ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"248 - 3B"> blanche, ne blesse moins la vûe, & enfin ne sent mieux celle du foin mouillé qu'on commence à allumer, que parce que l'huile qui en fait une grande partie est presque toute consumée avant que de sortir du four où elle étoit renfermée, où elle a circulé & a été forcée de passer à - travers une étendue de flamme assez considérable; ce qui fait qu'on n'en nettoye que rarement les cheminées, & qu'on n'y trouve qu'une petite quantité de noir de fumée, qui ne se voit point dans les cheminées des cuisines.

La flamme du grand fourneau anglois ne ressemble point à la flamme ordinaire; je puis même avancer qu'on n'en a aucune idée si on ne l'a vûe: cette singularité n'est dûe qu'à la fumée, qui étant exposée à l'ardeur de la flamme dans un long canal (car ce fourneau a souvent une cheminée de vingt à trente piés de haut, au - dessus de laquelle on voit la flamme la nuit), brûle en vapeurs, c'est - à - dire étant divisée en des molécules très - fines qui forment autant de petits points lumineux très - rouges: pour en donner une idée qui en approche, je la comparerai à du carmin en poudre fine qu'on agiteroit rapidement dans un vase de verre crystallin, ou aux vapeurs formées de l'acide nitreux le plus concentré, qui auroient l'éclat du feu; car la flamme de ce fourneau est obscure, tant elle est chargée; ce qui peut venir de la cendre qu'elle entraîne. On a encore quelque chose d'approchant dans quelques compositions de feux d'artifice. Il ne doit donc point ou presque point sortir de fumée par la cheminée de ce fourneau: la chose est démontrée par l'art qu'on a de mettre au sommet de la flamme d'une chandelle ou d'une lampe, un petit tuyau métallique où la lumiere monte & consume le peu de fumée qu'elle laisse échapper. Nous avons vû qu'on peut se dispenser d'employer ce tuyau pour la meche de la lampe par l'arrangement qu'on lui donne; ce qui est encore appliquable à ce dont il est ici question.

On pourroit m'objecter que les fourneaux des cloches & des canons remplissent l'atmosphere du hangard qui les couvre d'une matiere fuligineuse, tendre, & legere, comme on peut le voir à l'arsenal de Paris, &c. mais c'est prêter de nouvelles forces à ce que j'ai avancé. Cette matiere fuligineuse ne blesse point la vûe; elle est en petite quantité, malgré celle du bois qu'on brûle pendant plusieurs heures, & si legere qu'elle se soûtient dans l'air sans paroître tomber, semblable à celle de la chandelle qui ne se repose que dans les endroits les plus tranquilles & les plus à couvert de l'agitation de l'air; avec cette différence pourtant, que celle ci est plus charbonneuse, plus noire, & plus nuisible: d'ailleurs ces sortes de fourneaux sont sans cheminée; ils n'ont pour regîtres que trois ou quatre ouvertures de six ou huit pouces en quarré, selon la grandeur du fourneau, horisontalement disposées contre la chûte des corps. Que deviendra donc cette matiere fuligineuse, quand elle aura été encore exposée pendant la longueur de vingt ou trente piés, à l'action d'une flamme beaucoup plus vive & plus rapide, en conséquence de la longueur qu'elle a à parcourir? elle doit être résoute en ses élémens, & être invisible comme le noir de fumée que Stahl a brûlé dans un creuset.

Si on approche deux chandelles l'une de l'autre, la petite atmosphere lumineuse qui paroissoit à - peine d'abord, étant vûe à un pouce ou deux de distance, devient sensible, soit en conséquence de l'augmentation de mouvement, soit parce que le charbon qui s'en échappe peut être brûlé.

Une chandelle allumée n'en allume une autre inférieure mal éteinte & qui fume encore, que parce que la fumée ou les parties grasses & charbonneuses qui s'élevent encore de celle - ci, fournissent un aliment qui touche la flamme de la supérieure, & que celle - ci suit.

