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Cette maniere me parut simple, & j'ai par la seule addition du couvercle, remédié au danger réel auquel le fréquent usage de l'eau - forte peut exposer les artistes qui s'en servent souvent: mais ce moyen a toûjours l'inconvénient d'entraîner une perte de tems assez considérable pour l'artiste, ou la nécessité d'employer un homme dont il faur payer la peine. Pour surmonter cette difficulté, j'ai adapté à la boîte une machine très - simple qui lui communique le mouvement qu'on lui donneroit avec les deux mains, & qui rend ce mouvement si égal, que l'on est bien plus à portée de calculer l'effet de l'eau - forte sur la planche. Voici en quoi consiste cette machine, dont les figures aideront à bien faire entendre la construction.
Cette machine dont l'assemblage se voit
Ce rochet forme un échappement au moyen de deux palettes sixées sur un anneau elliptique DD, dans lequel il est renfermé. Sur le prolongement de son grand axe, cet anneau porte deux queues sur lesquelles sont deux coulisses, l'une supérieure, l'autre inférieure; il est arrêté sur un des montans de la cage par des tenons à vis qui lui permettent de se mouvoir librement de haut en - bas. La queue inférieure formée en équerre, porte un petit bras de fer I, qui lui est joint au moyen d'une vis par une de ses extrémités, & qui l'est de même par l'autre à la branche courte F du T, marqué EFG. En K est une goupille sixée sur un des montans; elle passe à - travers une douille rivée sur le T, sur laquelle il peut se mouvoir. Sa branche G passe par une ouverture faite à la table en forme de rainure, suffisamment grande pour ne pas gêner son mouvement, & porte une lentille de plomb assez pesante. A l'extrémité de la branche longue E est attaché un autre petit bras L, semblable à I, joint par son autre bout au levier M, lequel est sixé invariablement à l'un des tourillons du porte - boîte. Celui - ci est fait d'une piece de fer ON, NO, coudée en NN & en OO où sont deux tourillons sur lesquels il se meut. PP sont deux doigts de fer rivés sur la barre NN, lesquels entrent dans deux mains artachées sur la boîte pour l'empêcher de se renverser. QQ sont deux supports terminés par deux tenons qui traversent la table, & sont arrêtés dessous par deux vis ou deux clavettes; ils servent à porter les tourillons du porte - boîte: on y a ajoûté deux petits anneaux afin qu'ils ne puissent s'échapper. La boite est de fer - blanc, couverte d'un
Voici maintenant comment se fait le jeu de cette machine. Si l'on met le balancier G en mouvement il le communique par le petit bras L au levier M, & par conséquent au porte - boîte; ce qui produit un bercement qui agite sans cesse l'eau - forte contenue dans la boite, en la faisant passer sur la planche & repasser sans discontinuer: mais ce mouvement se rallentiroit & cesseroit peu - à - peu tout - à - fait, si le rochet R faisant monter & descendre alternativement l'anneau elliptique au moyen de ses palettes, ne restituoit pas le mouvement au balancier, auquel il communique le sien par le petit bras I.
Pour faciliter l'intelligence de cette machine, nous
allons développer quelques - unes de ses parties. La
J'avertirai que comme cette machine n'est parfaitement intelligible qu'avec le secours des figures qui ne doivent paroître qu'à la fin de l'ouvrage, si quelqu'un étoit curieux de la faire exécuter, je serai toûjours disposé à faire voir celle dont je me sers, ou à en envoyer le dessein, si cela peut obliger quelqu'un ou lui être de quelque utilité.
