ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"872"> parlerons dans un moment, l'action des cinq satellites de Saturne pourroit encore produire quelque dérangement dans cette planete; & peut - être sera - t - il necessaire d'avoir égard à l'action des satellites pour determiner entierement & avec exactitude toutes les inegalités du mouvement de Saturne, aussi - bien que celles de Jupiter.

Si les satellites agissent sur les planetes principales; & si celles - ci agissent les unes sur les autres, elles agissent donc aussi sur le soleil: c'est une conséquence assez naturelle. Mais jusqu'ici les faits nous manquent encore pour la verifier. Le moyen le plus infaillible de decider cette question, est d'examiner les inégalités de Saturne; car si Jupiter agit sur le Soleil en même tems que Saturne, il est nécessaire de transporter à Saturne, en sens contraire, l'action de Jupiter sur le Soleil, pour avoir le mouvement de Saturne par rapport à cet astre; & entr'autres inégalites cette action doit produire dans le mouvement de Saturne une variation proportionnelle au sinus de la distance entre le lieu de Jupiter & celui de Saturne. C'est aux Astronomes à s'assurer si cette variation existe, & si elle est telle que la théorie la donne. Voyez Saturne.

On peut voir par ce detail quels sont les différens degres de certitude que nous avons jusqu'ici sur les principaux points du système de la gravitation universelle, & quelle nuance, pour ainsi dire, observent ces degres. Ce sera la même chose quand on voudra transporter, comme fait Newton, le système general de la gravitation des corps celestes à celle des corps terrestres ou sublunaires. Nous remarquerons en premier lieu que cette attraction ou gravitation generale s'y manifeste moins en détail dans toutes les parties de la matiere, qu'elle ne fait, pour ainsi dire, en total dans les differens globes qui composent le systeme du monde; nous remarquerons de plus qu'elle se manifeste dans quelques - uns des corps qui nous environnent plus que dans les autres; qu'elle paroit agir ici par impuision, là par une mechanique inconnue, ici suivant une loi, là suivant une autre; enfin plus nous generaliserons & etendrons en quelque maniere la gravitation, plus ses effets aous paroitront varies, & plus nous la trouverons obscure, & en quelque maniere informe dans les phenomenes qui en resultent, ou que nous lui attribuons. Soyons donc tres - reserves sur cette generalisation, aussi - bien que sur la nature de la force qui produit la gravitation des planetes; reconnoissons seulement que les effets de cette force n'ont pu se réduire, du - moins jusqu'ici, à aucune des lois connues de la mechanique; n'emprisonnons point la nature dans les limites étroites de notre intelligence; approfondissons assez l'idée que nous avons de la matiere, pour être circonspects sur les propriétes que nous lui attribuons ou que nous lui refusons; & n'imitons pas le grand nombre des philosophes modernes, qui en affectant un doute raisonné sur les objets qui les intéressent le plus, semblent vouloir se dedommager de ce doute par des assertions prematurees sur les questions qui les touchent le moins.

II. Loi génerale de la gravitation. Si on appelle F la force de la gravitation d'un point vers un autre, e l'espace que cette force fait parcourir pendant le tems t, on aura d d e=F d t2, ou plus exactement [omission: formula; to see, consult fac-similé version], comme on l'a vû au mot Force, page 118 de ce Volume, en appellant a l'espace que la pesanteur p fait parcourir pendant un tems Q. M. Euler, dans sa piece sur le mouvement de Saturne, qui a remporte le prix de l'académie des Sciences en 1748, prend pour équation, non pas d d e =F d t2, mais d d e=1/2 F d t2. Comme cette maniere de presenter l'équation des forces accélératri<cb-> ces a causé de la difficulté à plusieurs personnes, je dirai ici qu'elle ne me paroit point exacte. En effet supposons F=p, c'est - à - dire F égale à la pesanteut naturelle, on auroit donc, suivant M. Euler, [omission: formula; to see, consult fac-similé version] & [omission: formula; to see, consult fac-similé version] ou [omission: formula; to see, consult fac-similé version]; cependant toutes les formules reçues jusqu'ici donnent la vitesse à la fin de l'espace [omission: formula; to see, consult fac-similé version], & le tems [omission: formula; to see, consult fac-similé version]; ce qui est fort différent de l'expression de t qui résulte de la formule de M. Euler. Il est vrai que l'équation, peu exacte en elle même, d d e=1/2 F d t2, dont M. Euler se sert, n'influe point sur le reste de sa piece, parce qu'il corrige cette erreur par une autre, en substituant dans la suite de la piece, à la place de [omission: formula; to see, consult fac-similé version], la quantité [omission: formula; to see, consult fac-similé version], a étant le rayon de l'orbite, S2 l'anomalie, & *Q le soleil; au lieu qu'en nous servant de la formule d d e=F d t2, nous eussions substitué cette quantité [omission: formula; to see, consult fac-similé version], non à la place de [omission: formula; to see, consult fac-similé version], mais à la place de d t2; en sorte que dans les deux cas le résultat auroit été le même, savoir [omission: formula; to see, consult fac-similé version]. En effet [omission: formula; to see, consult fac-similé version] étant ici la force centripete, & a d S2 l'arc parcouru pendant le tems d t, on a [omission: formula; to see, consult fac-similé version] (voyez l'article Force, pages 118 & 119.): donc, puisque [omission: formula; to see, consult fac-similé version], on aura [omission: formula; to see, consult fac-similé version]. Nous supposons qu'on ait ici sous les yeux la piece de M. Euler imprimée à Paris en 1749.