L'auteur ingénieux du poêle sans fumée, focus acapnos, est M. Dalesme, qui le publia en 1686, comme on peut le voir pag. 116. du journal des Savans de la même année. M. Justelius, angsois, fut le premier qui en rendit la figure publique; il la donna presque en même tems dans les mémoires de la joctété royale de Londres: comme nous n'en avons point représenté la figure, nous prendrons parmi nos fourneaux de quoi nous faire entendre. Soit donnée la fig. 37. n°. 1. on fait un cylindre creux en tôle, au milieu duquel on met une grille, comme à un fourneau: la partie supérieure est aussi ouverte; on peut encore le faire cubique de cinq lames de tôle, dans le goût de la fig. 36. & cela est même plus aisé. Pardessous la grille on ajuste un tuyau elliptique au cendrier: on fait ce tuyau le plus gros qu'il est possible, & même on fait l'axe de l'ellipse égal au diamene du foyer, & conséquemment horitontal. Il est dans la même position précisément que notre tuyau b, à cela pres qu'il est plus gros, comme nous l'avons dit, recourbé à angles droits, & deux ou trois fois plus haut que le corps du fourneau: on commence par échauffer la partie horisontale du tuyau; on met des charbons ardens sur la grille du foyer, & ensuite quelque matiere combustible, comme du bois, de la tourbe, &c. La flamme passe à - travers la grille, descend dans le cendrier, & enfile le tuyau b; & toute la chaleur sort par son orifice b. Mais la fumée est obligée de suivre le même chemin, c'est - à - dire d'enfiler aussi le tuyau b, & de passer à - travers la flamme qui remplit tout ce tuyau: ensorte qu'elle perd sa consistence & son caractere de fumée, se convertit en flamme, & sort sous cette apparence par l'extrémité du tuyau b, sans donner aucune marque de sa nature; car elle est devenue insensible; ce que nous venons de donner est plus la correction qui se trouve dans les remarques que M. de la Hire a ajoûtées dans l'endroit cité du journal des Savans, que la premiere ébauche qui en a paru. Peu importe qu'on chauffe la partie horisontale du tuyau avant que de mettre des charbons sur la grille; si - tôt qu'ils y sont, l'air s'échauffe au commencement de ce tuyau, & on n'y met des charbons ardens que pour l'échauffer plus vîte; ainsi on peut se dispenser de cette peine. Voyez plus bas ce que nous rapporterons des expériences de Gauger. A mesure que l'air s'échauffe sous la grille dans le tuyau, la chaleur qu'on sentoit sur la grille diminue: ensorte qu'à la fin on voit la flamme passer par l'extrémité b, & qu'on ne sent plus aucune chaleur au - dessus de la grille. Quand les choses en sont à ce point, si on jette de la paille sur le charbon, la flamme passe rapidement sous la grille, & sort par l'extrémité du tuyau sans donner de fumée: mais elle y produit une vive chaleur, tandis que le froid continue au - dessus de la grille. Le bois, la tourbe, le soufre, les huiles, donnent le même phénomene, & le tuyau s'échauffe au lieu de rougir; on y entend même siffler la flamme, tant sa rapidité est grande. On observe que les corps qui répandent en brûlant une puanteur insupportable ou un parfum agréable, ne donnent ni bonne ni mauvaise odeur dans ce poêle, & ne laissent d'autres vestiges de leur combustion, que des cendres. Enfin tous les corps combustibles subissent le même sort; leur flamme est également chassée par l'air qui presse le foyer plus bas que l'extrémité du tuyau, dans toute la longueur duquel réside la chaleur: c'est pour cette raison que la fumée y devient flamme; elle s'y atténue enfin à un point que tout ce qui étoit combustible ou capable de prendre le mouvement igné, ne laisse plus aucune trace de sa premiere existence. Ainsi la matiere du feu se résout en ses élémens, & ne paroît point sous une espece d'aggrégation, comme dans le noir de fumée; tant le mouvement qui lui est imprimé est [p. 248 - 4] considérable. Boerhaave, element. chem. pag. 163.

