ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS
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tre les disciples de Jean - Baptiste, & qui se trouvent
encore aujourd'hui en grand nombre dans la ville de
Bassore, près des bords du Tigre, & dans le voisinage
de la mer de Perse. Le fameux Moyse Maimonides a
tiré des auteurs Arabes tout ce qu'il a dit de cette secte;
& c'est en examinant d'un oeil curieux & attentif
toutes les cérémonies extravagantes & superstitieuses,
qu'il justifie très - ingénieusement la plûpart
des lois de Moyse, qui blesseroient au premier coup
d'oeil notre délicatesse, si la sagesse de ces lois n'étoit
marquée par leur opposition avec les lois des
Zabiens, pour lesquelles Dieu vouloit inspirer aux
Juifs une grande aversion. On ne pouvoit mettre
entre les Juifs & les Zabiens qui étoient leurs voisins
une plus forte barriere. On peut lire sur cela l'ouvrage
de Spencer sur l'oeconomie Mosayque. On
n'est pas moins partagé sur le nom de cette secte que
sur son âge. Pocock prétend que les Zabiens ont été
ainsi nommés de >, qui > Hébreu signifie les
astres ou l'armée céleste; parce que la religion des Zabiens consistoit principalement dans l'adoration des
astres. Mais Scaliger pense que c'est originairement
le nom des Chaldéens ainsi appellés, parce qu'ils
étoient orientaux. Il a été suivi en cela par plusieurs
savans, & entr'autres par Spencer. Cette signification
du nom de Zabiens est d'autant plus plausible,
que les Zabiens rapportent leur origine aux Chaldéens, & qu'ils font auteur de leur secte Sabius fils
de Seth. Pour nous, nous ne croyons pas devoir prendre
parti sur une chose, qui déjà par elle - même est
assez peu intéressante. Si par les Zabiens on entend
tous ceux, qui parmi les peuples de l'orient adoroient
les astres, sentiment qui paroît être celui de quelques
Arabes & de quelques auteurs Chrétiens, ce nom
ne seroit plus alors le nom d'une secte particuliere,
mais celui de l'idolatrie universelle. Mais il paroît
qu'on a toûjours regardé ce nom comme étant propre
à une secte particuliere. Nous ne voyons point
qu'on le donnât à tous les peuples, qui à l'adoration
des astres joignoient le culte du feu. Si pourtant au
milieu des ténebres, où est enveloppée toute l'histoire
des Zabiens, on peut à force de conjectures en
tirer quelques rayons de lumiere, il nous paroît probable
que la secte des Zabiens n'est qu'un mêlange du
Judaïsme & du Paganisme; qu'elle a été chez les arabes une religion particuliere & distinguée de toutes
les autres; que pour s'élever au - dessus de toutes celles
qui fleurissoient de son tems, elle avoit non - seulement affecté de se dire très - ancienne, mais même
qu'elle rapportoit son origine jusqu'à Sabius, fils de
Seth; en quoi elle croyoit l'emporter pour l'antiquité
sur les Juifs mêmes, qui ne peuvent remonter au - delà d'Abraham. On ne se persuadera jamais que le
nom de Zabiens leur ait été donné, parce qu'ils
étoient orientaux, puisqu'on n'a jamais appellé de
ce nom les Mages & les Mahométans, qui habitent
les provinces de l'Asie, situées à l'orient. Quoi qu'il
en soit de l'origine des Zabiens, il est certain qu'elle
n'est pas aussi ancienne que le prétendent les Arabes. Ils sont même sur cela partagés de sentimens;
car si les uns veulent la faire remonter jusqu'à Seth,
d'autres se contentent de la fixer à Noé, & même à
Abraham. Eutychius, auteur Arabe, s'appuyant sur
les traditions de son pays, trouve l'auteur de cette
secte dans Zoroastre, lequel étoit né en Perse, si
vous n'aimez mieux en Chaldée. Cependant Eutychius observe qu'il y en avoit quelques - uns de son
tems qui en faisoient honneur à Juvan, il a voulu
sans doute dire Javan; que les Grecs avoient embrassé
avidement ce sentiment, parce qu'il flattoit
leur orgueil, Javan ayant été un de leurs rois; &
que pour donner cours à cette opinion, ils avoient
composé plusieurs livres sur la science des astres &
sur le mouvement des corps célestes. Il y en a même
qui croyent que celui qui fonda la secte des Zabiens
étoit un de ceux qui travaillerent à la construction de
la tour de Babel. Mais surquoi tout cela est - il appuyé?
Si la secte des Zabiens étoit aussi ancienne
qu'elle s'en vante, pourquoi les anciens auteurs Grecs
n'en ont - ils point parlé? Pourquoi ne lisons - nous rien
dans l'Ecriture qui nous en donne la moindre idée?
Pour répondre à cette difficulté, Spencer croit qu'il
suffit que le Zabaïsme, pris matériellement, c'est - à - dire, pour une religion dans laquelle on rend un culte
au soleil & aux astres, ait tiré son origine des anciens
Chaldéens & des Babyloniens, & qu'il ait précédé
de plusieurs années le tems où a vécu Abraham.
