européens nomment demi - lunes, à cause de leur figure. Le roi de Siam se fait payer tous les ans par ce petit état un tribut de trois cens livres de notre monnoie actuelle. Long. 121. 30. lat. 1. 58. (D. J.)

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