ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"514"> Prit, comme on peut s'en assûrer par le xxjv. chap. du livre III. de ses Inst. D'autres s'en tinrent à révoquer en doute les conjectures des Philosophes; c'est ce que fit S. Augustin, comme on voit au chap. jx. du livre XVI. de la Cité de Dieu. Après avoir examiné, s'il est vrai qu'il y ait des Cyclopes, des Pygmées & des nations qui ayent la tête en bas & les piés en haut; il passe à la question des antipodes, & il demande si la partie inférieure de notre terre est habitée. Il commence par avoüer la sphéricité de la terre; il convient ensuite qu'il y a une partie du globe diamétralement opposée à celle que nous habitons: mais il nie que cette partie soit peuplée; & les raisons qu'il en apporte, ne sont pas mauvaises pour un tems où on n'avoit point encore découvert le nouveau monde. Premierement, ceux qui admettent des antipodes, dit - il, ne sont fondés sur aucune histoire. 2°. Cette partie inférieure de la terre peut être totalement submergée. 3°. Admettre des antipodes, & conséquemment des hommes d'une tige différente de la nôtre, (car les anciens regardant la communication de leur monde avec celui des antipodes, comme impossible, la premiere supposition entraînoit la seconde) c'est contredire les saintes écritures qui nous apprennent que toute la race humaine descend d'un seul homme. Telle est l'opinion de ce Pere de l'Eglise.

On voit par - là que S. Augustin se trompoit en croyant que les antipodes devoient être d'une race différente de la nôtre. Car enfin ces antipodes existent, & il est de foi que tous les hommes viennent d'Adam. A l'égard de la maniere dont ces peuples ont passé dans les terres qu'ils habitent, rien n'est plus facile à expliquer; on peut employer pour cela un grand nombre de suppositions toutes aussi vraissemblables les unes que les autres. Au reste nous remarquerons ici que S. Augustin condamne à la vérité, comme hérétique, l'opinion qui feroit venir les antipodes d'une autre race que de celle d'Adam; mais il ne condamne pas comme telle, celle qui se borneroit purement & simplement à l'existence des antipodes. S'il avoit pensé à séparer ces deux opinions, il y a grande apparence qu'il se seroit déclaré pour la seconde.

Quoi qu'il en soit, quand même il se seroit trompé sur ce point peu important de la Géographie, ses écrits n'en seront pas moins respectés dans l'Eglise, sur tout ce qui concerne les vérités de la foi & de la tradition; & il n'en sera pas moins l'Oracle des Catholiques contre les Manichéens, les Donatistes, les Pélagiens, Semi - pélagiens, &c.

Nous pouvons ajoûter à cela, que les Peres de l'Eglise n'étoient pas les seuls qui rejettassent la possibilité des antipodes.

Lucrece avoit pris ce parti, long - tems avant eux, comme il paroît par la fin du premier livre, v. 10. 60. &c. Voyez aussi le livre de Plutarque de Facie in orbe lunoe. Pline réfute la même opinion. Liv. II. c. lxv.

Ce qu'il y a de plus propre aux antipodes, & en quoi seulement nous les considérons ici, c'est d'être dans des lieux diamétralement opposés entr'eux sur le globe terrestre; de maniere qu'ayant mené une perpendiculaire ou une verticale à un lieu quelconque, & qui par conséquent passe par le zénith de ce lieu, l'endroit opposé de la surface du globe que cette verticale prolongée ira couper, en soit l'antipode. Tout le reste n'est qu'accessoire à cette idée dans la supposition énoncée ou tacite de la sphéricité de la terre; car si la terre n'est point une sphere, si c'est une sphéroïde elliptique, applati, ou allongé vers les poles, il n'y a plus d'antipodes réciproques; c'est - à - dire, par exemple, qu'ayant mené une ligne par le zénith de Paris & par le centre de cette ville, qui est dans l'hémisphère boréal, cette ligne ira eouper l'hémisphere austral en un point qui sera l'antipode de Pa<cb-> ris, mais dont Paris ne sera pas l'antipode; ainsi l'égalité réciproque de position, de latitude, de jour & de nuit dans les hémispheres opposés à six mois de différence, & tout ce qu'on a coûtume de renfermer dans l'idée des antipodes, comme inséparable, ne l'est plus, & doit effectivement en être séparé dès que l'on déroge à la sphéricité de la terre. Il ne faut qu'un peu d'attention pour s'en convaincre.

