ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"124"> astringent que ce remede; il est bien préférable aux caustiques qui laissent le danger du renouvellement de l'hémorrhagie à la chûte de l'escharre; mais celui - ci consolide le vaisseau après avoir arrêté le sang. Il faut avoir attention en levant l'appareil, de ne pas tirer de force ce médicament, s'il est adhérent au vaisseau: il faut au contraire en remettre qui soit un peu plus liquide, & attendre qu'il tombe de soi - même. Si quelque obstacle s'opposoit à l'application ou à l'effet de ce remede, il faudroit avoir recours à la ligature du vaisseau. Tel est le précis de la doctrine de Lanfranc sur les hémorrhagies; il me semble que les modernes n'ont rien dit de mieux; le médicament qu'il propose vulnéraire & astringent, est supérieur à l'agaric. La méthode de tenir le bout du doigt pendant un tems assez long sur l'orifice du vaisseau, est excellente, & il est certain qu'avec cette attention il y a effectivement peu d'hémorrhagies qu'on ne doive arrêter avec sécurité & succès. Personne n'a prescrit des précautions plus sages pour les pansemens; dans les observations que l'auteur rapporte, on voit qu'il ne levoit l'appareil que le quatrieme jour, qu'il ne touchoit point au fond de la plaie, & qu'il attendoit de la nature, la chûte du médicament qui avoit arrêté le sang. L'on acquiert bien peu d'expérience dans le cours de la plus longue vie; il faut se rendre propre celle de tous nos prédécesseurs, ils ont laissé des préceptes & des exemples admirables qui sont trop peu connus.

La pratique présente quelquefois des cas singuliers & imprévus, où la présence d'esprit du chirurgien devient une ressource capitale. On arrête assez facilement l'hémorrhagie qui suit l'extraction d'une dent, en remplissant l'alvéole de charpie brute, en faisant avec des compresses graduées un point d'appui suffisant que l'action des dents opposées contient avec force. Ce moyen s'est trouvé infidele dans un cas particulier, où la portion de l'os maxillaire qui forme la paroi de l'alvéole étoit éclaté. Feu M. Belloy eut recours à un morceau de cire pétrie entre les doigts, dont il mastiqua pour ainsi dire l'alvéole, & il parvint par ce moyen à arrêter une hémorrhagie menaçante qui n'avoit cedé à aucune des tentatives les plus approuvées. M. Foucou, très habile dentiste, a imaginé depuis une machine fort ingénieusement composée, pour embrasser l'arcade alvéolaire dans le cas d'hémorrhagie, après l'extraction d'une dent. Cet instrument est gravé dans le troisieme tome des mémoires de l'académie royale de Chirurgie.

S'il est difficile d'arrêter le sang dans un endroit favorable au succès de la compression, que n'a - t - on pas à craindre, lorsque l'hémorrhagie vient d'un vaisseau ouvert dans l'épaisseur d'une partie dépourvûe de point d'appui, & qui est dans un mouvement continuel? M. Belloy a observé une hémorrhagie après l'opération de la paracenthese. En retirant la cannule du trois - quart, le sang jaillit par la plaie, comme d'une grosse veine ouverte avec la lancette. L'appareil fut bien - tôt imbibé de sang, & aucune compression ne put parvenir à l'arrêter; il fallut introduire dans la plaie un petit fausset de cire qui eut quelques inconvéniens que n'avoit pas une bougie. Quoique cette hémorrhagie soit rare, il est bon d'être informé de sa possibilité, & du moyen d'y remédier, parce que des chirurgiens qui n'auroient pas le génie de l'invention dans une pareille circonstance, pourroient avoir la douleur de voir périr sous leurs yeux un malade, à l'occasion d'une opération qui devoit lui être salutaire. (Y)

HEMORRHOIDAL (Page 8:124)

