ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"496"> dont en son absence & pendant les guerres civiles, ses amis se servirent pour sceller en son nom des lettres & des édits; mais ce qui fut pratiqué dans ce cas de nécessité ne formoit pas un usage ordinaire, & les empereurs ne se servoient communément de leur cachet que pour clorre leurs lettres particulieres, & non pour leurs édits & autres lettres qui devoient être publiques.

Justinien ordonna seulement par sa novelle 104, que tous les rescrits signés de l'empereur seroient aussi souscrits ou contre - signés par son questeur, auquel répond en France l'office de chancelier.

En France au contraire, dès le commencement de la monarchie, nos rois au lieu de souscrire ou sceller leurs lettres, les scelloient ou faisoient sceller de leur sceau, soit parce que les clercs & les religieux étoient alors presque les seuls qui eussent l'usage de l'écriture, ou plutôt parce que les rois ne voulant pas alors s'assujettir à signer eux - mêmes toutes les lettres expédiées en leur nom, chargerent une personne de confiance de la garde de leur sceau, pour en apposer l'empreinte à ces lettres au lieu de leur signature.

Celui qui étoit dépositaire du sceau du roi, du tems de la premiere race, étoit appellé grand référendaire, parce qu'on lui faisoit le rapport de toutes les lettres qui devoïent être scellées; & comme sa principale fonction étoit de garder le scel royal qu'il portoit toujours sur lui, on le désignoit aussi souvent sous le titre de garde ou porteur du scel royal: gerulus annuli regalis, custos regii sigilli.

Le premier qui soit designé comme chargé du scel royal est Amalsindon, lequel se trouve avoir scellé du sceau de Thierri premier roi de Metz, la charte portant dotation du monastere de Flavigny, au diocèse d'Autun; sigillante, est - il dit, perillustri viro Amalsindone sigillo regio. Le titre de perillustris que l'on donne à cet officier, marque en quelle considération étoit dès - lors celui qui avoit la garde du sceau.

Gregoire de Tours, liv. V. ch. iij. fait mention de Siggo référendaire qui gardoit l'anneau de Sigebert premier, roi d'Austrasie, qui annulum Sigeberti tenuerat; & que Chilperic roi de Soissons, sollicita d'accepter auprès de lui le même emploi qu'il avoit eu près de son frere.

Sous Clotaire II. Ansbert archevêque de Rouen fut chargé de cette fonction, ainsi qu'il est dit en sa vie, écrite par Angrade ou Aigrade religieux bénédictin, qui fait mention que ce prélat étoit conditor regalium privilegiorum, & gerulus annuli regalis quo eadem signabantur privibegia.

Surius en la vie de S. Oüen, qui fut grand référendaire de Dagobert premier, & ensuite de Clovis II. son fils, dit qu'il gardoit le scel ou anneau du roi pour sceller toutes les lettres & édits qu'il rédigeoit par écrit: ad obsignanda scripta vel edicta regia quoe ab ipso conscribebantur, sigillum vel annulum regis custodiebat. Aimoin, liv. IV. ch. xlj. & le moine Sigebert en sa chronique de l'année 637, font aussi mention que S. Oüen avoit la garde de l'anneau ou scel royal dont il scelloit toutes les lettres du roi qui devoient être publiques.

On lit en la vie de S. Bonit évêque de Clermont en Auvergne, qu'étant aimé très - particulierement de Sigebert III. roi d'Austrasie, il fut pourvu de l'office de référendaire, en recevant de la main du roi son anneau, annulo ex manu regis accepto.

Du tems de Clotaire III. la même fonction étoit remplie par un nommé Robert: quidam illustris Robertus nomine, generosa ex stirpe proditus, gerulus fuerat annuli regii Clotarii; c'est ainsi que s'explique Aigrard qui a écrit la vie de Ste Angradisine sa fille.