Tout ceci est fondé surce que la sphere, ou, pour simplifier cette théorie, le cercle, est la seule figure réguliere que tous les diametres passans par son centre coupent à angles droits. Donc en toute figure terminée par une autre courbe, dans l'ellipse, par exemple, la perpendiculaire menée à un de ses points ou à sa tangente, excepté les deux axes qui répondent ici à la ligne des poles, ou à un diametre quelconque de l'équateur, ne sauroit passer par son centre, ni aller rencontrer la partie opposée du méridien elliptique à angles droits: donc le nadir de Paris n'est pas le zénith de son antipode, & réciproquement. Si l'on élevoit au milieu de Paris une colonne bien perpendiculaire à la surface de la terre, elle ne seroit pas dans la même ligne que celle qu'on éleveroit pareillement au point antipode de Paris: mais elle en déclineroit par un angle plus ou moins grand, selon que l'ellipse où le méridien elliptique differeroit pus ou moins du cercle. La latitude de l'un & de l'autre de ces deux points differera donc en même raison, & conséquemment la longueur des jours & des nuits, des mêmes saisons, &c.

Les lieux situés à l'un & l'autre pole, ou sur l'équateur, en sont exceptés; parce que dans le premier cas, c'est un des axes de l'ellipse qui joint les deux points; & que dans le second il s'agit toûjours d'un cercle, dont l'autre axe de l'ellipse est le diametre; le spéroïde quelconque applati ou allongé étant toûjours imaginé résulter de la révolution du méridien elliptique autour de l'axe du monde. Voyez Hist. acad. 1741. (O)

ANTIPTOSE (Page 1:514)

ANTIPTOSE, s. f. figure de Grammaire par laquelle, dit - on, on met un cas pour un autre, comme lorsque Virgile dit, AEn. V. v. 451. It clamor coelo, au lieu de ad coelum. Ce mot vient de A'NTI\, pour, & de WTW=SI, cas. On donne encore pour exemple de cette figure, Urbem quam statuo vestra est, AEn. L. l. v. 573, urbem au lieu de urbs. Et Térence au prologue de l'Andrienne dit: Populo ut placerent, quas fecisset fabulas, au lieu de fabuloe. On trouve aussi, Venit in mentcm illius diei pour ille dies. Mais Sanctius, liv. IV. & les Grammairiens philosophes, qui à la vérité ne font pas le grand nombre, & même la méthode de P. R. regardent cette prétendue figure comme une chunere & une absurdité qui détruiroit toutes les regles de la Grammaire. En effet les verbes n'auroient plus de régime certain; & les écoliers qu'on reprendroit pour avoir mis un nom à un cas, autré que celui que la regle demande, n'auroient qu'à répondre qu'ils ont fait une antiptose. Figura hoec, dit Sanctius, liv. IV. c. xiij. latinos canones excedere videtur; mhil imperitius; quod figmentum si esset verum, frustra quoereremus quem casum verba regerent.

Nous ne connoissons d'autres figures de construction que celles dont nous parlerons au mot Construction.

Le même fonds de pensée peut souvent être énoncé de différentes manieres: mais chacune de ces manieres doit être conforme à l'analogie de la langue. Ainsi l'on trouve urbs Roma par la raison de l'identité: Urbs est alors considéré adjectivement, Roma quoe est urbs; & l'on trouve aussi urbs Romoe, in oppido Antiochioe. Cic. Butroti ascendimus urbem. Virg. Alors urbs est considéré comme le nom de l'espece; nom qui est ensuite déterminé par le nom de l'individu.

