ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS
Previous page
HOMME
(Page 8:256)
* HOMME, s. m. c'est un être sentant, réfléchissant,
pensant, qui se promene librement sur la surface
de la terre, qui paroît être à la tête de tous les
autres animaux sur lesquels il domine, qui vit en société,
qui a inventé des sciences & des arts, qui a
une bonté & une méchanceté qui lui est propre, qui
s'est donné des maîtres, qui s'est fait des lois, &c.
On peut le considérer sous différens aspects, dont
les principaux formeront les articles suivans.
Il est composé de deux substances, l'une qu'on appelle
ame (Voyez l'article Ame), l'autre connue sous
le nom dé corps.
Le corps ou la partie matérielle de l'homme a été
beaucoup étudiée. On a donné le nom d'Anatomistes
[p. 257]
à ceux qui se sont occupés de ce travail important
& pénible. Voyez l'article Homme, (Anatomie.)
On a suivi l'homme depuis le moment de sa formation
ou de sa vie, jusqu'à l'instant de sa mort. C'est
ce qui forme l'histoire naturelle de l'homme. Voyez
l'article Homme, (Histoire naturelle.)
On l'a considéré comme capable de différentes
opérations intellectuelles qui le rendent bon ou méchant,
utile ou nuisible, bien ou mal faisant. Voyez
l'article Homme moral.
De cet état solitaire ou individuel, on a passé à
son état de société, & l'on a proposé quelques principes
généraux, d'après lesquels la puissance souveraine
qui le gouverne, tireroit de l'homme le plus
d'avantages possibles; & l'on a donné à cet article
le titre d'homme politique.
On auroit pû multiplier à l'infini les différens coups
d'oeil sous lesquels l'homme se considéreroit. Il se lie
par sa curiosité, par ses travaux & par ses besoins,
à toutes les parties de la nature. Il n'y a rien qu'on
ne puisse lui rapporter; & c'est ce dont on peut s'assurer
en parcourant les différens articles de cet Ouvrage, où on le verra ou s'appliquant à connoître
les êtres qui l'environnent, ou travaillant à les tourner
à son usage.
Homme
(Page 8:257)
* Homme, (Hist. nat.) L'homme ressemble aux
animaux par ce qu'il a de matériel; & lorsqu'on se
propose de le comprendre dans l'énumération de
tous les êtres naturels, on est forcé de le mettre dans
la classe des animaux. Meilleur & plus méchant
qu'aucun, il mérite à ce double titre, d'être à la tête.
Nous ne commencerons son histoire qu'après le
moment de sa naissance; pour ce qui l'a précédé,
voyez les articles
Foetus, Embryon, Accouchement, Conception, Grossesse
, &c.
L'homme communique sa pensée par la parole, &
ce signe est commun à toute l'espece. Si les animaux
ne parlent point, ce n'est pas en eux la faute de l'organe
de la parole, mais l'impossibilité de lier des
idées. Voyez Langue.
L'homme naissant passe d'un élément dans un autre.
Au sortir de l'eau qui l'environnoit, il se trouve
exposé à l'air; il respire. Il vivoit avant cette action;
il meurt si elle cesse. La plûpart des animaux restent
les yeux fermés pendant quelques jours après leur
naissance. L'homme les ouvre aussitôt qu'il est né;
mais ils sont fixes & ternes. Sa prunelle qui a déja
jusqu'à une ligne & demie ou deux de diametre, s'étrecit
ou s'élargit à une lumiere plus forte ou plus
foible; mais s'il en a le sentiment, il est fort obtus.
Sa cornée est ridée; sa rétine trop molle pour recevoir
les images des objets. Il paroît en être de même
des autres sens. Ce sont des especes d'instrumens dont
il faut apprendre à se servir. Voyez Sens. Le toucher
n'est pas parfait dans l'enfance. V. Toucher.
L'homme ne rit qu'au bout de quarante jours: c'est
aussi le tems auquel il commence à pleurer. Voyez
Ris & Pleurs. On ne voit auparavant aucun signe
de passion sur son visage. Voyez Passion. Les autres
parties de son corps sont foibles & délicates. Il ne
peut se tenir debout. Il n'a pas la force d'étendre le
bras. Si on l'abandonnoit il resteroit couché sur le
dos sans pouvoir se retourner.
La grandeur de l'enfant né à terme est ordinairement
de vingt - un pouces. Il en naît de beaucoup
plus petits. Il y en a même qui n'ont que quatorze
pouces à neuf mois. Le foetus pese ordinairement
douze livres, & quelquefois jusqu'à quatorze. Il a la
tête plus grosse à proportion que le reste du corps;
& cette disproportion qui étoit encore plus grande
dans le premier âge du foetus, ne disparoît qu'après
la premiere enfance. Sa peau est fort fine, elle paroît
rougeâtre; au bout de trois jours il survient une jau<cb->
nisse, & l'enfant a du lait dans les mamelles: on l'exprime
avec les doigts. Voyez Foetus.
On voit palpiter dans quelques nouveaux - nés le
sommet de la tête à l'endroit de la fontanelle, &
dans tous on y peut sentir avec la main le battement
des sinus ou des arteres du cerveau. Voyez Fontanelle. Il se forme au - dessus de cette ouverture une
espece de croûte ou de galle quelquefois fort épaisse.
La liqueur contenue dans l'amnios laisse sur l'enfant
une humeur visqueuse blanchâtre. Voyez Amnios. On le lave ici avec une liqueur tiede; ailleurs,
& même dans des climats glacés, on le plonge dans
l'eau froide, ou on le dépose dans la neige.
Quelque tems après sa naissance, l'enfant urine
& rend le meconium. Voyez Meconium. Le meconium
est noir. Le deuxieme ou troisieme jour, les
excrémens changent de couleur & prennent une
odeur plus mauvaise. On ne le fait tetter que dix ou
douze heures après sa naissance.
A peine est - il sorti du sein de sa mere, que sa captivité
commence. On l'emmaillote, usage barbare des
seuls peuples policés. Un homme robuste prendroit la
fievre, si on le tenoit ainsi garotté pendant vingt - quatre
heures. Voyez Maillot.
L'enfant nouveau - né dort beaucoup, mais la douleur
& le besoin interrompent souvent son sommeil.
Les peuples de l'Amérique septentrionale le couchent
sur la poussiere du bois vermoulu, sorte de lit
propre & mou. En Virginie on l'attache sur une
planche garnie de coton, & percée pour l'écoulement
des excrémens.
Dans le levant, on allaite à la mamelle les enfans
pendant un an entier. Les sauvages du Canada
leur continuent cette nourriture jusqu'à l'âge de quatre
à cinq ans, quelquefois jusqu'à six ou sept. Parmi nous, la nourrice joint à son lait un peu de bouillie,
aliment indigeste & pernicieux. Il vaudroit
mieux qu'elle substituât le pis d'un animal, ou qu'elle
mâchât pour son nourrisson, jusqu'à ce qu'il eut des
dents.
Les dents qu'on appelle incisives, sont au nombre
de huit, quatre au - devant de chaque mâchoire. Elles
ne paroissent qu'à sept mois, ou même sur la fin de
la premiere année. Mais il y en a en qui ce développement
est prématuré, & qui naissent avec des dents
assez fortes pour blesser le sein de leurs meres. Voyez
l'article Dents.
Les dents incisives ne percent pas sans douleur.
Les canines, au nombre de quatre, sortent dans le
neuvieme ou dixieme mois: il en paroît seize autres
sur la fin de la premiere année, ou au commencement
de la seconde. On les appelle molaires ou machelieres. Les canines sont contiguës aux incisives,
& les machelieres aux canines.
Les dents incisives, les canines, & les quatre
premieres mâchelieres, tombent naturellement dans
l'intervalle de la cinquieme à la huitieme année;
elles sont remplacées par d'autres dont la sortie est
quelquefois différée jusqu'à l'âge de puberté.
Il y a encore quatre dents placées à chacune des
deux extrémités des mâchoires; elles manquent à
plusieurs personnes, & le développement en est fort
tardif; il ne se fait qu'à l'âge de puberté, & quelquefois
dans un terme plus éloigné; on les appelle dents
de sagesse; elles paroissent successivement.
L'homme apporte communément des cheveux en
naissant, ceux qui doivent être blonds, ont les yeux
bleus; les roux d'un jaune ardent, & les bruns d'un
jaune foible. Voyez Cheveux.
L'enfant est sujet aux vers & à la vermine; c'est
un effet de sa premiere nourriture; il est moins sensible
au froid que dans le reste de sa vie; il a le poulx
plus fréquent; en général le battement du coeur &
des arteres est d'autant plus vîte, que l'animal est
[p. 258]
plus petit; il est si rapide dans le moineau, qu'à peine
en peut - on compter les coups. Voyez Chaleur
animale.
Jusqu'à trois ans, la vie de l'enfant est fort chancelante;
elle s'assûre dans les deux ou trois années
suivantes. A six ou sept ans, l'homme est plus sûr de
vivre qu'à tout âge. Il paroît que sur un certain
nombre d'enfans nés en même tems, il en meurt
plus d'un quart dans la premiere année, plus d'un
tiers en deux ans, & au moins la moitié dans les
trois premieres années; observation affligeante,
mais vraie. Soyons donc contens de notre sort; nous
avons été traités de la nature favorablement; félicitons - nous même du climat que nous habitons; il
faut sept à huit ans pour y éteindre la moitié des enfans;
un nouveau - né a l'espérance de vivre jusqu'à
sept ans, & l'enfant de sept ans celle d'arriver à
quarante deux ans.
Le foetus dans le sein de sa mere croissoit de plus
en plus jusqu'au moment de sa naissance; l'enfant
au contraire croît toûjours de moins en moins jusqu'à l'âge de puberté, tems auquel il croît, pour
ainsi dire, tout - à - coup, pour arriver en peu de tems
à la hauteur qu'il doit avoir.
A un mois, il avoit un pouce de hauteur, à deux
mois deux pouces & un quart, à trois mois trois
pouces & demi, à quatre mois cinq pouces & plus,
à cinq mois six à sept pouces, à six mois huit à neuf,
à sept mois onze pouces & plus, à huit mois quatorze
pouces, & à neuf mois dix - huit. La nature
semble faire un effort pour achever de développer
son ouvrage.
L'homme commence à bégayer à douze ou quinze
mois; la voyelle a qui ne demande que la bouche
ouverte & la production d'une voix, est celle qu'il
articule aussi le plus aisément. L'm & le p qui n'exigent
que l'action des levres pour modifier la voyelle
a, sont entre les consonnes les premieres produites;
il n'est donc pas étonnant que les mots papa,
mama, designent dans toutes les langues sauvages
& policées, les noms de pere & de mere: cette observation,
jointe à plusieurs autres & à une fagacité
peu commune, a fait penser à M. le président de
Brosse, que ces premiers mots & un grand nombre
d'autres, étoient de la langue premiere ou nécessaire
de l'homme.
L'enfant ne prononce guere distinctement qu'à
deux ans & demi.
La puberté accompagne l'adolescence & précede
la jeunesse. Jusqu'alors l'homme avoit tout ce qu'il
lui falloit pour être; il va se trouver pourvû de ce
qu'il lui faut pour donner l'existence. La puberté est
le tems de la circoncision, de la castration, de la
virginité, de l'impuissance. Voyez ces mots.
La circoncision est d'un usage très - ancien chez
les Hébreux; elle se faisoit huit jours après la naissance;
elle se fait en Turquie à sept ou huit ans; on
attend même jusqu'à onze ou douze; en Perse, c'est
à l'âge de cinq ou six. La plûpart de ces peuples auroient
le prépuce trop long, & seroient inhabiles à
la génération sans la circoncision. En Arabie & en
Perse, on circoncit aussi les filles lorsque l'accroissement
excessif des nymphes l'exige. Voyez Nymphes (Anat.). Ceux de la riviere de Benin n'attendent
pas ce tems; les garçons & les filles sont circoncis
huit ou quinze jours après leur naissance.
Il y a des contrées où l'on tire le prépuce enavant;
on le perce & on le traverse d'un gros fil
qu'on y laisse jusqu'à ce que les cicatrices des trous
soient formées; alors on substitue au fil un anneau;
cela s'appelle infibuler: on infibule les garçons &
les filles. Voyez Infibulation.
Dans l'enfance, il n'y a quelquefois qu'un testicule
dans le scrotum, & quelquefois point du tout;
ils sont retenus dans l'abdomen ou engagés dans
les anneaux des muscles; mais avec le tems, ils surmontent
les obstacles qui les arrêtent & descendent
à leur place. Voyez Testicules, Scrotum.
Les adultes ont rarement les testicules cachés;
cachés ou apparens, l'aptitude à la génération subsiste.
Il y a des hommes qui n'ont réellement qu'un testicule;
ils ne sont pas impuissans pour cela; d'autres
en ont trois: quand un testicule est seul, il est plus
gros qu'à l'ordinaire.
La castration est fort ancienne; c'étoit la peine
de l'adultere chez les Egyptiens; il y avoit beaucoup
d'eunuques chez les Romains. Dans l'Asie &
une partie de l'Afrique, une infinité d'hommes mutilés
sont occupés à garder les femmes; on en sacrifie
beaucoup à la perfection de la voix, au - delà des
Alpes. Les Hottentots se défont d'un testicule pour
en être plus légers à la course; ailleurs on éteint sa
postérité par cette voie, lorsqu'on redoute pour
elle la misere qu'on éprouve soi - même.
La castration s'exécute par l'amputation des deux
testicules; la jalousie va quelquefois jusqu'à retrancher
toutes les parties extérieures de la génération.
Autrefois on détruisoit les testicules par le froissement
avec la main, ou par la compression d'un instrument.
L'amputation des testicules dans l'enfance n'est
pas dangereuse; celle de toutes les parties extérieures
de la génération est le plus souvent mortelle, si
on la fait après l'âge de quinze ans. Tavernier dit
qu'en 1657, on fit jusqu'à vingt - deux mille eunuques
au royaume de Golconde.
Les eunuques à qui on n'a ôté que les testicules,
ont des signes d'irritation dans ce qui leur reste, &
même plus fréquens que les hommes entiers; cependant
le corps de la verge prend peu d'accroissement,
& demeure presque comme il étoit au moment de
l'opération. Un eunuque fait à l'âge de sept ans, est
à cet égard à vingt ans comme un enfant entier de
sept ans. Ceux qui n'ont été mutilés qu'au tems de
la puberté ou plus tard, sont à - peu - près comme les
autres hommes. Voyez Eunuque.
Il y a des rapports singuliers & secrets entre les
organes de la génération & la gorge; les eunuques
n'ont point de barbe; leur voix n'est jamais d'un
ton grave; les maladies vénériennes attaquent la
gorge.
Il y a dans la femme une grande correspondance
entre la matrice, les mamelles & la tête.
Quelle source d'observations utiles & surprenantes,
que ces correspondances! Voyez Physiologie.
La voix change dans l'homme à l'âge de puberté;
les femmes qui ont la voix forte, sont soupçonnées
d'un penchant plus violent à la volupté.
La puberté s'annonce par une espece d'engourdissement
aux aînes; il se fait sentir en marchant,
en se pliant. Il est souvent accompagné de douleurs
dans toutes les jointures, & d'une sensation particuliere
aux parties qui caractérisent le sexe. Il s'y
forme des petits boutons; c'est le germe de ce duvet
qui doit les voiler. Voyez Poil. Ce signe est
commun aux deux sexes: mais il y en a de particuliers
à chacun; l'éruption des menstrues, l'accroissement
du sein pour les femmes (Voyez Menstrue
& Mamelles); la barbe & l'émission de la liqueur
séminale pour les hommes. Voyez Barbe & Sperme.
Mais ces phénomenes ne sont pas aussi constans les
uns que les autres; la barbe, par exemple, ne paroît
pas précisément au tems de la puberté; il y a
même des nations où les hommes n'ont presque point
de barbe; au contraire il n'y en a aucune où la puberté
des femmes ne soit marquée par l'accroissement
des mamelles.
[p. 259]
Dans toute l'espece humaine, les femmes arrivent
plûtôt à la puberté que les hommes; mais chez
les différens peuples, l'âge de puberté varie & semble
dépendre du climat & des alimens; le pauvre &
le paysan sont de deux ou trois années plus tardifs.
Dans les parties méridionales & dans les villes, les
filles sont la plûpart pubertes à douze ans, & les
garçons à quatorze. Dans les provinces du Nord &
les campagnes, les filles ne le sont qu'à quatorze,
& les garçons qu'à seize; dans les climats chauds de
l'Asie, de l'Afrique, & de l'Amérique, la puberté
des filles se manifeste à dix, & même à neuf ans.
L'écoulement périodique des femmes moins abondant
dans les pays chauds, est à - peu - près le même
chez toutes les nations; & il y a sur cela plus de différence
d'individu à individu, que de peuple à peuple.
Dans la même nation, des femmes n'y sont sujettes
que de cinq ou six semaines en six semaines;
d'autres tous les quinze jours: l'intervalle commun
est d'un mois.
La quantité de l'évacuation varie; Hippocrate
l'avoit évaluée en Grece à neuf onces, elle va depuis
une ou deux onces, jusqu'à une livre & plus;
& sa durée depuis trois jours jusqu'à huit.
C'est à l'âge de puberté que le corps acheve de
prendre son accroissement en hauteur: les jeunes
hommes grandissent tout - à - coup de plusieurs pouces;
mais l'accroissement le plus prompt & le plus sensible
se remarque aux parties de la génération; il se
fait dans le mâle par une augmentation de volume;
dans les femelles il est accompagné d'un rétrécissement
occasionné par la formation d'une membrane
appellée hymen. Voyez l'article Hymen.
Les parties sexuelles de l'homme arrivent en moins
d'un an ou deux après le tems de puberté, à l'état
où elles doivent rester. Celles de la femme croissent
aussi; les nymphes sur - tout qui étoient auparavant
insensibles, deviennent plus apparentes. Par
cette cause & beaucoup d'autres, l'orifice du vagin
se trouve rétréci; cette derniere modification varie
beaucoup aussi. Il y a quelquefois quatre protuberances
ou caroncules, d'autres fois trois ou deux,
souvent une espece d'anneau circulaire ou semi - lunaire. Voyez Caroncules.
Quand il arrive à la femme de connoître l'homme
avant l'âge de puberté, nulle effusion de sang, àmoins d'une extrème disproportion entre les parties
de l'un & de l'autre, ou des efforts trop brusques.
Mais il arrive aussi qu'il n'y a point de sang répandu,
même après cet âge, ou que l'effusion reparoît
même après des approches réitérées, intimes &
fréquentes, s'il y a suspension dans le commerce
& continuité d'accroissement dans les parties sexuelles
de la femme. La preuve prétendue de la
virginité ne se renouvelle cependant que dans l'intervalle
de quatorze à dix - sept, ou de quinze à dix - huit
ans. Celles en qui la virginité se renouvelle ne
sont pas en aussi grand nombre que celles à qui la
nature a refusé cette faveur chimérique.
Les Ethiopiens, d'autres peuples de l'Afrique,
les habitans du Pégu, de l'Arabie, quelques nations
de l'Asie, s'assûrent de la chasteté de leurs filles par
une opération qui consiste en une suture qui rapproche
les parties que la nature a séparées, & ne laisse
d'espace que celui qui est nécessaire à l'issue des
écoulemens naturels. Les chairs s'unissent, adherent,
& il faut les séparer par une incision, lorsque
le tems du mariage est arrivé. Ils emploient aussi
dans la même vûe l'infibulation qui se fait avec un
fil d'amiante; les filles portent le fil d'amiante, ou
un anneau qui ne peut s'ôter; les femmes un cadenat
dont le mari a la clé.
Quel contraste dans les goûts & les moeurs de
l'homme! D'autres peuples méprisent la virginité,
& regardent comme un travail servile la peine qu'il
faut prendre pour la détruire. Les uns cedent les
prémices des vierges à leurs prêtres ou à leurs idoles;
d'autres à leurs chefs, à leurs maîtres; ici un
homme se croit deshonoré, si la fille qu'il épouse n'a
pas été déflorée; là, il se fait précéder à prix d'argent.
L'état de l'homme après la puberté est celui du
mariage; un homme ne doit avoir qu'une femme,
une femme qu'un homme, puisque le nombre des femelles
est à - peu - près égal à celui des mâles.
L'objet du mariage est d'avoir des enfans; mais il
n'est pas toûjours possible: la stérilité vient plus
souvent de la part de la femme, que de la part de
l'homme. Voyez Impuissance & Stérilité. Cependant il arrive quelquefois que la conception devance
les signes de la puberté; des femmes sont devenues
meres avant que d'avoir eu l'écoulement
naturel à leur sexe. D'autres, sans être jamais sujettes
à cet écoulement, ne laissent pas d'engendrer.
On dit même qu'au Brésil des nations entieres se
perpétuent, sans qu'aucune femme ait d'évacuation
périodique; la cessation des regles qui arrive ordinairement
à quarante ou cinquante ans, ne met pas
toutes les femmes hors d'état de concevoir; il y en
a qui ont conçu à soixante, à soixante & dix ans,
& même plus tard. Dans le cours ordinaire, les
femmes ne sont en état de concevoir qu'après la
premiere éruption, & la cessation de cet écoulement
à un certain âge les rend stériles.
L'âge auquel l'homme peut engendrer n'a pas de
termes aussi marqués; il commence entre douze &
dix - huit ans; il cesse entre soixante & soixante &
dix; il y a cependant des exemples de vieillards qui
ont eu des enfans jusqu'à quatre - vingt & quatre - vingt - dix ans, & des exemples de garçons qui ont
produit leur semblable à neuf, dix, & onze ans, &
de petites filles qui ont conçu à sept, huit & neuf.
On prétend qu'immédiatement après la conception
l'orifice de la matrice se ferme, & qu'elle s'annonce
par un frissonnement qui se répand dans tous
les membres de la femme. Voyez les articles Conception.
La femme de Charles Town qui accoucha en
1714 de deux jumeaux, l'un blanc & l'autre noir;
l'un de son mari, l'autre d'un negre qui la servoit,
prouve que la conception de deux enfans ne se fait
pas toûjours dans le même tems.
Le corps finit de s'accroître dans les premieres
années qui suivent l'âge de puberté: l'homme grandit
jusqu'à vingt - deux ou vingt - trois ans; la femme
à vingt est parfaitement formée.
Il n'y a que l'homme & le singe qui ayent des cils
aux deux paupieres; les autres animaux n'en ont
point à la paupiere inférieure; & dans l'homme même
il y en a beaucoup moins à la paupiere inférieure
qu'à la supérieure; les sourcils deviennent quelquefois
si longs dans la vieillesse qu'on est obligé de les
couper.
La partie de la tête la plus élevée est celle qui devient
chauve la premiere, ensuite celle qui est au - dessus
des tempes; il est rare que les cheveux qui
couvrent le bas des tempes tombent en entier, non
plus que ceux de la partie inférieure du derriere de
la tête.
Au reste, il n'y a que les hommes qui deviennent
chauves en avançant en âge; les femmes conservent
toûjours leurs cheveux; ils blanchissent dans
les deux sexes; les enfans & les eunuques ne sont
pas plus sujets à être chauves que les femmes.
Les cheveux sont plus grands & plus abondans
dans la jeunesse qu'à tout autre âge.
Les piés, les mains, les bras, les cuisses, le front,
l'oeil, le nez, les oreilles, en un mot, toutes les par,
[p. 260]
ties de l'homme ont des propriétés particulieres. Voyez
les différens articles de ce Dictionnaire.
Il n'y en a aucune qui ne contribue à la beauté
ou à la laideur, & qui n'ait quelque mouvement
agréable ou difforme dans la passion. Voyez
Honte, Colere, Fureur, Amour , &c.
Ce sont celles du visage qui donnent ce que nous
appellons la physionomie.
Toutes concourent par leurs proportions à la plus
grande facilité des fonctions du corps; mais il faut
bien distinguer l'état de nature, de l'état de société.
