ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"892"> éponge, pour lui faire prendre eau également: ce qui sera fait, si l'on le manie & remanie; si on le remet sous la presse, & si on l'y laisse quelques heures de suite, entre chacune de ces opérations.

Il faut avec la presse un broyon qu'on voit fig. 20. d'environ la hauteur de la main; & un rouleau de bois (figure 21.) de 15 à 18 pouces de longueur, garni de drap, & à poignées assez longues, pour être tenu à pleines mains.

Si l'on ajoûte le marbre à ces derniers outils, on aura tout ce qu'il faut pour tirer des épreuves de sa planche, sans la porter chez l'imprimeur en lettres. C'est sur ce marbre qu'on broyera l'encre.

Du bois. Le poirier, le pommier, le cormier, le buis, en un mot tous les bois qui ne sont pas poreux, sont propres à la gravure en bois; mais le buis est à préférer. Les substances dures & seches, telles que le gayac, le coco, le palisante, l'ébene, les bois d'Inde, sont sujets à s'égrener. Il n'en faut point employer, non plus que de bois blanc & mou. Il en faut faire équarrir les morceaux par l'ébéniste ou le menuisier, quand même les figures qu'on auroit à trai er seroient rondes, ovales, ou autres. On leur donnera dix lignes d'épaisseur; c'est celle de la hauteur de la lettre d'Imprimerie. On peut tenir les morceaux à fleurons, armes, &c. moins hauts. On y suppléera par - dessous avec des cartes; & le coup de presse en étant amorti, les bords de la gravure n'en seront point écrasés; & la planche en durera plus long - tems.

Principes. Que celui qui veut graver ait un établi d'une hauteur convenable: qu'il n'ait point la tête trop baissée ni le corps trop droit: que son établi soit un peu élevé en pupitre: qu'il ait le jour en face, parce que la coupe faite, la petite ombre du bois coupé le guidera pour la recoupe. Sans cette ombre l'on auroit peine, en hyver que l'humidité ou l'haleine enfle le bois, à discerner la trace de la pointe. Qu'il fasse d'abord quelques traits sur un morceau de poirier, au bout de la pointe, sans avoir été dessinés. Pour cet effet qu'il tienne la planche fermement de la main gauche: qu'il ait dans la droite sa pointe à graver, à - peu - près comme une plume à écrire, mais que sa main soit un peu plus tournée & panchée vers le corps. Que le biseau du taillant de la pointe soit du même côté, ensorte qu'on ne voye presque que l'épaisseur de la lame, obliquement, très - peu du plat, du taillant & du bout de la pointe, & le dessus de la main. Qu'il enfonce l'outil dans le bois, sur le plan incliné du biseau du taillant, & qu'il fasse la coupe. C'est la premiere & principale opération du graveur. Que les deux derniers doigts de sa main posent sur la planche, pour ne pas être gênés, en tirant la pointe de gauche à droite, comme on voit en A; c'est le contraire de la gravure au burin, où l'outil est poussé de droite à gauche.

Pour enlever le bois coupé, l'on fait la recoupe. La recoupe est la seconde opération. Que la main soit tournée en - dehors du corps, de façon qu'on n'en voye que le pouce & l'index qui tiennent la pointe, avec le bout du doigt du milieu: que les autres doigts soient posés & presque cachés sur la planche: qu'on enfonce la pointe au - dessus de la coupe, & où l'on a commencé à la former, ensorte qu'elle entre dans le bois, appuyée en - dehors du corps, sur le côté du taillant qui n'a point de biseau, & que l'on voye tout le côté du taillant du biseau, malgré l'ombre. Cela supposé, si l'on tire parallelement l'outil de gauche à droite, on enlevera le bois à mesure qu'il se détachera, comme on voit en B fig. 4.

