ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"808"> les mois qui leur sont affectés. Voyez Université fameuse.

Les degrés obtenus dans des universités étrangeres, ne sont pas considérés à l'effet d'obtenir des bénéfices; il faut néanmoins excepter l'université d'Avignon, qui joüit à cet égard des mêmes priviléges que les universités du royaume.

On comprend aussi quelquefois sous le nom de gradués, tous ceux qui ont obtenu des degrés, quoiqu'ils ne les ayent pas fait signifier à des patrons ou collateurs.

Les gradués qui ont fait signifier leurs grades peuvent requérir & recevoir des bénéfices; ceux qui ne les ont pas fait signifier ne peuvent pas requérir, mais seulement recevoir certains bénéfices qui ne peuvent être possédés que par des gradués.

On distingue trois sortes de gradués: savoir ceux qui ont été reçûs dans les formes prescrites par les statuts & reglemens autorisés par les lois; les gradués de grace qui ont la capacité requise, mais qui ont été dispensés du tems d'étude & de quelques exercices ordinaires pour y parvenir; enfin, les gradués de privilége. On appelle ainsi ceux qui en Italie, & dans quelques autres pays catholiques, ont obtenu du pape ou de ses légats & autres personnes qui prétendent en avoirle pouvoir, des lettres à l'effet d'être dispensés des examens & autres exercices.

Les degrés de grace de docteurs ou de licentiés suffisent aux personnes que le Roi nomme aux archevêchés ou évêchés, lorsque les universités les ont donnés sur des dispenses accordées ou autorisées par le Roi; mais les universités n'ont pas le pouvoir d'en donner de leur autorité privée.

Les gradués de grace, tels que sont ceux qui prennent des degrés en droit par bénéfice d'âge, & ceux qui obtiennent des degrés dans certaines universités où l'on a la facilité de les accorder, sans exiger le tems d'étude nécessaire, ne peuvent en vertu de leurs grades requérir des bénéfices.

Les gradués de privilége ne sont point reconnus en France.

L'origine du droit des gradués sur les bénéfices est fort ancienne: en effet, dès le xiij. siecle les papes conféroient les bénéfices aux gradués, suivant le rôle qui leur en étoit envoyé par les universités; mais les gradués n'avoient pas encore un droit certain aux bénéfices.

Les gradués étant fort négligés par les collateurs & par les patrons, il en fut fait de grandes plaîntes au concile de Bâle, qui leur affecta la troisieme partie des bénéfices, ce qui fut aussi - tôt confirmé en France par la pragmatique - sanction du roi Charles VII. & depuis par le concordat fait entre Léon X. & le roi François I.

Mais comme il n'étoit pas facile de partager tous les bénéfices du royaume en trois parties égales, le même concordat ordonna que l'année seroit divisée en trois parties, & que les bénéfices qui vaqueroient par mort durant le tiers de l'année, seroient affectés aux gradués.

Ce tiers étant de quatre mois: on en a affecté deux aux gradués simples; savoir Avril & Octobre, qu'on nomme mois de faveur; & deux aux gradués nommés, qui sont Janvier & Juillet, qu'on appelle mois de rigueur.

Tous gradués soit simples ou nommés, sont sujets à l'examen de l'ordinaire avant d'obtenir le visa, & ce non - seulement pour les moeurs, mais aussi pour la capacité.

On entend par gradués simples, ceux qui n'ont que les lettres de leurs degrés avec leurs attestations de tems d'étude; les gradués nommés sont ceux qui ont en outre des lettres de nomination, par lesquelles l'université en laquelle ils sont gradués, les présente aux collateurs & patrons ecclésiastiques pour être pourvûs des bénéfices qui viendront à vaquer dans les mois qui leur sont affectés.

Il y a néanmoins une exception pour les bénéfices à charge d'ames, à l'égard desquels il est permis au collateur par les derniers reglemens de gratifier le plus capable, quoique le bénéfice ait vaqué dans un mois de rigueur.

Tous collateurs & patrons ecclésiastiques, soit séculiers ou réguliers, sont sujets à l'expectative des gradués; les chanoines, chapitres, doyens, abbés, abbêsses, évêques, archevêques, cardinaux.

Le pape même seroit sujet au droit des gradués, s'il conferoit comme ordinaire de France; mais il n'y est pas sujet quand il confere comme ordinaire des ordinaires, jure devolutionis.

Les bénéfices sujets aux gradués sont tous les bénéfices dont ils sont capables, & qui vaquent par mort dans les mois qui leur sont affectés, à l'exception des bénéfices consistoriaux, des électifs - confirmatifs, & de ceux qui sont à la nomination ou collation du Roi.

Ceux dont la nomination appartient alternativement au Roi & à un patron ou collateur ecclesiastique, sont sujets aux gradués dans le tour du patron ou collateur ecclésiastique.