Dans l'état de nature, l'homme qui exécuteroit avec
le plus d'aisance toutes les fonctions animales, seroit
sans contredit le mieux fait; & réciproquement
le mieux fait exécuteroit le plus aisément toutes les
fonctions animales; mais il n'en est pas ainsi dans
l'état de société. Chaque art, chaque manoeuvre,
chaque action, exige des dispositions particulieres
de membres, ou que la nature donne quelquefois,
ou qui s'acquierent par l'habitude, mais toûjours
aux dépens des proportions les plus régulieres & les
plus belles. Il n'y a pas jusqu'au danseur, qui forcé
de soûtenir tout le poids de son corps sur la pointe
de son pié, n'eût à la longue cette partie défigurée
aux yeux du statuaire, qui ne se proposeroit que de
représenter un homme bien fait, & non un danseur.
Voyez Proportion.
La grace qui n'est que le rapport de certaines parties
du corps, soit en repos, soit en mouvement, considerées
relativement aux circonstances d'une action,
ne s'obtient souvent aussi que par des habitudes,
dont le dérangement des proportions est encore un
effet nécessaire. Voyez Grace.
D'où il s'ensuit que l'homme de la nature, celui
qu'elle se seroit complu à former de la maniere la
plus parfaite, n'excelleroit peut - être en rien; & que
l'imitateur de la nature en doit altérer toutes les
proportions, selon l'état de la société dans lequel il
le transporte. S'il en veut faire un crocheteur, il en
affaissera les cuisses sur les jambes; il fortifiera cellesci;
il étendra les épaules, il courbera le dos; &
ainsi des autres conditions.
Par un travers aussi inexplicable que singulier,
les hommes se défigurent en cent manieres bisarres;
les uns s'applatissent le front, d'autres s'allongent
la tête; ici on s'écrase le nez, là on se perce les oreilles.
On violente la nature avec tant d'opiniâtreté,
qu'on parvient enfin à la subjuguer, & qu'elle fait
passer la difformité des peres aux enfans, comme
d'elle - même. L'habitude de se remplir les narines de
poussiere est si générale parmi nous, que je ne doute
guere que si elle subsiste encore pendant quelques
siecles, nos descendans ne naissent tous avec de gros
nés difformes & évasés. Mais que ne doit - il pas arriver
à l'espece humaine parmi nous, par le vice de
l'habillement, & par les maladies auxquelles nos
moeurs dépravées nous exposent?
La tête de l'homme est à l'extérieur & à l'intérieur
d'une forme différente de celle de la tête de tous les
autres animaux; le singe a moins de cerveau.
L'homme a le cou moins gros à proportion que
les quadrupedes, mais la poitrine plus large; il n'y
a que le singe & lui qui ayent des clavicules.
Les femmes ont plus de mamelles que les hommes; mais l'organisation de ces parties est la même
dans l'un & l'autre sexe; celles de l'homme peuvent
aussi former du lait, & il y en a des exemples.
Le nombril qui est apparent dans l'homme, est presque
obliteré dans les animaux; le singe est le seul
qui ait des bras & des mains comme nous; les fesses
qui sont les parties les plus inférieures du tronc n'appartiennent
qu'à l'espece humaine.
L'homme est le seul qui se soûtienne dans une situation
droite & perpendiculaire.
Le pié de l'homme differe aussi de celui de quelque
animal que ce soit; le pié du singe est presque
une main.
L'homme a moins d'ongle que les autres animaux;
c'est par des observations continuées pendant longtems
sur la forme intérieure de l'homme, que l'on est
convenu des proportions qu'il falloit garder dans
la Peinture, la Sculpture, & le Dessein. Voyez l'article Proportion.
Dans l'enfance, les parties supérieures de l'homme sont plus grandes que les inférieures.
A tout âge, la femme a la partie antérieure de
la poitrine plus élevée que nous; en sorte que la
capacité formée par les côtes a plus d'épaisseur en
elles & moins de largeur. Les hanches de la femme
sont aussi plus grosses; c'est à ce caractere qu'on
distingue son squelette de celui de l'homme.
La hauteur totale du corps humain varie assez
considérablement; la grande taille pour les hommes,
est depuis cinq piés quatre ou cinq pouces, jusqu'à
cinq piés huit ou neuf pouces. La taìlle médiocre
depuis cinq piés ou cinq piés un pouce, jusqu'à cinq
piés quatre pouces; & la petite taille est au - dessous de cinq piés. Les femmes ont en général deux
ou trois pouces de moins; il y a des especes d'hommes qui n'ont que depuis quatre piés, jusqu'à quatre
piés & demi; tels sont les Lapons.
L'homme relativement à son volume est plus fort
qu'aucun animal; il peut devancer le cheval par sa
vîtesse; il le fatigue par la continuité de la marche;
les chaters d'Ispahan font trente - six lieues en quatorze
ou quinze heures.
La femme n'est pas à beaucoup près aussi vigoureuse
que l'homme.
Tout change dans la nature, tout s'altere, tout
périt. Lorsque le corps a acquis son étendue en hauteur
& en largeur, il augmente en épaisseur; voilà
le premier point de son dépérissement; elle commence
au moment où la graisse se forme, à trente - cinq
ou quarante ans. Voyez Graisse. Alors les
membranes deviennent cartilagineuses, les cartilages
osseux, les os plus solides, & les fibres plus dures;
la peau se seche, les rides se forment, les cheveux
blanchissent, les dents tombent, le visage se
déforme, & le corps s'incline vers la terre à laquelle
il doit retourner.
Les premieres nuances de cet état se font appercevoir
avant quarante ans; elles augmentent par
degrés assez lents jusqu'à soixante, par degrés plus
rapides jusqu'à soixante & dix. Alors commence la
vieillesse qui va toûjours en augmentant; la caducité
suit, & la mort termine ordinairement avant
l'âge de quatre - vingt - dix ou cent ans, la vieillesse
& la vie.
Les femmes en général vieillissent plus que les
hommes; passé un certain âge leur durée s'assûre; il
en est de même des hommes nés foibles; la durée totale
de la vie peut se mesurer par le tems de l'accroissement.
L'homme qui est trente ans à croître,
vit quatre - vingt - dix ou cent ans. Le chien qui ne
croît que pendant deux ou trois ans, ne vit aussi
que dix ou douze ans.
Il est parlé dans les Transactions philosophiques,
de deux hommes, dont l'un a vécu cent soixantecinq
ans, & l'autre cent quarante - quatre.
Il y a plus de vieillards dans les lieux élevés que
dans les lieux bas; mais en général l'homme qui ne
meurt pas par intempérie ou par accident, vit partout
quatre - vingt - dix ou cent ans.
La mort est aussi naturelle que la vie; il ne faut
pas la craindre, si l'on a assez bien vécu pour n'en
pas redouter les suites.
Mais il importe en une infinité de circonstances
de savoir la probabilité qu'on a de vivre un cer<pb->
[p. 261]
tain nombre d'années. Voici une courte table calculée
à cet effet.
Table des probabilités de la durée de la vie.
Age. Durée de la vie. Age. Durée de la vie.
Années. Années. Mois. Années. Années. Mois.
0 8 0 43 20 4
1 33 0 44 19 9
2 38 0 45 19 3
3 40 0 46 18 9
4 41 0 47 18 2
5 41 6 48 17 8
6 42 0 49 17 2
7 42 3 50 16 7
8 41 6 51 16 0
9 40 10 52 15 0
10 40 2 53 15 0
11 39 6 54 14 0
12 38 9 55 14 0
13 31 1 56 13 5
14 37 5 57 12 10
15 36 9 58 12 3
16 36 0 59 11 8
17 35 4 60 11 1
18 34 8 61 10 6
19 34 0 62 10 0
20 33 5 63 9 6
21 32 11 64 9 0
22 32 4 65 8 6
23 31 10 66 8 0
24 31 3 67 7 6
25 30 9 68 7 0
26 30 2 69 6 7
27 29 7 70 6 2
28 29 0 71 5 8
29 28 6 72 5 4
30 28 0 73 5 0
31 27 6 74 4 9
32 26 11 75 4 6
33 26 3 76 4 3
34 25 7 77 4 1
35 25 0 78 3 11
36 24 5 79 3 9
37 23 10 80 3 7
38 23 3 81 3 5
39 22 8 82 3 3
40 22 1 83 3 2
41 21 6 84 3 1
42 20 11 85 3 0
On voit par cette table qu'on peut espérer qu'un
enfant qui vient de naître vivra huit ans, & ainsi des
autres tems de la vie.
Mais on observera 1°. que l'âge de sept ans est
celui où l'on peut espérer une plus longue vie; 2°.
qu'à douze ou treize ans on a vécu le quart de sa
vie; & à vingt - huit ou vingt - neuf, qu'on a vécu la
moitié; & à cinquante, plus des trois quarts.
O vous, qui avez travaillé jusqu'à cinquante ans,
qui jouissez de l'aisance, à qui il reste encore de la
santé & des forces, qu'attendez - vous donc pour
vous reposer! jusqu'à quand direz - vous, demain,
demain?
Après avoir exposé ce qui concerne l'homme en
général, nous renverrons, pour ce qui appartient
à ses différens organes, aux différens articles de ce
Dictionnaire. Voyez donc, pour la tête, à l'article
Tête; pour les piés, les mains, les dents, à ces articles; pour la vûe, aux articles OEil & Vue; pour
l'ouie, aux articles Ouie & Oreille; pour l'odorat,
aux articles Odorat & Nés, &c. pour les sens
en général, aux articles Sens, Sensations, &
Toucher; & sur - tout à l'article Economie animale. Et quant aux variétés de l'espece humaine,
voyez les articles de Géographie qui y ont rapport,
comme
Lapons, Chinois, Indiens, Negres
&c. & l'article Humaine espece.
Il y a des hommes blancs, des noirs, des olivâtres,
des hommes de couleur de cuivre. Voyez les
articles Negres, Mulatres, &c.
Les hommes ont une physionomie propre aux lieux
qu'ils habitent. Voyez l'article Physionomie;
& pour l'histoire naturelle de l'homme, ce que M M.
de Buffon & d'Aubenton en ont dit dans leur excellente
histoire naturelle, dont nous avons extrait ce
qui précede.
Homme
(Page 8:261)
Homme (Exposition anatomique du corps de l');
ce corps, ainsi que celui de tous les autres animaux,
est une machine très - compliquée, & dans la composition
de laquelle entre une infinité d'instrumens différens
par leur structure & par l'usage auquel ils sont
destinés. Certaines parties blanches, dures, insensibles,
connues sous le nom d'os, soûtiennent tout
l'édifice. Voyez Os. Dans les endroits où ces parties
se meuvent en glissant les unes sur les autres, elles
sont enduites & comme encroûtées de certaines lames
brillantes, blanches, très - élastiques, d'un tissu
extrèmement serré qu'on nomme cartilages, & dont
on distingue plusieurs especes: il y a aussi des lieux
où les os sont retenus & fixés en place par l'intermede
d'autres cartilages un peu différens de ceux
dont les extrémités des os mobiles sont couvertes.
Voyez Cartilage. Les différentes pieces osseuses
qui ont du jeu & quelque mouvement, sont arrêtées
& liées les unes aux autres par certaines cordes ou
certains rubans que les Anatomistes appellent ligamens, & qui sont des parties blanches, souples,
extensibles, très - élastiques & douées d'un sentiment
très - obtus & presque nul. Voyez Ligament. Parmi
ces ligamens, il y en a qui sont très - minces & comme
membraneux, qui enveloppent les jointures des
os, & empêchent l'écoulement d'une certaine humeur
onctueuse nommée synovie; on les nomme capsules articulaires, ou ligamens capsulaires. Voyez Capsules articulaires. L'humeur que ces ligamens
retrennent est douce & gluante, & faite pour lubréfier
les parties & les empêcher de se dessécher & de
s'user par les frottemens répétés, voyez Synovie;
elle coule de certains paquets glanduteux communément
enveloppés de graisse, & que la nature a très artistement
placés dans certains enfoncemens pratiqués
exprès pour les mettre à l'abri des chocs & des
compressions violentes. Voyez Glandes synoviales. Toutes ces choses ne se voient que dans les
endroits où les os s'unissent de maniere à permettre
quelque mouvement; & cette sorte de jonction s'appelle
diarthrose, dont il y a plusieurs especes. Voyez
Énarthrose, Arthrodie, & Ginglime. En
général, toute union ou jonction de deux pieces osseuses
se nomme articulation, laquelle, pour parler
le langage des Anatomistes, se fait avec mouvement
ou sans mouvement: cette derniere espece est la sinarthrose, & comprend sous elle plusieurs divisions.
Voyez Suture, Harmonie & Gomphose. Les os
articulés par diarthrose, ont besoin d'être maintenus
en place, & liés les uns aux autres par différens
moyens; cette haison s'appelle symphise, & se fait
tantôt avec des ligamens, c'est la sinévrose; d'autres
fois avec les chairs ou les muscles, c'est la sisarcose, & dans certains lieux, par l'intermede des
cartilages, c'est la synchondrose. Voyez Sinevrose,
Sisarcose & Sinchondrose. Tous les os du
corps de l'homme, excepté les couronnes des dents,
sont couverts d'une membrane assez forte, dont
l'épaisseur varie suivant les lieux, & qui soûtient une
prodigieuse quantité de vaisseaux très - fins & de toute
espece; on l'appelle le périoste, tant qu'elle est
appliquée sur les os; lorsque de - là elle passe sur les
[p. 262]
ligamens, on la nomme péridesme; & quand enfin
elle s'étend sur les cartilages, elle reçoit le nom de
périchondre. Voyez Périoste. Cette membrane se
glisse & s'insinue jusques dans les cavités intérieures
des os, elle les tapisse exactement; c'est le périoste
interne qui enveloppe la moelle, & fournit les cloisons
sans nombre qui forment les cellules dans lesquelles
cette humeur onctueuse est renfermée. Voy.
Moelle. Les os sont formés de deux substances,
l'une dure & d'un tissu très - serré, composée de lames
très - étroitement unies les unes aux autres, c'est
la substance ou matiere compacte; l'autre est cellulaire,
& quand elle résulte de l'assemblage de plusieurs
lames, on l'appelle substance spongieuse; mais
quand elle résulte de l'entrelacement d'un grand
nombre de filets, c'est la substance réticulaire. Voyez
Substance osseuse & Ossification.
Les os, & avec eux toutes les autres parties des
animaux, sont mis en mouvement par certaines
puissances que les Anatomistes appellent muscles. Ce
sont des organes mous, d'une couleur rouge, formés
de fibres, qui ont la faculté de se raccourcir,
& qui par ce raccourcissement tirent les parties auxquelles
ils sont annexés: un tissu cellulaire plus
ou moins fin, lie toutes ces fibres entre elles, &
soûtient les divisions presque infinies des nerfs,
des arteres & des autres vaisseaux qui pénétrent la
substance du muscle; un autre tissu cellulaire plus
lâche, & communément chargé de graisse, unit entre
eux les différens muscles, ou les attache à d'autres
parties: on nomme contraction, l'action par laquelle
un muscle se raccourcit; & fibre musculaire
ou contractile, celle qui peut exercer cette action:
il faut que ce pouvoir dépende en partie de la maniere
dont les fibres sont unies entre elles; car dans
le milieu du muscle, où les fibres sont molles &
rouges, on les voit se contracter, & l'on n'observe
rien de semblable dans les extrémités, qui sont blanches
& d'un tissu bien plus ferme & bien plus serré:
cependant ce sont les mêmes fibres qui, sans interruption,
vont d'un bout à l'autre du muscle, mais
qui, ramassées vers les extrémités, sont si étroitement serrées entre elles qu'elles en perdent l'aptitude
au mouvement, il faut, pour qu'une fibre musculaire
se raccourcisse, qu'elle se gonfle & se renfle;
ce renflement devient impossible quand les fibres
sont trop rapprochées & trop fermement unies entre
elles; quand en se rapprochant ainsi, elles forment
par leur assemblage des cordes blanches, souples
& fléxibles, c'est ce qu'on nomme des tendons,
voyez Tendons; lorsqu'elles s'épanouissent en maniere
de membranes, elles sont ce qu'on appelle des
aponévroses, voyez Aponévrose; c'est par le moyen
de ces tendons ou de ces aponévroses que les muscles
s'attachent aux os, ou bien aux autres parties
qu'ils doivent mouvoir; ainsi dans chaque muscle
il y a toûjours un milieu rouge & mollet (les anciens
le nommoient le ventre du muscle) & deux extrémités
tendineuses plus ou moins longues, dont
l'une portoit chez les anciens le nom de tête, &
l'autre, celui de queue: ces noms étoient tirés de
la comparaison qu'ils faisoient d'un muscle avec un
rat écorché: au reste, les noms qu'on a donnés aux
différens muscles viennent ou de leur figure, comme
deltoïde, triangulaire, quarré; ou de leur situation, comme
fessier, dorsal, pectoral; ou de leur action, comme
fléchisseur, extenseur, abaisseur, ou de quelque autre
circonstance. Voyez Muscle.
C'est aux nerfs & aux vaisseaux sanguins que les
muscles doivent la faculté, dont ils jouissent, de se
contracter, & de mouvoir par - là toutes les autres
parties. Les nerfs sont des cordons blanchâtres, composés
de filets extrèmement fins, qui tous tirent leur
origine du cerveau, de la moelle allongée, ou de
la moelle épiniere: ils communiquent différemment
entre eux; cependant les deux manieres de communication
établies les plus ordinaires sont ou par
forme d'entrelacement & de réseau, ce qu'on nomme
plexus, & qui spécialement a lieu à l'intérieur
pour les visceres de la poitrine & du ventre, voyez
Plexus; ou par le moyen de certaines tumeurs
rougeâtres, d'une consistence assez marquée, & de
différentes figures qu'on appelle ganglions, lesquelles
se rencontrent dans différentes parties, mais surtout
le long de la colonne épiniere, voyez Ganglions. Quoique les yeux ne puissent saisir de cavité
dans les nerfs, on ne sauroit cependant se dispenser
d'y en admettre: bien des expériences semblent
prouver qu'un fluide très - subtil passe sans
cesse, à la faveur de ces cavités, du cerveau & de
la moelle vers les autres parties, & reflue peut - être
de ces mêmes parties vers les organes desquels il
avoit commencé à couler; ce fluide qui paroît fait
pour animer toute la machine, s'appelle esprit animal,
voy. Esprit animal ou Esprit animaux.
La nature de cet esprit ne nous est pas encore bien
connue: il n'est guere raisonnable d'en nier l'existence;
peut - être y en a - t - il de plusieurs especes.
Quand un nerf s'insinue dans une partie, il s'y divise
de façon qu'en le suivant avec soin, il semble
que toute la partie elle - même ne soit faite que par
sa division: ce qui a donné lieu de penser que dans
son principe & son origine le corps des animaux
n'étoit qu'un épanouissement nerveux différemment
fait dans les différentes parties. Quoi qu'il en soit de
toutes ces choses, toûjours est - il certain que c'est
aux nerfs que les parties de notre corps doivent le
sentiment & le mouvement: une chose singuliere,
sans doute, c'est que le principe du sentiment dérivant
du cerveau, du cervelet & de la moelle épiniere, ces parties soient cependant insensibles. On
nomme Névrologie la partie d'Anatomie qui traite des
nerfs & de leurs distributions: cette partie est une
des moins développées, & cependant c'est une des
plus importantes & des plus intéressantes. Voyez
Nerf & Névrologie.
Les vaisseaux sanguins sont des tuyaux membraneux,
cylindriques, plus ou moins élastiques, dont
les uns, sous le nom d'arteres, portent le sang du
coeur aux autres parties; les autres se nomment veines, & leur office est de reprendre le sang que les
arteres ont apporté, & de le ramener au coeur: le
mouvement par lequel le sang est ainsi porté & rapporté,
s'appelle circulation. Voyez Circulation
du sang. Les arteres ont leurs tuniques plus fortes
& plus épaisses que les veines; elles ont un mouvement
sensible de pulsation, c'est le pouls, voyez
Pouls, & le sang marche bien plus vîte dans ces
tuyaux que dans les veines: toutes les arteres ne sont
que des ramifications de deux troncs principaux,
connus sous les noms d'aorte & d'artere pulmonaire,
voyez Artere. Les membranes des veines sont foibles
& minces, elles ont peu d'action: mais pour
suppléer à ce défaut, la nature a placé dans leurs
cavités des replis membraneux qu'on appelle valvules, & qui sont disposés de maniere qu'ils cedent
sans peine à l'impulsion du sang qui retourne au
coeur, mais ils se levent pour l'empêcher de revenir
sur ses pas: les arteres n'ont point de valvules; on
n'en découvre point non plus dans les grosses veines
placées dans le ventre ou dans la poitrine: toutes
les veines vont se rendre à cinq tuyaux communs,
dont l'un, qui est le principal & le plus gros
de tous, se nomme veine - cave, & va se rendre à
l'oreillette droite du coeur: trois autres partent du
poulmon, & viennent décharger le sang dans l'oreillette
gauche du coeur: le cinquieme amasse le sang
de tous les visceres qui servent à la digestion des
[p. 263]
alimens, & le charie au foie, on le nomme veineporte. Outre ces tuyaux, il y en a d'autres dans le
corps humain, dont les uns sont pleins d'une liqueur
claire, transparente, sans goût & sans odeur; on la
nomme lymphe, & les tuyaux qui la contiennent,
s'appellent vaisseaux lymphatiques. Voyez Lymphe
& Vaisseaux lymphatiques. Les autres conduits,
qui ne contiennent ni sang, ni lymphe, sont
destinés à recevoir l'air, on les appelle bronches:
ils naissent tous d'un canal, en partie cartilagineux
& en partie membraneux, qui du fond de la bouche
gagne jusques dans la poitrine; on lui donne le nom
de trachée - artere, voyez Trachée - artere & Bronche: l'air amené par ces tuyaux gonfle les poûmons
& soûleve la poitrine; quand il en sort, la
poitrine se resserre & les poûmons s'affaissent: ce
double mouvement qui se fait alternativement pendant
tout le cours de la vie, constitue cette importante
fonction, connue de tout le monde sous le
nom de respiration: quand l'air rentre, c'est l'inspiration; quand il sort, c'est l'expiration. Voyez Respiration.
Toute partie qui remplit une fonction d'une certaine
importance, & qui est renfermée dans l'une
des grandes cavités de la machine, se nomme viscere, voyez Viscere. On voit encore certaines parties
arrondies, assez fermes, de différentes couleurs,
& qui pour la plûpart séparent du sang une humeur
particuliere, on les appelle en général du nom de
glandes; quand elles sont isolées & détachées les
unes des autres, elles se nomment glandes conglobées; elles prennent le nom de glandes conglomérées,
quand elles sont ramassées plusieurs ensemble &
renfermées sous une même enveloppe. Voyez Glande. L'action par laquelle les glandes, ainsi que d'autres
parties, séparent de la masse commune des humeurs
une liqueur particuliere, porte en général le
nom de sécrétion, voyez Sécrétion; & les canaux
par lesquels cette humeur est reçûe pour être conduite
en un lieu différent, se nomment vaisseaux excréteurs: quand ils sont très - fins & très - déliés, on les
nomme pores, & du nombre de ces derniers il en est
dont la fonction differe des autres, & qui sont destinés
à pomper quelque humeur, à s'en charger, pour
la ramener à la masse, soit médiatement. soit immédiatement;
ils ont reçû le nom de pores absorbans,
& il paroît que la surface de tous nos visceres en
est aussi criblée que celle de la peau. Voyez Pores
absorbans. Cette derniere partie couvre tout notre
corps, ainsi que tout le monde le sait: on l'appelle
à cause de cela le tégument universel; elle est
composée de plusieurs lames, dont la plus superficielle
& la plus mince se nomme épiderme: celle - ci
est insensible, & formée d'un grand nombre de petites
écailles très - fines; elle se replie dans les grandes
ouvertures de la peau, & s'y confond, ou s'y perd
dans la membrane qui revêt l'extérieur de l'oeil, les
narines, la bouche, le gosier, l'oesophage, &c. Voyez
Epiderme. On apperçoit à la face de l'épiderme qui
touche la peau, un réseau plus ou moins fin dans les
différentes parties; il semble être une appendice de
l'épiderme, on le nomme le corps réticulaire. Voyez
Corps réticulaire. Quelques anatomistes pensent
que ce qui fait la liaison de l'épiderme & de la
peau est une certaine substance à - peu - près muqueuse,
qu'ils ont appellée le corps muqueux, & qu'ils
croient être le siege de la couleur blanche de la peau
des Européens, &c. & celui de la couleur noire de la
peau des Négres. Voyez Corps muqueux. La peau,
proprement dite, est immédiatement sous ce corps;
elle est faite par l'assemblage & l'entrelacement le
plus singulier de fibres qui approchent fort de la nature
des fibres ligamenteuses: à travers cet entrelacement
pénetrent mille & mille filets nerveux, qui
viennent à sa superficie s'épanouir en papilles applaties,
ou se gonfler de maniere à former les papilles
pyramidales: ces papilles sont l'organe immédiat
du plus étendu, du plus important & peut - être
du plus utile de tous nos sens, du toucher, voyez
Toucher. C'est dans la peau que s'opere l'excrétion
la moins sensible, & cependant la plus abondante
de toutes celles qui se font dans notre machine;
elle est connue sous le nom d'insensible transpiration:
l'humeur qu'elle fournit est chassée par les pores de
la peau. Voyez insensible Transpiration. La
peau ne se réfléchit point comme l'épiderme par la
bouche, le nez, le fondement, &c. elle est vraiment
trouée dans tous ces endroits - là: il s'en manque
beaucoup que la peau ait par - tout la même sensibilité,
la même consistence, la même élasticité: toutes
ces choses varient suivant les lieux. Voyez Peau.