Parmi ces différentes manieres de parler, si nous [p. 515] en rencontrons quelqu'une de celles que les Grammairiens expliquent par l'antiptose, nous devons d'abord examiner s'il n'y a point quelque faute de copiste dans le texte; ensuite avant que de recourir à une figure aussi déraisonnable, nous devons voir si l'expression est assez autorisée par l'usage, & si nous pouvons en rendre raison par l'analogie de la langue. Enfin entre les différentes manieres de parler autorisées, nous devons donner la préférence à celles qui sont le plus communément reçùes dans l'usage ordinaire des bons Auteurs.

Mais expliquons à notre maniere les exemples ci - dessus, dont communément on rend raison par l'antiptose.

A l'égard de it clamor coelo; coelo est au datif, qui est le cas du rapport & de l'attribution, c'est une façon de parler toute naturelle; & Virgile ne s'en est servi que parce qu'elle étoit en usage en ce sens, aussi - bien que ad coelum ou in coelum. Ne dit - on pas aussi, mittere epistolam alicui, ou ad aliquem?

Urbem quam statuo vestra est, est une construction très - élégante & très - réguliere, qu'il faut réduire à la construction simple par l'ellipse; & pour cela il faut observer que le relatif qui, quoe, quod, n'est qu'un simple adjectif métaphysique; que par conséquent il faut toûjours le construire avec son substantif, dans la proposition incidente où il est: car c'est un grand principe de syntaxe, que les mots ne sont construits que selon les rapports qu'ils ont entr'eux dans la même proposition; c'est dans cette seule proposition qu'il faut les considérer, & non dans celle qui précede, ou dans celle qui suit: ainsi si l'on vous demande la construction de cet exemple trivial, Deus quem adoramus, demandez à votre tour qu'on en acheve le sens, & qu'on vous dise, par exemple, Deus, quem adoramus, est omnipotens; alors vous ferez d'abord la construction de la proposition principale Deus est omnipotens; ensuite vous passerez à la proposition incidente & vous direz, nos adoramus quem Deum.

Ainsi le relatif qui, quoe, quod, doit toûjours être considéré comme un adjectif métaphysique, dont le substantif est répété deux sois dans la même période, mais en deux propositions différentes; & ainsi il n'est pas étonnant que ce nom substantif soit à un certain cas dans une de ces propositions, & à un cas différent dans l'autre proposition, puisque les mots ne se construisent & n'ont de rapport entr'eux que dans la même proposition.

Urbem quam statuo, vestra est. Je vois là deux propositions, puisqu'il y a deux verbes: ainsi construisons à part chacune de ces propositions; l'une est principale, & l'autre incidente; vestra est, ou est vestra, ne peut être qu'un attribut. Le sens fait connoître que le sujet ne peut être que urbs: je dirai donc, hoec urbs est vestra, quam ube n statuo.

Par la même méthode j'explique le passage de Térence, ut fabuloe, quas fabulas fecisset, placerent populo. C'est donc par l'ellipse qu'il faut expliquer ces passages, & non par la prétendue antiptose de Despautere & de la foule des Grammatistes.

Pour ce qui est de venit in mentem illius diei, il y a aussi eliipse; la construction est memoria, cogitatio, ou recordatio hujus diei venit in mentem. (F)

ANTIQUAIRE (Page 1:515)

ANTIQUAIRE, s. m. est une personne qui s'occupe de la recherche & de l'étude des monumens de l'antiquité, comme les anciennes médailles, les livres, les statues, les sculptures, les inscriptions, en un mot ce qui peut lui donner des lumieres à ce sujet. Voyez Antiquité, voyez aussi Monument, Médaille, Inscription, Sculpture, Statue , &c.