Il paroît par ces différens exemples, que tous ceux qui remplissoient la fonction de référendaire sous la premiere race de nos rois, étoient tous en même tems chargés du scel ou anneau royal.

Il en fut de même sous la seconde race, des chanceliers qui succéderent aux grands - référendaires; quoiqu'on n'ait point trouvé qu'aucun d'eux prît le titre de garde du scel royal, il est néanmoins certain qu'ils étoient tous chargés de ce scel.

Sous la troisieme race de nos rois, la garde des sceaux du roi a aussi le plus souvent été jointe à l'office de chancelier, tellement que la promotion de plusieurs chanceliers des premiers siecles de cette race, n'est désignée qu'en disant qu'on leur remit le sceau ou les sceaux, quoiqu'ils fussent tout - à - la-fois chanceliers & gardes des sceaux.

On voit aussi dans les historiens de ce tems, qu'en parlant de plusieurs chanceliers qui se démirent volontairement de leurs fonctions, soit à cause de leur grand âge ou indisposition, ou qui furent destitués pour quelque disgrace, il est dit simplement qu'ils remirent les sceaux; ce qui dans cette occasion ne signifie pas simplement qu'ils quittoient la fonction de garde des sceaux, mais qu'ils se démettoient totalement de l'office de chancelier que l'on désignoit par la garde du sceau, comme en étant la principale fonction. Aussi voit - on que les successeurs de ceux qui avoient ainsi remis les sceaux, prenoient le titre de chanceliers, même du vivant de leur prédécesseur; comme le remarque M. Ribier conseiller d'état, dans un mémoire qui est inséré dans Joli, des off. tom. I. aux addit.

On ne parlera donc ici ni de ceux auxquels on donna les sceaux avec l'office de chancelier, ni de ceux qui les quitterent en cessant totalement d'être chanceliers; mais seulement de ceux qui sans être pourvus de l'office de chancelier, ont tenu les sceaux, soit avec le titre de garde des sceaux, ou autre titre équipollent.

Depuis la troisieme race, il y a eu plus de quarante gardes des sceaux; les uns pendant que l'office de chancelier étoit vacant, les autres dans le tems même que cet office étoit rempli, lorsque nos rois ont jugé à propos pour des raisons particulieres, de séparer la garde de leur sceau de la fonction de chancelier; on comprend dans cette seconde classe plusieurs chanceliers qui ont tenu les sceaux séparément, avant de parvenir à la dignité de chancelier.

On fera aussi mention des vices - chanceliers, attendu qu'ils ont fait la fonction de gardes des sceaux.

Les rois de la premiere & de la seconde race n'avoient qu'un seul sceau ou anneau, dont le chancelier ou le garde du scel royal étoit dépositaire. Pour le conserver avec plus de soin, & afin que personne ne pût s'en servir furtivement, il le portoit toujours pendu à son cou: cet usage avoit passé de France en Angleterre. En effet, Roger vice - chancelier de Richard I. roi d'Angleterre, ayant péri sur mer par une tempête, on reconnut son corps parce qu'il avoit le scel du roi suspendu à son cou.

Depuis que l'on se servit en France de sceaux plus grands, & que le nombre en fut augmenté, il ne fut pas possible au chancelier ou garde des sceaux de les porter à son cou; il n'en a plus porté que les clés qu'il a toûjours sur lui dans une bourse.

Anciennement le coffre des sceaux étoit couvert de velours azuré, semé de fleurs - de - lis d'or; & dans les cérémonies ce coffre étoit porté sur une hacquenée qu'un valet - de - pié conduisoit par la main: autour de cette hacquenée chevauchoient les héraux & poursuivans du roi, & autres seigneurs qui étoient présens; d'autres disent que c'étoient des archers, d'autres les appellent des chevaliers vêtus de livrée: cela se trouve ainsi rapporté par Alain Chartier, sous l'an 1449 & 1451, & par [p. 497] Monstrelet au troisieme volume, en parlant des entrées faites par le roi Charles VII. à Roüen & à Bordeaux.