Ajoûtez à tout cela que cette partie soûtient les poils
& les ongles. Ces premiers sont des filets très - déliés,
de diverses couleurs, de différentes longueurs, toûjours
insensibles dans l'état naturel, lesquels naissent
d'un petit oignon placé à la face interne de la
peau, & qui paroissent destinés à couvrir & défendre
du froid, &c. la surface du corps. Voyez Poils.
Les ongles paroissent faits d'une substance assez semblable
à celle des poils: chacun sait qu'ils garnisient
le bout des doigts, des mains & des piés: leur racine
jouit d'une grande sensibilité; l'extrémité se
coupe sans qu'on en sente rien. Voyez Ongle. Dans
la plûpart des quadrupedes, on trouve sous la peau
une lame musculaire, qui s'appelle le pannicule charnu: cette partie manque dans l'homme, voyez Pannicule charnu. Il n'y a sous la peau du corps
humain qu'un tissu formé par un grand nombre de
cellules irrégulieres, lesquelles renferment une humeur
huileuse condensée, douce & jaunâtre, connue
sous le nom de graisse, voyez Graisse: ces cellules
sont autant de petits réservoirs où la nature
met en dépôt l'humeur dont nous venons de parler,
& qu'elle saura bien reprendre en cas de besoin, par
exemple, dans le tems des maladies, soit pour nourrir
le corps, soit pour adoucir l'acrimonie des humeurs
morbifiques: les membres gagnent à ce dépôt
une forme plus réguliere, des contours plus
gracieux & une souplesse très - marquée: la sagesse
de la nature sait tirer plusieurs avantages d'une même
chose; elle les épuise; le tissu cellulaire joint
aux propriétés que nous venons d'indiquer, celle de
servir de lien à toutes les parties du corps; c'est lui
qui les soûtient, qui les fixe à leurs places, & qui
fait que, quoiqu'adhérentes les unes aux autres, elles
peuvent pourtant se mouvoir les unes sur les autres
sans la moindre difficulté. Voyez Tissu cellulaire ou graisseux.
Le corps de l'homme se divise en plusieurs parties
principales, qui sont la tête, le tronc & les extrémités: ces dernieres sont, les unes supérieures, ce sont
les bras; les autres inférieures, qui sont formées
des cuisses & des jambes. Chacune de ces parties se
divise encore en plusieurs autres régions.
On distingue dans la tête deux régions principales: l'une couverte de poils, on la nomme partie
chevelue; l'autre en est dépouillée pour la plus grande
partie, c'est la face. Voyez Tête.
La tête est unie à la poitrine par le moyen du cou.
Voyez Cou. Le tronc se divise en thorax ou poitrine,
& bas - ventre ou abdomen. Le devant de la poitrine
retient le nom de thorax; le derriere s'appelle le dos.
C'est du haut & des côtés de cette région, que sortent
les extrémités supérieures.
Le bas - ventre a comme la poitrine une face en
devant & l'autre en arriere; la premiere se partage
en trois régions: la premiere est au milieu, elle est
marquée par le nombril, & de là elle a pris le nom
[p. 264]
de région ombilicale; celle qui est au - dessus, & qui va
jusqu'au bas de la poitrine, se nomme région épigastrique; la troisieme qui s'étend au - dessous, & gagne
jusqu'aux parties génitales de l'un & de l'autre sexe,
a reçu le nom de région hypogastrique. Chacune de
ces régions se divise encore en trois autres; savoir,
celle du milieu & les deux latérales: le milieu de la
région épigastrique se nomme épigastre; les côtés
sont les hypochondres. Voyez Epigastre & Hypochondres.
Les côtés de la région du nombril s'appellent les
lombes; le milieu a conservé le nom de région ombilicale.
La derniere des régions antérieures du ventre se
partage en haute & basse; le milieu de la premiere
est l'hypogastre; les parties latérales sont les îles ou
les flancs: la partie basse répond au petit bassin, son
milieu est le pénil, ses côtés sont les aines.
La face postérieure du ventre présente un grand
enfoncement, qu'on appelle aussi région lombaire postérieure, ou plus communément le creux ou le pli des
reins; ce qui est au - dessous se releve & fait saillie;
c'est la région des fesses, entre lesquelles est l'ouverture
par où le corps se débarasse de ses excrémens;
on l'appelle le fondement, ou l'anus (Voyez Anus);
l'espace qui est entre cette ouverture & les parties
génitales de l'un ou l'autre sexe, porte le nom de
périné, & la ligne qui le partage en partie droite &
gauche, se nomme raphé. Les extrémités supérieures
sont chacune composées de l'épaule, du bras, de
l'avant - bras & de la main; les inférieures le sont
chacune aussi des cuisses, des jambes & du pié.
Après cette idée générale des principales parties
du corps humain, examinons chacune de ces mêmes
parties: nous suivrons dans cet examen l'ordre le
plus simple; nous ne ferons mention des organes qu'à
mesure qu'ils se présenteront successivement à nos
yeux: commençons par la tête. Les poils qui couvrent
plus de la moitié de la surface de cette partie,
sont au moins dans les blancs, beaucoup plus longs
que ceux du reste du corps, on les nomme cheveux.
Voyez Cheveux. La partie la plus haute de la région
chevelue se nomme le vertex; le derriere s'appelle
l'occiput; le devant porte le nom de sinciput;
& les côtés celui de tempes. Le cuir qui porte les
cheveux est plus crasse & moins sensible que la peau
du reste du corps; on y voit un plus grand nombre
de glandes sébacées. Voyez Glandes sébacées.
Le tissu cellulaire qui est au - dessous, a la propriété
de ne se charger que d'une certaine quantité de graisse
assez petite, & logée dans des cellules étroites; ce
tissu étant enlevé, on découvre en devant deux muscles
minces qui vont sous la peau descendre sur le
front jusqu'auprès des sourcils, qu'ils relevent en faisant
rider la peau du front. Ce sont les muscles frontaux.
Voyez Muscles frontaux. En marchant
du sinciput vers l'occiput, le milieu de droite à gauche
est occupé par une aponevrose, à laquelle tiennent
les fibres des muscles frontaux; M. Winslow
l'a nommée calotte aponevrotique du crâne. Voyez Calotte aponevrotique. Du bas & des côtés de
cette aponevrose, partent en arriere des lames charnues
qui vont s'attacher à l'os qui se trouve dans cet
endroit, & qui à cause de cela, a reçû le nom d'os
occipital; ce sont les muscles occipitaux, dont l'usage
paroît être d'aider les frontaux dans leur action.
Voyez Muscles occipitaux. Tout attenant
ces muscles, on en apperçoit deux petits qui vont
transversalement s'attacher au derriere de la conque
de l'oreille externe, qu'ils tirent en arriere; on les
nomme les muscles postérieurs de l'oreille. En remontant
vers les tempes, il se présente de chaque côté
une lame musculaire large & mince, qui du bord de
la calotte aponevrotique, s'avance vers l'oreille,
& s'y insere à quelque distance au - dessus du conduit;
c'est le muscle supérieur de l'oreille externe; il sert
à l'élever un peu. Voyez
Releveur de l'oreille externe . L'artere temporale paroît à quelque distance
de ce muscle en devant; on la voit serpenter
dans cet endroit & se partager en deux branches
principales, dont l'une va vers le front, & l'autre
vers l'occiput; cette derniere s'anastomose
avec l'artere occipital: le mot d'anastomose est employé
par les Anatomistes pour désigner l'abouchement
de deux vaisseaux qui se confondent & n'en
font plus qu'un. Voyez Anastomose.
Quand on a enlevé l'aponévrose dont nous venons
de parler, & les muscles qui y sont annexés,
on découvre sur toute la tête, à l'exception des côtés,
la membrane qui couvre les os immédiatement,
on la nomme le péricrâne: elle ne differe point du
périoste des autres parties; on la voit s'insinuer par
les sutures entre les os de la tête, & communiquer
avec la membrane qui tapisse les os en dedans, &
qui se nomme la dure mere. Voyez Péricrane. Sur
les côtés, dans les régions temporales, se trouve une
aponévrose, que l'on a mal - à - propos prise pour une
des lames du péricrâne; elle couvre un muscle qui
occupe toute cette région, & qui est attaché aux os
du crâne par son extrémité supérieure, & à l'apophise
coronoïde de la mâchoire inférieure, par son
extrémité inférieure; il a principalement la fonction
de lever la mâchoire inférieure, il porte le nom de
crotaphite. Voyez Muscle crotaphite. Sous ce
muscle se découvre un nerf, qui part du maxillaire
inférieur à sa sortie du crâne par le trou ovale de l'os
sphénoïde; on le nomme le nerf temporal.
L'oreille extérieure est placée au bas de la région
temporale; on distingue la partie supérieure qui est
cartilagineuse, d'avec l'inférieure qui est faite par
la peau seulement & le tissu cellulaire; on la nomme
le lobule. La portion supérieure présente plusieurs replis
& plusieurs enfoncemens qui ont différens noms;
entre ces derniers, il y en a un qui mene à un canal
appellé conduit auditif externe. Voyez Oreille externe.
Derriere l'oreille est le nerf auriculaire postérieur
qui vient de la portion dure du nerf auditif; sur le
devant sont les auriculaires antérieurs, qui sont produits
par deux des nerfs cervicaux; je ne fais point
mention du muscle antérieur de l'oreille, parce que
je ne l'ai jamais vû.
Le muscle crotaphite & le péricrâne étant emportés,
on voit en devant l'os frontal; sur les côtés
& en haut, les deux os pariétaux; en bas & toujours
sur les côtés, les grandes ailes de l'os sphénoïde, &
les os des tempes, en arriere l'os occipital: ce dernier
est uni avec les pariétaux & les temporaux par
la suture lambdoïde; les pariétaux le sont entre eux
par la suture sagitrale, & avec les os temporaux &
les grandes aîles du sphénoïde, par la suture écailleuse; enfin par - devant, ils s'unissent avec l'os frontal
par la suture appellée coronale; ces os sont la partie
supérieure & les côtés de la boîte osseuse du
crâne. Voyez
Os frontal, Os pariétaux
, &c.
Il y a dans les enfans une ouverture au crâne dans
le milieu de la suture coronale, dans l'endroit où
la sagittale la rencontre; on la nomme la fontanelle
ou la fontaine de la téte. Voyez Fontanelle.
Pour découvrir ce que le crâne renferme, on le
scie tout - au - tour; & quand on a séparé la calotte,
les parties qui s'offrent aux yeux, sont d'abord une
membrane forte, épaisse, composée de deux lames,
& très - adhérente à la face interne du crâne: c'est la
premiere des enveloppes du cerveau; on l'appelle la
dure mere. Voyez Dure mere. Celle des deux lames
qui regarde le cerveau, se réfléchit entre les deux
principales portions de ce viscere, & forme une cloi<pb->
[p. 265]
son nommée la faux: sur le dos de cette cloison est
un conduit d'une forme triangulaire, qui va toujours
en s'élargissant à mesure qu'il avance en arriere, &
qui reçoit le sang des veines du cerveau; c'est le
sinus longitudinal supérieur: au bord opposé de la
faulx, est un autre conduit bien plus délié; c'est le
sinus longitudinal inférieur: le long du premier de ces
sinus, sur - tout en arriere, sont plusieurs grappes
glanduleuses; on leur a donné le nom de glandes de
P achioni.
Sous la dure - mere est une membrane fine, transparente,
composée de deux lames, dont l'intérieur
s'enfonce dans les sillons qui sont creusés à la surface
extérieure du cerveau; la premiere lame se nomme
la pie - mere, la seconde a reçû le nom d'aracnoïde.
Voyez Pie - mere, &c.
Le cerveau vient ensuite; c'est un viscere très gros,
mol, insensible, arrosé d'un prodigieux nombre
de vaisseaux, composé de deux substances, l'une
extérieure & grise, où l'on pense que l'esprit vital
est situé; l'autre blanche, & qu'on nomme médullaire, que l'on croit formée par l'assemblage des vaisseaux
excréteurs de la premiere, & qui donne naissance
aux nerfs, soit immédiatement, soit médiatement: ce viscere est partagé en deux portions principales
nommées hémispheres; chaque hémisphere
l'est en trois lobes; l'un antérieur, l'autre moyen,
& le troisieme postérieur: à la surface extérieure
sont différens enfoncemens connus sous le nom d'anfractuosités: la substance grise qu'on appelle aussi
corticale, s'insinue dans toutes les anfractuosités: une
lame blanche assez épaisse, fait par en bas & dans la
partie moyenne, la réunion des deux hémispheres;
c'est le corps calleux, où quelques - uns ont assez ridiculement
placé le siége de l'ame: sur les côtés de ce
corps, un peu plus bas que lui, sont creusées deux
grandes cavités connues sous le nom de ventricules
supérieurs ou latéraux du cerveau, qui sont fort irrégulieres,
& qui s'enfoncent en le contournant comme
les cornes d'un bélier; sous les lobes moyens du cerveau,
une cloison transparente se voit entre les deux
ventricules; elle les sépare, elle est formée de deux
lames fort distinctes; c'est le septum lucidum: la premiere
chose qui frappe dans les ventricules supérieurs,
c'est une masse de vaisseaux très - sins, & différemment
entortillés, laquelle, en s'élargissant en
arriere, se prolonge jusqu'au fond des ventricules;
elle a pris le nom de plexus choroïde: les vaisseaux qui
la forment se réunissent en une grosse veine, nommée
veine de Galien, qui décharge le sang dans un sinus,
que nous observerons dans l'instant: otez le plexus
choroïde, & vous apperceverez en devant &
sur le côté dans chaque ventricule, une bosse oblongue,
qui se termine en - arriere par une sorte de queue;
elle est grise à l'extérieur, mais le dedans est mélé
de la substance blanche & de la grise; c'est le corps
cannelé. Sous le septum lucidum est une lame blanche
qui s'élargit en s'avançant en - arriere, & s'y partage
en deux branches minces; on la nomme la voûte à
trois piliers: enlevez cette voûte, rejettez - la en devant,
& vous apperceverez qu'elle s'y divise en
deux cordons blancs, dans l'écartement desquels vous
pourrez distinguer un troisieme cordon transversal
nommé la commissure antérieure du cerveau: vis - à - vis
est une ouverture qui va au troisieme ventricule:
plus loin sont deux éminences ovales, appellées couches des nerfs optiques; ces éminences laissent entre
leurs extrémités postérieures une autre ouverture
qui va aussi au troisieme ventricule; on la nomme
anus, l'antérieure s'appelle vulva: attenant l'anus
est la commissure postérieure du cerveau; c'est un
cordon transversal qui s'avance assez peu de chaque
côté: dans le lieu où la cavité des ventricules supérieurs
commence à s'enfoncer, on voit un petit pro<cb->
longement pointu en - arriere; c'est le processus anciroïde: on apperçoit dans le reste un bourrelet qui suit
les contours de la cavité; les Anatomistes l'ont nommé
la corne d'ammon; quand on écarte les couches
des nerfs optiques, il se présente une cavité oblongue
d'assez peu d'étendue, d'une forme à peu près
triangulaire; c'est le troisieme ventricule du cerveau
qui s'enfonce en devant, & forme l'entonnoir, dont
le bec aboutit à une petite colonne médullaire, appuyée
sur la glande pituitaire; on la nomme à cause
de cela, tige pituitaire: on apperçoit à la face postérieure
du troisieme ventricule, l'ouverture de l'aquéduc de Silvius; c'est un conduit qui du troisieme ventricule
mene au quatrieme: sur le trajet de ce conduit,
il y a quatre éminences arrondies, que les anciens
ont assez ridiculement appellées natès & testès.
Après avoir considéré tous les objets que nous venons
d'indiquer, si l'on renverse la masse du cerveau de
devant en arriere, on voit d'abord sous les lobes antérieurs
les nerfs de la premiere paire, ou nerfs olfactoires, qui vont gagner la lame cribleuse de l'os ethmoïde;
ensuite on voit les nerfs optiques, dont on
observe la réunion sur le devant de la selle du turc,
& le passage par les trous optiques de l'os sphénoïde:
les arteres carotides sont à côté de ces nerfs, & les
touchent; on les voit se partager en deux branches
principales, dont l'une s'avance entre les deux lobes
antérieurs du cerveau, & se réfléchit sur le corps
calleux; l'autre s'engage dans la grande scissure de
Silvius, & va se rendre au lobe moyen & à la plus
grande partie du lobe postérieur: derriere la réunion
des deux nerfs optiques, est l'extrèmité de la tige pituitaire,
& dans le voisinage sont deux éminences
appellées mamillaires: viennent ensuite deux grosses
masses blanches & arrondies, qui marchant de devant
en arriere, se rapprochent & s'enfoncent dans
un gros bourrelet arrondi, appellé pont de varole, ou
protubérance annulaire; ces deux masses sont les crura
cerebri: dans ce trajet se voient les nerfs de la troisieme
paire, ou nerfs grands moteurs des yeux, lesquels
vont se rendre à l'orbite par la fente sphénoïdale: un
peu plus en arriere & sur les côtés, se présentent
aussi les gros nerfs de la cinquieme paire, qui vont,
après s'être partagés en trois branches, à l'orbite, à
la mâchoire supérieure, & à la mâchoire inférieure.
Si l'on enleve la masse du cerveau, après avoir
coupé vers les cuisses, ou cruva cerebri, voici les
choses qui se présentent à la vue: en devant est le
plancher osseux qui soutenoit les lobes antérieurs du
cerveau; il est fait par l'os frontal en partie, & par
certaines productions de l'os sphénoïde, nommées
aîles d'Ingrassias; le milieu de ce plancher s'enfonce
plus que le reste, & c'est dans cet enfoncement qu'est
logée la lame cribreuse de l'os ethmoïde; sur le milieu
de cette lame en devant, est l'éminence crista
galli, à laquelle s'attache la pointe de la faulx du
cerveau: sur le devant de cette éminence, est le
trou borgne, duquel part le sinus longitudinal supérieur
de la dure mere, au - dessus duquel s'éleve l'épine frontale: sur le bord de la lame cribreuse est le
nerf accessoire de l'olfactif, qui sort de l'orbite par
un des trous orbitaires internes: au bord postérieur
du plancher dont nous parlons, vers le milieu, sont
les deux apophyses clinoïdes antérieures, & tout auprès,
les deux trous optiques: au - dessous de ce bord
sont deux grandes fosses séparées par une éminence
mitoyenne; la paroi de ces fosses est formée par
les os temporaux & le sphénoïde: sur l'éminence
moyenne, est creusée la selle du turc qui renferme
la glande pituitaire & son accessoire, avec quelques
petits sinus; cette cavité est terminée en arriere par
les apophyses clinoïdes postérieures: sur les côtés de
la selle du turc, sont les deux sinus orbitaires, au - dessus
desquels se glisse le nerf pathétique, ou nerf
[p. 266]
de la quatrieme paire, qui va se rendre dans l'orbite
par la fente sphénoïdale, & se perd dans le muscle
extérieur de l'oeil: dans la cavité des sinus orbitaires
sont renfermés les nerfs de la troisieme paire, ceux
de la cinquieme & sixieme, l'artere carotide interne
& les filets qui sont la communication du nerf grand
sympathique, avec la sixieme paire & la premiere
branche de la cinquieme: dans le fond des fosses
moyennes de la base du crâne, sont plusieurs petits
sinus, & l'on voit au - dessous des aîles d'ingrassias,
les fentes sphénoïdales: plus bas & plus en arriere,
les trous ronds antérieurs qui laissent passer la seconde
branche du nerf de la cinquieme paire: plus
loin, en marchant toujours en arriere, les trous
ovales, les trous innominés, & les trous épineux de
l'os sphénoïde; ce dernier laisse passer l'artere qui se
distribue à la dure - mere: le rocher dans lequel est
renfermé l'organe de l'oüie, sépare les fosses moyennes
du crâne d'avec les postérieures: on voit à sa
face antérieure un petit trou, & sur son sommet un
sinus nommé le sinus supérieur du rocher: les arteres
carotides pénetrent dans le crâne vers la pointe de
ce rocher, & se couchent en s'avançant en devant
sur les côtés de la selle du turc pour gagner les apophyses
clinoïdes antérieures: au niveau du rocher se
découvre un plancher membraneux, un peu élevé
dans son milieu, où s'appuie la partie la plus large
de la faulx, & échancré en - devant pour laisser passer
la moëlle allongée; il est fait par la réflexion de
la lame interne de la dure - mere; c'est la tente du cervelet; il soutient les lobes postérieurs du cerveau:
le pressoir d'Hérophile marche dans son milieu de
devant en - arriere; c'est à ce sinus que la grande veine
de Galien & le sinus longitudinal inférieur viennent
se rendre; cette tente est attachée dans son contour,
aux branches transversales de l'éminence cruciale
de l'os occipital, & à l'angle supérieur du rocher;
c'est dans la premiere partie de cette adhésion
que se trouvent les sinus latéraux, dans lesquels vont
se dégorger le sinus longitudinal supérieur, & le
pressoir d'Hérophile; ces sinus vont en s'enfonçant,
aboutir au golphe des jugulaires. Voyez Cerveau &
tous les noms écrits en lettres italiques.
Le cervelet paroît quand on a enlevé la tente commune;
c'est un viscere plus petit que le cerveau;
mais qui, eu égard aux principales circonstances, a
beaucoup de ressemblance avec lui: une petite faulx
que l'on voit en - arriere, le partage en deux hémispheres;
la substance grise est à l'extérieur, la blanche
se ramifie en dedans, & forme ce qu'on nomme
l'arbre de vie; en soulevant le bord antérieur, on
voit une pellicule, c'est la grande valvule de Vieussens, qui couvre le quatrieme ventricule, & du voisinage
de laquelle on voit aussi naître les nerfs de la
quatrieme paire; cette valvule rompue, la cavité
qui se présente est le quatrieme ventricule, ou le calamus scriptorius, dont les côtés sont formés par les
pédoncules du cervelet; par le même renversement
qui découvre ces parties, on met aussi sous les yeux
dans son entier, l'appendice vermiforme: si vous coupez
les deux pédoncules, & que vous emportiez le
cervelet, les fosses postérieures de la base du crâne se
font voir; vous appercevez aussi les sinus occipitaux,
& sur la face postérieure du rocher, le méat auditif
interne, dans lequel s'insinue la double portion du
nerf acoustique & les arteres auditives: plus bas vous
voyez les trous déchirés postérieurs, par lesquels sortent
les sinus latéraux, la huitieme paire des nerfs, ou
la paire vague & le nerf accessoire de Willis: sur le milieu
est un gros cylindre médullaire; c'est la moëlle
allongée qui descend vers le grand trou occipital,
passe par cette ouverture, & descend dans le canal
de l'épine en prenant le nom de moëlle épiniere. Renversez - la en arriere, l'éminence transversale que
vous voyez en haut, est le pont de Varole: vous distinguez
au bas les éminences olivaires & les piramidales: les deux nerfs que vous appercevez vers le milieu,
sont ceux de la sixieme paire: plus bas sur les
côtés, sont ceux de la septieme paire, ou les nerfs
auditifs: un peu au - dessous, plusieurs filets se ramassent
pour former la paire vague; d'autres naissant
après vont aux trous condiloïdiens antérieurs, &
sont les nerfs de la neuvieme paire, ou nerfs hypoglosses; les nerfs sous - occipitaux paroissent ensuite:
coupez la moëlle au niveau du trou occipital, &
vous appercevez les arteres vertébrales se réunir pour
former la basilaire, de laquelle vous voyez naître les
spinales, les auditives, &c. ensuite la basilaire montant
vers les apophyses clinoïdes postérieures, communique
avec les carotides, donne au cervelet, &
va aux lobes postérieurs du cerveau: au bas des apophyses
que nous venons de nommer, sont les sinus
caverneux, qui par le haut communiquent avec les
orbitaires, & par le bas avec deux tuyaux assez déliés,
qui sous le nom de sinus inférieurs du rocher,
vont s'ouvrir à l'extrémité des sinus latéraux; enfin
on voit ici la tubérosité occipitale interne, l'éminence
cruciale de l'os occipital, & l'apophyse basilaire du
même os, qui va jusqu'au sphénoïde pour s'unir &
se confondre avec lui chez les adultes. Voyez Cervelet & tous les mots écrits en lettres italiques.
