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Pour rentrer encore un moment dans notre continent, il y a, à ce qu'on dit, en Saxe & dans le pays d'Hanovre, beaucoup de mines d'argent: on trouva à Hartz un morceau d'argent si considérable, qu'étant battu, on en fit une table où pouvoient s'asseoir vingt - quatre personnes.
Les mines les plus riches, après la mine naturelle, sont les mines d'argent corné; elles cedent sous le marteau comme fait le plomb, & elles se laissent couper comme de la corne; elles contiennent de l'arsenic. La couleur de ces mines est no>átre; & plus elles sont noirâtres, plus elles sont riches: il y en a de si riches, qu'elles donnent cent quatre - vingts marcs d'argent par quintal; c'est - à - dire par cent livres de mine; de sorte qu'il n'y a que dix livres de déchet, sur chaque quintal de mine. Il y en a qui n'est ni si facile à couper ni si noire, & elle donne cent soixante marcs d'argent par quintal: ces mines sont fort aisées à fondre, pourvû qu'on les ait séparées des pierres qui y sont souvent jointes, & pourvû qu'elles ne soient pas mêlées de cobalth, qui est ordinairement ferrugineux. Les mines d'argent noires sont rarement seules; elles se trouvent presque toûjours avec la blende & avec le misprekel, qui est une espece de cobalth ou mine arsénicale. On a beaucoup de peine à les en séparer; ce qui rend la mine difficile à fondre: ces mines noires d'argent se trou<cb->
La mine d'argent rouge est la plus riche, après la mine cornée. Il y a de plusieurs sortes de mines d'argent rouge; il y en a qui sont en grappes de raisin; il y en a de transparentes, d'autres qui ne le sont pas; il y en a de noires avec des taches rouges; il y en a de dures, compactes, & rouges comme du cinabre; ce sont de toutes les mines rouges d'argent les plus riches; elles donnent depuis 90 jusqu'à 100 marcs d'argent par quintal. Celles qui sont comme de la suie, tachetées de rouge, donnent vingt marcs par quintal. Cette mine se trouve ordinairement dans les montagnes arides. Les mines rouges se trouvent quelquefois dans des pierres dures, qui paroissent à la vûe peintes de couleur de sang. Ces pierres sont ou du quartz, ou de la pierre à fusil, que les mineur> appellent pierre cornée, à cause de sa res<-> >n blance avec la corne de cheval coupée.
Les mines blanches & grises donnent jusqu'à 20 ma>s d'argent par quintal. On trouve dans des soûterrains de ces mines blanches qui ne donnent qu'un mate par quintal; c'est ce qu'on nomme fausse apparence.
Pour retirer l'argent du minerai qui le contient, on commence par >e caster en morceaux assez petits, pour être mouius & broyés sous des pilons de fer qui petent jusqu'à deux cens livres, & qui pour l'ordinaire tont mis en mouvement par le moyen de l'eau. On paste le minerai réduit en poudre par un crible de ser ou de cuivre, & on le pétrit avec de l'eau pour en faire une pâte qu'on laisse un peu dessécher; puis on la petrit derechef avec du sel marin; enfin on y jette du mercure, & on la pétrit une troisieme fois pour incorpoier le mercure avec l'argent; c'est - là ce qu'on appelle amalgame. Huit ou dix jours suffi>ent pour la faire dans les lieux tempérés: mais dans les pays froids il faut quelquefois un mois ou six semaines. On jette la pâte dans des lavoirs pour en séparer la terre: ces lavoirs consistent en trois bassins qui sont sur le courant d'un ruisseau qui entraîne la terre, lorsqu'elle a été délayée dans chaque bassin. Pour faciliter l'opération, on agite continuellement la pâte avec les piés, afin que quand l'eau sort claire des bassins, il ne reste au fond que de l'argent & du mercure amalgamés ensemble, c'est ce qu'on appelle pigne. On tâche de tirer le mercure qui n'est pas uni a l'argent, en pressant la pigne, en la battant fortement, ou en la foulant dans une presse ou moule. Il y a des pignes de différentes grosseurs & de différentes pesanteurs; ordinairement elles contiennent de l'argent pour le tiers de leur poids; le mercure fait les deux autres tiers. On pose la pigne sur un trepié, au - dessous duquel est un vase rempli d'eau; on couvre le tout avec de la terre en forme de chapiteau, que l'on environne de charbons ardens. L'action du feu fait sortir le mercure de la pigne; il se sublime, & ensuite il retombe dans l'eau où il se condense. Les intervalles que le mercure occupoit dans la pigne restent vuides; ce n'est plus qu'une masse d'argent poreuse & légere, en comparaison de son volume.