Revenons à ce qui regarde l'effet de l'eau - forte. Cette liqueur corrosive destinée à approfondir les tailles, lorsqu'elle est répandue sur la planche, la creuse effectivement en détruisant les parties de cuivre qui sont découvertes, & en respectant celles qui sont enduites de vernis. Mais il est nécessaire, pour qu'une planche soit au point de perfection où tend le graveur, que ces tailles soient approfondies avec une juste dégradation: les lointains ou les plans éloignés ne feront point l'effet qu'ils doivent faire, si les tailles dont ils sont travaillés sont trop approfondies; car alors le noir d'impression dont on remplit ces tailles en imprimant la planche, y sera en trop grande abondance; ces objets paroîtront trop noirs sur l'estampe, & ne feront pas l'illusion qu'ils doivent causer: il est donc nécessaire de conduire avec une grande sagacité & beaucoup d'intelligence l'opération de l'eau - forte sur les tailles. Pour cela, lorsqu'on a fait mordre sa planche pendant l'espace de tems qu'on estime suffisant pour les lointains, on suspend l'opération de l'eau - forte; on retire la plancne, on la lave en versant beaucoup d'eau fraîche dessus; ensuite on la laisse secher ou à l'air ou en l'approchant doucement d'un feu très - modéré. Lorsque la planche sera seche, vous vous éclaircirez de l'effet qu'a produit l'eau - forte, en découvrant le vernis, avec un grattoir ou un petit morceau de charbon de saule, dans quelque endroit des lointains.
Si vous jugez qu'ils soient assez mordus, vous couvrirez tout ce qui doit être du ton de ces lointains, en vous servant du mélange que j'ai déjà indrqué, & qui se fait avec le vernis de peintre & le noir de fumée; vous l'employerez avec des pinceaux plus ou moins fins, suivant la finesse des traits & des masses que vous voulez couvrir. Ensuite, aptes avoir donné le tems à ce vernis que vous venezd employer, de sécher, vous remettrez votre planche comme elle étoit, pour l'exposer de nouveau à l'eau<pb-> [p. 887]
J'observerai qu'il seroit injuste d'exiger qu'on donnât des évaluations précises du tems qu'on doit employer l'eau - forte chaque fois; les calculs & les observations les plus exactes n'ont pû me satisfaire; l'effet de l'eau - forte dépend de trop de causes accidentelles, pour qu'on puisse le soûmettre à des regles invariables.
1°. L'eau - forte est plus ou moins agissante, suivant le degré de cuisson qu'on lui a donné, & suivant la qualité & le choix particulier des ingrédiens dont elle est composée.
2°. Le cuivre par sa nature peut être plus ou moins docile à l'effet de l'eau forte. Le cuivre mou dont j'ai parlé dans le commencement de cet article, résiste à l'action de l'eau - forte; le cuivre aigre se dissout trop tôt, & toutes ces différences sont susceptibles de degrés & de nuances infinies.
3°. L'effet de l'air influe sensiblement sur l'effet de l'eau - forte, le froid retarde son action, le chaud l'accélere, l'humidité y cause des différences sensibles.
4°. La maniere de se servir des outils avec lesquels on grave, & la différence des pointes ou émoussées ou coupantes, facilitent à l'eau - forte l'entrée du cuivre, ou lui laissent la peine de l'entamer.
Il faut donc que l'usage accompagné des observations particulieres de l'artiste, lui donnent les lumieres dont il a besoin pour se guider: il est fort difficile d'arriver à faire mordre une planche à un effet juste; & c'est pour cela que la plus grande partie des graveurs se contentent d'obtenir de l'eau - forte un ton général, gris, propre, & égal, en réservant de donner à leur ouvrage avec le secours du burin un accord & un effet dont ils sont les maîtres par ce moyen: mais cette pratique que le méchanisme de la gravure favorise, est sujet à des réflexions que j'ai déjà indiquées. Poursuivons ce qui regarde l'opération que je viens de décrire.