La tête renferme encore les principaux organes
des sens: celui de l'ouïe est placé dans la portion dure
de l'os des tempes. Nous avons déja remarqué le
conduit auditif extérieur, il est terminé par une cloison
membraneuse un peu enfoncée dans son milieu,
on la nomme membrane du tympan: la cavité qu'elle
ferme est le tambour, qui est assez peu régulier, &
par - tout tapissé d'un périoste très - fin: ce qu'on distingue
au premier coup - d'oeil, ce sont trois petits
osselets, dont l'un est placé en - devant, & ne ressemble
pas mal à une massue, on l'appelle le marteau;
deux muscles viennent s'y insérer: l'un est renfermé
dans un conduit osseux, qui suit la direction de
la trompe d'Eustache; le second passe par la fêlure
articulaire. Derriere le marteau sur la même ligne
est un autre osselet appellé l'enclume, il s'unit avec
la tête du marteau; il a deux branches, dont la plus
courte s'avance dans l'ouverture des cellules mastoïdiennes,
la plus longue va s'unir à un petit os,
appellé l'étrier: ce dernier a un muscle fort petit,
& qui est renfermé dans le conduit osseux de la pyramide: entre la tête de l'étrier & la branche de l'enclume
qui s'y joint, il y a un petit osselet, qu'on
nomme orbiculaire: on distingue entre ces parties
un cordon nerveux, qui d'arriere s'avance en descendant
en - devant, pour sortir par la fêlure articulaire
de l'os des tempes & se joindre au nerf lingual
qui vient de la cinquieme paire; ce nerf porte
le nom de corde du tambour: plusieurs orifices s'ouvrent
dans la cavité du tympan; celui qui est enhaut
& en - arriere, conduit aux cellules mastoïdiennes, qui sont des cavités assez irrégulieres, creusées
dans la base du rocher au - dessus des apophyses mastoïdes: la seconde ouverture est en - bas & en - devant,
elle mene à un conduit, qui va toûjours en s'élargissant
se terminer vers le fond des narines; c'est la
trompe d'Eustache: la troisieme ouverture s'appelle la
fenêtre ovale, elle est remplie par la base de l'étrier,
& conduit au vestibule: la derniere est la fenêtre
ronde qui communique avec le limaçon; entre la
fenêtre ovale & le haut du tympan se trouve une
partie de l'aqueduc de Fallope; c'est un conduit osseux
qui part du fonds du méat auditif interne, &, après
plusieurs contours, vient aboutir au trou stilo - mastoïdien; il renferme la portion dure du nerf auditif.
La petite cavité qui est vis - à - vis la fenêtre ovale, ressemble
à un petit dôme, où viennent se rendre les
[p. 267]
canaux demi - circulaires, & l'un des conduits du limaçon,
on la nomme le vestibule: ces canaux demi circulaires
sont au nombre de trois, le supérieur, l'inférieur,
& le postérieur. Au bas de ces canaux est un
canal partagé intérieurement en deux, qui tournant
en spirale & toûjours en se retrécissant, fait environ
deux tours & demi, & ressemble fort à un limaçon
dont il a emprunté le nom. Voy. Oreille interne,
& tous les mots écrits en lettres italiques.
Les autres organes des sens qui ont leur siége à la
tête, sont placés dans la face: le premier & le plus
important est l'oeil qui est logé dans l'orbite, & couvert
des paupieres: le front s'éleve au - dessus; &
dessous la peau qui le couvre, on voit la veine préparate vers le milieu, & les deux nerfs frontaux qui
viennent de la premiere branche, ou branche orbitaire
supérieure de la cinquieme paire. La racine du
nez est au milieu des fibres musculaires qui viennent
des frontaux, la couvrent: on a compté ces fibres
au nombre des muscles du nez: les sourcils se présentent
ici, & suivent dans leur contour le bord
supérieur de l'orbite; sous leur grosse extrémité ou
tête est le muscle corrugateur, qui s'attache d'une
part à l'apophyse orbitaire interne du frontal, & de
l'autre au revers de la peau vers le milieu des sourcils
qu'il abaisse. Sous la peau qui couvre & forme
les paupieres est un muscle large, mince, dont les
fibres disposées circulairement vont aboutir à un
petit tendon placé à la partie intérieure des paupieres,
il les rapproche, ferme l'oeil, & s'appelle le
muscle orbiculaire des paupieres: chacune de ces parties
est bordée d'une rangée de poils appellés cils,
qui sont soutenus par certains petits cartilages
applatis (les torses), & dans le voisinage desquels
on voit à la face interne les glandes ciliaires: les endroits
où ces cartilages se rencontrent, se nomment
les angles de l'oeil; l'un grand ou interne, c'est celui
du côté du nez; l'autre petit ou externe, c'est l'opposé.
Au grand angle est la caroncule lacrymale; c'est
une petite glande grenue & rouge: près d'elle est le
repli semi - lunaire de la conjonctive: dans le même
lieu, le bord de chaque paupiere porte une petite
éminence au sommet de laquelle est un petit trou,
c'est le point lacrymal, qui mene à un petit canal
membraneux, lequel s'avance vers le grand angle de
l'oeil; on le nomme conduit lacrymal: celui de la paupiere
supérieure venant à rencontrer le canal de l'inférieure
s'unit à lui, & de cette réunion résulte le
canal commun, qui est très - court & qui s'ouvre dans
un sac placé au grand angle de l'oeil, on le nomme
sac lacrymal; il est membraneux, d'une forme
oblongue, & finit en - bas par un conduit membraneux,
qui s'enfonce dans le canal nasal & décharge
dans le nez l'humeur des larmes que les conduits
lacrymaux ont apportée dans le sac: la paupiere supérieure
a un muscle qui l'éleve, & qu'on nomme
le releveur de la paupiere supérieure; il vient du fond
de l'orbite, & finit au cartilage de la paupiere: on
trouve vers le petit angle en - haut dans un enfoncement
creusé à la face interne de l'apophyse orbitaire
externe, la glande qui fait la secrétion de l'humeur
des larmes, on la nomme la glande lacrymale:
de sa face concave partent douze ou quinze tuyaux
excréteurs très - fins, qui percent la conjonctive &
versent l'humeur sur l'oeil, ce sont les vaisseaux hygrophthlamiques: la tunique qui revêt les paupieres
en - dedans, se nomme conjonctive, elle se réfléchit sur
la face antérieure du globe de l'oeil, & la couvre
jusqu'au bord de la cornée transparente.
Si l'on enleve la paroi supérieure de l'orbite, on
voit d'abord le périoste de cette cavité qui paroît
n'être qu'un prolongement de la dure - mere, ensuite
on distingue le nerf orbitaire supérieur, c'est la premiere
branche de la cinquieme paire, puis le muscle
releveur de la paupiere, sous lequel est le muscle
superbe ou rele veur de l'oeil; au côté extérieur est
placé l'oblique abducteur de l'oeil, & le nerf de la
quatrieme paire qui va s'y distribuer tout entier: du
côté du nez paroît d'abord le muscle grand oblique de
l'oeil, vulgairement dit trochéateur: il vient comme
les autres du fond de l'orbite, mais il passe son tendon
par une petite poulie cartilagineuse placée vers
le grand angle de l'oeil, & de - là se réfléchit en arrière
& en - dehors pour s'insérer au globe de l'oeil
entre le superbe & le dédaigneux. Sous le grand
oblique est placé le muscle adducteur ou bibiteur: on
trouve aussi dans cet endroit le nerf accessoire de l'olfactif, & la branche de l'orbitaire supérieure qui
va au sac lacrymal, &c.
Le globe de l'oeil paroît en écartant les muscles
supérieurs, il n'est pas tout - à - fait au milieu de l'orbite;
le gros cordon blanc que vous voyez partir
en arriere de son fond & gagner la pointe de l'orbite,
est le nerf optique; les petits filets qui l'entourent,
forment le plexus optique; vous les voyez naître
pour la plûpart d'une petite tumeur, c'est le ganglion lenticulaire, auquel se rendent des nerfs qui
viennent de la troisieme paire & de la cinquieme:
la premiere tunique du globe est épaisse, forte &
grise, c'est la sclérotique; elle se change en - devant
en une lame transparente, nommée cornée, à - travers
laquelle passent les rayons visuels: derriere cette
cornée est un espace qui contient une humeur fort
claire, & qui se régénere avec une extrême facilité,
on la nomme l'humeur aqueuse, ses sources
nous sont inconnues; le lieu qui la renferme s'appelle
la chambre antérieure de l'oeil; sous la sclérotique
se trouve une membrane composée de deux
lames, qui est d'une couleur brune, & à la surface
de laquelle sont les filets nerveux du plexus optique
qui ont traversé la sclérotique & qui s'avancent en
devant: cette seconde tunique porte le nom de
choroïde; quand elle est venue près du bord de la
cornée, elle adhere fortement à la face interne de
la sclérotique: cette adhérence est marquée par un
bourrelet assez mal - à - propos appellé ligament ciliaire: les filets nerveux que nous venons d'observer
s'y terminent: de - là la choroïde se refléchit &
forme une cloison qui sépare la chambre antérieure
de l'oeil d'avec la postérieure, qui loge l'humeur
vîtrée & le crystallin; cette cloison est percée dans
son milieu, le trou est rond & il peut se resserrer &
s'élargir, c'est la pupille; la face antérieure de cette
même partie est teinte de plusieurs couleurs, on la
nomme iris; la face postérieure est brune, elle s'appelle
uvée par quelques Anatomistes: c'est - là qu'on
voit les fibres musculaires qui resserrent & dilatent
la pupille; plus loin sont plusieurs lignes disposées
en rayons, nommées processus ciliaires; ces lignes
vont aboutir au lieu où la circonférence de la cloison
adhere à la sclérotique: la rétine est sous la choroïde,
c'est une membrane molle & pulpeuse qui
s'étend en s'amincissant jusqu'à la cloison; on la
regarde comme l'organe immédiat de la vûe: dans
le creux que toutes ces tuniques forment, est renfermé
une masse claire, brillante & semblable à
du verre fondu, c'est le corps vitré; une membrane
très - fine, connue sous le nom de membrane hialoïde, l'enveloppe: elle est composée de deux lames;
l'intérieure se replie en - dedans & forme un prodigieux
nombre de cellules: le crystallin est placé endevant
entre ces deux lames, qui font sa capsule ou
son chaton; cette partie est un corps transparent,
d'une certaine consistance situé immédiatement derriere
la pupille, sa forme approche assez de celle
d'une lentille un peu applatie en - devant. Sous le
globe de l'oeil sont placés deux muscles, l'humble ou
l'abaisseur, & le petit oblique: si l'on enleve le globe
[p. 268]
& ses muscles, on voit en - bas & en - dehors une
longue fente, c'est la fente orbitaire inférieure; elle
livre passage au nerf maxillaire supérieur & aux arteres orbitaires. On voit alors que la cavité de l'orbite
est pyramidale, & que plusieurs os entrent dans
sa composition; savoir le frontal & le sphénoïde en - dessus,
le maxillaire & le palatin en - bas, sur le côté
extérieur l'os de la pommette & une partie de la
grande aîle du sphénoïde, en - dedans l'os éthmoïde &
l'os unguis; on y voit en - dehors les deux fentes
orbitaires, l'une supérieure & l'autre inférieure: en
dedans le trou optique, les trous orbitraires internes,
le commencement du conduit nasal, en - bas le
conduit orbitaire inférieur qui laisse passer le nerf
maxillaire supérieur. Voyez OEil, &c.
L'organe de l'odorat est fait par le nez, l'extérieur
& l'intérieur: le premier, dont la situation est
assez connue, offre à sa racine, sous la peau & les
lames musculaires dont nous avons parlé, deux os
nommés os du nez, & deux apophyses longues de
l'os maxillaire supérieur; au bas de ces os est un
cartilage, qui se prolongeant en dedans, fait la partie
antérieure de la cloison des narines, c'est le
grand cartilage ou le moyen, après lequel se présentent
deux autres cartilages recourbés, qui sont les
aîles & le bas de la cloison du nez extérieur; vers
le bout des aîles on trouve quelques petits cartilages
irréguliers: dans le voisinage, on apperçoit le
muscle incisif, qui vient de la racine du nez & du
bord voisin de l'orbite pour se terminer à la peau
de la levre supérieure qu'il releve, en dilatant la
narine: au - dessous de l'aîle de la narine est le
muscle myrthiforme: si l'on pénétre dans l'intérieur
des narines, on voit tout tapissé par la membrane
pituitaire; elle est l'organe de l'odorat: au milieu
de cette cavité est une cloison moitié osseuse, moitié
cartilagineuse. Nous venons de voir que le cartilage
moyen du nez fournissoit ce qu'elle a de cartilagineux: la lame descendante de l'os ethmoïde
& le vomer sont la portion osseuse qui est en arriere: on apperçoit en haut le corps cellulaire de l'os
ethmoïde, dans lequel on distingue les deux cornets
supérieurs du nez; entre ces cellules se découvrent
deux rigoles qui conduisent à deux trous arrondis,
creusés dans le bord du frontal, & qui sont les orifices
des sinus frontaux ou sourcilliers: sur chacun
des côtés, il se présente un petit os fait & disposé
en maniere d'auvent, on le nomme la conque inférieure
du nez: au - dessus se voit l'ouverture du sinus
maxillaire, c'est une grande cavité qui occupe tout
l'intérieur de l'os du même nom: plus bas que la
conque est l'extrémité du conduit nasal: en - arriere,
& toûjours sur le côté, est une grande ouverture,
c'est le pavillon de la trompe d'Eustache, cette
trompe est un conduit en partie cartilagineux &
membraneux, en partie osseux, qui montant en se
retrécissant de bas en haut & de dedans en dehors,
va communiquer avec la cavité du tympan: la paroi
intérieure de la fosse nasale est en partie osseuse
& en partie membraneuse: la portion osseuse est
faite par les os maxillaires & les os palatins; la portion
membraneuse est en - arriere, elle va en pente
vers le gosier; c'est ce qu'on appelle le voile du palais: les côtés de la fosse nasale sont formés par les
os maxillaires & les os du palais: le haut est fait par
les os du nez, l'os ethmoïde, & en arriere par le
sphénoïde; dans la portion nasale de ce dernier os
on voit les ouvertures des sinus sphénoïdaux, qui
sont placés sous la selle du turc, & occupent tout le
corps de l'os: au - dessous de ces trous sont les narines
postérieures ou arrieres narines, par lesquelles le
nez communique avec le gosier: outre les nerfs olfactoires,
dont les filets passent & descendent dans
le nez par les petits trous de la lame cribreuse de
l'os ethmoïde, il y a encore des nerfs qui, accompagnés
de petites arteres, s'insinuent par les trous
sphéno - palatins, ceux - là viennent du maxillaire supérieur: au bas de la cloison du nez dans les os
secs, il y a une ouverture de chaque côté qui va
aboutir dans le haut du palais en - devant au trou
palatin antérieur.
Les joues sont sur le côté du nez; on y voit sous
la peau, qui est très - fine & très - colorée dans cet
endroit, les muscles zygomatiques grand & petit, qui
tous les deux vont à la commissure des levres qu'ils
tirent en - dehors; la glande parotide qui s'avance
jusqu'à l'oreille, c'est la plus grosse des salivaires:
son conduit excréteur part en - devant, vient s'ouvrir
dans la bouche, & s'appelle le conduit de Sténon: le muscle masseter, un des principaux releveurs
de la mâchoire, se voit sous la parotide dont
il est en partie caché, & sous ce muscle est la branche
de la mâchoire inférieure: l'os de la pommette
est dans le même lieu, & l'on voit son apophyse
externe s'avancer vers les tempes, & former avec
une autre apophyse de l'os des tempes l'arcade zygomatique, sous laquelle passe le tendon du crotophyte,
& au bord de laquelle s'attache le masseter
par en - haut. Sous l'os de la pommette est un enfoncement
(c'est la fosse malaire) dans lequel on voit le
muscle canin & le trou orbitaire externe, par lequel
sort l'extrémité du nerf maxillaire supérieur, qui
s'unissant ici avec la portion dure du nerf auditif,
fait un plexus d'une grande étendue.
Chacun sait où la bouche est placée; les Anatomistes distinguent la bouche extérieure de la cavité
à laquelle elle conduit. Cette bouche extérieure
s'ouvre entre les deux levres: sous la peau de chacune
des levres, on voit les arteres labiales qui viennent
de la maxillaire externe: elles serpentent sur le
muscle orbiculaire, qui fait une partie de l'épaisseur des
levres; l'angle qu'elles forment en se rencontrant,
se nomme la commissure, à laquelle viennent se rendre
les muscles zygomatiques, canin, buccinnateur,
quelques fibres du peaucier, le muscle triangulaire,
le quarré, la houpe du menton: la peau qui couvre
ces trois derniers laisse passer les poils de la barbe,
ainsi que celle des levres & du bas des joues, dans
les mâles seulement: en renversant les levres, on
apperçoit la membrane fine qui les couvre, & sous
laquelle est un tissu légérement spongieux, qui soûtient
les glandes labiales & les papilles nerveuses:
cette membrane, avec son tissu, se réfléchissant sur
les bords de chaque mâchoire, y forme les gencives,
& produit deux petits replis qu'on nomme
freins des levres. Elle tapisse aussi le reste de la bouche,
& loge d'autres glandes semblables aux labiales,
& qu'on nomme buceales: si l'on enleve les
parties que nous venons d'indiquer, la face externe
de la mâchoire paroît à nud; on distingue dans son
milieu ce qu'on nomme la symphise; à quelque distance
on voit les trous mentoniers par lesquels sortent
les extrémités des nerfs maxillaires inférieurs,
lesquels vont former par leur union avec la portion
dure de l'auditif, le plexus maxillaire: l'artere maxillaire
externe se présente aussi sur le bord de la mâchoire: les dents se montrent toutes, & l'on peut
distinguer les incisives qui sont en - devant au nombre
de quatre à chaque mâchoire; les canines qui viennent
après, & qui sont au nombre de deux, & les
molaires placées le plus en arriere; on en compte
dix, cinq de chaque côté: en écartant les mâchoires,
on voit en bas la langue; sa base est en - arriere:
observez le trou qui y est creusé, c'est le trou borgne;
depuis ce trou jusqu'à la pointe vous distinguez une
ligne légérement creusée, c'est la ligne médiane: à la
face supérieure de cette partie sont les papilles nerveuses: les pyramidales vers sa pointe, les bouton -
[p. 269]
nées au milieu, & vers sa base celles qui sont à tête
de champignon: plus loin que ces dernieres sont placées
les glandes linguales: ce même écartement des
mâchoires fait paroître les ligamens intermaxillaires
& les glandes molaires: si vous relevez la pointe de
la langue en arriere, vous apperceverez une petite
duplicature de la membrane interne de la bouche,
c'est le frein de la langue: à côté sont les arteres &
les veines de la langue, on les nomme ranines: deux
petites élévations se font aussi appercevoir, elles
sont percées: leur trou est l'orifice du tuyau excréteur
des glandes maxillaires & sublinguales: ces
dernieres sont placées dans l'endroit que nous examinons: la voûte du palais répond à la face supérieure
de la langue, on y voit les glandes palatines
& le voile du palais: au milieu de l'arcade que ce
voile forme par son bord inférieur est la luette: au - dessus
d'elle jusqu'à l'épine palatine est le muscle
azygos; sur les côtés sont deux replis qui viennent
tomber sur les bords de la base de la langue, ils forment
le contour de l'isthme du gosier, & renferment
les muscles glosso - staphilins: deux autres replis partent
également du voisinage de la luette, & vont se
perdre en - arriere dans le fond du gosier. Les glandes
amygdales sont situées entre ces replis: les muscles
petro - staphilins, les pterigo - staphilins supérieurs & les
inférieurs vont se rendre au voile du palais, & servent
aux différens mouvemens qu'il exécute. L'espace qui est derriere le voile du palais est l'arrierebouche
ou le pharinx, qui va en s'allongeant en
maniere d'entonnoir, aboutir à l'oesophage: cette
partie est toute musculeuse, & se resserre par la contraction
des muscles pétro & céphalo - pharingiens,
ptérigo - pharingiens, hypéro - pharingiens, bucco - pharingiens, maxillo - pharingiens, glosso - pharingiens, hiophar
ngiens, syndesmo - pharingiens, thiro - pharingiens
& crico - pharingiens: dans la partie anterieure &
basse de cette région, on voit une ouverture qui
mene à la trachée - artere, c'est la bouche du larynx;
plus bas est une fente connue sous le nom de glotte:
au - dessus est un cartilage nommé épiglotte, il fait la
fonction de valvule dans le tems de la dégiutition:
sur les côtés de la glotte sont les ventricules du larynx,
& sur ces cavités sont placées les cartilages
ariténoïdes & les glandes du même nom. Quittons
pour un moment cette région, & considérons le bas
du menton & le col. La premiere partie qui se présente
en - devant sous les tégumens est le muscle
peaucier; quand on l'a enlevé, on apperçoit sous la
mâchoire le muscle digastrique qui y tient, & va de
l'autre bout s'attacher au crâne dans la rainure - mastoïdienne: sous la portion antérieure du digastrique
est le muscle milo hyoidien: qu'on le détache de la
mâchoire à laquelle il tient par son bord supérieur,
& qu'on le renverse sur l'os hyoïde, les parties
qu'on découvre sont les muscles génio - hyoïdiens,
après lesquels viennent les génio - glosses, sur le côté
desquels sont placées les glandes sublinguales, & à
quelque distance vers l'angle de la mâchoire les
glandes maxillaires: on a crû voir dans cet endroit
deux muscles que l'on avoit nommés milo - glosses:
mais ils n'existent point; l'os hyoïde est en - devant
au - dessous de ces parties; les fibres musculaires
qui s'élevent de son bord supérieur, & qui montent
à la base de la langue, constituent le muscle hyoglosse; on voit au - dessous de ce même os les muscles
sterno - hyoïdiens & les omo - hyoïdiens: les uns & les
autres sont attachés au bas de l'os hyoïde, & les premiers
vont au sternum, les derniers à l'omoplate:
ces muscles étant enlevés, il en paroît deux autres,
l'un court, & qui du bord inférieur de l'os hyoïde
va se terminer à l'aîle du cartilage thyroïde, c'est
le hyo - thyroïdien; l'autre est plus long, & va du
même cartilage se rendre au sternum & s'y insérer,
c'est le sterno - thyroïdien. Il s'éleve aussi du sternum
& de la partie voisine de la clavicule, un muscle
tres - fort, qui monte jusqu'à l'apophyse mastoïde de
l'os des tempes, & s'y attache ainsi qu'à la partie la
plus prochaine de la ligne demi - circulaire supérieure
de l'occiput, c'est le sterno - mastoidien: la trachéeartere se présente en - devant au milieu du cou; c'est
un tuyau qui recoit l'air, & le conduit au poûmon:
sa partie antérieure est faite de petites bandes cartilagineuses
semi - circulaires liées entre elles par des
membranes, le derriere est tout membraneux: on
apperçoit en - dedans & en - arriere les glandes trachéales & les bandes musculaires de Morgagni: dans l'endroit
où ce conduit s'enfonce dans la poitrine chez
les enfans, il est en partie couvert par le thymus;
c'est une glande dont l'usage n'est pas encore bien
connu, & qui descend dans le foetus jusqu'au péricarde: au commencement de la trachée - artere, on
voit une espece de tête qu'on appelle larynx, c'est
elle qui fait l'éminence appellée pomme d'Adam:
une glande étroite dans son milieu, & renflée sur les
côtés, embrasse le bas du larynx, on la nomme la
glande thyroïde: le plus grand & le plus antérieur des
cartilages du larynx ressemble à un bouclier, il a
pris, à cause de cela, le nom de thyroïde ou de scutiforme; il a deux apophyses en - haut & en - arriere,
qui par le moyen d'un petit ligament, sont unies
aux extrémités des cornes de l'os hyoïde: deux autres
apophyses moins longues, mais plus larges,
s'articulent en - arriere & en - bas avec le cartilage cricoïde: ce second cartilage a la forme d'un anneau,
dont le chaton fort large & fort élevé est en - arriere;
le muscle crico - thyroïdien est en - devant entre les
bords correspondans du thyroïde & du cricoïde. Audessus de ce dernier, en - arriere, sont les cartilages
ariténoïdes: on voit aussi plusieurs muscles de chaque
côté; les premiers vont de la surface du chaton
du cricoïde à la partie inférieure des ariténoïdes,
ce sont les crico - ariténoïdiens postérieurs: les seconds
vont en se croisant du bord supérieur du cricoïde au
milieu de la face creuse & posterieure de l'ariténoïde;
du côté opposé, ils ont le nom de crico - ariténoïdiens
croisés: les troisiemes sont placés sur le bord du cricoïde
en - devant, & vont gagner l'ariténoïde, ce
sont les crico - ariténoïdiens latéraux: il y a encore ici
deux muscles nommés thyro - ariténoïdiens: entre l'os
hyoïde & le cartilage thyroïde pénetre le nerf laringé supérieur; on voit en - bas le nerf laringé inférieur & l'artere laringée, dont plusieurs rameaux serpentent
sur la glande thyroïde; au - dessus de l'os
hyoïde on distingue l'artere linguale & les trois nerfs
hypo - glosses, le grand, le moyen & le petit. Les deux
ligamens suspenseurs du même os se montrent aussi,
& vont gagner l'apophyse stiloïde, de laquelle trois
muscles semblent partir, dont l'un va à la langue,
l'autre au pharynx, & le troisieme à l'os hyoïde:
le premier s'appelle stilo - glosse, le second stilo - pharyngien, le troisieme stilo - hyoïdien: c'est à - peu - près
dans cette région & vers l'angle de la mâchoire inférieure
que se rendent les veines qui rapportent le
sang des parties indiquées; elles vont s'ouvrir dans
la grosse veine jugulaire interne; mais il y a beaucoup
de variétés dans la maniere dont elles le font: cette
grosse veine jugulaire interne descend le long de la
partie latérale du cou pour se rendre à la poitrine:
à côté d'elle s'éleve l'artere carotide, qui se divise en
deux vers le bas du larynx: le rameau postérieur,
sous le nom d'artere carotiae interne, va pénétrer dans
l'intérieur du crâne par le trou & le conduit carotidien
de l'os des tempes, il se distribue au cerveau:
la seconde branche, sous le nom d'artere carotide externe, se distribue aux parties extérieures de la tête,
& fournit les arteres laringée, linguale, cervicale antérieure & supérieure, maxillaire externe, occipitale,
[p. 270]
massétérines, maxillaire interne, de laquelle naissent les
arteres temporales, orbitaires, épineuse, nasale postérieure; les troncs des carotides & des veines jugulaires
internes sont accompagnés dans leur trajet
des nerfs de la huitieme paire, & du tronc de l'intercostal, qui par le haut aboutit au ganglion olivaire,
& par le bas au ganglion cervical inférieur: dans le
bas du cou, on voit encore les arteres cervicales antérieures & inférieures, & les veines gutturales; derriere
la trachée - artere est le conduit musculaire qui
mene à l'estomac, & qui porte le nom d'oesophage:
il est appuyé sur la colonne vertébrale, sur laquelle
sont placés, dans la partie la plus élevée, les muscles
droits antérieurs de la tête, l'un appellé long, le
second court, & le troisieme latéral: plus bas, & sur
le côté, est le muscle long antérieur du cou.