III. Maniere de trouver la gravitation d'un corps vers un autre. Newton dans le livre I. de ses principes, a donné pour cela une méthode qui a été commentée & étendue depuis par différens auteurs. Voyez les memoires de l'acad. 1732. le commentaire des PP. le Seur & Jaquier; les mémoires de Petersbourg, &c. Cette méthode a principalement pour objet l'attraction que les corps spheriques, elliptiques & cylindriques, ou regardés comme tels, exercent sur un point donné. Nous avons donné les premiers la methode de trouver l'attraction qu'un solide peu différent d'une sphere, elliptique ou non, sphéroide ou non, exerce sur un point placé, soit au - dedans, soit au - dehors de lui. Voyez la seconde & la troisieme partie de nos recherches sur le système général du monde, Paris 1754 & 1756; voyez aussi l'article Figure de la Terre . De plus une remarque singuliere que nous avons faite à ce sujet, & que nous croyons nouvelle, c'est que quand un corpuscule est au - dehors d'une surface spherique & très - près de cette surface, l'attraction que cette surface exerce sur ce corpuscule, est à - peu - près double de celle qu'elle exerce, si le corpuscule est placé sur la surface même. On peut voir dans la III. partie de nos recherches sur le système du monde, 1756, pp. 198 & 199. la preuve & le dénouement de cette espece de paradoxe. Mais pour faire sentir aux commençans comment le calcul donne ce paradoxe, représentons - nous la differentielle [omission: formula; to see, consult fac-similé version] de l'attraction d'une surface sphérique, r étant le rayon, 2 P le rapport de la circonférence au rayon, n la distance du corpuscule à la surface sphérique, & x une abscisse quelconque; nous trouverons aisément par les méthodes connues que l'intégrale de cette différentielle est [omission: formula; to see, consult fac-similé version] Voyez Intégral, [p. 873] Transformation, & la II. partie de mes recherches sur le système du monde, page 284. Or, soit que n soit =0, ou non, la seconde partie de cette intégrale, savoir [omission: formula; to see, consult fac-similé version] devient [omission: formula; to see, consult fac-similé version], quand x = 2r. A l'égard de la premiere partie, elle est évidemment toûjours nulle, quand n=0, puisque n en multiplie tous les termes; mais quand n n'est pas=0, elle devient, lorsque x = 2r, [omission: formula; to see, consult fac-similé version], comme la précédente à laquelle elle s'ajoûte pour lors. Ainsi quand n=0, l'attraction n'est que [omission: formula; to see, consult fac-similé version]; & quand n n'est pas zéro, elle est [omission: formula; to see, consult fac-similé version]. Voilà la raison analytique du paradoxe.

IV. Usage du système de la gravitation pour trouver les masses des planetes. Soient deux planetes, dont les masses soient M, m, qui ayent des satellites qui tournent autour d'elles à la distance A, a, & qui fassent leurs révolutions dans les tems T, t, les forces centripetes de ces satellites seront [omission: formula; to see, consult fac-similé version], puisque la gravitation est en raison directe de la masse du corps attirant, & inverse du quarré de la distance: de plus ces forces centripetes seront égales aux forces centrifuges; & en considérant les orbites des satellites comme des cercles, les forces centrifuges seront entr'elles comme [omission: formula; to see, consult fac-similé version] Voyez Force centrale au mot Central. Donc on aura [omission: formula; to see, consult fac-similé version]. Donc si on connoît le rapport de A avec a & celui de T avec t, on connoîtra le rapport de M à m. Par - là on peut connoître le rapport de la masse du Soleil, de Jupiter & de Saturne, à celle de la Terre; car toutes ces planetes (en y comprenant le Soleil) ont des satellites, dont on connoit le rapport des distances à leurs planetes principales, & les tems des révolutions. V. Planlte. (O)

GRAVITÉ (Page 7:873)

GRAVITÉ, s. f. (Phys. & Méchaniq.) on appelle ainsi parmi les Physiciens la force que le vulgaire appelle pesanteur, & en vertu de laquelle les corps tendent vers la terre.