HEMORRHOIDAL (flux), Medecine. d'AI=MA, sang, & de R)E/EIN, fluer, couler. Ce terme, pris à la lettre, signifie en général un écoulement, une perte de sang, & se trouve par - là synonyme d'hémorrhagie: mais l'usage en a fixé le sens, pour exprimer en particulier la tuméfaction des veines de l'anus ou de l'extrémité de l'intestin rectum, devenue variqueuses (ce qu'Hippocrate designe par les mots de KONDULODHS2 AI=MATI=TIS2) ou susceptibles par quelque cause que ce soit, d'être gorgées de sang, au point qu'elles s'ouvrent souvent, & qu'il en résulte effectivement un écoulement de sang, une hémorrhagie.

Les Anatomistes ont aussi appellé hémorrhoïdaux, les vaisseaux tant artériels que veineux, qui se distribuent au fondement, & qui portent le sang dans cette partie, où peuvent se former des tumeurs sanguines ou des flux de sang tels qu'il vient d'être dit.

Il y a deux arteres, comme deux veines hémorrhoïdales: l'artere hémorrhoïdale interne est un rameau de la mesentérique inférieure, qui rampe le long de l'intestin droit, & se termine au fondement: l'artere hémorrhoïdale externe vient de l'hipogastrique. Les veines hémorrhoïdales, qui sont ordinairement le siége des symptômes des hémorrhoïdes, sont distinguées en deux rameaux, dont l'un qui est aussi dit interne ou supérieur, appartient à la branche mesentérique de la veine - porte, & communique avec la branche splénique; circonstance qui avoitdonné lieu à l'erreur des anciens, qui croyent que c'est par ces vaisseaux que se dégorge l'artere dans les flux hémorrhoïdaux; erreur qui a été reconnue par la découverte de la circulation du sang, & par la connoissance de son véritable cours acquise en conséquence: d'où il résulte, qu'il n'y a aucune influence directe de ce viscere sur les vaisseaux de l'anus. L'autre rameau des veines hémorrhoïdales, dites externes ou inférieures, se joint à la veine hypogastrique, qui s'insere à la veine - cave; en sorte que l'origine des vaisseaux qui se distribuent à l'intestin rectum, répond à ses différentes connexions, savoir au mesocolon & à l'os sacrum.

De cette distribution de vaisseaux il s'ensuit, qu'une partie de ceux de l'intestin rectum & du cou de la matrice ayant la même origine, communiquent entre eux par ce moyen; (voyez Matrice.) ce qui peut servir à rendre raison, pourquoi le flux hémorrhoïdal est souvent un supplément au flux menstruel, (voyez Menstrues.) & pourquoi les douleurs hémorrhoïdales s'étendent souvent aux parties génitales.

Il y a différentes sortes d'hémorrhoïdes: on distingue principalement celles qui restent fermées, d'avec celles qui sont ouvertes. Celles - là sont aussi appellées aveugles, coecoe, parce que la tumeur hémorrhoïdale qui forme comme un oeil, n'est point ouverte; & furentes, comme furieuses, lorsque dans ce cas elles sont accompagnées de beaucoup de douleur. On distingue encore les hémorrhoïdes en internes & en externes, selon qu'elles ont leur siége au - dehors ou au - dedans du fondement. Elles sont aussi dites critiques, lorsqu'elles sont l'effet des efforts salutaires de la nature, ce qu'on appelle vulgairement & assez à propos un bénéfice de nature, quand elles sont spontanées: on les nomme symptomatiques, lorsqu'elles naissent d'une maniere pernicieuse, & qu'elles sont la suite de quelque vice dans les visceres du bas - ventre ou de la partie affectée.

Les hommes sont plus sujets que les femmes aux hémorrhoïdes, sur - tout considérées comme critiques; parce que le besoin de ce flux de sang est suppléé dans celles - ci par les menstrues: c'est aussi comme critiques principalement, que l'on observe que les hémorrhoïdes sont plus fréquentes dans les climats chauds, que dans les froids. Il est encore à remarquer qu'elles surviennent plus communément aux adultes, entre la jeunesse & la vïeillesse, que dans [p. 125] le bas âge, aux environs de celui de puberté & dans l'âge bien avancé.