Autrefois il y avoit différentes autres especes d'antiquaires: les Libraires ou les copistes, c'est - à - dire eux qui transcrivoient en caracteres beaux & lisi<cb-> bles ce qui avoit auparavant été seulement écrit en notes, s'appelloient antiquaires. Voyez Libraire. Ils furent aussi dénommés calligraphi. Voyez Calligraphe. Dans les principales villes de la Grece & de l'Italie, il y avoit d'autres personnes distinguées que l'on appelloit antiquaires, & dont la fonction étoit de montrer les antiquités de la ville aux étrangers, de leur expliquer les inscriptions anciennes, & de les assister de tout leur pouyoir dans ce genre d'érudition.

Un établissement si utile au public & si flatteur pour les curieux, mériteroit bien d'avoir lieu parmi nous. Pautanias appelle ces antiquaires E'CHGHTA\: les Siciliens leur donnoient le nom de mystagogi. (G)

ANTIQUE (Page 1:515)

ANTIQUE, adject. en général ancien. Voyez Ancien & Antiquité.

Antique (Page 1:515)

Antique, s.f. est principalement en usage parmi les Architectes, les Sculpteurs & les Peintres: ils l'employent pour exprimer les ouvrages d'Architecture, de Sculpture, de Peinture, &c. qui sont d'un tems où les Arts avoient été portés à leur perfection par les plus beaux génies de la Grece & de Rome: savoir depuis le siecle d'Alexandre le Grand jusqu'au regne de l'empereur Phocas, vers l'an de Notre - Seigneur 600, que l'Italie fut ravagée par les Goths & les Vandales.

Antique dans ce sens est opposé à moderne. C'est ainsi que nous disons un edifice antique, un buste, un bas - relief, une maniere, une medaille antique; & d'une statue, qu'elle est dans le goût antique.

Il nous reste plusieurs antiquites de Sculpture, telles que le Laocoon, la Venus de Medicis, l'Apollon, l'Hercule Farnese, &c.

Mais en sait d'antiquités pittoresques, nous n'avons que la noce Aldobrandine, les figurines de la pyranride de Cestius, le nymphee du palais Barberin, ia Venus, une figure de Rome qui occupe le Palladium, & qu'on voit dans le même ieu, quelques morceaux de fresque tirés des uines d'Adriane, des thermes de Tite & d'Héraclée.

Il s'est trouvé des Sculpteurs qui ont contrefait l'antique jusqu'à tromper le jugement du public. On prétend que Michel - Ange fit la statue d'un Cupidon, & qu'apres en avoir cassé un bras qu'il retint, il enterra le reste de la figure dans un endroit où il savoit qu'on devoit fouiller. Le Cupidon en ayant été tiré, tout le monde le prit pour antique. Mais Michel - Ange ayant présenté à son tronc le bras qu'il avoit réservé, chacun fut obligé de convenir de sa méprise. Si ce fait est vrai, il prouve combien dès ce tems - là le préjugé étoit favorable à l'antiquité. Notre siecle n'en a rien rabattu; & si l'on pouvoit, ainsi que Michel Ange, prouver que les morceaux qu'on admire comme des antiquités, ne sont que des productions modernes, la plûpart de ces antiquités perdroient bientôt de l'estime où elles sont, & seroient reduites à leur juste valeur.

Antique est quelquefois distingué d'ancien qui signifie un moindre degré d'antiquité, un tems où l'art n'étoit pas encore à sa derniere perfection. Ainsi architecture antique n'est souvent autre chose que l'ancienne architecture. Voyez Architecture.

Quelques écrivains usent du composé antiquo - moderne, en parlant des vieilles églites gothiques & d'autres bâtimens, qu'ils ne veunt pas confondre avec ceux des Grecs & des Romains. (G P - R)

Antique (Page 1:515)

Antique. On employe ce mot dans le Blason en parlant des choses qui ne sont pas de l'usage moderne, comme des couronnes à pointes de rayons, des coëffures anciennes, greques & romaines, des vêtemens, des bâtimens, des niches gothiques, &c. Les armoiries de Montpellier sont une image de Notre - Dame sur son siége à l'antique en forme de niche.

L'évêché de Freyssing en Baviere, d'argent au

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