Examinons maintenant la face postérieure du cou.
Le muscle trapèse est la premiere partie qui se présente
sous les tégumens, lequel s'étend jusqu'à la
partie inférieure du dos, & gagne en - devant jusqu'à
la moitié de la clavicule: sous le trapèse est en - arriere le muscle splenius qui couvre immédiatement
une masse musculaire assez compliquée, nommée
muscle complexus: ce dernier étant emporté, on découvre
les deux muscles droits postérieurs de la tête,
l'un appellé le grand droit, & l'autre nommé petit
droit. Il y a encore deux autres muscles placés obliquement;
le premier s'appelle le grand oblique, le
second se nomme petit oblique: au - dessous de la seconde
des vertébres du cou est une masse charnue
qui occupe tout l'espace compris en - arriere entre
les apophyses transverses & les apophyses épineuses
des vertebres du cou; cette masse est la partie cervicale
d'un muscle très - composé, qui porte le nom
d'oblique épineux, & qui est un des plus forts extenseurs
de l'épine: l'artere occipitale, l'artere cervicale
postérieure, se trouvent aussi dans cet endroit: enfin
sur le côté, sont placés les muscles releveurs de l'omoplate, les muscles scalenes, & le mastoïdien latéral,
auxquels il faut ajouter les portions supérieures du
sacro - lombaire & du très - long du dos; les nerfs cervicaux sortent sur les côtés par les trous latéraux de
la portion cervicale de l'épine: l'artere vertébrale
monte par ceux des apophyses transverses des vertebres
du cou: on trouve aussi le nerf récurrent de
Willis, ou l'accessoire de la huitieme paire. Toutes ces
parties ôtées, les vertebres cervicales restent à nud;
il y en a sept, la premiere s'appelle atlas, la seconde
se nomme axis: les quatre suivantes n'ont point
de noms particuliers: la septieme s'appelle prominente: dans l'union de la premiere & de la seconde
est l'apophyse odontoïde, & de cette apophyse naissent
les deux forts ligamens qui vont s'attacher à
l'occiput, & qu'on nomme les odonto - occipitaux: le
ligament transversal & l'infundibuliforme sont aussi
placés dans ce lieu, &c. Voyez tous les noms écrits
en lettres italiques.
La peau qui couvre la poitrine en - devant est plus
fine que par - tout ailleurs: elle soûtient dans les deux
sexes les mamelles, qui, quoique différentes à bien
des égards, se ressemblent pourtant en ce que dans
l'un comme dans l'autre, il s'éleve du milieu un
bouton appellé du nom de papille: il est bien plus
gros chez les femmes; un cercle plus ou moins large
l'entoure; c'est l'aréole. Dans les femmes le corps
de la mamelle est fait par une masse de glandes réunies
& entourées de graisse; la forme & le volume
varient, mais l'usage & la destination sont les mêmes: le lait filtré dans les mamelles des nourrices,
passe dans certains reservoirs nommés vaisseaux galactophores, desquels il s'échappe par des tuyaux
plus fins, qui pénetrent le mamellon & s'ouvrent à
sa surface. Sous les mamelles se rencontrent les muscles
grands pectoraux: ils tirent le bras en - bas &
en devant, & couvrent la plus grande partie de la
poitrine; le reste est couvert en - devant & sur le
côté, premierement par la partie supérieure des muscles
droits du ventre, & l'aponévrose sous laquelle ils
sont situés, & secondement, par la portion supérieure
des muscles grands obliques du bas - ventre. Au
milieu de la poitrine est un os que la peau & quelques
expansions aponévrotiques couvrent uniquement;
on lui donne le nom de sternum; il est fait
de trois pieces, dont la derniere & la plus basse porte
le nom d'appendice, ou plus ordinairement de
cartilage xiphoïde; les cartilages des vraies côtes se
joignent aux côtés de cet os, & par son extrémité supérieure
il s'articule avec deux os nommés clavicules, lesquels s'étendent jusqu'à l'épaule dont ils sont
une partie. Entre cet os & la premiere des vraies
côtes, il y a de chaque côté un muscle nommé souclavier; il abaisse la clavicule & la tire un peu endevant: on trouve sous la clavicule & derriere ce
muscle la veine & l'artere sous - clavieres. Cette derniere
produit les arteres mammaires internes, de l'anastomose
desquelles avec l'artere épigastrique, on a fait
tant de bruit, quoique cela n'en méritât guere la
peine. La sous - claviere fournit encore les arteres
vertébrales, cervicales, & pour l'ordinaire les premieres
intercostales. Les veines qui accompagnent
ces arteres & qui portent les mêmes noms pour la
plûpart, vont se terminer à la veine sous - claviere,
ou au tronc prochain de la veine - cave. Sous le muscle
grand pectoral on apperçoit celui qui porte le
nom de petit pectoral, & qui va s'insérer à l'apophyse
coracoïde de l'omoplate: un peu plus bas est le muscle
grand dentelé, qui tient d'une part aux côtes, &
de l'autre à la base de l'omoplate dans toute sa longueur.
Cet os qu'on appelle omoplate, se trouve à
la partie supérieure & postérieure de la poitrine; il
forme une partie de l'épaule. Le muscle trapèse s'insere
à certaine éminence de cet os, qu'on nomme
l'épine de l'omoplate, dont le bout saillant est ce
qu'on nomme l'acromion, & qui s'unit avec la clavicule.
Du bord postérieur de l'omoplate part un
muscle qui va s'insérer à l'épine, c'est le romboïde,
au - dessus duquel est l'insertion du releveur de l'omoplate.
La côte qui est au - dessus de l'épine de l'omoplate,
& qui porte le nom de côte surépineuse,
renferme un muscle, qui va s'insérer à l'os du bras;
on l'appelle muscle surépineux: au - dessous de la
même épine est placé le muscle sous - épineux. Sur
le bord antérieur de l'omoplate se trouve le muscle
petit rond; & de son angle intérieur naît le muscle
grand rond; une partie de cet angle est couvert
par le bord supérieur du muscle grand dorsal:
c'est le plus large de tous les muscles de notre machine;
il descend de l'os du bras jusqu'au sacrum.
Sous l'omoplate est le muscle sous - scapulaire: on
trouve dans l'aisselle les glandes nommées axillaires; elles sont lymphatiques comme les glandes du
cou: l'artere & veine axillaires se rencontrent aussi
dans la même région: l'artere produit la mammaire
externe & les scapulaires. Enfin, on peut considérer
ici les nerfs qui vont au bras, & qui dans ce lieu
forment un plexus nommé brachial, duquel naissent
principalement les nerfs suivans; savoir, les scapulaires tant supérieurs qu'inférieurs, le médian, le cutané, le musculo - cutané, le cubital, le radial, & l'huméral. Si l'on écarte toutes les parties désignées, on
voit paroître en - arriere les muscles dentelés postérieurs, dont l'un se nomme supérieur, & l'autre inférieur, tous les deux, comme il est aisé de le penser,
à cause de leur situation. Sous ces muscles sont
les principaux extenseurs de l'épine, qui sont connus
sous les noms de sacrolombaires, très - longs du
dos, épineux & obliques épineux. Les releveurs des côtes paroissent ensuite, c'est - à - dire, quand on a en<pb->
[p. 271]
levé le sacrolombaire & le très - long du dos, les
côtes sont maintenant découvertes; on peut distinguer
les vraies d'avec les fausses, & leur articulation
avec le sternum & les vertébres thorachiques, ou
dorsales. Les espaces que les côtes laissent entre
elles sont remplis par les muscles intercostaux, dont
il y a deux plans, l'un interne, l'autre externe, qui
ont tous deux la même action, qui consiste à élever
les côtes. Dans une certaine rainure creusée au bord
insérieur de chaque côte, sont logées les veines & les
arteres intercostales, lesquelles sont accompagnées des
nerfs costaux. Si l'on ouvre la poitrine, on rencontrera
sur le sternum & les parties voisines des
dernieres vraies côtes, les bandes musculaires appellées
muscles sterno - costaux. On voit aussi certaines
portions charnues, qui suivant la direction des
intercostaux internes, passent quelquefois par - dessus une ou deux côtes sans s'y attacher, pour s'insérer
à la côte qui est au - dessus. Ce sont les souscostaux de Verrehien: la plevre est la membrane qui
couvre l'intérieur de la poitrine; elle se réfléchit
vers le milieu pour former le médiastin; c'est une
cloison qui partage la poitrine en deux loges. Entre
les deux lames de cette cloison, est placé un grand
sac conique, composé de trois tuniques, & qui renferme
le premier de nos visceres, de coeur. Sa base
est attachée fort étroitement à la face supérieure du
diaphragme: on trouve ordinairement un peu d'eau
dans ce sac. Le coeur est un muscle creux, placé presqu'au milieu de la poitrine; de maniere que sa pointe
est à gauche, & sa base directement à la partie
moyenne du thorax. L'artere pulmonaire sort de la
partie la plus élevée de la face antérieure, qui répond
à l'une des principales cavités du coeur appellée
ventricule droit par les anciens, & que les modernes
ont nommé ventricule antérieur. La grande artere
ou l'aorte, prend sa naissance en - arriere du
ventricule gauche ou ventricule postérieur. A la
base du coeur au - dessus de chaque ventricule, est
un sac nommé oreillette, l'une droite & plus grande,
l'autre gauche & plus petite. C'est dans la premiere
que la veine - cave vient dégorger le sang qu'elle ramasse
de toutes les parties du corps: on voit à son
entrée par bas un repli membraneux nommé la valvule d'Eustache. L'oreillette a un petit prolongement
qu'on appelle son appendice: une cloison sépare les
deux oreillettes, & dans le foetus on voit dans son
milieu le trou botal avec la valvule; dans l'adulte il
ne reste que la trace de cette ouverture; les veines
pulmonaires viennent se rendre à l'oreillette gauche.
On voit à la surface du coeur les arteres coronaires:
les deux ventricules sont à l'intérieur séparés par
une cloison forte & épaisse: toute la surface interne
de ces cavités présente un grand nombre de cordes
charnues plus ou moins grosses, nommées colomnes
du coeur: leurs racines s'entrelacent d'une maniere
admirable; & de leurs extrémités opposées partent
plusieurs filets tendineux, qui se réunissant & s'épanoüissant,
forment une valvule festonée, qu'on trouve
placée à l'entrée de l'oreillette dans le ventricule,
& qu'on appelle la valvule auriculaire. Les
anciens appelloient valvules mitrales les deux festons
de cette soûpape, qui pendent dans le ventricule
gauche, & ils donnoient le nom de valvules tricuspidales, à ceux du ventricule droit. A l'embouchure
des deux grosses arteres dans les ventricules, se rencontrent
trois soupapes ou valvules appellées sémilunaires, à cause de la figure qu'elles ont. Auprès
de ces valvules à l'entrée de l'artere aorte, se trouvent
les orifices des arteres coronaires: cette grande
artere s'éleve en sortant du coeur, puis se contourne
de droite à gauche, & descend derriere le
coeui, en s'appliquant sur le côté gauche de la colonne
de l'épine. Cette courbure est ce qu'on ap<cb->
pelle la crosse de l'aorte: un conduit va dans le foetus
de la concavité de cette courbure jusqu'à l'artere
pulmonaire à laquelle il s'abouche; c'est le canal
artériel. La convexité de la même courbure produit
à droite un gros tronc qui se partageant en deux,
fait les arteres carotides & souclavieres droites: à gauche
naissent séparément les deux arteres du même
nom; en descendant vers le diaphragme, l'aorte
produit de chaque côté un peu en - arriere les arteres
intercostales, & en - devant l'artere bronchiale, &
les arteres aesophagiennes. Dans le voisinage est
l'oesophage, qui continue sa route vers l'estomac, à
côté duquel sont les glandes oesophagiennes; la veine
azygos se trouve encore dans cette région. Entre
elle & la grande artere est placé le conduit thorachique: derriere la plevre sur les extrémités des côtes
sont rangés les ganglions des nerfs grands sympathiques. On voit aussi sur le côté de l'épine plusieurs
nerfs provenans de ces ganglions se réunir, pour traverser
le diaphragme, & s'aller rendre dans le ventre
aux ganglions sémi - lunaires: le poûmon remplit
dans la poitrine tout le vuide que les parties susdites
laissent. C'est un très - gros viscere, mou, &
cellulaire; il reçoit l'air & le chasse, & doit être
regardé comme le principal organe de la sanguification.
La trachée - artere, après avoir fait quelque chemin
dans la poitrine, se partage en deux branches
qu'on appelle bronches, & sur les divisions desquelles
font plusieurs petits paquets glanduleux nommés
glandes bronchiales: la poitrine étant vuidée,
on voit les douze vertebres du dos, leurs ligamens, &c.
Ces vertebres, comme les cervicales, font en - arriere un conduit pour le passage de la moëlle épiniere:
on découvre aussi la cloison musculaire, qui sépare
le ventre de la poitrine; c'est le diaphragme. Sa partie
moyenne est aponévrotique; on la nomme le
centre nerveux; on voit trois ouvertures dans ce muscle;
l'une laisse passer la veine - cave, elle est ronde
& creusée dans la portion aponévrotique: la seconde
est dans le bas de la portion charnue; elle est
oblongue, & livre passage à l'oesophage: la troisieme
est placée entre les deux piliers du diaphragme;
& c'est par cette derniere que descend l'artere
aorte, & que montent la veine azygos & le conduit
thorachique. Ce qu'on nomme piliers du diaphragme, sont deux appendices placées sur les vertebres
des lombes, & qui s'y attachent; ils forment ce
qu'on appelle le petit muscle du diaphragme.
Sous cette cloison est la plus grande des cavités
de notre machine, le ventre intérieur ou l'abdomen:
chacun sait que le nombril est au milieu de sa surface
antérieure. Sous les tégumens sont placés endevant
les muscles grands obliques, les petits obliques,
les transverses, & les droits à la partie inférieure desquels
on trouve souvent deux petits muscles nommés
piramidaux: la ligne blanche sépare les muscles
du côté droit de ceux du côté gauche. Sous les muscles
droits sont situées les arteres mammaires internes
& les épigastriques, dont les rameaux s'anastomosent
ensemble. L'aponévrose du muscle grand oblique
laisse vers le pubis un écartement appellé l'anneau des muscles du bas - ventre, par lequel sort dans
les hommes le cordon des vaisseaux spermatiques,
& dans la femme les ligamens ronds de la matrice.
Du bord inférieur du muscle petit oblique, il se détache
un petit muscle qui va jusqu'au testicule; il
porte le nom de crémaster: l'intérieur du bas - ventre
est tapissé par le péritoine. C'est une membrane assez
semblable à la plevre, & qui se refléchit dans plusieurs
endroits pour former des sacs dans lesquels
plusieurs visceres sont renfermés. L'estomac est placé
dans l'hypocondre du côté gauche, & s'étend plus
ou moins dans l'épigastre. L'orifice qui communique
avec l'oesophage, & qui est à la partie supé<pb->
[p. 272]
rieure du sac se nomme cardia: celui qui est au bout
de la petite extrémité, & par lequel les alimens passent
dans les intestins, s'appelle le pylore: on voit
autour du cardia les ramifications de l'artere coronaire
stomachique. Dans le même endroit sont les
nerfs de la huitieme paire; tout le long de la grande
courbure de l'estomac pend une membrane graisseuse
nommée omentum; & dans le lieu où elle adhere
à l'estomac, il se trouve deux arteres, dont
l'une vient de droite à gauche; c'est la grande - gastrique; l'autre vient dans un sens contraire, c'est la
petite gastrique. Ces deux tuyaux s'anastomosent en
se rencontrant; la rate est placée derriere la grosse
extrémité de l'estomac à gauche: on voit l'artere
splénique qui va s'y rendre, & la grosse veine splénique qui en revient; les vaisseaux courts sont dans cet
endroit: au - dessus de la petite courbure de l'estomac
est placé le petit épiploon de M. Winslow. La
région hypocondriaque droite est occupée par le
foie: son grand lobe est perpendiculaire, & descend
jusqu'au bord des fausses côtes. Le petit lobe va horisontalement,
& s'avance dans la région de l'épigastre,
en couvrant la petite extrémité de l'estomac.
La grande scissure sépare ces deux lobes, au bout de
laquelle en - arriere est le lobule de Spigel. C'est dans
cette grande scissure que s'avance la veine ombilicale, qui depuis le nombril jusqu'au foie est soûtenue
par une petite duplicature du péritoine nommée la
faulx du péritoine. Cette veine s'ouvre dans le sinus
de la veine - porte: de ce dernier canal il en part un
dans le foetus, qui va se rendre à la veine - cave en
passant près du lobule de Spigel; on lui donne le
nom de conduit veineux. Dans la région de cette
grande scissure, on trouve, outre le sinus de la veineporte,
l'artere hépatique, le canal hépatique, & les
nerfs qui vont au soie & sont le plexus hépatique
antérieur. La vésicule du fiel est placée à la face
interne du grand lobe; elle fournit le conduit cystique,
qui se réunissant à l'hépatique, fait le canal
cholédoque. En allant au foie, l'artere hépatique envoie
les arteres pylorique, duodénale, grande gastrique,
pancréatiques droites, & les deux gemelles ou
arteres cystiques. Les veines hépatiques vont en - haut
& en - arriere se rendre à la veine - cave; elles sont
au nombre de trois principales. Le foie est attaché
au diaphragme par le moyen de trois ligamens; le
moyen ou suspenseur, le latéral droit, & le latéral
gauche: outre cela sa surface adhere immédiatement
à celle du diaphragme; & cette adhérence est
ce qu'on nomme le ligament coronaire du foie. Entre
l'estomac & le foie se trouve l'intestin duodenum,
dans la cavité duquel est l'orifice du conduit cholidoque,
& celle du canal pancréatique. Le pancréas
est derriere l'estomac, & un peu plus bas que lui:
c'est dans cette région que l'artere aorte produit les
arteres coeliaques & phréniques, & un peu plus bas
l'artere mésentérique supérieure. On y trouve aussi les
ganglions sémi - lunaires, auxquels se rendent les nerfs
de la paire vague, & qui produisent la plus grande
partie des plexus nerveux du bas - ventre; savoir le
plexus transversal, le plexus splénique, le plexus hépatique
postérieur, les plexus reinaux, le plexus solaire, & le plexus mesentérique supérieur, auxquels cas on
peut ajoûter le plexus arriere mésentérique. Quand on a
levé l'épiploon, on découvre les intestins jejunum &
ileum; ils sont arrêtés par le mésentere, dans le tissu
cellulaire duquel on trouve les glandes mésentériques
& les rameaux de l'artere mésentérique supérieure,
accompagnés des veines mésaraïques. Les
vaisseaux lactés sont à côté, & vont se rendre à un certain
sac membraneux, qui porte le nom de reservoir
de Pecquet, duquel s'éleve le canal thorachique; les
gros intestins sont derriere ceux que nous venons de
nommer; le coecum est le premier; il porte l'appen -
dice vermisorme; le second est le colon; la valvule de
Bauhin est placée à l'entrée du coecum dans le colon.