On doit regarder comme constant, d'après les plus grands observateurs, que les congestions se sont dans différentes parties du corps, selon les différens tems de la vie, par une disposition particuliere dans l'économie animale; en sorte que les enfans & les jeunes gens sont spécialement sujets aux hémorrhagies par le nez. A l'âge viril, jusqu'à trente - cinq ans environ, on devient sujet au crachement de sang, à l'hémophtysie, & dans la vieillesse au pissement de sang: les hémorrhoïdes semblent donc regarder plus particulierement le moyen âge: pour la raison de ces différens effets, qui n'est pas facile à déterminer, voyez Nature, Économie animale, Hémorrhagie, Saignement de nez, Hémophtysie , &c. On se bornera à faire ici une application particuliere de ce qui donne lieu aux hémorrhagies critiques.

Comme il est peu de personnes qui observent le régime convenable pour la conservation de la santé dans un état aussi parfait, qu'elle seroit susceptible d'y être, & que dans tous les tems de la vie, l'intempérance, le défaut d'exercice, contribuent à faire surabonder les humeurs dont l'excédent est porté le plus souvent (par un principe véritablement actif, ou par la tendance générale à l'équilibre, dans le corps animal) vers les parties où il se trouve moins de résistance; (Voyez Nature, Faculté, Equilibre , Physiol.) il est ordinaire de voir que dans le moyen âge, un des effets le plus commun de la pléthore est la formation des hémorrhoïdes, qui doivent alors être regardées comme salutaires, surtout si elle est suivie de flux - de - sang, parce qu'elles sont l'effet des efforts critiques de la nature, par les spasmes qu'elle opere, qui resserrent, qui étranglent les veines vraissemblablement par le même méchanisme, que dans l'érection de la verge. (Voyez Effort, Physiol. Erection.) En sorte que le sang y est arrêté, s'y accumule, sans qu'il cesse d'y en être porté de nouveau; que la circulation s'y fait à - peu - près comme dans les corps caverneux dilatés; que le sang dans les vaisseaux hémorrhoïdaux, forcés, relâchés, n'y est pas absolument croupissant; & que l'excédent est rapporté par les veines dans la masse, (comme celui de la verge, à mesure que l'érection cesse) lorsque l'équilibre se rétablit par quelque cause que ce soit, interne ou externe, entre les vaisseaux hémorrhoïdaux & les autres vaisseaux du corps; à moins que ceux - là ne se dégorgent auparavant en cédant à l'effort critique, en s'ouvrant pour former un flux - de - sang.

Ce flux hémorrhoïdal, par le renouvellement de la pléthore, devient souvent aussi régulier dans ses retours, que le flux menstruel; ce que l'on a observé souvent dans un grand nombre d'hommes (voyez Horstius, lib. V. observ. 45.) ce qui arrive même aussi quelquefois dans les femmes, après la suppression naturelle des regles, selon Ethmuller, de hemorrhoïd. & pendant la grossesse, selon Schenkius, dans ses oeuvres, lib. III. & Amatus Lusitanus, cent. V. cur. 3. mais il est plus ordinaire que le flux hémorrhoïdal & les symptomes qui le précedent, soient irréguliers dans leur apparition: ce qui fait encore distinguer les hémorrhoïdes en périodiques & en erratiques.