C'est ce qu'il prouve par les témoignages des Arabes,
qui s'accordent tous à dire que la religion des Zabiens est très - ancienne, & par la ressemblance de
doctrine qui se trouve entre les Zabiens & les Chaldéens. Mais il n'est pas question de savoir si le culte
des étoiles & des planetes est très - ancien. C'est ce
qu'on ne peut contester; & c'est ce que nous montrerons
nous - mêmes à l'article des Chaldéens. Toute
la difficulté consiste donc à savoir si les Zabiens ont
tellement reçû ce culte des Chaldéens & des Babyloniens, qu'on puisse assûrer à juste titre que c'est chez
ces peuples que le Zabaïsme a pris naissance. Si l'on
fait attention que le Zabaïsme ne se bornoit pas seulement
à adorer le soleil, les étoiles & les planetes,
mais qu'il s'étoit fait à lui - même un plan de cérémonies
qui lui étoient particulieres, & qui le distinguoient
de toute autre forme de religion, on m'avouera qu'un
tel sentiment ne peut se soûtenir. Spencer lui - même,
tout subtil qu'il est, a été forcé de convenir que le
Zabaïsme considéré formellement, c'est - à - dire, autant
qu'il fait une religion à part & distinguée par la
forme de son culte, est beaucoup plus récent que les
anciens Chaldéens & les anciens Babyloniens. C'est
pourtant cela même qu'il auroit dû prouver dans ses
principes; car si le Zabaïsme pris formellement n'a
pas cette grande antiquité, qui pourroit le faire remonter
au - delà d'Abraham: comment prouvera - t - il
que plusieurs lois de Moyse n'ont été divinement établies, que pour faire un contraste parfait avec les
cérémonies superstitieuses du Zabaïsme? Tout nous
porte à croire que le Zabaïsme est assez récent, qu'il
n'est pas même antérieur au Mahométisme. En effet,
nous ne voyons dans aucun auteur soit Grec, soit
Latin, la moindre trace de cette secte; elle ne commence
à lever la tête que depuis la naissance du Mahométisme, &c. Nous croyons cependant qu'elle est
un peu plus ancienne, puisque l'alcoran parle des
Zabiens comme étant déja connus sous ce nom.
Il n'y a point de secte sans livres; elle en a besoin
pour appuyer les dogmes qui lui sont particuliers.
Aussi voyons nous que les Zabiens en avoient, que
quelques - uns attribuoient à Hermès & à Aristote,
& d'autres à Seth & à Abraham. Ces livres, au rapport
de Maimonides, contenoient sur les anciens patriarches,
Adam, Seth, Noé, Abraham, des histoires
ridicules, & pour tout dire, comparables aux
fables de l'alcoran. On y traitoit au long des démons,
des idoles, des étoiles & des planetes; de la maniere
de cultiver la vigne & d'ensemencer les champs; en
un mot on n'y omettoit rien de tout ce qui concernoit
le culte qu'on rendoit au soleil, au feu, aux étoiles,
& aux planetes. Si l'on est curieux d'apprendre toutes
ces belles choses, on peut consulter Maimonides.
Ce seroit abuser de la patience du lecteur, que de lui
présenter ici les fables dont fourmillent ces livres. Je
ne veux que cette seule raison pour les décrier comme
des livres apocryphes & indignes de toute créance.
Je crois que ces livres ont été composés vers la
naissance de Mahomet, & encore par des auteurs qui
n'étoient point guéris, ni de l'idolatrie, ni des folies
du Platonisme moderne. Il nous suffira, pour faire
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connoître le génie des Zabiens, de rapporter ici quelques - uns de leurs dogmes. Ils croyoient que les étoiles
étoient autant de dieux; & que le soleil tenoit parmi
elles le premier rang. Ils les honoroient d'un double
culte, savoir d'un culte qui étoit de tous les jours,
& d'un autre qui ne se renouvelloit que tous les mois.