A la surface externe de ce dernier sont les appendices épiploïques, & les trois bandes charnues appellées
improprement ligamens du colon, ou bandes ligamenteuses. On découvre aussi les cellules de cet intestin:
le mésocolon retient la principale partie de ce gros
intestin, que l'on nomme l'arc du colon, qui passe
sous l'estomac, & à laquelle s'attache la seconde
lame de l'épiploon. Ce qu'on appelle l'S du colon
est fait par deux contours de ce boyau dans la région
lombaire & iliaque gauches: en se continuant
& se prolongeant dans le petit bassin pour gagner
le podex, le gros boyau prend le nom de rectum. A
son extrémité sont placés les muscles releveurs de l'anus, & les deux sphincters, l'interne & le cutané. La
grosse veine hémorrhoïdale avec l'artere intestinale
inférieure, sont placées sur le rectum. On peut voir
dans le mésocolon l'artere colique supérieure, &
dans la seconde courbure de son S l'artere mésentérique
inférieure. Si l'on enleve maintenant tous les
visceres mentionnés & le péritoine, on apperçoit
derriere cette toile membraneuse les deux reins, &
au - dessus les capsules atrabilaires: l'aorte envoie
deux arteres aux reins; on les nomme rénales; deux
veines du même nom reviennent vers la veine - cave.
Le rein a vers la partie postérieure un conduit de
décharge nommé uretere, dont le principe est fait en
forme de vessie & se nomme le bassinet du rein. Les
tuyaux qui s'ouvrent dans ce bassinet, aboutissent à
certains épanouissemens membraneux, qui embrassent
les papilles du rein, & que l'on appelle les calices: ces papilles sont les extrémites de la substance
rayonnée du rein, laquelle est enveloppée de la substance corticale. Entre les deux reins & sur le devant
de l'épine, est l'artere aorte qui fournit en - arriere
les arteres lombaires, & en - devant à quelque distance
des émulgentes les arteres spermatiques. La veine - cave est sur la droite à quelque distance; dans
le fonds de la région lombaire sont les vertebres de
même nom, & sur leurs côtés les principes, ou parties
supérieures des muscles grands & petits psoas,
les muscles quarrés des lombes, & les parties inférieures
des extenseurs de l'épine, le muscle dentelé postérieur &
inférieur, & partie du muscle très - large du dos.
Le bassin qui est à la partie basse du ventre est fait
par le sacrum, le coccix, & les os innominés, qu'on
distingue en trois portions, qui sont l'os des îles, l'os
ischium, & le pubis. L'union de ce dernier os du côté
droit avec celui du côté gauche, se nomme la symphise
du pubis. A l'extérieur du bassin sont placés enarriere
les muscles grands, moyens, & petits fessiers,
les muscles coxigiens, les pyramidaux, l'accessoire de
l'obturateur interne, le quarré de la cuisse. Les ligamens
illo sacro - sciatiques, & les sacro - sciatiques, sont aussi
dans cette même région; on y trouve aussi les arteres fessieres, les grandes honteuses, les sciatiques, &
les veines qui portent les mêmes noms: on y voit enfin
le gros nerf sciatique, qui produit les nerfs fessiers, &c.
A la partie antérieure du petit bassin sont placées
les parties génitales externes de l'un & l'autre sexe:
dans les mâles ces parties sont la verge & les bourses.
La premiere a une sorte de tête appellée le gland,
qui est couvert par le prépuce; on voit au bout du
gland l'orifice du conduit des urines, qui va le long
de la verge jusqu'à la vessie, & qu'on nomme l'urethre: à la base du gland est un bourrelet nommé
la couronne du gland, dans le voisinage duquel sont
certaines glandes nommées glandes odorantes de thison. Le corps de la verge est fait par les deux corps
caverneux & l'urethre, qui est entouré d'un tissu
spongieux: un ligament se présente vers sa racine;
on le nomme le ligament élastique de la verge. C'est
aussi vers cette racine que viennent se terminer les
[p. 273]
muscles ischio - caverneux, & les muscles bulbo - caverneux: sur le dos de la verge sont placeés beaucoup
de vaisseaux sanguins & de nerfs. La peau qui forme
les bourses se nomme le scrôtum, au - dessous de
laquelle est un tissu appellé le dartos; la tunique vaginale
du testicule vient ensuite, puis le testicule lui - même,
dont la membrame extérieure se nomme albuginée. Le testicule por te une appendice, qui rampe
sur son bord supérieur, c'est l'épididime qui produit
le canal déférent. Ce conduit monte le long du
cordon des vaisseaux speri natiques; il est accompagné
de l'artere spermatique des nerfs honteux, & d'un lacis
de veines qu'on nomme le corps pampiniforme: le
crémaster couvre la plus grande partie de ce cordon.
Après que le conduit déférent a pénétré dans l'abdomen,
il se porte derriere la vessie urirnaire, & communique
avec les vésicu les séminales, lesquelles donnent
naissance à un perit tuyau excréteur qui va se
terminer dans le canal de l'urethre, & y porte la
semence. Le commencement de ce conduit est embrassé
par la glande prostate: on voit à l'intérieur
une éminence nommée le verumontanum: le tissu
spongieux commence à quelque distarice de là à couvrir
le canal de l'urethre; ce commencement qui
est renflé s'appelle le bulbe de l'urethre: au - dessus est
la partie membraneuse de ce conduit, & l'on trouve - là les glandes petites prostates, le muscle transversal, & les petits muscles prostatiques. On voit aussi à
l'extérieur du conduit les lacunes, & vers son extrémité
qui traverse le gland, on obser ve la fosse naviculaire: par son autre extrémité, ce conduit mene à
la vessie urinaire, laquelle est placée derriere le pubis,
& donne de son sommet naissance à un cordon nommé
l'ouraque, qui va jusqu'au nomb ril, & à côté
duquel sont placées les arteres ombili cales; dans lé
bas de la vessie sont les orifices des uretres.
La face interne de l'os des îles est couverte par le
muscle iliaque: les arteres & veines iliaques avec les
nerfs cruraux, sont vers le bord du bassin; l'artere
sacrée est au milieu vers le haut du sacrum. On voit
sur le côté des vertebres des lombes les nerfs lombaires, & plus bas les nerfs sacrés sortent par les trous
antérieurs du sacrum: le muscle obturateur interne
couvre en dedans le grand trou ovale de l'os innominé.
Le ligament obturateur le soutient, & au - dessus
se remarque une ouverture qui laisse passer le nerf
obturateur & l'artere obturatrice: en dehors se trouve
le muscle obturateur externe sur le même trou ovale.
Enfin depuis le diaphragme jusqu'au bas du petit bassin,
on voit une double rangée des ganglions du nerf
grand lympatique; quelques - uns les ont appellés
ganglions hordéiformes.
Les parties génitales des femmes sont internes &
externes: au - dessus de ces dernieres s'éleve le mont de
venus: la grande fente est plus bas; ses bords se nomment
les grandes levres: les angles qu'elles font en se
rencontrant sont les commissures; dans l'inférieure est
la fourchette. En écartant les levres on voit en haut
le gland du clitoris avec son prépuce: le corps de cette
partie est caché sous la peau; il ressemble à la verge
de l'homme: il est fait de deux corps caverneux, dont
les racines sont attachées aux branches du pubis: il
est soutenu par un ligament élastique & deux muscles
de chaque côté s'y rendent, qui sont les bulbes
caverneux & les constricteurs de la vulve, sous lesquels
est placé le plexus rétiforme. Il ne manque au clitoris
pour ressembler parfaitement à la verge de l'homme,
que d'avoir comme elle un urethre. Le méat urinaire
& le conduit des urines sont en haut à quelque distance
du clitoris, & l'on voit un peu plus en devant
les deux appendices nommées nymphes; plus loin est
l'hymen dans les vierges, & les caroncules mirthiformes
dans les personnes mariées. La premiere des parties
intérieures est le vagin; il est placé sur l'intestin rec -
tum: on voit à son extrémité supérieure l'orifice de
la matrice, ou l'os tineoe, au - dessus duquel est le col
de ce même organe, qui vient ensuite lui - même, &
qui est retenu par les ligamens larges & les ligamens
ronds: il y a une petite ouverture de chaque côté
à son angle supérieur; elle mene à la trompe de Fallope; c'est un conduit membraneux, qui va toujours
en s'élargissant, & se termine par une extrémité frangée,
qu'on nomme le pavillon de la trompe, à quelque
distance duquel est le testicule des femmes, que les
modernes ont appellé ovaire. Chacun sait que la
matrice est le lieu où l'enfant séjourne pendant neuf
mois, avant de venir au monde: il y est renfermé
dans une double membrane; la premiere porte le
nom de chorion, & la seconde celui d'amnios: il y a
de plus une grosse masse applatie semblable à un gâteau,
laquelle s'attache à la matrice; c'est le placenta auquel le cordon ombilical vient se rendre; ce
cordon est fait des deux arteres ombilicales & de la
veine du même nom, liées ensemble par un tissu
assez fort.
Après avoir passé en revûe les parties du tronc,
jettons un coup d'oeil sur celles des extrémités; commençons
par les supérieures.
Ce qui fait le gros moignon de l'épaule, c'est le
muscle deltoïde, qui couvre l'articulation du bras
avec l'omoplate. A la partie antérieure du bras sous
les tégumens, sont placés les muscles biceps & le brachial: du tendon du biceps naît cette aponévrose,
qui couvre toute la partie interne & supérieure de
l'avant bras: à la partie interne & supérieure du
bras, est une portion du grand pectoral, qui cache
une des extrémités du biceps & le muscle coracobrachial, au bas duquel est le ligament intermusculaire
interne: sous la peau qui couvre ces parties, se trouve
l'artere brachiale, qui donne en haut l'humérale
& la grande collatérale. Elle fournit par en bas la
petite collatérale, ou l'interne; les veines brachiales
satellites accompagnent l'artere aussi bien que les nerfs
médian, cutané interne & le nerf cubital: celui qu'on
nomme musculo - cutané, traverse le muscle coracobrachial,
passe entre le brachial & le biceps, & vient
à l'extérieur de l'avant - bras: il y en a encore un au - dessus;
c'est l'huméral qui se perd dans le deltoïde.
La partie postérieure du bras est occupée par le muscle
triceps brachial: on trouve en dehors le nerf radial
& l'artere collatérale externe descendante: l'os
du bras s'appelle humerus. L'avant - bras est formé de
deux os, savoir du cubitus & du radius: le ligament
qui tient l'espace que ces os laissent entre eux, se
nomme ligament inter - osseux brachial; celui qui entoure
la tête de l'os du rayon est le coronaire radial;
enfin le ligament humero - radial est au côté externe
de l'article, & l'humero - cubital est au côté interne. La
premiere chose qui paroît sous la peau de l'avantbras,
est l'aponevrose qui vient en partie du biceps,
sous laquelle on voit d'abord l'artere brachiale qui
se divise en cubitale & radiale, & la division du
nerf médian: sur l'aponevrose sont les veines basilique, médiane; la céphalique est sur le haut de l'avantbras
en dehors, & les cubitales sont en dedans vers
le coude. On voit du côté interne une masse charnue,
composée des muscles radial interne, rond pronateur,
long palntaire, cubital interne: sous cette premiere
couche musculaire, il en est une autre faite
par les muscles sublime & profona, avec le fléchisseur
propre du pouce: au bas de l'avant - bras en devant est
placé le muscle pronateur quarré. L'artere cubitale &
le nerf du même nom sont dans la même région.
L'avant - bras présente une autre masse du côté du
rayon; celle - ci est formée par les muscles long supinateur, les radiaux externes, & le court supinateur:
la veine céphalique est ici sous la peau, & plus profondément
se trouve l'artere radiale qui fournit une
[p. 274]
petite artere, laquelle remonte vers l'articulation,
& qui se nomme l'artere collatérale ascendante radiale.
La cubitale en fournit une semblable de son côté,
c'est l'artere collatérale ascendante cubitale. A la partie
postérieure de l'avant - bras, sont placés les muscles
cubital externe, l'extenseur commun des doigts, l'extenseur
propre du petit doigt: & plus haut que ces muscles
vers l'olécrane, on voit le muscle anconeus: sous
les muscles que je viens d'indiquer, sont placés les
extenseurs propres du pouce, & celui de l'index, qu'on
nomme indieateur: l'artere intérosseuse externe se perd
dans ces muscles; l'interne, conjointement avec le
nerf intérosseux, rampe à la surface antérieure du ligament
intérosseux.
La main est la troisieme partie de l'avant - bras, le
dedans se nomme la paulme de la main: la partie opposée
s'appelle le dos. Sous la peau de cette derniere
région sont plusieurs veines, entre lesquelles les anciens
distinguoient celle qui répond au petit doigt;
ils l'appelloient la salvatelle: la peau & les veines
étant enlevées, on voit les tendons des radiaux externes & ceux des extenseurs commun & propre, lesquels
sont tous bridés par le ligament annulaire externe placé vers l'articulation du poignet. Ces tendons
se continuent sur les doigts, au mouvement
desquels ils servent. Les intervalles que laissent les
os du métacarpe entre eux, sont occupés par les muscles
intérosseux externes; celui qui est entre l'os, qui
soutient le pouce & l'os qui porte l'index, se nomme
l'adducteur de l'index. Sous la peau du dedans de
la main est placée l'aponevrose palmaire, à laquelle
tient le muscle palmaire cutané: vers le haut du poignet
se trouve le ligament annulaire interne, sous lequel
passent les tendons des muscles fléchisseurs; l'aponevrose
levée, ces tendons paroissent à découvert,
ils s'avancent jusqu'au bout des doigts, & sont
arrêtés en chemin par plusieurs traverses ligamenteuses.
Il y a ici quatre petits muscles nommés lombricaux, qui tiennent par un bout aux tendons du
muscle fléchisseur profond. Les intérosseux internes sont
ici placés entre les os du métacarpe: on appelle antithénar celui qui est entre le pouce & l'index: sur le
premier os du pouce est placé le muscle appellé thénar. Il y a deux muscles du côté du petit doigt; l'un
se nomme hypothenar, l'autre est le métacarpien: les
arteres radiales & cubitales se rencontrent & s'anastomosent
dans la paume de la main: on y voit
aussi les divisions des nerfs palmaires qui viennent
du médian & du cubital. Le poignet est fait de huit petits
os, qui sont le trapèse, le piramidal, le grand os,
le crochu, le scaphoïde, le lunaire, le cuneïforme & le
pisiforme; sur ces os sont placés les cinq os du métacarpe,
dont l'un soutient le pouce: chaque doigt
est fait de trois petits os nommés phalanges, excepté
le pouce qui n'en a que deux. On trouve aux articulations
des doigts, certains petits os appellés os sésamoïdes.
L'extrémité inférieure est composée de la cuisse,
de la jambe & du pié. A la partie antérieure de la
cuisse sous les tégumens, se trouve le muscle quadriceps; une partie du grand couturier, les vaisseaux &
les nerfs cruraux en haut, le muscle obturateur externe qui est appliqué sur le bassin, aussi - bien que le
pectineus: à la partie interne sont les vaisseaux cruraux & les trois adducteurs de la cuisse: le fascia lata
& le muscle épineux sont placés extérieurement, &
l'on trouve en arriere le muscle biceps crural, le deminerveux, le demi - membraneux, & les vaisseaux qui
changent de nom en passant sous le jarret, & prennent
celui de poplités. L'os de la cuisse se nomme femur. Dans son articulation avec l'os innominé se
trouve un ligament applati, & dans son union avec
la jambe, on voit en devant la rotule, & dans l'intérieur
les ligamens eroisés. La jambe est faite de
deux os, le tibia & le péroné; entre ces deux os est
un ligament intérosseux, à la face antérieure duquel
sont placés les muscles jambiers antérieurs, le long extenseur
commun des orteils, & l'extenseur propre du
pouce: l'artere tibiale antérieure se trouve entre ces
muscles: sur le côté sont les deux muscles péroniers
externes & les nerfs péroniers; en arriere sont les muscles
gastrocnémiens, le tibial grêle, le solaire, le jambier postérieur, le long fléchisseur commun des orteils, le fléchisseur propre du pouce, l'artere tibiale postérieure, la péroniere, la surale, l'intérosseuse, & les
veines satellites de toutes ces arteres, les nerfs tibiaux:
vers les malléoles sous la peau, sont les veines saphènes,
l'une interne & l'autre externe: vers la jointure
du pié est en devant le ligament annulaire externe, & en arriere le tendon d'Achille. Le pié est fait
du tarse, du métatarse & des orteils: le tarse est fait
par l'assemblage de sept os, qui sont le calcaneum,
l'astragal, le scaphoïde, le cuboïde, & les trois cunéiformes: le métatarse est fait de cinq os, & chacun
des orteils de trois phalanges, à l'exception du pouce
qui n'en a que deux. Sous la peau du dos du pié sont
les tendons extenseurs & le muscle pédieux: sous
celle de la plante du pié est placée l'aponevrose plantaire; les tendons des fléchisseurs couverts par le
muscle sublime, les lombricaux, & le muscle accessoire
du profond; les nerfs & les vaisseaux plantaires, les
muscles fléchisseurs courts du gros orteil, le muscle abducteur
transversal du même, les muscles intérosseux internes; les externes paroissent en dehors, & la masse
musculaire qui fait le bord externe de la plante du
pié, & qui se divise en muscle métatarsin & muscle
abducteur du petit orteil. Cet article est de M. Petit,
doct. en Medec. profess. en Anat. de l'acad. des Scienc.
Homme
(Page 8:274)
Homme, (Mat. med.) le corps humain fournit
plusieurs remedes à la Médecine, soit tandis qu'il
joüit de la vie, soit après qu'il a cessé de vivre.
Le corps vivant donne la salive, le sang, l'urine,
la cire des oreilles & la fiente. On retire du cadavre
la graisse, les poils, les ongles & le crâne. Voyez
ces articles particuliers. (b)
Homme
(Page 8:274)
Homme, s. m. (Morale.) ce mot n'a de signification
précise, qu'autant qu'il nous rappelle tout ce
que nous sommes; mais ce que nous sommes ne peut
pas être compris dans une définition: pour en montrer
seulement une partie, il faut encore des divisions
& des détails. Nous ne parlerons point ici de notre
forme extérieure, ni de l'organisation qui nous range
dans la classe des animaux. Voyez Homme, (Anatomie). L'homme que nous considérons est cet être qui
pense, qui veut & qui agit. Nous chercherons donc
seulement quels sont les ressorts qui le font mouvoir
& les motifs qui le déterminent. Ce qui peut rendre
cet examen épineux, c'est qu'on ne voit point dans
l'espece un caractere distinctif auquel on puisse reconnoître
tous les individus. Il y a tant de différence
entre leurs actions, qu'on seroit tenté d'en supposer
dans leurs motifs. Depuis l'esclave qui flate indignement
son maître, jusqu'à Thamas qui égorge des
milliers de ses semblables, pour ne voir personne
au - dessus de lui, on voit des variétés sans nombre.
Nous croyons appercevoir dans les bêtes des traits
de caractere plus marqués. Il est vrai que nous ne
connoissons que les apparences grossieres de leur instinct.
L'habitude de voir, qui seule apprend à distinguer,
nous manque par rapport à leurs opérations.
En observant les bêtes de près, on les juge plus capables
de progrès qu'on ne le croit ordinairement.
Voyez Instinct. Mais toutes leurs actions rassemblées
laissent encore entre elles & l'homme une distance
infinie. Que l'empire qu'il a sur elles soit usurpé
si l'on veut, il n'en est pas moins une preuve de
la supériorité de ses moyens, & par conséquent de
sa nature. On ne peut qu'être frappé de cet avan<pb->
[p. 275]
tage lorsqu'on regarde les travaux immenses de
l'homme, qu'on examine le détail de ses arts, & le
progrès de ses sciences; qu'on le voit franchir les
mers, mesurer les cieux, & disputer au tonnerre son
bruit & ses effets. Mais comment ne pas frémir de
la bassesse ou de l'atrocité des actions par lesquelles
s'avilit souvent ce roi de la nature? Effrayés de ce
mélange monstrueux, quelques moralistes ont eu
recours pour expliquer l'homme, à un mélange de
bons & de mauvais principes, qui lui - même a grand
besoin d'être expliqué. L'orgueil, la superstition &
la crainte ont produit des systèmes, & ont embarrassé
la connoissance de l'homme de mille préjugés
que l'observation doit détruire. La religion est chargée
de nous conduire dans la route du bonheur qu'elle
nous prépare au - delà des tems. La Philosophie doit
étudier les motifs naturels des actions de l'homme, pour
trouver des moyens, du même genre, de le rendre
meilleur & plus heureux pendant cette vie passagere.
Nous ne sommes assurés de notre existence que
par des sensations. C'est la faculté de sentir qui nous
rend présens à nous - mêmes, & qui bientôt établit
des rapports entre nous & les objets qui nous sont
extérieurs. Mais cette faculté a deux effets qui doivent
être considérés séparément, quoique nous les
éprouvions toujours ensemble. Le premier effet est
le principe de nos idées & de nos connoissances; le
second est celui de nos mouvemens & de nos inclinations.
Les Philosophes qui ont examiné l'entendement
humain, ont marqué l'ordre dans lequel naissent
en nous la perception, l'attention, la réminiscence,
l'imagination, & tous ces produits d'une faculté
générale qui forment & étendent la chaîne de
nos idées. Voyez Sensations. Notre objet doit être
ici de reconnoître les principaux effets du desir.
C'est l'agent impérieux qui nous remue, & le créateur
de toutes nos actions. La faculté de sentir appartient
sans doute à l'ame; mais elle n'a d'exercice
que par l'entremise des organes matériels dont l'assemblage
forme notre corps. De - là naît une différence
naturelle entre les hommes. Le tissu des fibres
n'étant pas le même dans - tous, quelques - uns doivent
avoir certains organes plus sensibles, & en conséquence
recevoir des objets qui les ébranlent, une impression
dont la force est inconnue à d'autres. Nos
jugemens & nos choix ne sont que le résultat d'une
comparaison entre les différentes impressions que
nous recevons. Ils sont donc aussi peu semblables
d'un homme à un autre que ces impressions mêmes.
Ces variétés doivent donner à chaque homme une
sorte d'aptitude particuliere qui le distingue des autres
par les inclinations, comme il l'est à l'extérieur
par les traits de son visage. De - là on peut conclure
que le jugement qu'on porte de la conduite d'autrui
est souvent injuste, & que les conseils qu'on lui
donne sont plus souvent encore inutiles. Ma raison
est étrangere à celle d'un homme qui ne sent pas comme
moi; & si je le prends pour un fou, il a droit de
me regarder comme un imbécille. Mais toutes nos
sensations particulieres, tous les jugemens qui en résultent,
aboutissent à une disposition commune à
tous les êtres sensibles, le desir du bien - être. Ce desir
sans cesse agissant, est déterminé par nos besoins
vers certains objets. S'il rencontre des obstacles, il
devient plus ardent, il s'irrite, & le desir irrité est
ce qu'on appelle passion; c'est - à - dire un état de souffrance,
dans lequel l'ame toute entiere se porte vers
un objet comme vers le point de son bonheur. Pour
connoître tout ce dont l'homme est capable, il faut le
voir lorsqu'il est passionné. Si vous regardez un loup
rassasié, vous ne soupçonnerez pas sa voracité. Les
mouvemens de la passion sont toujours vrais, &
trop marqués pour qu'on puisse s'y méprendre. Or
en suivant un homme agité par quelque passion, je le
vois fixé sur un objet dont il poursuit la jouissance;
il écarte avec fureur tout ce qui l'en sépare. Le péril
disparoit à ses yeux, & il semble s'oublier soi - même.
Le besoin qui le tourmente ne lui laisse voir que ce
qui peut le soulager. Cette disposition frappante
dans un état extrème, agit constamment, quoique
d'une maniere moins sensible dans tout autre état.
L'homme sans avoir un caractere particulier qui le
distingue, est donc toujours ce que ses besoins le
font être. S'il n'est pas naturellement cruel, il ne lui
faut qu'une passion & des obstacles pour l'exciter à
faire couler le sang. Le méchant, dit Hobbes, n'est
qu'un enfant robuste. En effet, supposez l'homme sans
expérience comme est un enfant, quel motif pourroit
l'arrêter dans la poursuite de ce qu'il desire? c'est
l'expérience qui nous fait trouver dans notre union
avec les autres, des facilités pour la satisfaction de
nos besoins. Alors l'intérêt de chacun établit dans
son esprit une idée de proportion entre le plaisir
qu'il cherche, & le dommage qu'il souffriroit s'il
aliénoit les autres. De - là naissent les égards, qui ne
peuvent avoir lieu, qu'autant que les intérêts sont
superficiels. Les passions nous ramenent à l'enfance,
en nous présentant vivement un objet unique, avec
ce dégré d'intérêt qui éclipse tout. Ce n'est point ici le
lieu d'examiner quels peuvent être l'origine & les fondemens
de la société. V. Sociabilité & Société.
