ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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Fusée (Page 7:391)

Fusée, (Horlogerie.) piece d'une montre; c'est cette partie conique sur laquelle s'enveloppe la chaîne, & qui sert à transmettre son action au roüage. Voyez nos Planches d'Horlogerie. [p. 392]

Son utilité est très - grande; car au moyen de sa figure elle remédie aux inégalités du ressort, qui étant plus bandé lorsque la montre est nouvellement montée, & moins lorsqu'elle est presque au bas, la feroit avancer dans le premier cas, & retarder dans le second. Les premiers horlogers qui firent des montres, tâcherent de remédier à cet inconvénient du ressort au moyen d'une machine qu'ils appelloient stochsred. Mais ses défauts les engagerent bien - tôt à la perfectionner, ou à y suppléer par une autre. Ainsi on l'abandonna dès qu'on eut inventé la fusée. Quelqu'ingénieuse que soit cette découverte, on n'en connoît point l'auteur; ce qu'il y a de sûr, c'est qu'elle est fort ancienne.

Pour bien concevoir de quelle maniere la fusée compense les inégalités du ressort, il faut faire attention que dans une montre au bas, la chaîne est entierement sur le barillet ou tambour, & que lorsqu'on la remonte, on ne fait autre chose que la faire passer sur la fusée. Mais par - là on fait la même chose que si l'on tiroit la chaîne jusqu'à ce qu'il n'y en ait plus sur le barillet. Or ce mouvement ne se peut faire sans qu'on fasse tourner le barillet, & cela précisément autant de fois que la chaîne feroit de tours dessus. De plus on a vû à l'art. Barillet, que par la disposition des pieces, en le tournant on bande le ressort. Il sera donc bandé d'autant de tours exactement que le barillet aura tourné de fois, ce qui sera de trois tours & demi, qui est la quantité des tours qu'une chaîne fait ordinairement autour du barillet.

Ceci bien entendu, on voit manifestement que la plus grande bande du ressort, & par conséquent sa plus grande force, a lieu lorsque la montre est montée jusqu'au haut; & que cette force va toûjours en diminuant à mesure que la fusée tourne; & qu'elle est la plus petite de toutes lorsque la montre est presqu'au bas. Pour faire donc que malgré cette inégalité de force son action soit toûjours égale sur le roüage, on diminue le diametre de la fusée en haut, & on lui donne une forme telle que lorsque le ressort a le plus de force, le bras de levier de la fusée par lequel la chaîne tire, est aussi le plus petit, de façon que dans un point quelconque de la fusée, le produit formé de ce bras de levier multiplié par la force du ressort dans ce même point, est toûjours égal. Par ce moyen l'action du ressort transmise au roüage, est constamment le même; & il est pour ainsi dire mû presque aussi uniformément que s'il l'étoit par un poids.

C'est un probleme parmi les Géometres, que de trouver la figure précise que doit avoir la fusée d'une montre, c'est - à - dire quelle est la courbe qui tournant autour de son axe, produiroit le solide dont cette fusée doit être formée. M. de Varignon a déterminé cette courbe, pag. 198. des mémoires de l'académie royale des Sciences, année 1702, pour toutes sortes d'hypotheses de tensions du ressort. Ce qu'il y a de singulier dans la solution, c'est que la base de la fusée, au lieu de s'étendre à l'infini, comme il sembleroit que cela devroit être, pour que le ressort tirât également lorsque sa force seroit infiniment plus petite; cette base, dis - je, est déterminee, & d'une certaine grandeur. Enfin pour parler plus géométriquement, la courbe qu'il trouve, & dont la révolution autour de son axe donneroit la figure de la fusée, n'a qu'une asymptote, au lieu qu'elle devroit en avoir deux; parce que d'un côté elle doit s'approcher de plus en plus de son axe, sans jamais le toucher, & de l'autre côté s'en éloigner toûjours à l'infini. Au reste la détermination de cette courbe ne seroit pas d'un grand secours dans l'Horlogerie, car quelque parfaits que soient les ressorts, ils ne seront jamais assez uniformément élastiques, & par la nature de l'acier, & par le défaut d'exécution, pour qu'on puisse se servir d'une fusée formée selon une courbe trouvée d'après une hypothese quelconque des tensions du ressort. Les Horlogers ont trouvé un moyen plus sûr de lui donner la forme requise, en se servant d'un instrument nommé levier, voyez Levier; par lequel ils vérifient à chaque point de la fusée, si la force du ressort est la même en la mettant toûjours en équilibre avec un même poids.