Pour achever de former ou graver le trait, le contour, ou la taille commencée, on en fera autant qu'il a été dit, par une coupe & une recoupe du côté opposé à celui que l'on aura gravé: & on donnera à ce trait, ce contour, ou taille, une figure pyramidale sur toute sa longueur, plus ou moins menue, selon qu'on l'aura voulu.

On se formera la main en faisant des traits en - travers du fil du bois, comme en C, fig. 5. retournant la planche, le fil du bois montant toûjours devant soi, & faisant une autre coupe comme en D, fig. 6. Les deux coupes faites, retournant la planche d'un autre sens, le fil du bois en - travers devant soi, & y traçant à des distances égales d'autres coupes en échelle, depuis le haut jusqu'en - bas, comme on voit en E, fig. 7. Les lignes tracées fig. 7. dénotant où l'on a passé la pointe, il s'agit d'enlever le bois à cette espece d'échelle; pour cela on recoupe & l'on acheve les tailles, comme dans la fig. 8. commençant toûjours par celle d'en - haut, & finissant par celle d'en - bas. On voit fig. 9. la forme que doivent avoir les tailles. Ce sont comme des dents de scie: & l'espace qui les constitue est une espece de gouttiere.

Il faut bien prendre garde à la coupe, de ne pas coucher la pointe vers le corps, plus qu'il n'a été prescrit: on s'exposeroit à endommager les tailles par le pié, ce qui les rendroit sujettes à se casser.

Quand on fait des tailles en - travers du fil du bois, s'il arrive qu'il soit disposé à s'égrener, on exécute la recoupe avant la coupe.

Voilà pour les tailles droites. Les circulaires ou courbes se font en tournant un peu la main sur elle - même devant soi, toûjours de gauche à droite, tant à la coupe qu'à la recoupe, concourant à cette opération, de la main qui tiendra la planche & qui la fera mouvoir à contre - sens de la main qui tiendra l'instrument; commençant la coupe & la recoupe en A, & les finissant en B, fig. 13. où les traits blancs marquent le relief, & l'ombre marque les creux.

Les entre - tailles ou tailles courtes entre des longues, comme on en voit en C, fig. 14. se font comme les tailles ordinaires, les racourcissant seulement à volonté.

Les ente - tailles ou tailles rentrées ou grossies par endroits, ne se font pas autrement que les tailles, observant sur leur longueur de réserver des endroits plus épais & plus nourris, comme on voit fig. 15.

Pour les contre - tailles ou secondes tailles, l'on fait d'abord toutes les coupes paralleles, comme à des tailles simples: puis l'on croise ces coupes par d'autres, sous toutes sortes d'angles: observant de ne pas trop enfoncer la pointe, de peur d'égrener ou même de détacher les croisées: procédant ensuite carreau par carreau, en équerre, à contre - sens de ce qui a été coupé, l'on recoupe; & lorsque tout est gravé, on passe en frottant l'ongle sur les croisées pour les raffermir. Voyez la fig. 16. où les carreaux sont creux, & les tailles croisées de relief.

Nous ne dirons des triples tailles, sinon qu'il faut à chaque sens de chaque taille, faire d'abord les trois coupes, ce qui divise ou coupe toutes leurs croisées: aller posément, passer d'un petit carreau à un autre, y faire la recoupe, & enlever le bois, ce qui suppose un artiste exercé, voyez la fig. 17.

S'il arrive que parmi des tailles on en fasse qui soient de beaucoup plus basses que celles entre lesquelles elles se trouvent, de sorte que ces dernieres empêchent la balle d'atteindre aux autres, & par conséquent celles - ci de laisser aucun trait sur le papier, on appelle ces tailles tailles perdues. L'effet en est irréparable & mauvais, sur - tout dans les morceaux délicats.