Lorsqu'après avoir exposé autant de tems qu'il le
faut la planche à l'action de l'eau - forte, ce qui va
quelquefois à l'espace d'une heure, d'une heure &
demie & plus, vous la trouvez parvenue au point
que vous souhaitez; vous la lavez une derniere fois
dans une quantité d'eau fraîche, ensuite la chauffant
raisonnablement, vous enlevez avec un linge tout le
vernis dont vous avez fait usage avec le pinceau, pour
couvrir les différens plans: vous ôtez par le même
moyen la mixtion de suif & d'huile dont le derriere
de la planche est couvert; après quoi il reste à enlever
le vernis dur: vous y parviendrez en vous servant
du charbon de saule que vous passerez dessus la planche,
en frottant fortement & en mouillant d'eau commune
ou d'huile & la planche & le charbon. Il est
inutile d'observer qu'à mesure que vous voyez le
cuivre se découvrir, il faut ménager le frottement,
pour que le charbon n'altere point les finesses de la
gravure. Lorsque vous aurez enfin enlevé tout ce
qui reste de vernis dur à la planche, vous la livrerez
à l'imprimeur pour en tirer des épreuves: on donnera
au mot
Revenons à la maniere de faire mordre les planches vernies au vernis mou, lorsqu'on employe pour cela l'eau - sorte qu'on nomme eau de départ.
Cette eau - forte se fait avec le vitriol, le salpetre, & quelquefois l'alun de roche, distillés ensemble;
Je remarquerai ici, pour ne point l'oublier, qu'on peut se servir pour faire mordre les planches gravées au vernis mou, de l'eau - forte dont j'ai donné la composition, & qui est faite avec le vinaigre, le sel ammoniac, & le verdet; elle ménage davantage le vernis, & on la gouverne plus aisément: mais l'eauforte de départ ne peut servir pour les planches vernies au vernis dur; elle fait éclater ce vernis, & détruit ainsi en un moment l'ouvrage de plusieurs jours & quelquefois de plusieurs mois.
Venons au vernis mou & à l'eau - forte de départ.
Il faut prendre de la cire molle, rouge ou verte,
qui devienne flexible en l'échauffant un peu, comme
celle dont se servent les Sculpteurs pour modeler.
Vous en formerez en le paîtrissant & l'étendant
un rebord autour de votre planche. Ce rebord n'a
pas besoin d'être plus haut que cinq ou six lignes au
plus; mais il faut qu'il soit tellement appliqué à la
planche de cuivre, qu'elle puisse par son moyen, contenir
l'eau dont on doit la couvrir à la hauteur de
deux ou trois lignes. La planche ainsi préparée, vous
la placerez horisontalement sur une table qui soit de
niveau, comme on le voit à la
Voilà les manieres connues de graver à l'eauforte; c'est aux artistes à les éprouver toutes, & sur - tout à ne jamais opérer sans faire des observations: c'est ainsi qu'ils pourront découvrir des pratiques ou plus commodes, ou plus sûres, ou plus convenables à leur génie & à leur goût. Il y a, je crois, une infinité de recherches à faire sur cette partie, dont j'espere donner un jour les détails, lorsque je m'en serai assûré par des expériences réitérées. Je me contente aujourd'hui d'offrir aux artistes la machine dont j'ai donné le détail, comme un moyen sûr d'éviter les inconvéniens que l'eau - forte a pour ceux qui s'en approchent. La conservation des hommes doit toûjours être l'objet principal de ceux qui dans les arts cherchent à étendre leurs découvertes.
Je vais maintenant emprunter de l'ouvrage que j'ai cité au commencement de cet article, la plus grande partie de ce qui regarde la gravure au burin.
De la gravure au burin. Le Dessein est toûjours la
base sur laquelle on doit appuyer toutes les opérations
de la Gravurs; on ne peut donc trop recommander
aux Graveurs, soit à l'eau - forte soit au burin,
de s'exercer continuellement à dessiner; ils doivent
sur - tout s'appliquer à dessiner long - tems des
têtes, des piés, & des mains d'après nature, & peut - être
aussi souvent d'après les desseins des artistes qui
ont bien dessiné ces extrémités. Augustin Carrache
& Villamene sont des exemples à suivre pour cette
partie du Dessein, dans laquelle ils ont partaitement
réussi. Un graveur qui aura les ouvrages de ces artistes
sous les yeux, & qui fera de continuelles études, se trouvera en état de corriger les desseins peu
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