ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS
Previous page
"246B">
exact. Il ne faut pourtant pas vouloir travailler de
la sorte en grand; car les amateurs en ont été dégoûtés
par les sommes considérables que cela exigeoit:
malgré cela, on y fait par la réduction, des opérations
très - utiles & des alliages de métaux peu connus
jusqu'ici des artistes, à cause des difficultés de l'opération: on le fait même commodément & pas
trop en petit; car on y peut traiter à - la - fois jusqu'à
dix livres de métal ou de mine, & de fer même. Or
la disposition du fourneau est telle pour cette circonstance
qu'elle l'étoit dans la précédente, c'est - à - dire
pour la fusion dans le creuset; à cette différence près,
qu'on n'employe ni creuset ni grille: seulement on
conserve le soufflet & le pié - d'estal D 1. On allume
le feu par degrés, ensuite de quoi l'on jette alternativement
des charbons & de la matiere à fondre. Ce
qui est fondu tombe dans le pié - d'estal. Nous parlerons
de cette opération en dernier lieu: enfin ce fourneau, dans cette circonstance, revient au même que
celui de M. Cramer (fig. 26.).
Nous voici enfin parvenus à la derniere piece de
notre fourneau, c'est son fond ou fondement, ou piéd'estal, ou cendrier, qui est de deux especes, comme
nous l'avons déjà dit, & qu'on peut encore le voir
en D 1. & D 2. Le premier est un cylindre dont on
voit assez la grandeur & la figure, pour qu'il soit
inutile d'en parler; on le remplit de brasque pesante: quand elle est un peu seche, on y enfonce un
hémi - sphere de bois au point qu'on juge nécessaire,
pour que la cavité pratiquée puisse contenir la matiere
fondue. On fait au fond un trou d'un pouce de
diametre qui va sortir à l'un des côtés du pié - d'estal;
on est le maître de le tenir ouvert ou fermé. Le soufflet
donne son vent vis - à - vis, directement à la superficie
de la matiere; les scories & les charbons nagent
sur son bain; elle coule sitôt qu'on ouvre le trou.
En un mot Beccher assûre avoir trouvé par ce moyen
plusieurs mines, & fait des observations singulieres
au sujet de cette fusion: quant à la précédente, il est
avantageux qu'on puisse toûjours voir le creuset. Ici
quand la matiere est fondue, on ôte le corps, & elle
reste dans le catin, ou bien on la verse au moyen
d'un manche qu'on lui ajuste dans un crampon qu'on
y attache exprès, si on ne la veut pas faire couler par
le canal qui perce dans le milieu de sa cavité. Nous
nous sommes déjà étendus là - dessus en parlant du
fourneau de fusion de M. Cramer, fig. 26 & suiv.
D 2. est un trépié qui permet l'accès de l'air libre
au fourneau pour différentes opérations, dans les cas
où il ne faut pas un grand feu, c'est - à - dire l'appareil
du soufflet & du pié - d'estal D 1. car quand on employe
la fig. D 2. il faut aussi se servir de la premiere
ou seconde grille. Il donne pourtant une grande flamme
avec la fig. D 2. & la pousse à quelques coudées
par - dessus l'orifice. Il est pour lors d'un usage admirable
dans plusieurs opérations où il n'est pas besoin
de soufflet; mais il faut encore faire remarquer une
autre décomposition & assemblage de ce trépié D 2.
Mettez dessus le dôme renversé, & par - dessus le cercle
B 1. & vous aurez un très - beau fourneau descenfoire.
Vous pourrez mettre ou une cucurbite ou une
retorte dans cette cavité, en faisant passer son cou àtravers le regître du dôme; lutez tout - autour & ajustez
un récipient: allumez le feu par - dessus, & vous
aurez le résultat que vous pouvez desirer, si vous
employez toutefois les matieres qui sont propres à
être traitées par cette voie. En voici assez sur la
structure & les applications de ce fourneau; les Planches & leurs explications doivent y avoir suppléé.