On trouve ailleurs que quand le chancelier alloit en voyage, c'étoit le chausse - cire qui portoit le scel royal sur son dos, ainsi qu'il est dit dans un hommage rendu par Philippe archiduc d'Autriche, au roi Louis XII. le 5 Juillet 1499, pour les comtés de Flandre, Artois & Charolois.

Présentement le roi donne pour renfermer les sceaux un grand coffre couvert de vermeil, lequel est distribue en trois cases, contenant chacune une petite cassette fermante à clef.

La premiere qui est couverte de vermeil renferme le grand sceau de France & son contre - scel.

La seconde qui est couverte de velours rouge, parsemée de fleurs - de - lys & de dauphins de vermeil, contient le sceau particulier dont on use pour la province de Dauphiné, & son contre - scel.

La troisieme cassette contenoit le sceau & le contre - sceau de l'ordre de S. Louis, établi en 1693; mais présentement cette cassette est vuide, les sceaux de cet ordre ayant été donnés en 1719 au chancelier garde des sceaux créé pour cet ordre, par édit du mois d'Avril de la même année.

Comme il n'y a plus que les deux premieres cassettes qui servent, le garde des sceaux pour les transporter plus facilement, a fait faire un petit coffre de bois dans lequel ces deux cassettes sont renfermées; & lorsqu'il marche par la ville ou qu'il va en voyage, il fait toujours porter avec lui ce coffre dans son carrosse.

Ce fut vers le commencement de la troisieme race que le nombre des sceaux du roi fut multiplié, que le roi garda lui - même depuis ce tems son petit scel ou anneau, qu'on appelloit le petit signet du roi, dont il scelloit lui - même toutes les lettres particulieres qui devoient être closes; & au lieu de ce scel ou anneau, on donna au chancelier ou au garde des sceaux d'autres sceaux plus grands, pour sceller les lettres qui devoient être publiques, & que par cette raison l'on envoyoit ouvertes, ce que l'on a depuis appellé lettres - patentes.

Le premier exemple que j'aye trouvé de ces grands sceaux, est dans une charte du tems de Louis - le - Gros, datée de l'an 1106, pour l'égl se de S. Eloy de Paris; elle est scellée de deux grands sceaux appliqués sur le parchemin de la lettre: dans l'un le roi est assis sur son throne, dans l'autre il est à cheval, & à l'entour sont écrits ces mots, Philippus gratiâ Dei Francorum rex; ce qui prouve que ces sceaux étoient en usage dans le tems de Philippe I.

Depuis que l'on se servit ainsi de plusieurs sceaux, il étoit naturel que celui qui en étoit dépositaire fût appellé garde des sceaux; cependant on continua encore long - tems à l'appeller sitnplement garde du scel royal, comme si le scel du roi étoit unique; ce qui feroit croire que le second sceau dont on a parlé, représentant le roi à cheval, n'étoit autre chose que le revers du premier sceau: mais on n'étoit point encore dans l'usage d'appliquer ce second sceau par forme de contre - scel, c'est - à - dire, derriere le premier.

Le scel fabriqué du tems de Philippe I. étant beaucoup plus grand que le sceau ou anneau dont on s'étoit servi jusqu'alors, fut surnommé le grand scel, & celui qui en étoit chargé étoit quelquefois appellé le porteur du grand scel du roi.

Cette distinction du grand scel fut sans doute établie, tant à cause du cachet ou sceau privé du roi, qu'à cause du contre - scel ou scel secret, qui fut établi sous Louis VII. & qui étoit porté par le grand chambellan.