Les dignités des églises cathédrales sont exemptes de l'expectative des gradués, suivant l'édit de 1006; mais il n'a pas été enregistré au grand conseil, ni dans quelques parlemens.

Les bénéfices en patronage laïc, ceux qui exigent quelques qualités particulieres, comme de noble ou de musicien; les bénéfices unis valablement, & ceux fondés depuis la date de la nomination des gradués, ne sont pas non plus sujets à leur droit, ni les chapelles desservies par commission dans des châteaux & maisons particulieres, ces chapelles n'étant pas des bénéfices.

L'affectation particuliere d'un certain nombre de bénéfices d'une église faite à des gradués par le titre d'érection d'une église, n'empêcheroit pas les gradués de requérir les autres bénéfices dans les mois qui leur sont affectés.

Les gradués ne peuvent pas requérir des bénéfices en Bretagne ni en Franche - Comté, dans les troisévêchés de Metz, Toul, & Verdun, ni dans le Roussillon.

Le concordat donne aux gradués le decret irritant, c'est - à - dire que toute disposition qui seroit faite au préjudice de leur requisition, seroit nulle de plein droit; mais si le collateur ordinaire avoit conféré à un non - gradué un bénéfice sujet aux gradués, & qui auroit vaqué dans un des mois qui leur sont affectés, la provision ne seroit pas nulle de plein droit; elle subsisteroit, pourvû qu'aucun gradué ne vînt après requérir dans les six mois.

Suivant le concordat, les gradués doivent s'adresser dans les six mois de la vacance du bénéfice au collateur ordinaire & patron, pour requérir le bénéfice vacant; en cas de refus du collateur ou patron, ils doivent s'adresser au supérieur immédiat, en remontant de degré en degré jusqu'au pape; & si le collateur n'a point de supérieur ecclésiastique dans le royaume, les parlemens commettent le chancelier de Notre - Dame ou le grand archidiacre de la même église, pour donner des provisions. En Normandie, les gradués obtiennent des lettres de chancellerie adressées aux évêques ou à leurs grands - vicaires, qui leur ordonnent de conférer aux gradués, & les collateurs obéissent à cet ordre.

Lorsqu'un bénéfice sujet aux gradués vient à vaquer, le gradué qui veut le requérir doit se transporter chez le collateur, lui demander le bénéfice; si le collateur le lui refuse, il faut prendre acte du refus, le faire insinuer, & se présenter au supérieur immé<pb-> [p. 809] diat, lui justifier de l'acte de resus, & des titres en vertu desquels le gradué requiert, & en cas de nouveau refus, il faut faire la même chose auprès du supérieur.

Le collateur supérieur ne peut pas conférer d'avance, mais seulement en cas de refus de la part du collateur ordinaire.

Le tems d'étude nécessaire pour acquérir les degrés à l'effet de pouvoir requerir des bénéfices, est reglé par l'ordonnance de Louis XII. du mois de Mars 1498, & du mois de Juin 1510, auxquelles le concordat est aussi conforme en ce point; ce tems est de dix ans pour les licentiés ou bacheliers formés en Théologie; sept ans pour les docteurs ou licentiés en Droit canon, civil, ou en Medecine; pour les maîtres ou licentiés - ès - Arts cinq ans à logicalibus inclusivè, ou en autre plus haute & supérieure faculté; pour les bacheliers simples en Théologie six ans; pour les bacheliers en Droit canon ou civil, cinq ans, à - moins qu'ils ne fussent nobles ex utroque parente, & d'ancienne lignée; auquel cas il suffit qu'ils ayent étudié trois ans.

L'université de Paris est dans l'usage de recevoir maîtres - és - Arts ceux qui ont fait leur cours dans les universités de Reims & de Caen, & qui ont étudié un an dans l'université de Paris.

Le certificat de tems d'étude doit être signé du professeur, & visé du principal où l'on a etudié.

Les lettres de degré doivent aussi être délivrées par les universités ou l'on a étudié.

Pour obtenir des bénéfices en vertu de ses grades, il faut notifier aux collateurs ou patrons ses degrés, ses lettres de nomination, si on en a, & le certificat de tems d'étude.

Cette notification doit être faite en présence de deux notaires apostoliques, ou d'un notaire apostolique & de deux témoins qui signent la minute de la notification; en cas de refus du notaire apostolique, il faut lui demander acte de son refus; s'il ne veut pas le donner, il faut s'adresser au juge royal, pour en obtenir une ordonnance qui autorise un autre officier à instrumenter au lieu & place du notaire apostolique.

Les mêmes formalités doivent être observees dans la notification que les gradués sont obligés de réitérer tous les ans dans le tems de carême, de leurs noms & surnoms aux collateurs ou patrons ecclésiastiques.