Les points si faciles à faire dans la gravure en cuivre, sont très - difficiles dans la gravure en bois. Il faut qu'ils soient de relief, vuidés tout - autour, & assez solides à la base pour ne point se casser ou s'écraser. Pour cet effet, il faut faire cette base à quatre faces, en pyramide. On ne les arrangera point par colon<pb-> [p. 893] nes, comme font ceux qui après a voir gravé les tailles, les coupent & recoupent tout en - travers, pour abréger l'ouvrage: en exécutant d'une seule coupe & recoupe toute la largeur des points qu'ils ont à marquer: au hasard de faire partir & sauter les points qu'ils gravent ainsi, par les soubresauts de la pointe de taille en taille; mais il faut, après avoir divisé toute la longueur d'une taille par des points un à un, former à la taille d'à - côté les points correspondans à l'entre - deux de chacun des autres, & ainsi de suite, comme on voit fig. 18. & 191 Si les points n'etoient pas assez fins pour paroître ronds, il faudroit en abattre ou adoucir les angles; car rien n'est plus desagréable que des points quarrés à des ouvrages délicats, sur - tout à des chairs pointillées, s'il arrivoit d'en faire; ce qui est rare dans la gravure en bois, où l'on ne porte guere le fini jusque - là.

Les points longs ou tailles courtes se font quelquefois au bout des grandes tailles, en les séparant à leurs extrémités. Il faut les rendre très - déliées & très - pointues où elles se doivent perdre dans les clairs. L'on en glisse aussi parmi des tailles qui ombrent la pierre, &c. alors il semble qu'il les faut d'égale épaisseur dans leurs petites longueurs, afin d'en obtenir l'effet des entre - tailles. Mais l'usage de ces points longs est rare dans la gravure en bois.

Voilà les manoeuvres auxquelles il faut s'exercer, avant que de passer à des sujets. On passera du poirier au buis, des traits aux desseins, & des contours simples aux vuides. Il s'agit maintenant de vuider solidement & proprement la gravure. Dégagez d'abord fermement vos contours avec la pointe, que vous passerez & repasserez dans tout le creux de la gravure qui bordera les champs ou parties de buis qu'il faut enlever & creuser; servez - vous ensuite du sermoir pour enlever autour de ces traits le bois, partie par partie. Le dégagement avec la pointe qui aura précédé, empéchera le fil du bois d'entraîner le sermoir, & les copeaux qu'on séparera, d'en attirer d'autres.

L'art de bien vuider a été assez négligé: cu les artistes sont mal outillés pour cette manoeuvre: ou ils ne font consister la perfection que dans les tailles: ou ils sacrifient tout à la diligence, négligent la propreté & la solidité, & ne vuident les champs que superficiellement ou grossierement, sans les ragréer, polir, & finir à la gouge; ou ils abandonnent ce travail à des apprentis qui, ne prenant aucune attention pour ne pas appuyer la lame de l'outil sur les traits, les meurtrissent, écrasent, & font égrencr: ou qui baissant trop le coude en agissant, & tenant la lame du fermoir ou de la gouge presque de niveau au plan sur lequel la planche est posée, font passer l'outil tout au - travers de la gravure, & la défigurent par sept à huit échapades ou breches: ou qui ne contenant pas leur main droite par la gauche, vont donner du taillant de l'outil au pié d'un contour ou d'une taille qu'ils coupent, cassent, ou ébrechent tout - à - fait. On ne répare ces accidens que par des pieces; & cette réparation laisse toûjours de très - mauvais effets. D'ailleurs le vuider peu profond & grossier, fait que des places qui doivent être blanches, viennent maculées d'encre.