La chancellerie étoit vacante en 1128, suivant une charte de Louis - le - Gros pour S. Martin - des<cb-> Champs, à la fin de laquelle il est dit cancellario nullo; ce qui peut d'abord faire penser qu'il y avoit alors quelqu'un commis pour tenir le grand scel du roi, mais il n'en est point fait mention; & il est plûtôt à croire que pendant cette vacance le roi tenoit lui - même son sceau, comme plusieurs de nos rois l'ont pratiqué en pareille occasion. On trouve plusieurs chartes du douzieme siecle, que les rois faisoient sceller en leur présence, & à la fin desquelles il y a ces mots, data per manum regiam vacante cancellaria; ce qui fait de plus en plus sentir la dignité attachée à la fonction de garde des sceaux, puisque nos rois ne dédaignent point de tenir eux - mêmes le sceau en certaines occasions.

La chancellerie étoit dite vacante lorsqu'il n'y avoit ni chancelier ni garde des sceaux.

Hugues de Chamfleuri fut nommé chancelier de France en 1151, mais sa disgrace le fit destituer de cet office; de sorte que la chancellerie vaqua durant les années 1172, 1173, 1174, 1175, 1176 & 1177. Il paroît néanmoins que Hugues fut rétabli dans ses fonctions en 1175, qui est l'année de sa mort.

La chancellerie vaqua encore en 1179, comme il paroît par un titre du cartulaire de S. Victor.

Elle vaqua pareillement durant tout le regne de Philippe - Auguste, si l'on en excepte les années 1180 & 1185, où il est parlé de Hugues de Puiseaux en qualité de chancelier, l'année 1201, où Gui d'Athies vice - chancelier pendant la vacance de la chancellerie, fit la fonction de garde des sceaux, & les années 1203, 1204, 1205. & 1207, ou frere Guerin, chevalier de l'ordre de S. Jean de Jérusalem, sit la même fonction de garde des sceaux, vacante cancellariâ; il fut depuis élevé à la dignité de chancelier dont il releva beaucoup l'éclat.

Il paroît par une charte de l'année 1226, qui est la premiere du regne de S. Louis, que frere Guerin faisoit encore les fonctions de chancelier: mais depuis il n'y en eut point pendant tout le regne de S. Louis; il se contenta de commettre successivement différentes personnes à la garde du sceau.

Suivant une cédule de la chambre des comptes au mémorial A, qui est sans date; & une autre cédule au mémorial E, fol. 132. Philippe d'Antogny portoit le grand scel da roi S. Louis: il prenoit pour soi, ses chevaux & valets à cheval, sept sous parisis par jour pour l'avoine & pour toute autre chose, excepté son clerc, & son valet qui le servoit en lachambre, qui mangeoient à la cour; & leurs gages étoient doubles aux quatre fêtes annuelles.

La derniere des deux cédules dont on vient de parler, fait aussi mention de Philippe de Nogaret qui portoit le grand scel du roi.

Nicolas, doyen & archidiacre de Chartres, chapelain & conseiller du roi S. Louis, fut choisi en 1249 pour porter le sceau du roi dans le voyage de la Terre - Sainte; il mourut en Egypte après la prise de Damiete, en 1250.

Gilles, archevêque de Tyr en Phénicie, aussi conseiller du roi S. Louis, avoit la garde du sceau de ce prince en 1253, comme on l'apprend de l'histoire de Joinville, & de la vie de S. Louis écrite par Guillaume de Nangis.

Raoul de Pitis, doyen de S. Martin de Tours, fut fait garde des sceaux au retour de la Terre - Sainte, & évêque d'Evreux en 1256; il fut cardinal & légat, & moutut l'an 1270: il se trouve un titre pour l'abbaye de S. Remi de Reims, scellé par lui, où on lit ces mots: & has litteras dominus episcopus ebroicensis, tunc decanus turonensis, sigillavit.

Plusieurs titres de S. Denis & du prieuré de S. Sauveur - lez - Bray sur Seine, font mention que la chancellerie vaqua en 1255 & 1258.

Mais dans cette même année 1258, Raoul de

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