Ils adoroient les démons sous la forme de boucs; ils
se nourrissoient du sang des victimes, qu'ils avoient
cependant en abomination; ils croyoient par - là s'unir
plus intimement avec les démons. Ils rendoient
leurs hommages au soleil levant, & ils observoient
scrupuleusement toutes les cérémonies, dont nous
voyons le contraste frappant dans la plûpart des lois
de Moyse; car Dieu, selon plusieurs savans, n'a affecté
de donner aux Juifs des lois qui se trouvoient
en opposition avec celles des Zabiens, que pour détourner
les premiers de la superstition extravagante
des autres. Si nous lisons Pocock, Hyde, Prideaux,
& les auteurs arabes, nous trouverons que tout leur
système de religion se réduit à ces différens articles
que nous allons détailler. 1°. Il y avoit deux sectes
de Zabiens; le fondement de la croyance de l'une &
de l'autre étoit, que les hommes ont besoin de médiateurs
qui soient placés entr'eux & la Divinité; que
ces médiateurs sont des substances pures, spirituelles
& invisibles; que ces substances, par cela même
qu'elles ne peuvent être vûes, ne peuvent se communiquer
aux hommes, si l'on ne suppose entr'elles
& les hommes d'autres médiateurs qui soient visibles;
que ces médiateurs visibles étoient pour les uns des
chapelles, & pour les autres des simulachres; que les
chapelles étoient pour ceux qui adoroient les sept
planetes, lesquelles étoient animées par autant d'intelligences,
qui gouvernoient tous leurs mouvemens,
à peu près comme notre corps est animé par une ame
qui en conduit & gouverne tous les ressorts; que ces
astres étoient des dieux, & qu'ils présidoient au destin
des hommes, mais qu'ils étoient soûmis eux - mêmes à l'Être suprème; qu'il falloit observer le lever
& le coucher des planetes, leurs différentes conjonctions,
ce qui formoit autant de positions plus ou
moins régulieres; qu'il falloit assigner à ces planetes
leurs jours, leurs nuits, leurs heures pour diviser le
tems de leur révolution, leurs formes, leurs personnes,
& les régions où elles roulent; que moyennant
toutes ces observations on pouvoit faire des talismans,
des enchantemens, des évocations qui réussissoient
toûjours; qu'à l'égard de ceux qui se portoient
pour adorateurs des simulach>es, ces simulachres
leur étoient nécessaires, d'autant plus qu'ils
avoient besoin d'un médiateur toûjours visible, ce
qu'ils ne pouvoient trouver dans les astres, dont le
lever & le coucher qui se succedent régulierement,
les dérobent aux regards des mortels; qu'il falloit
donc leur substituer des simulachres, moyennant lesquels
ils pussent s'élever jusqu'aux corps des planetes,
des planetes aux intelligences qui les animent,
& de ces intelligences jusqu'au Dieu suprème; que
ces simulachres devoient être faits du métal qui est
consacré à chaque planete, & avoir chacun la figure
de l'astre qu'ils réprésentent; mais qu'il falloit
sur - tout observer avec attention les jours, les heures,
les degrés, les minutes, & les autres circonstances
propres à attirer de bénignes influences, &
se servir des évocations, des enchantemens, & des
talismans qui étoient agréables à la planete; que ces
simulachres tenoient la place de ces dieux célestes,
& qu'ils étoient entr'eux & nous autant de médiateurs.
Leurs pratiques n'étoient pas moins ridicules
que leur croyance. Abulfeda rapporte qu'ils avoient
coûtume de prier la face tournée vers le pole arctique,
trois fois par jour; avant le lever du soleil, à
midi, & au foir; qu'ils avoient trois jeûnes, l'un de
trente jours, l'autre de neuf, & l'autre de sept; qu'ils
s'abstenoient de manger des féves & de l'ail; qu'ils
faisoient brûler entierement les victimes, & qu'ils ne
s'en réservoient rien pour manger.
Voilà tout ce que les Arabes nous ont appris du
système de religion des Zabiens. Plusieurs traces de
l'astrologie Chaldaïque, telle que nous la donnerons
à l'article Chaldéens, s'y laissent appercevoir.
C'est elle sans doute qui aura été la premiere pierre
de l'édifice de religion que les Zabiens ont bâti. On
y voit encore quelques autres traits de ressemblance,
comme cette ame du monde qui se distribue dans
toutes ses différentes parties, & qui anime les corps
célestes, sur - tout les planetes, dont l'influence sur
les choses d'ici bas est si marquée & si incontestable
dans tous les vieux systèmes des religions orientales.
Mais ce qui y domine sur - tout, c'est la doctrine d'un
médiateur; doctrine qu'ils auront dérobée, soit aux
Juifs, soit aux Chrétiens; la doctrine des génies médiateurs,
laquelle a eu un si grand cours dans tout
l'Orient, d'où elle a passé chez les cabalistes & les
ph>osophes d'Alexandrie, pour revivre chez quelques
Chrétiens hérétiques, qui en prirent occasion
d'imaginer divers ordres d'aeones. Il est aisé de voir
par - là que le Zabaïsme n'est qu'un composé monstrueux
& un mêlange embarrassant de tout ce que
l'idolatrie, la superstition & l'hérésie ont pû imaginer
dans tous les tems de plus ridicule & de plus extravagant.
Voilà pourquoi, comme le remarque fort
bien Spencer, il n'y a rien de suivi ni de lié dans les
différentes parties qui composent le Zabaïsme. On y
retrouve quelque chose de toutes les religions, malgré
la diversité qui les sépare les unes des autres.
Cette seule remarque suffit pour faire voir que le Zabaïsme n'est pas aussi ancien qu'on le croit ordinairement;
& combien s'abusent ceux qui en donnent
le nom à cette idolatrie universellement répandue
des premiers siecles, laquelle adoroit le soleil & les
astres. Le culte religieux que les Zabiens rendoient
aux astres, les jetta, par cet enchaînement fatal que
les erreurs ont entr'elles, dans l'Astrologie, science
vaine & ridicule, mais qui slatte les deux passions
favorites de l'homme; sa crédulité, en lui promettant
qu'il percera dans l'avenir; & son orgueil, en
lui insinuant que sa destinée est écrite dans le ciel.
Ceux qui d'entr'eux s'y sont le plus distingués, sont
Thebet Ibn Korra, Albategnius, &c.
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