Pour bien vuider une planche, il faut être assis plus haut que pour la graver. Cela fait, on plante une cheville dans un des trous répandus à distance sur l'établi, pour y appuyer l'ouvrage s'il en est besoin. On a un fermoir dans la main droite: ce fermoir doit être de moyenne largeur, comme de deux lignes ou enviro: la partie du bouton de son manche est placée dans la main, comme on voit fig. 3. Pl. 3. le biseau du taillant de l'outil en A, & un peu do l'épaisseur de la lame, paroissant du côté droit sur toute sa longueur. On tient la planche de la main gauche: on écarte le pouce on B, fig. 4. pour recevoir & soûte<cb-> nir, comme en C, le bout du pouce de l'autre main qui tient le fermoir; par ce moyen la lame de l'outil appuyée du côté gauche en O, peut facilement glisser d'environ la longueur de quatre lignes seulement; en avançant & retirant vers le creux de la main les quatre qutres doigts. C'est ainsi que l'outil va & viert à discrétion dans le bois. Cependant cette position n'est encore que préparatoire; pour dégager, on tirera le bras droit assez, pour que l'outil poussé entre diagonalement dans le bois: alors la situation des mains changera, prendra celles qu'on a représentées fig. 5. & 6. & l'on vuidera sans danger.

Le bois ainsi ébauché & enlevé dans toute une longueur à volonté, on y repassera le fermoir pour la polir par - tout, jusqu'à la base des contours ou traits.

Si l'on sent en dégageant que l'on est dans le fil du bois, & qu'on en est entraîné, on reprendra la pointe qu'on repassera au pié du trait; ou pour le mieux, on enfoncera moins l'outil par le côté du fil, qu'à contre - fil.

S'il y a des petites parties à vuider qui n'exigent pas de dégagement avec le fermoir, il faut les vuider en plain avec les outils proportionnés à leurs espaces.

On voit fig. 7. une planche entierement dégagée avec le fermoir. Il s'agit de vuider les grands champs comme en L. Il y faut procéder à coups de maillet avec des gouges proportionnées, comme on voit dans la vignette. On commencera cette manoeuvre à contre - fil: puis de droit fil; l'on formera ainsi un bloc de copeau qu'on enlevera. On réparera ensuite ces creux à la gouge sans maillet, plaçant les mains comme nous les avons montrées ci - dessus, & conduisant l'outil de maniere à ne faire aucune échapade. Plus les places à vuider seront grandes, plus il faudra les creuser, afin que les balles & le papier n'y atteignent pas à l'impression. Ainsi une place d'un pouce de diametre sera creusée d'environ 3 lignes, & ainsi des autres à proportion.

Les parties à vuider sur les bords d'une planche sans filets, comme aux fleurons, aux figures de Mathématiques, &c. le seront à coups de gouges & de maillet, & presqu'à moitié de leur épaisseur sur leurs extrémités, pour peu que les places soient grandes, afin d'empêcher les balles & le papier d'y atteindre. Ces places n'étant point soûtenues, les balles y pochent plus, & il y faut vuider plus creux, plus d'àplomb, & plus en fond qu'ailleurs. Voyez Pl. III. fig. 10.

Malgré toutes ces précautions, s'il arrive qu'on fasse quelqu'échapade, qu'il y ait quelque trait ou taille brisée, éclatée, il y faut remédier par une piece, ainsi que nous allons l'indiquer.

Vuiaer & mettre pieces. Si bien mises que soient des pieces, elles peuvent se renfler à l'impression, après avoir été mouillées, ou par d'autres causes, excéder le reste de la superficie, & marquer plus noir; ou si elles n'excedent pas, laisser leurs limites sur l'estampe.

Si une planche est échapadée, on prendra un fermoir de grandeur convenable; on en tounera le biseau vers le dedans du trou qu'on veut pratiquer à l'endroit échapadé: & l'on fera ce trou qu'on tiendra d'abord plus petit. On tracera les limites du trou à petits coups: puis avec un fermoir plus petit, l'on enlevera tout le bois de l'enceinte. L'attention principale, c'est de ne pas froisser ou meurtrir les traits contigus à cette ouverture. On la creusera de deux lignes plus profonde que le trait ébreché. On en planira le fond: on en unira bien les côtés; on la repassera à la main & au fermoir: on en rendra les bords bien vifs & bien nets: on observera de la creuser un peu plus large à son fond qu'à son entrée, afin que la piece y entre facilement, s'y étende, & se resserre d'autant à sa surface.

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