Les horlogers en Angleterre se servent de fusées dans les pendules à ressort, mais ici on ne les employe pas. 1°. Parce qu'on fait faire le ressort un peu plus long, & que l'on ne se sert que des tours qui sont les plus égaux; & 2°. parce qu'on peut toûjours construire l'échappement de façon que malgre que la force du ressort diminue à mesure qu'il se debande, la pendule aille toûjours avec la même justesse. Voyez les articles Pendule, Échappement, Ressort , &c.

Après avoir parlé de la forme que doit avoir la fusée, nous allons expliquer sa construction. Elle est com posée d'un arbre (voy. les Pl.) avec lequel elle ne qu'un seul corps. Cet arbre a deux pivots C & P à ses deux extrémités; le pivot P doit être assez gros & assez long pour pouvoir déborder un peu le cadran, & pour qu'on y puisse faire un quarré sur lequel entre la clé. Lorsqu'on veut monter la montre, le pivot C doit être beaucoup plus menu, parce que le rayon de la fusée étant beaucoup plus petit à son sommet qu'à sa base, le frottement sur ce pivot en est beaucoup augmenté; inconvénient auquel on remédie en quelque façon par la petitesse de ce pivot. Parmi tous les avantages que les montres à la françoise ont sur celles qui sont à l'angloise, celui - ci n'est pas un des moindres; car dans celles ci le quarré se trouvant du côté du sommet de la fusée, oblige à faire le pivot de ce côté fort gros, ce qui en augmente beaucoup le frottement; frottement déjà assez considérable par la petitesse des bras de leviers de la fusée de ce côté, & par l'augmentation de la force du ressort.

Du même côté est le crochet C (voyez les Pl.) qui sert à empêcher qu'on ne remonte la montre plus qu'il ne faut. Voyez Guide - Chaîne.

Du côté de sa base elle a un petit rebord, où il y a des dents dont la figure ressemble à un triangle; ces dents composent ce que l'on appelle le rochet, on en verra l'usage plus bas.

La grande roue ou premiere roue (V. les Pl.) portée sur l'arbre de la fusée, vient s'appliquer contre sa base. Elle est mobile circulairement sur cet arbre, qui pour cet effet est rond. Pour qu'elle pose continuellement contre la base de la fusée, elle est retenue par la goutte 2"'qui tient à frottement sur cet arbre, & qui entrant dans la petite creusure de la roue, la presse toûjours contre cette base. Voyez Grande Roue, Goutte , &c. voyez les Planches, & leur explication.

Lorsque la fusée & la grande roue sont montées ensemble, le cliquet C de la grande roue entre dans les dents du rochet, & il s'y engage de façon que la fusée tournant dans le sens où elle est entraînée par la chaîne la montre allant, ses dents s'appuient sur le cliquet; ensorte que la fusée & la grande roue tournent ensemble du même côté; & qu'au contraire quand on tourne la fusée dans le sens opposé, elle se meut indépendamment de la grande roue, le cliquet ne s'opposant plus à son mouvement. Cette mécanique est nécessaire pour qu'en remontant la montre, la fusée tourne sans la grande roue; car un point d'appui étant nécessaire, si la grande roue tournoit avec la fusée, il seroit impossible de remonter la montre.

Il y a des fusées qui sont disposées de façon qu'en tournant leur quarré d'un sens ou de l'autre, on re<pb-> [p. 393] monte également la montre. On appelle les montres qui ont de ces sortes de fusées, montres à l'ivrogne; comme il est rare que l'on en fasse usage, nous n'en parlerons point, d'autant plus que ces sortes de fusées sont fort inutiles. Voyez Montre. (T)

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