Quels que puissent être les motifs qui forment &
resserrent nos liens réciproques, il est certain que
le seul ressort qui puisse nous mettre en mouvement,
le desir du bien - être, tend sans cesse à nous isoler.
Vous retrouverez par - tout les effets de ce principe
dominant. Jettez un coup d'oeil sur l'univers, vous
verrez les nations séparées entre elles, les sociétés
particulieres former des cercles plus étroits, les familles
encore plus resserrées, & nos voeux toujours
circonscrits par nos intérêts, finir par n'avoir d'objet
que nous - mêmes. Ce mot que Paschal ne haïssoit
dans les autres, que parce qu'un grand philosophe
s'ainie comme un homme du peuple, n'est donc pas
haïssable, puisqu'il est universel & nécessaire.
C'est une disposition réciproque que chacun de nous
éprouve de la part des autres, & lui rend. Cette connoissance
doit nous rendre fort indulgens sur ce que
nous regardons comme torts à notre égard: on ne
peut raisonnablement attendre de l'attachement de
la part des hommes, qu'autant qu'on leur est utile. II
ne faut pas se plaindre que le degré d'utilité en soit
toujours la mesure, puisqu'il est impossible qu'il y en
ait une autre. L'attachement du chien pour le maître
qui le nourrit, est une image fidelle de l'union des
hommes entre eux. Si les caresses durent encore lorsqu'il est rassasié, c'est que l'expérience de ses besoins
passés lui en fait prévoir de nouveaux. Ce qu'on
appelle ingratitude doit donc être très - ordinaire parmi
les hommes; les bienfaits ne peuvent exciter un
sentiment durable & desintéressé, que dans le petit
nombre de ceux en qui l'habitude fait attacher aux
actions rares une dignité qui les éleve à leurs propres
yeux. La reconnoissance est un tribut qu'un orgueil
estimable se paye à lui - même, & cet orgueil n'est pas
donné à tout le monde. Dans la société, telle que
nous la voyons, les liens n'étant pas toujours formés
par des besoins apparens, ou de nécessité étroite, ils
ont quelquefois un air de liberté qui nous en impose
à nous - mêmes. On n'envisage pas, comme effets du
besoin, les plaisirs enchanteurs de l'amitié, ni les
soins desintéressés qu'elle nous fait prendre, mais
nous ne pensons ainsi, que faute de connoître tout
ce qui est besoin pour nous. Cet homme, dont la conversation
vive fait passer dans mon ame une foule
d'idées, d'images, de sentimens, m'est aussi nécessaire
que la nourriture l'est à celui qui a faim. Il est
en possession de me délivrer de l'ennui, qui est une
[p. 276]
sensation aussi importune que la faim même. Plus nos
attachemens sont vifs, plus nous sommes aisément
trompés sur leur véritable motif. L'activité des passions
excite & rassemble une foule d'idées, dont l'union
produit des chimeres comme la fievre forge des
rêves à un malade; cette erreur, sur le but de nos
passions, ne nous séduit jamais d'une maniere plus
marquée, que dans l'amour. Lorsque le printems de
notre âge a développé en nous ce besoin qui rapproche
les sexes, l'espérance jointe à quelques rapports,
souvent mal - examinés, fixe sur un objet particulier
nos voeux, d'abord errans; bientôt cet objet
toujours présent à nos desirs, anéantit pour nous tous
les autres: l'imagination active va chercher des fleurs
de toute espece pour embellir notre idole. Adorateur
de son propre ouvrage, un jeune homme ardent voit
dans sa maitresse le chef - d'oeuvre des graces, le modele
de la perfection, l'assemblage complet des merveilles
de la nature; son attention concentrée ne s'échappe
sur d'autres objets, que pour les subordonner
à celui - là. Si son ame vient à s'épuiser par des
mouvemens aussi rapides, une langueur tendre l'appesantit
encore sur la même idée. L'image chérie ne
l'abandonne dans le sommeil, qu'avec le sentiment
de l'existence; les songes la lui représentent, & plus
intéressante que la lumiere, c'est elle qui lui rend la
vie au moment du réveil. Alors si l'art ou la pudeur
d'une femme, sans desespérer ses voeux, vient
à les irriter par le respect & par la crainte, l'idée des
vertus jointe à celle des charmes, lui laisse à peine
lever des yeux tremblans sur cet objet majestueux:
ses desirs sont éclipsés par l'admiration; il croit ne
respirer que pour ce qu'il adore; sa vie seroit mille
fois prodiguée, si l'on desiroit de lui cet hommage.
Enfin arrive ce moment qu'il n'osoit prévoir, & qui
le rend égal aux dieux: le charme cesse avec le besoin
de jouir, les guirlandes se fannent, & les fleurs
desséchées lui laissent voir une femme souvent aussi
flétrie qu'elles: il en est ainsi de tous nos sacrifices.
Les idées factices que nous devons à la société, nous
présentent le bien - être sous tant de formes différentes,
que nos motifs originels se dérobent. Ce sont ces
idées, qui en multipliant nos besoins, multiplient
nos plaisirs & nos passions, & produisent nos vertus,
nos progrès, & nos crimes. La nature ne nous
a donné que des besoins aisés à satisfaire: il semble
d'après cela, qu'une paix profonde dût régner parmi
les hommes; & la paresse qui leur est naturelle,
paroîtroit devoir encore la cimenter. Le repos, ce
partage réservé aux dieux, est l'objet éloigné que se
proposent tous les hommes, & chacun envisage la facilité
d'être heureux sans peine, comme le privilege
de ceux qui se distinguent; de - là naît dans chaque
homme un desir inquiet, qui l'éveille & le tourmente.
Ce besoin nouveau produit des efforts que la concurrence
entretient, & par - là la paresse devient le principe
de la plus grande partie du mouvement dont les
hommes sont agités. Ces efforts devroient au moins
s'arrêter au point où doit cesser la crainte de manquer
du nécessaire; mais l'idée de distinction étant une
fois formée, elle devient dominante, & cette passion
sécondaire détruit celle qui lui a donné la naissance.
Dès qu'un homme s'est comparé avec ceux qui
l'environnent, & qu'il a attaché de l'importance à
s'en faire regarder, ses véritables besoins ne sont plus
l'objet de son attention, ni de ses démarches. Le repos,
en perspective, qui faisoit courir Pyrrhus, fatigue
encore tout ambitieux qui veut s'élever, tout
avare qui amasse au de - là de ses besoins, tout homme
passionné pour la gloire, qui craint des rivaux. La
modération, qui n'est que l'effet d'une paresse plus
profonde, est devenue assez rare pour être admirée,
& dès lors elle a pû être encore un objet de jalousie,
puisqu'elle étoit un moyen de considération. La plû<cb->
part des hommes modérés ont même été de tout tems
soupçonnés de masquer des desseins, parce qu'on
ne voit dans les autres que la disposition qu'on
éprouve, & que les desirs de chaque homme ne sont
ordinairement arrêtés que par le sentiment de son
impuissance. Si on ne peut pas attirer sur soi les regards
d'une république entiere, on se contente d'être
remarqué de ses voisins, & on est heureux par l'attention
concentrée de son petit cercle. Des prétentions
particularisées naissent ces différentes choses,
qui divisent les connoissances, & qui n'ont rien à
démêler entr'elles. Beaucoup d'individus s'agitent
dans chaque tourbillon, pour arriver aux premiers
rangs: le foible, ne pouvant s'élever, est envieux,
& tâche d'abaisser ceux qui s'élevent; l'envie
exaltée produit des crimes, & voilà ce qu'est la société.
Ce desir, par lequel chacun tend sans cesse à
s'élever, paroît contredire une pente à l'esclavage,
qu'on peut remarquer dans la plûpart des hommes,
& qui en est une suite. Autrefois la crainte, & une
sorte de saisissement d'admiration, ont dû soumettre
les hommes ordinaires à ceux que des passions fortes
portoient à des actions rares & hardies; mais depuis
que la reconnoissance a des degrés, c'est l'ambition
qui mene à l'esclavage. On rampe aux piés du
trône où l'on est encore au dessus d'une foule de
têtes qu'on fait courber. Les hommes qui ont des prétentions
communes, sont donc les uns à l'égard des
autres dans un état d'effort réciproque. Si les hostilités
ne sont pas continuelles entre eux, c'est un repos
semblable à celui des gardes avancées de deux camps
ennemis; l'inutilité reconnue de l'attaque maintient
entre elles les apparences de la paix. Cette disposition
inquiette, qui agite intérieurement les hommes,
est encore aidée par une autre, dont l'effet, assez
semblable à celui de la fermentation sur les corps,
est d'aigrir nos affections, soit naturelles, soit acquises.
Nous ne sommes présens à nous - mêmes que
par des sensations immédiates, ou des idées, & le
bonheur, que nous poursuivons nécessairement,
n'est point sans un vif sentiment de l'existence: malheureusement
la continuité affoiblit toutes nos sensations.
Ce que nous avons regardé long - tems, devient
pour nous comme les objets qui s'éloignent,
dont nous n'appercevons plus qu'une image confuse
& mal terminée. Le besoin d'exister vivement est
augmenté sans cesse par cet affoiblissement de nos
sensations, qui ne nous laisse que le souvenir importun
d'un état précédent. Nous sommes donc forcés
pour être heureux, ou de changer continuellement
d'objets, ou d'outrer les sensations du même
genre. De - là vient une inconstance naturelle, qui
ne permet pas à nos voeux de s'arrêter, ou une progression
de desirs, qui toujours anéantis par la jouissance,
s'élancent jusques dans l'infini. Cette disposition
malheureuse altere en nous les impressions les
plus sacrées de la nature, & nous rend aujourd'hui
nécessaire, ce dont hier nous aurions frémi. Les jeux
du cirque, où les gladiateurs ne recevoient que des
blessures, parurent bientôt insipides aux dames
Romaines. On vit ce sexe, fait pour la pitié, poursuivre
à grands cris la mort des combattans. On exigea
dans la suite qu'ils expirassent avec grace, dit
l'abbé Dubos, & ce spectacle affreux devint nécessaire
pour achever l'émotion & completer le plaisir.
Par - là notre attention se porte sur les choses nouvelles
& extraordinaires, nous recherchons avec
intérêt tout ce qui réveille en nous beaucoup d'idées;
par - là sont déterminés même nos goûts purement
physiques. Les liqueurs fortes nous plaisent
principalement, parce que la chaleur qu'elles communiquent
au sang produit des idées vives, & semble
doubler l'existence: on pourroit en conclure que
le plaisir ne consiste que dans le sentiment de l'exis<pb->
[p. 277]
tence, porté à un certain dégré. En effet, en suivant
ceux du chatouillement, depuis cette sensation vague,
qui est une importunité jusqu'à ce dernier terme,
au de - là duquel est la douleur: en descendant
du chagrin le plus profond, jusqu'à cette douleur
tendre & intéressante, qui en est une teinte affoiblie,
on seroit tenté de croire que la douleur & le
plaisir ne different que par des nuances. Voyez Plaisir. Quoi qu'il en soit, il est certain que nous devons
au besoin d'être émus une curiosité, qui devient
la passion de ceux qui n'en ont point d'autres,
un goût pour le merveilleux, qui nous entraîne à
tous les spectacles extraordinaires, une inquietude
qui nous promene dans la région des chimeres. Ce
qui est renfermé dans ce qu'on appelle les termes de la
raison, ne peut donc pas être long - tems pour nous
le point fixe du bonheur. Les choses difficiles & outrées,
les idées hors de la nature doivent nous séduire
presque sûrement. Voyez Fanatisme. La vigilance
religieuse, & l'occupation de la priere ne
suffisent pas à l'imagination mélancholique d'un
bonze. Il lui faut des chaînes dont il se charge; des
charbons ardens qu'il mette sur sa tête, des cloux
qu'il s'enfonce dans ses chairs; il est averti de son
existence d'une maniere plus intime & plus forte,
que celui qui remplit simplement les devoirs de la
vie civile & de la charité. Suivez le cours de toutes
les affections humaines, vous les verrez tendre à
s'exalter, au point de paroître entierement défigurées.
L'homme délicat & sensible devient foible &
pusillanime: la dureté succede au courage; le contemplatif
devient quiétiste, & le zélé est bientôt un
homme atroce. Il en est ainsi des autres caracteres,
& même de celui qui se montre de la maniere la plus
constante dans quelques individus, la gaieté. Il est
rare qu'elle dure plus long - tems que la jeunesse,
parce qu'elle est absorbée par les passions, qui occupent
l'ame plus profondément, ou détruite par
son exercice même. Mais dans ceux en qui ce caractere
subsiste plus long - tems, parce qu'ils ne sont capables
que d'intérêts superficiels, il s'altere par dégrés,
& perd beaucoup de son honnêteté premiere.
Les hommes légers qui n'ont que la gaieté pour attribut,
ressemblent assez à ces jeunes animaux qui,
après avoir épuisé toutes les situations plaisantes, finissent
par égratigner & mordre. Cette pente qui entraîne
presque tous les individus, peut s'observer en
grand dans la masse des événemens qui ont agité la
terre. Suivez l'histoire de toutes les nations, vous
verrez les meilleurs gouvernemens se dénaturer;
une fermentation lente a fait croître la tyrannie dans
les républiques: la monarchie est changée par le
tems en pouvoir arbitraire. Voyez Gouvernement.
Lorsque dans un état la sécurité commence à polïr
les moeurs, & que les idées se tournent du côté
des plaisus, la vertu regne au milieu d'eux: une
urbanité modeste couvre la volupté d'un voile,
mais il devient bientôt importun. Alors le libertinage
se produit sans pudeur, & des goûts honteux
insultent la nature. Dans les arts, vous verrez l'architecture
quitter une simplicité noble pour prodiguer
les ornemens; la peinture chargera son coloris;
la même altération se fera sentir dans les ouvrages
d'esprit. Le besoin de nouveauté mettra la finesse à
la place de l'élégance; l'obscurité prendra celle de
la force, ou sophistiquera fort; une métaphysique
puérile analysera les sentimens; tout sera perdu, si
quelques génies heureux ne rompent pas cette
marche naturelle des penchans humains. Mais la
physique expérimentale cultivée & le tableau de la
nature présenté par des hommes d'une trempe forte
& rare pourront donner à l'esprit humain un spectacle
qui étendra ses vûes, & fera naître un nouvel
ordre de choses.
Nous voyons que l'homme paresseux par nature,
mais agité par l'impatience de ses desirs est le jouet
continuel d'un esprit qui ne se renouvelle que pour
le trahir. Fatigué dans la recherche du bonheur par
mille intérêts étrangers qui le croisent, rebuté par
les obstacles, ou dégoûté par la jouissance, il semble
que la méchanceté lui dût être pardonnable, &
que le malheur soit son état naturel. L'intérêt de
tous réclamant contre l'intérêt de chacun, a donné
naissance aux lois qui arrêtent l'extérieur des grands
crimes. Mais malgré les lois, il reste toûjours à la
méchanceté un empire qui n'en est pas moins vaste
pour être ténébreux. Dans une société nombreuse,
une foule d'intérêts honnêtes & obscurs que la scélératesse
peut troubler, lui donne sans danger un
exercice continuel. La société humaine seroit donc
une confédération de méchans que l'intérêt seul
tiendroit unis, & auxquels il ne faudroit que la suppression
de cet intérêt pour les armer les uns contre
les autres. Mais en observant l'homme de près, il
n'est pas possible de méconnoître en lui un sentiment
doux qui l'intéresse au sort de ses semblables
toutes les fois qu'il est tranquille sur le sien. Peut - être rencontrerez - vous quelques monstres atrabilaires
qu'une organisation vicieuse & rare porte à
la cruauté. Une habitude affreuse aura rendu peut - être
à quelques autres cette émotion nécessaire. La
plûpart des hommes, lorsque des passions particulieres
ne les enleveront pas aux mouvemens de la
nature, céderont à une sensibilité précieuse qui
est la source de toutes les vertus, & qui peut être
celle d'un bonheur constant. Voyez Humanité.
Ce sentiment tempere dans l'homme l'activité de
l'amour - propre; & peu semblable aux autres genres
d'émotion, il acquiert des forces en s'exerçant. On
ne sauroit donc l'inspirer de trop bonne heure
aux enfans. On devroit chercher à l'exciter en eux
par des images pathétiques, & leur présenter des
situations attendrissantes qui pussent le développer.
Des leçons de bienséance seroient peut - être plus de
leur goût, & leur serviroient sûrement plus que ne
peuvent faire les mots barbares dont on les fatigue.
Si ces idées ne sont pas fort actives pendant l'effervescence
de la jeunesse, elles s'emparent du terrein
que les passions abandonnent, & leur douceur remplace
l'yvresse de celles - ci. Elles élevent & remplissent
l'ame. Malheureux qui n'a point éprouvé
la sensation complete qu'elles procurent ! Nous
disons qu'on pourroit développer dans les enfans
le sentiment vertueux de la pitié. L'expérience apprend
qu'on pourroit aussi leur inspirer tous les préjugés
favorables, soit au bien des hommes en général,
soit à l'avantage de la société particuliere dans
laquelle ils vivent. Ces heureux préjugés faisoient
à Sparte autant de héros que de citoyens, & ils
pourroient produire dans tous les hommes toutes les
vertus relatives aux situations dans lesquelles ils
sont placés. L'amour propre étant une fois dirigé
vers un objet, une premiere action généreuse est
un engagement pour la seconde, & des sacrifices
qu'on a faits naît l'estime de soi - même qui soûtient
& assûre le caractere qu'on s'est donné. On devient
pour soi le juge le plus sévere. Cet orgueil estimable
maîtrise l'ame, & produit ces mouvemens de
vertu que leur rareté fait regarder comme hors de
la nature. Cette estime de soi - même est le principe
le plus sûr de toute action forte & généreuse; on
ne doit point en attendre d'esclaves avilis par la
crainte. L'asservissement ne peut conduire qu'à la
bassesse & au crime. Mais l'éducation ne peut pas
être regardée comme une affaire de préceptes; c'est
l'exemple, l'exemple seul, qui modifie les hommes,
excepté quelques ames privilégiées qui jugent de
l'essence des choses, parce qu'elles sentent elles<pb->
[p. 278]
mêmes, les autres sont entraînés par l'imitation.
C'est elle qui fait prosterner l'enfant aux piés des
autels, qui donne l'air grave au fils d'un magistrat,
& la contenance fiere à celui d'un guerrier. Cette
pente à imiter, cette facilité que nous avons d'être
émûs par les passions des autres, semblent annoncer
que les hommes ont entre eux des rapports secrets
qui les unissent. La société se trouve composée
d'hommes modifiés les uns par les autres, & l'opinion
publique donne à tous ceux de chaque société particuliere
un air de ressemblance qui perce à - travers
la différence des caracteres. La continuité des exemples
domestiques fait sans doute une impression forte
sur les enfans; mais elle n'est rien en comparaison
de celle qu'ils recoivent de la masse générale des
moeurs de leur tems. Voyez Moeurs. Chaque siecle a
donc des traits marqués qui le distinguent d'un autre.
On dit, le siecle de la chevalerie: on pourroit dire,
le siecle des beaux - arts, celui de la philosophie; & plût
à Dieu qu'il en vînt un qu'on pût appeller, le siecle
de la bienfaisance & de l'humanité! Puisque ce sont
l'exemple & l'opinion qui désignent les différens
points vers lesquels doit se tourner l'amour - propre
des particuliers, & qui déterminent en eux l'amour
du bien - être, il s'ensuit que les hommes se font, &
qu'il est à - peu - près possible de leur donner la forme
qu'on voudra. Cela peut arriver sur - tout dans une
monarchie: le trône est un piédestal sur lequel
l'imitation va chercher son modele. Dans les républiques,
l'égalité ne souffre point qu'un homme s'éleve
assez pour être sans cesse en spectacle. La vertu
de Caton ne fut qu'une satyre inutile des vices de
son tems. Mais dans tout gouvernement les opinions
& les moeurs dépendent infiniment de sa situation
actuelle. S'il est tranquille au - dehors, & qu'au - dedans
le bon ordre & l'aisance rendent les citoyens
heureux, vous verrez éclore les arts de plaisir, &
la mollesse marchant à leur suite énerver les corps,
engourdir le courage, & conduire à l'affaissement
par la volupté. Si des troubles étrangers ou des divisions
intestines menacent la sûreté de l'état des
citoyens, la vigilance naîtra de l'inquiétude, l'esprit,
la crainte & la haine formeront des projets,
& ces passions tumultueuses produiront des efforts,
des talens & des crimes hardis. Il faudroit des révolutions
bien extraordinaires dans les situations,
pour en produire d'aussi subites dans les sentimens
publics. Le caractere des nations est ordinairement
l'effet des préjugés de l'enfance, qui tiennent à la
forme de leur gouvernement. A l'empire de l'habitude,
on ajoûteroit pour les hommes la force beaucoup
plus puissante du plaisir, si l'on prenoit soin
de l'éducation des femmes. On ne peut que gémir
en voyant ce sexe aimable privé des secours qui feroient
également son bonheur & sa gloire. Les femmes
doivent à des organes délicats & sensibles des
passions plus vives que ne sont celles des hommes.
Mais si l'amour propre & le goût du plaisir excitent
en elles des mouvemens plus rapides, elles éprouvent aussi d'une maniere plus forte le sentiment de
la pitié qui en est la balance. Elles ont donc le
germe des qualités les plus brillantes, & si l'on joint
à cet avantage les charmes de la beauté, tout annonce
en elles les reines de l'univers. Il semble que
la jalousie des hommes ait pris à tâche de défigurer
ces traits. Dès l'enfance on concentre leurs idées
dans un petit cercle d'objets, on leur rend la fausseté
nécessaire. L'esclavage auquel on les prépare,
en altérant l'élévation de leur caractere, ne leur
laisse qu'un orgueil sourd qui n'emploie que de petits
moyens: dès - lors elles ne regnent plus que dans
l'empire - de la bagatelle. Les colifichets devenus
entre leurs mains des baguettes magiques, transforment
leurs adorateurs comme le furent autrefois
ceux de Circé. Si les femmes puisoient dans les principes
qui forment leur enfance, l'estime des qualités
nobles & généreuses; si la parure ne les embellissoit
qu'en faveur du courage ou des talens supérieurs,
on verroit l'amour concourir avec les autres passions
à faire éclorre le mérite en tout genre; les
femmes recueilleroient le fruit des vertus qu'elles
auroient fait naître. Combien aujourd'hui, victimes
d'une frivolité qui est leur ouvrage, sont punies de
leurs soins par leurs succès! Article de M. le Roi.
Homme
(Page 8:278)
* Homme, (Politique.) il n'y a de véritables richesses
que l'homme & la terre. L'homme ne vaut rien
sans la terre, & la terre ne vaut rien sans l'homme.
L'homme vaut par le nombre; plus une société est
nombreuse, plus elle est puissante pendant la paix,
plus elle est redoutable dans les tems de la guerre.
Un souverain s'occupera donc sérieusement de la
multiplication de ses sujets. Plus il aura de sujets,
plus il aura de commerçans, d'ouvriers, de soldats.
Ses états sont dans une situation déplorable, s'il
arrive jamais que parmi les hommes qu'il gouverne,
il y en ait un qui craigne de faire des enfans, & qui
quitte la vie sans regret.
Mais ce n'est pas assez que d'avoir des hommes,
il faut les avoir industrieux & robustes.
On aura des hommes robustes, s'ils ont de bonnes
moeurs, & si l'aisance leur est facile à acquérir & à
conserver.
On aura des hommes industrieux, s'ils sont libres.
L'administration est la plus mauvaise qu'il soit
possible d'imaginer, si faute de liberté de commerce,
l'abondance devient quelquefois pour une province
un fléau aussi redoutable que la disette.