On peut encore tirer l'argent de la mine de la maniere suivante: on commence par la casser, & quelquefois on la lave pour en séparer la partie pierreuse qui s'est réduite en poussiere; on la calcine ensuite pour en chasser le soufre & l'arsenic; c'est ce qu'on appelle rotir la mine; puis on la relave pour en ôter la poudre calcinée. La mine étant ainsi préparée, on la fait fondre avec du plomb ou avec de la litharge, ou avec des têtes de coupelles qui ont servi: on employe à cet effet le plomb granulé, quand le travail est petit. Plus la mine est dif<pb-> [p. 641]
Pour séparer l'argent du mercure avec lequel il est amalgamé, on a un fourneau qui a une ouverture au sommet; on couvre cette ouverture d'une espece de chapiteau de terre de forme cylindrique, qu'on peut laisser ou enlever à discrétion. Quand on a mis dans le fourneau la masse d'argent & le mercure, & qu'on a appliqué le couvercle & allumé le feu, le vif - argent s'éleve en forme de vapeurs, & s'attache au chapiteau, d'où on le retire pour le faire servir une seconde fois.
Lorsque l'argent est bien purisié, qu'on en a ôté, autant qu'il est possible, toute la matiere étrangere, soit métallique ou autre, qui pourroit y être mêlée, on dit qu'il est de douze deniers; c'est - là l'expression dont on se sert pour désigner le titre de l'argent le plus pur, & sans aucun mêlange ni alliage: mais s'il s'y en trouve, on déduit le poids du mêlange du poids principal, & le reste marque le titre de l'argent. Le denier est de 24 grains; ainsi lorsque sur le poids de douze deniers il y a douze grains de mêlange, le titre de l'argent est onze deniers douze grains; & ainsi des autres exemples.
Pour monter le titre de l'argent en le rafinant, on
s'y prend de la maniere suivante: on met une coupelle
ou une tête à rougir au feu, ensuite on y met
le plomb; quand le plomb est fondu, & bien clair,
on y ajoûte une quantitité d'argent proportionnée;
savoir, une livre de plomb pour quatre à cinq onces
d'argent; on met quelquefois davantage de
plomb, lorsque l'argent a beaucoup d'alliage. A mesure
que ces deux métaux se fondent ensemble, le
cuivre, qui auparavant étoit mêlé avec l'argent,
s'en va en fumée, ou sort avec l'écume & la litharge;
le plomb s'évapore de même, & il ne reste dans
la coupelle que l'argent, qui est au degré de finesse
qui lui convient. V.
Indépendamment de la maniere de raffiner l'argent avec le plomb, il y en a une autre qui se fait
avec le salpetre. V.
L'argent, en Chimie, s'appelle luna, lune: on en fait différentes préparations, principalement une teinture. Pour avoir la teinture d'argent, dissolvez des plaques d'argent minces dans l'esprit de nitre, & jettez cette dissolution dans un autre vase plein d'eau de sel; par ce moyen l'argent se précipite aussi - tôt en une poudre blanche qu'on lave plusieurs fois dans l'eau de fontaine: on met cette poudre dans un matras, & on jette par - dessus de l'esprit - devin rectifié, & du sel volatil d'urine: on laisse digérer le tout sur un - feu modéré pendant quinze jours; durant ce tems l'esprit - de - vin contracte une belle couleur bleu - céleste. Cette couleur lui vient du cui<cb->
On peut convertir l'argent en crystal par le moyen
de l'esprit de nitre; & c'est ce qu'on appelle improprement
vitriol d'argent. Voyez
La pierre infernale d'argent n'est rien autre chose que le crystal d'argent fondu dans un creuset à une chaleur modérée, & ensuite jettée dans des moules de fer.
Lorsqu'on verse dans une dissolution d'argent faite
par l'eau - forte de l'esprit de sel, ou du sel commun
fondu dans de l'eau, l'argent se précipite en une
poudre qu'on nomme chaux d'argent; cette chaux
d'argent se fond aisément au feu; elle s'y dissipe si le
feu est fort; & si au contraire le feu est médiocre,
& qu'on ne l'y laisse pas long - tems, la chaux d'argent se change en une masse qui est un peu transparente,
& qu'on peut couper comme de la corne:
dans cet état on la nomme lune cornée. Voyez
On peut conjecturer sur ce qui précede, que la maniere
de séparer l'argent d'avec la terre de mine, est
la même que celle dont on sépare l'or de la mine;
c'est - à dire, par le moyen du vif - argent; avec cette
différence que pour l'argent, on ajoute sur 50000
livres pesant de mine, mille livres de sel de roche,
ou de quelqu'autre sel naturel. Voyez la description
au long de cette curieuse opération à l'article
L'argent est après l'or le métal le plus fixe. Kunckel ayant laissé pendant un mois de l'argent bien pur en fonte dans un feu de verrerie, trouva après ce tems qu'il n'avoit diminué que d'une soixante - quatrieme partie. Haston de Claves exposa de même de l'argent dans un fourneau de verrerie, & l'ayant laissé deux mois dans cet état, il le trouva diminué d'un douzieme, & couvert d'un verre couleur de citron. On ne peut douter que cette diminution ne provînt de la matiere qui s'étoit séparée & vitrifiée à la surface de l'argent; & on peut assûrer que ce verre n'est point un argent dont les principes ayent été détruits par le feu; c'est plûtôt un composé de cuivre, de plomb, & d'autres matieres étrangeres qui se trouvent presque toûjours dans l'argent.
L'argent est moins ductile que l'or; il l'est plus
qu'aucun des autres métaux. Voyez
Argent (Page 1:641)
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