Il suit de ce qui vient d'être dit, que la cause immédiate des hémorrhoïdes est une sorte de pléthore particuliere dans les vaisseaux de l'intestin rectum, qui engorge principalement les veines, attendu que leurs tuniques résistent moins, & que la surabondance du sang peut y être déposée comme dans les vaisseaux relâchés, par l'effet d'une ventouse: en effet, la position des veines hémorrhoïdales, qui sont d'un tissu foible dans la cavité du bassin, où elles ne sont point soutenues, où elles sont exposées à être relachées ultérieurement par l'humidité onctueuse de la graisse, dans laquelle elles sont ordinairement comme ensevelies; exposées à la compression, au frottement des matieres fécales, lorsqu'elles sont sous forme solide, dure; & à l'action rongeante de ces mêmes matieres, lorsqu'elles sont fluides & acrimonieuses; sujettes à l'étranglement de leur canal, à la gêne dans le cours du sang, qu'y peut causer la situation fréquente d'être assis, d'aller à cheval, jointe à tout cela la difficulté dans le retour du sang, qui est le plus souvent dans le cas de remonter contre son propre poids, à cause de la direction parallele de ces veines le long de l'intestin rectum; toutes ces circonstances concourent à établir la disposition particuliere, à ce que ces veines deviennent aisément variqueuses, & soient plus susceptibles, tout étant égal, des effers de la pléthore, qu'aucune autre partie du corps, excepté la matrice; ce qui sert principalement à rendre raison pourquoi les hommes sont plus sujets aux hémorrhoïdes que les femmes, & pourquoi celles - ci éprouvent souvent que le flux hémorrhoïdal est lesupplément le plus naturel du flux menstruel.

Il faut noter que le sang n'est pas toûjours la seule matiere du flux hémorrhoïdal; il y a plusieurs exemples d'écoulement de différentes humeurs excrémenticielles, corrompues, qui se fait par les vaisseaux hémorrhoïdaux, comme dans les fleurs blanches. Schneider, lib. III. de catharris, rapporte plusieurs observations à ce sujet.

La déjection sans tranchées, sans douleurs qui la précedent, sans ténesme, distinguent le flux hémorrhoïdal du flux dissentérique; & d'ailleurs dans celui - ci le sang est mêlé avec les matieres fécales, & ressemble à de la raclure de boyaux, au lieu que dans celui - là, le sang est ordinairement séparé des matieres, qui sont ordinairement sous forme solide; d'ailleurs, il est d'une couleur plus foncée, & quelquefois même il est rendu en caillots, lorsqu'il sort de l'intérieur du boyau où il a sejourné après son épanchement. Ces dernieres circonstances suffisent pour distinguer aussi le flux hémorrhoïdal du flux hepatique. L'hémorrhagie scorbutique, par la voie des selles, se fait sans dépendre des déjections, les précede souvent ou les suit sans conséquence (Voyez Scorbut); au lieu que les hémorrhoïdes ne produisent un flux - de - sang considérable que par l'effet des déjections, sans quoi, ou elles fluent peu, ou elles ne fluent point du tout.

L'écoulement de sang qu'elles produisent paroît n'être jamais dépendant de la volonté; cependant il n'est pas sans exemple que la nature ait pu se faire une habitude de lui obéir, relativement à cet effet. Panarole, Pentecost. 2. obs. 47. fait mention d'un vieillard, qui ayant été sujet dans sa jeunesse à un flux hémorrhoïdal salutaire, se l'étoit rendu si familier, & tellement à sa disposition, que lorsque, dans un âge plus avancé, il se sentoit quelque indisposition, à la guérison de laquelle il jugeoit qu'une évacuation hémorrhoïdale pouvoit contribuer, il se la procuroit, & de telle quantité qu'il croyoit nécessaire; ce qui ne laisse aucun doute que dans bien des cas, le flux hémorrhoidal ne soit l'effet d'une puissance active, indépendamment d'aucune détermination méchanique, quoique la chose se fasse d'une maniere moins sensible, que dans le cas de ce vieillard.

Lorsque les tumeurs hémorrhoïdales ne s'ouvrent point, c'est - à - dire, qu'elles ne forment point de fluxde - sang, elles sont ce qu'on appelle hémorrhoïdes fermées, coecoe; elles ne sont incommodes qu'autant qu'elles deviennent douloureuses, avec ardeur, ten<pb->

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