Le concordat veut que ces notifications soient faites à la personne du collateur ou à son domicile; cependant il y a des diocèses où ces actes se signifient à l'évêque, en parlant à son secrétaire: le greffier du chapitre, ou la premiere dignité dans les lieux où cet usage est établi, reçoivent aussi les actes de notification comme feroit le chapitre même.

A l'égard de la rémotion qui se fait tous les ans en l'absence des collateurs, elle peut être faite à leurs vicaires, & au défaut des vicaires au greffe des insinuations.

Le gradué qui a fait notifier ou insinuer ses degrés au collateur avant la vacance du bénéfice, est préféré à celui qui n'a notifié les siens que dans le tems de la vacance; mais celui - ci l'emporte sur un pourvû per obitum, postérieurement à la requisition.

Quand la nomination du gradué n'est adressée qu'au patron, il suffit de la notifier au patron; mais si elle est aussi adressée au collateur, il faut la notifier à l'un & à l'autre.

Un gradué qui omet en un carême de réitérer la notification de ses noms & surnoms, n'est pas pour toûjours déchu de son droit, mais seulement pour cette année.

Quand un bénéfice vaque dans un des deux mois de faveur, le collateur ou patron n'est pas obligé de le conférer au plus ancien gradué ni au plus qualifié; il peut choisir entre tous les gradués soit simples ou nommés qui ont requis, celui qu'il juge à - propos.

Ainsi les gradués nommés peuvent requerir les bénéfices qui vaquent dans les mois de faveur; mais les gradués simples ne peuvent pas requérir ceux qui vaquent dans les mois de faveur.

Dans les mois de rigueur le collateur ou patron est oblige de conférer aux gradués nommés, eu égard à l'ancienneté & à la prérogative de leurs grades.

L'ancienneté se détermine par la date des lettres de nomination.

Entre plusieurs gradués nommés, qui sont également anciens, on préfere le plus qualiné: ainsi les docteurs, licentiés, ou bacheliers formés en Théologie, sont préférés aux docteurs en Droit civil, en Droit canon, ou en Medecine; les bacheliers en Droit canon ou en Droit civil, aux maîtres - ès - Arts; les docteurs en Droit canon, aux docteurs en Droit civil, & aux docteurs en Medecine; les bacheliers en Droit canon, aux bacheliers en Droit civil: mais cela n'a lieu qu'en concurrence de date.

On ne peut tirer aucune préférence de ce qu'un gradué a été nommé par une université plus fameuse qu'une autre, pourvû que celle - ci soit aussi du nombre des universités fameuses.

Si plusieurs gradués ont des lettres de nomination du même jour, on préfere celui qui a obtenu le premier ses degrés.

Lorsque toutes choses se trouvent égales, le collateur ou patron a la liberté de nommer celui qu'il juge à - propos.

Les gradués nommés sont obligés d'exprimer dans leurs lettres les bénéfices dont ils sont pourvûs, & la véritable vaieur de ces bénéfices, année commune.

Les gradués doivent aussi faire mention des pensions qu'ils se sont reservées en résignant.

Ce n'est pas assez pour requérir un bénéfice en vertu de ses grades, d'avoir fait insinuer dûement ses degrés, il faut aussi avoir l'âge & les autres qualités requises pour le bénéfice, soit par la loi, soit par la fondation.

Il faut aussi être françois, ou du moins être naturalisé; mais il suffit que ces lettres soient enregistrées avant le jugement du procès.

Pour requérir des bénéfices en vertu de ses grades, il faut être du - moins tonsuré.

Il faut aussi être né d'un mariage légitime.

Il est pareillement nécessaire d'être capable des effets civils.

Un gradué qui est in reatu, ne peut requérir de bénéfice.

Pour qu'un gradué soit censé rempli, il faut qu'il ait du - moins quatre cents livres de revenu en bénéfices obtenus en vertu de ses grades, ou six cents livres en bénéfices obtenus autrement qu'en vertu de ses grades, si c'est un ecclésiastique séculier; car s'il est régulier, le plus petit bénéfice suffit pour qu'il soit cense rempli; le tout à - moins que les gradués ne prouvent qu'ils ont été évincés de ces bénéfices par jugement contradictoire donné sans fraude ni collusion.

Lorsqu'il s'agit de déterminer s'il y a replétion, on considere la valeur des bénéfices du gradué, eu égard au tems qu'ils lui sont advenus.

Les rétributions & même les distributions journalieres & les obits de fondation, sont comptés dans le revenu pour la replétion.

La somme de quatre cents ou de six cents livres nécessaire pour remplir le gradué, s'entend, toute déduction faite, des charges ordinaires, telles que les décimes, mais non pas des charges extraordinaires & casuelles, au nombre desquelles on met le don gratuit.

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