Il faut avoüer que Beccher épuise la matiere par l'étendue
de l'application qu'il donne à son fourneau;
on ne peut qu'admirer ses vûes, & l'on ne doit pas
douter qu'il ne dise vrai. MM. Cramer & Pott ne l'auroient
pas imité & n'auroient pas fait les merveilles
qu'ils racontent, si ce fourneau ou ses imitations n'avoient
un mérite réel; mais il doit user une quantité
considérable de charbon, souvent pour peu de chose,
ce qui est un grand inconvénient; sans compter
qu'il y a encore des opérations qui ne s'y font pas,
& qu'il doit être fort incommode pour d'autres. Cependant nous croyons qu'il peut être exécuté avec
beaucoup de fruit, & qu'il peut être très - utile: au
reste, on appercevra aisément entre les trois fourneaux en question les différences qui nous les ont fait
admettre tous trois. On trouve quelque analogie
entre ceux de Beccher & de Glauber.
Le fourneau de fusion de M. Cramer (fig. 26. &
suiv.), que nous avons décrit à sa section, peut encore
servir aux distillations & sublimations; opérations
très - utiles & même nécessaires; ensorte qu'un
essayeur, par exemple, qui n'auroit point l'athanor,
pourroit se servir de celui - ci, pour y faire une partie
des opérations qu'il exécute au moyen de l'athanor.
Ce dernier lui est pourtant moins nécessaire
qu'un fourneau de fusion; car il peut faire dans celui - ci tout ce qu'il fait dans l'autre, à l'exception du
coupellement qu'il fait dans son fourneau d'essai, &
même encore le peut - il par la nouvelle variété suivante.
Pour le rendre propre à tous ces usages, on
n'a qu'à pratiquer au corps du fourneau une ouverture
garnie d'une porte roulant sur deux gonds a (fig.
30.), semblable à celle du dôme. Sa base sera éloignée de trois pouces de l'anneau inférieur; elle sera
arquée, large de quatre pouces par le bas, & haute
d'autant dans son milieu. La cavité elliptique en question
recevra son complément du dôme (fig. 31.),
garni de deux poignées au moyen desquelles on
pourra le manier aisément. Ce dôme destiné à recevoir
le chauderon de fer (fig. 60.), muni d'une
échancrure, en aura pareillement une c, qui répondra
à la premiere. Cette échancrure sera fermée d'une
porte quand il faudra faire des opérations auxquelles
le chauderon de fer ne devra point avoir de
part. Pour favoriser le jeu de l'air & la conduite du
feu, l'on pratiquera, tant dans le cercle supérieur du
dôme, que dans le bord du chauderon, quatre trous
ou regîtres à égale distance les uns des autres; &
l'on fera autant de couvercles pour fermer le passage
à l'air, quand on le jugera à - propos, quoique la
porte du cendrier (fig. 28.), employée avec le fourneau dont il s'agit, puisse servir aux mêmes sins: les
figures & l'explication que nous en avons données
répandront de nouvelles lumieres sur ce que nous
venons d'exposer.
La variété dont nous venons de parler peut être
employée dans la place de la fig. 26. & lui est même
semblable, excepté qu'elle est separée en deux corps,
& qu'elle a des portes que l'autre n'a pas, mais qui
ne préjudicient absolument à aucune opération, si
ce n'est peut - être en donnant moins de chaleur & en
s'échauffant plus lentement que la fig. 26.
Depuis fort long tems on a pensé aux fourneaux
polychrestes, comme on l'a vû par celui de Dornaeus: depuis ce tems - là, & peut - être même avant,
tous les auteurs en ont donnés & se sont exercés
pour en trouver: Libavius, Béguin, Rhénanus,
Glauber, Glaser, le Fêvre, Charas, le Mort, Beccher, Barner, Lémery, Manget, Barchusen, M. Teichmeyer, Boerhaave, Juncker, Cramer, Cartheuser,
& Vogel, dont la succession est indiquée par l'ordre
que je leur donne, en ont parlé les uns plus, les autres
moins: il n'y a pas jusqu'au fourneau de notre fig. 1.
qui ne se mêle aussi d'être polychreste; car on peut
s'exprimer de la sorte après avoir parcouru la description
de celui de Beccher. Le premier que je sache
qui l'ait donné, & donné comme polychreste, est
Béguin, comme je l'ai déjà dit en son lieu; je dis
comme polychreste. Voyez la section suivante des philo -
[p. 247]
sophiques; il est intitulé, pag. 80. de cet auteur, servant a toutes les opérations de Clûmie. Il en dit ce qu'on
peut penser là - dessus, & moins même quand on
se rappelle le détail de Beccher.