Voyez les articles
Gouvernement, Lois, Impôts, Population, Liberté
, &c.
Ce sont les enfans qui font des hommes. Il faut
donc veiller à la conservation des enfans par une
attention spéciale sur les peres, sur les meres & sur
les nourrices.
Cinq mille enfans exposés tous les ans à Paris peuvent
devenir une pepiniere de soldats, de matelots
& d'agriculteurs.
Il faut diminuer les ouvriers du luxe & les domestiques.
Il y a des circonstances où le luxe n'emploie
pas les hommes avec assez de profit; il n'y en
a aucune où la domesticité ne les emploie avec
perte. Il faudroit asseoir sur les domestiques un impôt
à la décharge des agriculteurs.
Si les agriculteurs, qui sont les hommes de l'état
qui fatiguent le plus, sont les moins bien nourris,
il faut qu'ils se dégoûtent de leur état, ou qu'ils y
périssent. Dire que l'aisance les en feroit sortir, c'est
être un ignorant & un homme atroce.
On ne se presse d'entrer dans une condition que
par l'espoir d'une vie douce. C'est la jouissance
d'une vie douce qui y retient & qui y appelle.
Un emploi des hommes, n'est bon que quand le
profit va au - delà des frais du salaire. La richesse
d'une nation est le produit de la somme de ses travaux
au - delà des frais du salaire.
Plus le produit net est grand & également partagé,
plus l'administration est bonne. Un produit
net également partagé peut être préférable à un
plus grand produit net, dont le partage seroit très inégal,
& qui diviseroit le peuple en deux classes,
dont l'une regorgeroit de richesse & l'autre expireroit
dans la misere.
Tant qu'il y a des friches dans un état, un homme
ne peut être employé en manufacture sans perte.
A ces principes clairs & simples, nous en pourrions
ajoûter un grand nombre d'autres, que le souverain
trouvera de lui - même, s'il a le courage & la
bonne volonté nécessaires pour les mettre en pratique.
[p. 279]
Homme nouveau
(Page 8:279)
Homme nouveau, novus homo, (Hist. rom.)
les Romains appelloient hommes nouveaux, ceux qui
commençoient leur noblesse, c'est - à - dire, ceux
qui n'ayant aucune illustration par leurs ancêtres,
commençoient les premiers à se pousser par leurs
vertus; c'est cependant ce reproche d'homme nouveau que tant de gens firent à l'orateur de Rome,
& entr'autres Catilina, lorsqu'il lui fut préferé pour
la premiere magistrature:
« Je ne prétens pas, dit
Ciceron en plein sénat, m'étendre sur les louanges
de mes ancêtres, par cette seule raison qu'ils
ont vécu sans rechercher les applaudissemens de
la renommée populaire, & sans desirer l'éclat des
honneurs que vous conférez ».
Cicéron étoit donc un homme nouveau; il étoit
sans doute bien illustre par lui - même, & bien digne
des premiers emplois; mais il n'étoit pas noble, il
n'avoit pas le droit de faire porter à ses funérailles
le buste de cire de ses ayeux: celui - là seul avoit ce
droit dont les ancêtres étoient parvenus aux grandes
charges; il étoit noble par ce titre, & rendoit
nobles ses descendans. Ceux qui avoient les images
de leurs ayeux, pour me servir des termes d'Asconius, étoient appellés nobles, nobiles; ceux qui
n'avoient que les leurs, on les nommoit hommes
nouveaux, novi homines; & ceux qui n'avoient ni
les images de leurs ancêtres, ni les leurs, étoient
appellés ignobles, ignobiles; ainsi la noblesse, le
droit d'images, jus imaginum, se trouvoit attaché
aux charges, aux dignités; c'est pourquoi Caton le
censeur, qu'on qualifioit comme Cicéron d'homme
nouveau, répondoit qu'il l'étoit quant aux dignités,
mais que quant au mérite de ses ancêtres, il pouvoit
se dire très - ancien. (D. J.)
Homme libre
(Page 8:279)
Homme libre, (Hist. des Francs.) on appelloit
au commencement de notre monarchie hommes libres ceux qui d'un côté n'avoient point de bénéfices
ou fiefs, & qui de l'autre n'étoient point soumis à
la servitude de la glebe; les terres qu'ils possédoient
étoient des terres allodiales; alors deux sortes de
gens étoient tenus au service militaire, les leudes
vassaux, ou arriere - vassaux, qui y étoient obligés
en conséquence de leurs fiefs, & les hommes libres,
francs, romains & gaulois, qui servolent sous le
comte & étoient menés à la guerre par lui, & ses
officiers qu'on nommoit vicaires; de plus, comme
les hommes libres étoient divisés en centaines (en anglois
hundred) qui formoient ce qu'on appelloit un
bourg, les comtes avoient encore sous eux outre les
vicaires d'autres officiers, nommés centeniers, qui
conduisoient les hommes libres du bourg, ou de leur
centaine, au camp.
Les droits du prince sur les hommes libres ne consistoient
qu'en de certaines voitures exigées seulement
dans de certaines occasions publiques, & dans
quelques droits sur les rivieres; & quant aux droits
judiciaires, il y avoit des lois des Ripuaires & des
Lombards pour prévenir les malversations.
J'ai dit que les hommes libres n'avoient point de
fiefs; cela se trouvoit ainsi dans les commencemens,
alors ils n'en pouvoient point encore posséder;
mais ils en devinrent capables dans la suite,
c'est - à - dire, entre le regne de Gontram & celui de
Charlemagne. Dans cet intervalle de tems, il y
eut des hommes libres, qui furent admis à jouir de
cette grande prérogative, & par conséquent à entrer
dans l'ordre de la noblesse; c'est du moins le
sentiment de M. de Montesquieu, voyez l'Esprit des
lois, liv. XXXI. ch. xxiij. (D. J.)
Homme d'État
(Page 8:279)
Homme d'État, (Droit politiq.) celui à qui le
souverain confie sous ses yeux les rènes du gouvernement
en tout, ou en partie.
Un citoyen d'Athènes ou de Rome nous diroit
que le devoir d'un homme d'état est de n'être rempli
que du seul bien de sa patrie, de lui tout sacrifier,
de la servir inébranlablement sans aucune vûe de
gloire, de réputation, ni d'intérêt; de ne point
s'élever pour quelque honneur qu'on lui rende, &
de ne point s'abaisser pour quelque refus qu'il éprouve; de soumettre toûjours ses propres affaires aux
affaires publiques; de tirer sa consolation dans les
malheurs particuliers, de la prospérité générale de
son pays; de ne s'occuper qu'à le rendre heureux;
en un mot, de vivre & de mourir pour lui seul.
Mais je ne tiendrai point ici des propos si sublimes,
qui ne vont ni à nos moeurs, ni à nos idées,
ni à la nature des gouvernemens sous lesquels nous
vivons: c'est bien assez de demander à un homme
d'état du travail, de l'honneur, de la probité, de
servir son prince fidelement, d'avoir l'oreille plus
ouverte à la vérité qu'au mensonge, d'aimer l'ordre
& la paix, de respecter les lois, de ne pas opprimer
la nation, & de ne se pas jouer du gouvernement.
Le vulgaire suppose toûjours une étendue d'esprit
prodigieuse, & un génie presque divin aux hommes
d'état, qui ont heureusement gouverné; mais il ne
faut souvent, pour y réussir, qu'un esprit sain, de
bonnes vûes, de l'application, de la suite, de la
prudence, des conjonctures favorables. Cependant
je suis persuadé que, pour être un bon ministre, il
faut sur toutes choses avoir pour passion, l'amour
du bien public: le grand homme d'état est celui dont
les actions parlent à la postérité, & dont il reste
d'illustres monumens utiles à sa patrie. Le cardinal
de Mazarin n'étoit qu'un ministre puissant; Sully,
Richelieu & Colbert ont été de grands hommes d'état.
Alexandre se fit voir un grand homme d'état, après
avoir prouvé qu'il étoit un grand capitaine. Alfred
a été tout ensemble, le plus grand homme d'état, &
le plus grand roi qui soit monté sur le trône depuis
l'époque du christianisme. (D. J.)
Hommes d'intelligence
(Page 8:279)
Hommes d'intelligence, (Théol.) nom d'une
secte d'hérétiques, qui parurent dans la Picardie en
1412; leur chef étoit Fr. Guillaume de Hildernissen,
allemand, de l'ordre des Carmes, & un certain
Gilles le Chantre, homme séculier. Celui - ci disoit
qu'il étoit le sauveur des hommes, & que par lui
les fideles verroient Jesus - Christ, comme par Jesus - Christ ils verroient Dieu le Pere; que les plaisirs
du corps étant de simples actions de la nature, n'étoient
point des péchés, mais des avant - goûts du
paradis; que le tems de l'ancienne loi avoit été celui
du Pere; que le tems de la nouvelle loi étoit celui
du Fils; & qu'il y en auroit bientôt un troisieme,
qui seroit celui du saint - Esprit, lequel mettroit les
hommes en toute liberté. Le carme se retracta à
Bruxelles, à Cambrai, & à Saint - Quentin, où il
avoit semé ses erreurs, & cette secte se dissipa. Mezerai, Hist. de France. (G)
Homme d'armes
(Page 8:279)
Homme d'armes. (Cart. milit. & hist.) C'étoit dans l'ancienne gendarmerie un gentilhomme
qui combattoit à cheval, armé de toutes pieces, cataphractus eques. Chaque homme d'armes avoit avec
lui cinq personnes; sçavoir trois archers, un coutillier, ou un écuyer, ainsi appellé d'une espece de
couteau ou bayonnette, qu'il portoit au côté, &
enfin un page ou un valet. Charles VII ayant commencé
à réduire la noblesse françoise en corps réglé
de cavalerie, il en composa quinze compagnies,
chacune de cent hommes d'armes, appellées compagnies d'ordonnance; & comme chaque homme d'armes
avoit cinq autres hommes à sa suite, chaque compagnie
se trouvoit de six cens hommes, & les quinze
ensemble faisoient neuf mille chevaux. Il y avoit outre
cela une grande quantité de volontaires, qui suivoient
ces compagnies à leurs dépens, dans l'espérance
d'y avoir, avec le tems, une place de gen<pb->
[p. 280]
darme. Au reste, le nombre d'hommes qui étoit attaché
à l'homme d'armes, ou qui composoient la lance
fournie, comme on parloit alors, n'a pas toujours été
le même. Louis XII, dans une ordonnance du 7 Juillet 1498, met sept hommes pour une lance fournie;
François I. huit, selon une autre ordonnance, du 28
Juin de l'an 1526. Les archers de ces hommes d'armes
étoient de jeunes gentilshommes qui commençoient
le métier de la guerre, & qui par la suite parvenoient
à remplir les places des hommes d'armes. Voyez Compagnie d'Ordonnance.
Les hommes d'armes, qu'on appelloit aussi gendarmes, formoient le corps de la gendarmerie. Voyez
Gendarme.
Homme
(Page 8:280)
Homme, (Jurisp.) en matiere féodale, signifie
tantôt vassal, & tantôt sujet, ou censitaire, ainsi
qu'on le peut voir dans un grand nombre de coutumes.
(A)
Hommes allodiaux
(Page 8:280)
Hommes allodiaux, étoient ceux qui tenoient
des terres en aleu, ou franc - aleu. On les appelloit
aussi leudes, leudi vel leodes, & en françois leudes.
Voyez le style de Liege, chap. xix. art. 11. (A)
Homme de commune
(Page 8:280)
Homme de commune. On appelloit ainsi ceux
qui étoient compris dans la commune, ou corps des
habitans d'un lieu qui avoient été affranchis par leur
seigneur, qui juroient d'observer les articles de la
charte de commune, & participoient aux priviléges
accordés par le seigneur. (A)
Homme confisquant
(Page 8:280)
Homme confisquant, étoit un homme, que
les gens d'église & autres gens de main - morte,
étoient obligés de donner au seigneur haut - justicier
pour leurs nouvelles acquisitions, à quelque titre
que ce fût, afin que par son fait, le fief pût être confisqué
au profit du seigneur haut - justicier, & que le
seigneur ne fût pas totalement frustré de l'espérance
d'avoir la confiscation du fief.
Quelques coutumes, comme celles de Peronne,
veulent que les gens d'église & de main - morte donnent
au seigneur homme vivant, mourant & confisquant; ce qui suppose que le fief dominant & la justice
soient dans la même main; car lorsqu'ils étoient
divisés, il n'étoit dû au seigneur féodal qu'un homme
vivant & mourant, & au seigneur haut - justicier un
homme confisquant.
L'obligation de fournir un homme confisquant au
seigneur haut - justicier, étoit fondée sur ce qu'ancienement
on ne jugeoit que par le fait de l'homme
vivant & mourant: l'héritage pouvoit être confisqué
au profit du seigneur haut - justicier; mais suivant
la derniere jurisprudence, l'héritage ne peut plus
être confisqué par le fait d'un tiers; c'est pourquoi
l'on n'oblige plus les gens d'église & de main - morte
à donner l'homme confisquant, mais seulement l'homme
vivant & mourant; ce qui n'empêche pas qu'il ne
soit dû une indemnité au seigneur haut - justicier, lors
de l'amortissement, à cause de l'espérance des confisquations
dont il est privé. Voyez les Mémoires de
M. Auzanet, tit. de l'indemnité dûe par les gens de
main - morte. Voyez aussi
Homme vivant et mourant
. (A)
Hommes et Femmes de corps
(Page 8:280)
Hommes et Femmes de corps, sont des
gens dont la personne est serve, à la différence des
main - mortables, qui ne sont serfs qu'à raison des
héritages qu'ils possedent, & qui sont d'ailleurs des
personnes libres. Il est parlé des hommes & femmes de
corps dans la coutume de Vitry, art. 1, 103, 140 &
suiv. Châlons, art. 18, & en la coutume locale de
Resberg, ressort de Meaux, & au chap. xxxjx. de
l'ancien style de parlement à Paris, & en l'ancienne
coutume du bailliage de Bar, & au liv. II. de l'usage
de Paris & d'Orléans.
Sur l'origine de ces servitudes de corps, Voyez
Beaumanoir, chap. xlv. pag. 254. (A)
Hommes cottiers
(Page 8:280)
Hommes cottiers. On appelle ainsi en Picar<cb->
die, Artois, & dans les Pays - bas, les propriétaires
des héritages roturiers. Ils sont obligés de rendre
la justice en personne, ou par procureur, avec leur
seigneur. On les en a déchargés en Picardie; mais
cela a encore lieu en Artois, & dans plusieurs autres
coutumes des Pays - bas. Voyez l'auteur des notes
sur Artois, art. 1, n. 23 & suiv. (A)
Homme de la Cour du Seigneur
(Page 8:280)
Homme de la Cour du Seigneur, sont les
vassaux qui rendent la justice avec leur seigneur dominant;
ce sont ses pairs. Voyez l'ancienne coutume
de Montreuil, art. 23. (A)
Homme féodal
(Page 8:280)
Homme féodal ou feudal, dans quelques
coutumes, est le seigneur qui a des hommes tenans
en fief de lui. Voyez Ponthieu, art. 72 & 87. Boulenois, art. 15 & 39. Hainault, chap. j, iv & v: mais
en l'art. 74 & 81 de la coutume de Ponthieu, & dans
celle de Boulenois, l'homme feudal est le vassal. (A)
Homme de fer
(Page 8:280)
Homme de fer. C'étoit dans quelques seigneuries,
un sujet obligé d'exécuter les ordres de son
seigneur, & de le suivre armé à la guerre. La maison
qu'il occupoit s'appelloit maison de fer. Il y a
encore un homme de fer, joüissant de certaines exemtions,
dans le comté de Neuviller - sur - Moselle en
Lorraine.
Hommes de fiefs
(Page 8:280)
Hommes de fiefs, dans les coutumes de Picardie, Artois & des Pays - bas, sont les vassaux qui
doivent rendre la justice avec le seigneur dominant.
(A)
Hommes de foi
(Page 8:280)
Hommes de foi, c'est le vassal. Voyez la coutume
d'Anjou, art. 151, 174, 176 & 177. Bretagne, 283; 294, & 662. (A)
Homme de foi lige
(Page 8:280)
Homme de foi lige, est le vassal qui doit la
foi & hommage lige. Voyez Foi lige & Hommage lige. (A)
Homme de foi simple
(Page 8:280)
Homme de foi simple, est celui qui ne doit
que l'hommage simple, & non l'hommage lige.
Voyez Hommage simple. (A)
Hommes jugeans
(Page 8:280)
Hommes jugeans, étoient les hommes de siefs
ou vassaux, qui rendoient la justice avec leur seigneur
dominant. Il en est souvent fait mention dans
les anciens arrêts de la cour, & dans la quest. 169 de
Jean le Coq; les vassaux de Clermont qui jugeoient
en la cour de leur seigneur, sont appellés hommes jugeans. (A)
Hommes jugeans ou jugeurs, sont aussi les conseillers
ou assesseurs, que les baillifs & prevôts appelloient
pour juger avec eux. Il y a encore dans
quelques coutumes de ces sortes d'assesseurs. Voyez
Hommes Cottiers, Hommes de Fiefs, Hommes de Loi
. (A)
Homme lige
(Page 8:280)
Homme lige, homo ligius, est le vassal qui doit
à son seigneur la foi & hommage lige. Voyez Ponthieu, art. 66, & aux mots Foi & Hommage lige, & Hommage lige. (A)
Homme de main - morte
(Page 8:280)
Homme de main - morte, ou Mainmortable, est la même chose, comme on voit dans la
coutume de Vitri, article 78, Voyez Mainmorte (A).
Homme sans moyen
(Page 8:280)
Homme sans moyen, on appelloit ainsi un vassal,
qui relevoit immédiatement du roi, comme il
est dit au chap. lxvj. de la vielle chronique de Flandres. (A)
Homme de paix
(Page 8:280)
Homme de paix, étoit un vassal qui devoit procurer
la paix à son seigneur, ou bien celui qui avoit
juré de garder paix & amitié à quelqu'un plus puissant
que lui. D'autres entendent par homme de paix,
celui qui devoit tenir & garder, par la foi de son
hommage, la paix faite par son seigneur, comme il
est dit en la somme rurale: mais tout cela n'a plus lieu
depuis l'abolition des guerres privées. Voyez ci - dessus Hommage de paix. (A)
Homme de pléjure
(Page 8:280)
Homme de pléjure, étoit un vassal qui étoit
obligé de se donner en gage, ou ôtage pour son seigneur,
quand le cas le requéroit, comme quand
[p. 281]
plusieurs barons, qui étoient vassaux du roi, furent
envoyés en Angleterre pour tenir prison & ôtage
pour le roi Jean, & faire pléjure de sa rançon. Voyez
les assises de Jerusalem, chap. ccvj. Bouthelier, som.
lxxxvij. rur. l. m. 1. chap. vij. pag. 429. (A)
Homme de pote
(Page 8:281)
Homme de pote, quasi potestatis; c'est un sujet
qui est dans une espece de servitude envers son seigneur,
qui est obligé de faire pour lui des corvées,
& d'acquitter d'autres droits & devoirs. Voyez Homme de corps. (A)
Hommes profitables
(Page 8:281)
Hommes profitables, sont les sujets dont le
seigneur tire profit & revenu. Coutume de Bretagne,
art. 91. (A)
Homme du Roi
(Page 8:281)
Homme du Roi, est celui qui représente le roi
dans quelque lieu, comme un ambassadeur, envoyé
ou résident chez les étrangers, un intendant dans les
provinces; dans les tribunaux royaux, le procureur
du roi; & dans les cours, le procureur général. (A)
Homme de service
(Page 8:281)
Homme de service, est un vassal qui, outre
la foi & le service militaire auquel tous les fiefs sont
tenus, doit en outre à son seigneur dominant quelque
droit ou service particulier, & qui tient quelques
possessions à cette condition. Voyez Cujas ad tit. 5,
lib. II. feudor. Boutillier, som. rur. (A)
Homme de servitude
(Page 8:281)
Homme de servitude, sont des gens de condition
servile; ils sont ainsi appellés dans la coutume
de Troyes, art. 1 & 6, & dans celle de Chaumont, art. 9. Voyez Homme de corps. (A)
Homme de vigne
(Page 8:281)
Homme de vigne est une certaine étendue de
terre plantée en vigne, égale à ce qu'un homme laborieux
peut communément façonner en un jour.
l'homme de vigne contient ordinairement 800 seps ou
un demi quartier, mesure de Paris. Cette maniere
de compter l'étendue des vignes par hommes ou
hommées, est usitée dans le Lyonnois & dans quelques
autres provinces. En quelques endroits de
Champagne, il faut douze hommes de vigne pour faire
un arpent de cent cordes, de vingt piés pour corde:
dans d'autres l'arpent n'est divisé qu'en huit hommes.
(A)
Homme vivant et mourant
(Page 8:281)
Homme vivant et mourant, est un homme
que les gens d'église & autres gens de main - morte,
sont obligés de donner au seigneur féodal, pour les
représenter en la possession d'un héritage, en faire la
foi & l'hommage en leur place, si c'est un fief, attendu
qu'ils ne peuvent la faire eux - mêmes, & afin
que, par le décès de cet homme, il y ait ouverture
au droit de relief, si l'héritage est tenu en fief.
La coutume d'Orléans appelle l'homme vivant &
mourant vicaire.
Les gens d'église de main - morte sont obligés de
donner homme vivant & mourant, pour toute acquisition
par eux faite, à quelque titre que ce soit.
Il n'est dû ordinairement que pour les fiefs; cependant
quelques auteurs prétendent qu'il en est
aussi dû un pour les rotures, quoiqu'à dire vrai, l'indemnité
suffise pour les rotures; mais il est certain
que l'on ne donne point d'homme vivant & mourant
pour les franc - aleux, pas même au seigneur haut - justicier. Voyez Homme confisquant.
C'est au seigneur féodal dominant qu'on donne
l'homme vivant & mourant, & non au seigneur haut-justicier.
L'amortissement fait par le roi, n'empêche pas
que les gens d'église & de main - morte ne doivent au
seigneur homme vivant & mourant, avec le droit d'indemnité.
S'ils ne donnoient pas homme vivant & mourant, le
seigneur pourroit saisir le fief, & feroit les fruits siens.
Les bénéficiers particuliers qui ne forment point
un corps, ne sont pas obligés de donner homme vivant
& mourant, parce qu'il y a mutation par leur mort.
Les communautés ecclésiastiques, & autres gens
de main - morte, peuvent donner pour homme vivant
& mourant, une personne de leur corps, ou telle
autre personne que bon leur semble, pourvû qu'elle
ait l'âge requis pour faire la foi; ainsi à Paris, il
faut que l'homme vivant & mourant soit âgé de vingt
ans. Dans d'autres coutumes, où la foi se peut faire
plûtôt, il suffit que l'homme vivant & mourant ait
l'âge requis par la coutume, pour porter la foi.
Quand l'homme vivant & mourant est décédé, il
faut en donner un autre dans les quarante jours, &
il est dû un droit de relief pour la mutation du vassal.
Dans quelques coutumes, comme celle de Péronne, il est dû en outre un droit de chambellage.
Faute de donner dans les quarante jours un nouvel
homme, le seigneur peut saisir le fief, & faire les
fruits siens.
La mort civile de l'homme vivant & mourant, soit
pour profession en religion, soit par quelque condamnation
qui emporte peine de mort civile, n'oblige
point de donner un nouvel homme vivant & mourant; il n'en est dû qu'en cas de mort naturelle; ce
n'est aussi que dans ce cas qu'il y a ouverture au fief.
L'obligation de fournir un homme vivant & mourant est imprescriptible, par quelque tems que les
gens d'église & de main - morte ayent joui de leur
fief. Voyez le tit. des fiefs de Billecoq, liv. V, chap.
xij, sect. 6. (A)
Next page
The Project for American and French Research on the Treasury of the
French Language (ARTFL) is a cooperative enterprise of Analyse et
Traitement Informatique de la Langue Française (ATILF) of the
Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), the Division
of the Humanities, the Division of the Social Sciences, and Electronic
Text Services (ETS) of the University of Chicago.
PhiloLogic Software, Copyright © 2001 The University of Chicago.