Ne pourroit - il pas se trouver des occasions où il seroit nécessaire d'employer une flamme qui n'auroit que très - peu ou point - du - tout de fumée, & conséquemment d'avoir recours à la construction du poéle sans fumée? La fumée est nuisible, par exemple, dans les fourneaux de verrerie, où les creusets demeurent toûjours ouverts. Elle gâte le verre, & l'empêche de se perfectionner. Neri, préf. page 17. Le fourneau qui seroit le plus approchant de ce poéle, celui auquel il y auroit moins de changement à faire, seroit le grand fourneau anglois, ou notre fig. 19. On m'objectera que la fumee ou partie charbonneuse fine du bois qui échappe à l'embrasement, y est nécessaire pour le succes de certaines epérations, comme, par exemple, du minium, de la fonte des mines, de celle du cuivre, &c. mais on peut repondre à cela, que si cette partie charbonneuse est consumée dans le commencement de son trajet à - travers la flamme, ce qui n'est pas démontré, il s'ensuit que cette methode ne sera pas bonne dans les circonstances ou la partie charbonneuse est nécessaire; & en effet on parle de celles où elle seroit nuisible. On pourroit donc en ce cas, au lieu de mettre la grille en b au - dessous du sol, la placer au niveau de la voûte qui est immédiatement au - dessus; on ouvriroit un espace au - dessus de la grille, comme dans celui du poêle sans fumée, capable de contenir l'aliment nécessaire au feu; & sous la grille on condamneroit le cendrier qui pour lors seroit inutile & nuisible, & on le mettroit au niveau du sol du fourneau; ensorte qu'on auroit un vrai poêle sans sumée en toutes les regles, mais en grand. Mais il faut observer que la cheminée, comme celle des fourneaux anglois, seroit nécessaire en ce cas, & qu'on ne pourroit pas faire ce changement aux fourneaux des canons de l'arsenal de Paris, à - moins que d'y en construire une.

Nous avons encore observé, en parlant du fournaliste, que dans sa chemineé on trouvoit des cendres noires, ou une matiere noire & seche qui n'étoit pas octueuse comme le noir de fumée. On trouve encore la même matiere à la partie supérieure que les fourneaux y ont dans son four, c'est - à - dire dans cet endroit qui y est le moins exposé à l'action du feu; & cette matiere y est encore moins noire & fuligineuse que celle de la cheminée.

Le four du potier de terre est beaucoup plus large & plus long que celui du fournaliste; mais sa cheminée est derriere, & la flamme n'est pas obligée de s'y réfléchir, ce qui la rend d'autant plus vive: aussi n'apperçoit - on ni sur les pots ni dans la cheminée pas le moindre vestige de suie. J'ai aussi remarqué que l'endroit le plus vitrifié, celui qui avoit le plus éprouvé l'action du feu, c'étoit l'extrémité du four & le commencement de la cheminée.

On peut profiter de tous ces exemples pour la Chimie & l'Economie domestique: ce n'est pas que nous conseillions de faire des poêles sans fumée dont le tuyau seroit ouvert dans les appartemens; nous ne connoissons que trop les accidens qui arrivent tous les jours de la part de la vapeur du charbon ou matiere du feu, quoiqu'invisibles, encore associées à des corps qu'on ne connoît pas, comme les gas de Vanhelmont; mais il n'y auroit rien à craindre, si les tuyaux avoient une issue au - dehors; & s'il resstoit encore des doutes sur l'ouverture de la partie supérieure de la grille, on pourroit la fermer & dériver l'air, qui lui seroit nécessaire, par un tuyau recourbé qui perceroit dans une chambre inférieure, ou même qui seroit horisontal & viendroit du dehors. Nous en parlerons dans la suite.

Quand on allume les fourneaux, on sent pour l'ordinaire une odeur de foie de soufre, & quelquefois de soufre brûlant; on en trouvera les raisons aux artieles Soufre & Phlogistique.

