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La généralisation consiste donc dans l'établissement de certains phénomenes étendus, qui se tirent du caractere commun & distinctif de tous les rapports apperçûs entre les faits de la même espece.
On envisage sur - tout les rapports les plus féconds, les plus lumineux, les mieux décidés, ceux, en un mot, dont la nature nous présente le plus souvent les termes de comparaison: tels sont les objets de la généralisation. Par rapport à ses procédés, elle les dirige sur la marche de la nature elle - même, qui est toûjours tracée par une progression non interrompue de faits & d'observations, rédigés dans un ordre dépendant des combinaisons déjà apperçûes & déterminées. Ainsi les faits se trouvent (par les précautions indiquées dans les deux articles précédens) disposés dans certaines classes générales, avec ce caractere qui les unit, qui leur sert de lien commun; caractere qu'on a saisi en détail, & qu'on contemple pour - lors d'une seule vûe; caractere enfin qui rend palpable l'ensemble des faits, de maniere que le plan de leur explication s'annonce par ces dispositions naturelles. Dans ce point de vûe l'observateur joüit de toutes ses recherches; il apperçoit avec satisfaction ce concert admirable, cette union, ce plan naturel, cet enchaînement méthodique qui semble multiplier un phénomene, par sa correspondance avec ceux qui se trouvent dans des circonstances semblables.
De cette généralisation on tire avec avantage des principes constans, qu'on peut regarder comme le suc extrait d'un riche fonds d'observations qui leur tiennent lieu de preuves & de raisonnemens. On part de ces principes, comme d'un point lumineux, pour éclaircir de nouveau certains sujets par l'ana logie; & en conséquence de la régularité des opérations de la nature, on en voit naître de nouveaux faits qui se rangent eux - mêmes en ordre de système. Ces principes sont pour nous les lois de la nature, sous l'empire desquelles nous soûmettons tous les phénomenes subalternes; étant comme le mot de l'énigme, ils offrent dans une précision lumineuse plus de jeu & de facilité à l'esprit observateur, pour étendre ses connoissances. Enfin ils ont cet avantage très - important, de nous détromper sur une infinité de faits défigurés ou absolument faux; ces faits disparoîtront ou se rectifieront à leur lumiere, comme il est facile de suppléer une faute d'impression, lorsqu'on a le sens de la chose.
Mais pour établir ces principes généraux, qui ne sont proprement que des effets généraux apperçûs régulierement dans la discussion des faits combinés, il est nécessaire que la généralisation ait été severe & exacte; qu'elle ait eu pour fondement une suite nombreuse & variée de faits liés étroitement, & continuée sans interruption. Sans cette précaution, aulieu de principes formés sur des faits & des réalités, vous aurez des abstractions générales d'où vous ne pourrez tirer aucun fait qui se retrouve dans la na<cb->
Si l'induction par laquelle vous avez généralisé, n'a pas été éclairée par un grand nombre d'observations, le résultat général aura trop d'étendue: il ne comprendra pas tous les faits qu'on voudra lui soûmettre; & cet inconvénient a pour principe cette précipitation blâmable qui, au lieu de craindre des exceptions où les faits manquent, & où leur lumiere nous abandonne, se laisse entraîner sur les simples soupçons gratuits d'une régularité constante.
On voit aisément que cette méprise n'a lieu que parce que dans la discussion des faits on n'a pas distingué l'essentiel de l'accessoire, & que dans l'énumération & la combinaison des phénomenes on a formé l'enchaînement sans y comprendre les exceptions; il falloit en tenir un compte aussi exact, que des convenances qui ont servi aux analogies.
D'un autre côte je remarque que les observations vagues & indéterminées ne peuvent servir à l'établissement d'aucun principe. Toutes nos recherches doivent avoir pour but de vérifier, d'apprécier tous les faits, & de donner sur - tout une forme de précision aux résultats: sans cette attention, point de connoissance certaine, point de généralisation, point de résultats généraux.
Les principes ont souvent trop d'étendue, parce qu'ils ont été rédigés sur des vûes ambitieuses, dictées par une hypothèse favorite; car alors dans tout le cours de ses observations on a éludé par dissimulation ou par des distinctions subtiles, les exceptions fréquentes: on les a négligées comme inutiles, & l'on a toûjours poursuivi, au milieu de ces obstacles, la généralisation des résultats. Si dans la suite on trouve des faits contraires, on les ajuste comme s'ils étoient obligés de se prêter à une regle trop générale.
D'autres résultats se présentent souvent avec une infinité de modifications & de restrictions, qui font craindre qu'ils ne soient encore subordonnés à d'autres. Cette timidité avec laquelle on est obligé de mettre au jour ses principes, vient d'un défaut d'observations; il n'y a d'autre parti à prendre pour leur assûrer cette solidité, cette étendue, cette précision qu'ils méritent peut - être d'acquérir, que de consulter la nature: sans cela, les principes dont la généralisation n'est pas pleine & entiere, dont l'application n'est pas fixe & déterminée, seront continuellement une source de méprises & d'illusions.
Ce n'est qu'en s'appuyant sur des faits discutés avec soin, liés avec sagacité, généralisés avec discernement, que l'on peut se flater de transmettre à la postérité des vérités solides, des résultats généraux & incontestables, enfin des principes féconds & lumineux.
II. Lorsqu'on jette un premier coup - d'oeil sur notre globe, la division la plus générale qui se présente, est celle par laquelle on le conçoit partagé en grands continens & en mers. Comme dans la partie couverte d'eau on rencontre plusieurs pointes de terre qui s'élevent au - dessus des flots, & qu'on appelle îles, de même on remarque, en parcourant les continens, des espaces couverts d'eau; si elle y séjourne, ce sont des lacs; si elle y circule, ce sont des fleuves ou des rivieres.