Il y a cette différence entre pesanteur & gravité, 1°. que gravité ne se dit jamais que de la force ou cause générale qui fait descendre les corps, & que pesanteur se dit quelquefois de l'effet de cette force dans un corps particulier; ainsi on dit la foice de la gravité pousse les corps vers la terre, & la pesanteur du plomb est plus grande que celle du cuivre. 2°. Que pesanteur ne se dit jamais que de la force particuliere qui fait tomber les corps terrestres vers la terre, & que gravité se dit aussi quelquefois dans le système Newtonien, de la force par laquelle un corps quelconque tend vers un autre. Car le principe général de ce système, est que la gravité est une propriété universelle de la matiere. Voyez Gravitation. Mais avant que d'en détailier les preuves, disons un mot des systèmes imaginés par les autres philosophes, pour rendre raison de la gravité.

Le vulgaire est d'abord étonné qu'on cherche une cause à ce phénomene; il lui paroît tout naturel qu'un corps tombe, dès qu'il n'est pas soûtenu; sur quoi nous renvoyons le lecteur à l'article Force d'inertie, p. 112. col. j. Nous renvoyons aussi aux mots Accélération & Descente sur les explications que les Péripatéticiens, les Epicuriens, & les Gassendistes donnent de la gravité, & qui ne méritent pas un plus long détail. Mais l'explication de Descartes est trop ingénieuse & trop séduisante au premier coup - d'oeil, pour ne pas nous y arrêter.

La matiere subtile, dit ce philosophe, se meut en tourbillon autour de la terre; en vertu de ce mouvement elle a une force centrisuge, voyez Force & Centrifuge; en vertu de cette sorce, toutes les parties de cette matiere tendent à s'éloigner de la terre; elles doivent donc pousser les corps vers la terre, c'est - à - dire dans un sens contraire à la direction de leur force centrifuge: car par la même raison qu'un fluide qui pese de haut en bas, tend à pousser de bas en - haut les corps qu'on y plonge, & les y pousse en effet, s'ils tendent de haut en - bas avec moins de force que lui; par cette même raison la matiere du tourbillon ayant une force centrifuge, doit pousser vers la terre les corps qu'on place dans ce tourbillon, & qui n'ont point une pareille force. Voyez Fluide & Hydrodynamique. Ainsi la pesanteur du corps L place dans la pyramide AEB (fig. 8. Méch.), est égale à la force centrifuge de la matiere du tourbillon dont il occupe la place, multipliee par la masse de cette matiere, moins la force centrifuge du corps L, s'il en a, multipliée par la masse L.

En supposant l'existence des tourbillons que nous croyons insoûtenable, & que presque personne n'admet plus aujourd'hui, voyez Tourbillon, il suit de cette explication qu'il faut, ou que la force centrifuge de la matiere du tourbillon soit beaucoup plus grande que celle du corps L, ou que la matiere subtile soit beaucoup plus dense que ce corps. Or la force centrifuge du corps L vient de sa vîtesse de rotation autour de la terre; vîtesse qui est à - peu - près égale à celle des points de la surface terrestre. Donc il faudroit dans le premier cas que la matiere du tourbillon eût beaucoup plus de vîtesse de rotation que la terre; or cela posé, on sentiroit une espece de vent continuel dans le sens de la rotation de la terre, c'est - à - dire d'occident en orient. Dans le second cas, si la matiere du tourbillon a beaucoup plus de densité que les corps terrestres, on devroit sentir dans les mouvemens de bas en - haut & de haut enbas la résistance de cette matiere; or on sait que cette résistance est insensible, que l'air seul est la source de celle qu'on éprouve, & qu'il n'y en a point dans la machine du vuide, où tous les corps tombent également vîte. Ce n'est pas tout; supposant, comme on le dit, la force centrifuge de la matiere du tourbillon beaucoup plus grande que celle du corps L, le corps L devroit toûjours avoir une pesanteur sensiblement égale, pourvû qu'il conservât le même volume; car la force centrifuge qui agiroit sur ce corps, seroit alors la même. Or cela est contraire à l'expérience: car un pié cube d'or pese plus qu'un pié cube de liége. De plus & par la même raison, les corps devroient descendre d'autant plus vîte, abstraction faite de la résistance de l'air, qu'ils auroient moins de masse sous un même volume; car la force qui les presse étant la même, elle devroit y produire des vîtesses en raison inverse des masses. Or c'est ce que l'expérience dément encore; car l'expérience prouve que tous les corps descendent également vîte dans le vuide; d'où il résulte que la gravité agit en raison de la masse, & non du volume du corps.

Une autre objection contre les Cartésiens, c'est que les corps devroient descendre vers l'axe de la terre, & non vers le centre; de sorte que sous les paralleles à l'équateur ils devroient tomber par des lignes obliques, & non par des lignes à - plomb. Les Cartésiens, il est vrai, ont imaginé différens moyens de répondre à ces difficu tés; mais tous ces moyens sont autant de paralogismes. Je me flate de l'avoir démontré dans mon traité des fluides, art. 409. M. Huyghens a cherché à corriger sur ce point le système de Descartes; mais la correction est pire que le

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