Quand on les veut aliumer lentement, on met, comme nous l'avons déjà dit à l'art. Essai, les charbons ardens par le haut sur les charbons noirs dont on les a eu remplis. Les soupiraux & les regitres étant ouverts, le feu descend; c'est de la sorte qu'on allume ordinairement la tour des athanors, & qu'il faut nécessairement allumer celle qui n'a point de bouche du feu, comme dans Charas, à - moins qu'on ne veuille se donner la peine d'ôter le charbon dont elle peut être pleine. Son dôme & son soupirail étant ouverts, le feu descend de haut - en - bas, à - peu - près dans la même quantité qu'on l'y a mis; c'est - à - dire que les charbons allument de proche en proche pareille quantité de charbons à - peu - près, & perdent l'ignition qu'ils ont communiquée, jusqu'à ce que l'embrasement étant parvenu au fond du charbon ou du fourneau, il se communique enfin à tout celui qui est dans la tour, si on n'a soin de fermer sa partie supérieure: voilà le fait; cherchons - lui quelque application. L'air passe par le soupirail ou par les regitres qui sont inférieurs à la partie supérieure de la tour, pour se mettre en équilibre avec celui qui étant raréfié par le feu, doit déterminer son action par en - haut; puisque le feu étant plus leger que l'air, il doit s'élever au - dessus de celui - ci: ou, ce qui revient au même, que l'air chaud, qui est plus rare & plus leger, doit s'élever au - dessus de celui qui est froid: ensorte que le feu, au - lieu de s'étendre par en - bas, s'éteindroit faute de pâture au - dessus de lui. Quelle est donc la cause qui produit ce phénomene, & qui change le cours de l'air, non - seulement dans la circonstance présente, où il est tout le contraire de ce qu'il est ordinairement; mais encore dans la suite, où le charbon de la tour étant allumé par le bas, l'air reprend son jeu ordinaire? seroit - ce par un méchanisme approchant de celui du poêle sans fumée? La chose ne s'y passe de la sorte que parce qu'il a un tuyau qui est supérieur à son foyer: ainsi il ne seroit pas étonnant que la même chose arrivât dans l'athanor de M. Cramer, en supposant que l'une de ses petites cheminées fût plus haute que la partie supérieure de la tour, & ouverte aussi, selon les expériences de Gauger. Si l'on expose un tuyau au feu horisontalement, il donne une vapeur chaude à chaque extrémité: si on l'incline, le côté supérieur soufslera un air chaud capable d'éteindre la flamme d'une bougie; & cet air le sera d'autant plus, qu'on lélevera davantage. La chose sera la même, si l'on change de bout; celui qui étoit supérieur d'abord se refroidira, & celui qui est devenu le supérieur, d'inférieur qu'il étoit avant, s'échauffera à son tour; & quoiqu'on bouche l'extrémité inférieure, l'air ne laissera pas de sortir, quoiqu'avec moins de vivacité; par la raison qu'il fait pour lors comme dans un tuyau d'orgue à vent fermé, où il a une colonne entrante & une colonne sortante. Ainsi une moufle d'essai pourra n'avoir point de soupiraux; & l'agitation de l'air, malgré cela, ne laissera pas d'entraîner ses vapeurs, quoique plus foiblement. Au reste, il y a au - moins certainement une vapeur ignée comme autour des poêles, &c. qui produit le phénomene qu'on attribue peut - être mal - à - psopos à l'air: d'où il s'ensuit que l'air le plus chaud est le plus leger & prend le dessus, & qu'une chambre doit être plus chaude en - haut qu'en - bas, &c. Mais si au lieu du tuyau droit dont nous venons de parler, on en employe un courbé comme un syphon, la chose sera précisément la même, c'est - à - dire que l'air sortira pour lors par la plus longue branche. On pourroit comparer la tour de l'athanor de Cramer avec son foyer & une de ses cheminées à un syphon.

Mais on observe que la petite flamme que donne

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