Les deux portions générales de terres fermes & de mers s'étendent réciproquement l'une dans l'autre, & en différens sens. Dans les diverses configurations [p. 619]
Une lame de terre resserrée entre deux mers, se nomme isthme. Les isthmes réunissent de grandes portions de continens à d'autres, & des presqu'îles aux continens.
Je reprends ces idées, & j'oppose les continens aux mers, les îles aux lacs, les golfes aux presqu'îles, & les détroits aux isthmes. Ce sont des configurations correspondantes & opposées, qu'il est bon de saisir sous ce point de vûe d'opposition.
Dans la discussion des affections générales du globe, que nous venons de disséquer en indiquant la nomenclature de ses différentes configurations, il est nécessaire de suivre quelque plan.
1°. Nous présenterons d'abord les résultats généraux des observations qui ont un rapport direct avec l'organisation constante & réguliere du globe, & nous envisagerons cet objet sous deux points de vûe différens; l'organisation extérieure, & l'organisation intérieure.
2°. Nous nous occuperons des phénomenes généraux qui paroissent indiquer une altération dans cette organisation constante.
3°. Enfin les affections relatives de la terre, dépendantes de l'atmosphere & des différens aspects du globe par rapport au Soleil & à la Lune, feront la matiere de la troisieme section.
Affections générales de l'organisation extérieure du globe. La terre ferme comprend quatre grands continens: 1° l'ancien: 2° le nouveau: 3° les terres australes connues ou soupçonnées: 4° les terres arctiques, dont la séparation d'avec l'Amérique n'est pas encore bien déterminée; la configuration des terres australes est encore moins connue. Nous nous bornerons donc à raisonner sur l'ancien & le nouveau continent.
En considérant avec attention l'ancien continent & le nouveau, on observe que l'ancien est plus étendu vers le nord que vers le sud de l'équateur, & qu'au contraire le nouveau l'est plus au sud qu'au nord de l'équateur. On voit aussi que le centre de l'ancien continent se trouve à 16 ou 18 degrés de latitude nord, & celui du nouveau à 16 ou 18 degrés de latitude sud. Ce centre est déterminé par l'intersection des lignes menées sur les plus grandes longueurs & largeurs des continens.
Ils ont encore cela de remarquable, qu'ils paroissent comme partagés en deux parties qui seroient toutes quatre environnées d'eau, & formeroient des continens à part, sans deux petits isthmes ou étranglemens de terre; celui de Suez & celui de Panama. Le premier est produit en partie par la mer Rouge, qui femble l'appendice & le prolongement d'une grande anse avancée dans les terres de l'est à l'oüest, & en partie par la Méditerranée. L'autre est de même produit par le golfe du Mexique, qui présente une large ouverture de l'est à l'oüest.
Bacon observe que ce n'est pas sans quelque raison que les deux continens s'élargissent beaucoup vers le nord, se rettécissent vers le milieu, & alongent une pointe assez aiguë vers le midi. On peut même ajoûter que les pointes de toutes les grandes presqu'îles formées par les avances des continens, regardent le midi; que quelques - unes même sont coupées par des détroits dont le canal est dirigé de l'est à l'oüest.
Si nous voyageons maintenant sur la partie seche du globe, nous y remarquerons d'abord différentes inégalités à sa surface, de longues chaînes de montagnes, des collines, des vallons, des plaines. Nous appercevrons que les diverses portions des continens affectent des pentes assez régulieres depuis leur centre, ou depuis les sommets élevés des chaînes qui les traversent, jusque sur les côtes de la mer, ou le terrein s'abaisse sous l'eau pour former la profondeur de son bassin: réciproquement, en remontant des rivages de la mer vers le centre des continens, nous trouvons que le terrein s'éleve jusqu'à certains points qui dominent de tous côtés sur les terres qui les environnent.
Osons sonder la profondeur des mers, nous trouverons qu'elle augmente à - mesure que nous nous éloignons davantage des côtes, & qu'elle diminue au contraire à - mesure que nous nous en approchons davantage; ensorte que le fond de la mer gagne par une élevation insensible les terres qui s'élevent au - dessus des flots. Dans le même examen nous découvrons que la vaste étendue du bassin de la mer nous offre des inégalités correspondantes à celles des continens; il a ses vallées & ses montagnes: les roches à fleur d'eau, les îles, ne sont que les sommets les plus élevés des chaînes montueuses qui sillonnent par diverses ramifications la partie du globe que la mer recouvre.
Je remarque que les eaux de la mer, en se répandant dans de grandes vallées où le terrein est assujetti à des pentes plus rapides, ont formé les goifes, les mers Méditerranées; & que réciproquement les terres éprouvant une irrégularité dans leur abaissement vers les côtes de la mer, & se prêtant moins à la courbure des terreins qui se plongent sous les flots, s'avancent au milieu des eaux, & forment des caps, des promontoires, des presqu'îles.
Entrons maintenant dans un plus grand détail, & examinons de plus près chaque objet dont les différentes particularités nous échappoient dans le lointain où ils ont été présentés.
Nous reconnoissons d'abord que toutes les montagnes
forment différentes chaînes principales qui se
lient, s'unissent, & embrassent tant par leurs troncs
principaux que par leurs ramifications collatérales
la surface des continens. Les montagnes, qui sont
proprement les tiges principales, présentent des
masses très - considérables & par leur hauteur & par
leur volume; elles occupent & traversent ordinairement
le centre des continens: celles de moindre
hauteur naissent de ces chaînes principales; elles diminuent
insensiblement à - mesure qu'elles s'éloignent
de leur tige, & vont mourir ou sur les côtes de la
mer, ou dans les plaines: d'autres se soûtiennent en<pb->
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