Voici ce qu'on peut dire en particulier sur les fourneaux de decoction proprement dite, où l'on expose
la matiere dans une bassine, un chauderon, une
cuilliere de fer, &c. avec l'eau exposée à l'air libre.
Ce sont les mêmes qui servent pour la distillation à
feu nud, si le chauderon est surmonté d'un chapiteau;
au bain - marie, si l'on met dans ce chauderon un
vaisseau d'étain qui baigne dans l'eau contenant la
matiere à distiller, soit à sec, avec l'eau ou l'esprit - devin; au bain de vapeur, si ce même vaisseau d'étain
n'étant pas assez profond pour baigner dans l'eau, qui
en même tems n'est pas en assez grande quantité pour
y atteindre, n'en reçoit que la vapeur. Voy. les artic.
Vaisseaux, Alembic, Polychreste, Bainmarie, & Bain de Vapeur
. Si l'on change l'intermede
des bains, ils seront pour lors des bains de
cendre, de sable, de limaille de fer, de farine de
briques, qui y sont placés dans une poêle de fer ou
capsule: ils servent encore aux calcinations qu'on y
fait dans des capsules de terre ou de fer. On les employe
aux distillations dans la cucurbite basse ou
chapelle des anciens, en passant une barre de fer ou
deux dans des trous faits exprès, & lutant le contour
de la cucurbite. Si les regitres ne sont point au - dessous
du bord, on en laisse en lutant, & on les détourne
du vaisseau distillatoire au moyen du lut; ainsi
c'est une peine de moins quand ils sont au - dessous
du bord & non dans le bord intérieur. Les mêmes
fourneaux servent encore pour les sublimations du
soufre, dà benjoin, &c.
Les fourneaux de lampe qui sont encore des polychrestes,
ne sont, comme nous l'avons dit, que des
fourneaux de décoction ou de distillation ascensoire
& latérale, & par conséquent de bain marie, de vapeurs,
de cendres, de sable, ou de limaille, & de farine
de briques, qui, au lieu d'être chauffes par des
charbons, le sont par une ou plusieurs meches de
lampe, parce qu'on a pour but d'y soûtenir le degré
fixe d'une chaleur modérée. Voyez les fig. 64 & 65.
On ne fait plus guere d'usage aujourd hui des fourneaux de lampe en Chimie; le second peut servir
pour la distillation latérale à feu nud. Voyez la section
des philosophiques. Le premier est un de ces petits
instrumens qui ne sert plus guere qu'à ceux qui
ne sont point chimistes de profession; quelques physiciens,
les gens du monde, & des femmes l'employent
à distiller quelques onces d'esprit - de - vin,
d'eau - de - vie, d'eau de - lavande, de.thym, de romarin,
de fleurs - d'orange, simples on spiritueuses, de
roses, de myrthe, de lait, de miel, &c. (voyez Abdéquer); à faire chauffer du bouillon, de la tisanne,
&c.
On peut regarder à juste titre les athanors comme
des poly chrestes; mais on ne peut pas dire l'inverse:
c'est pour cette raison que nous avons mis les polychrestes
après.
Le fourneau de verrerie de M. Cramer (fig. 39 - 44.
voyez la section des fourneaux de fusion) est aussi un
polychreste; les fourneaux d'essai, & les fourneaux
de fusion en sont aussi: mais il ne faut pourtant pas
abuser de ce terme au point de l'étendre à un fourneau où l'on fait deux opérations de même genre,
comme on l'a déjà dit, comme les bains - marie &
tous les bains, les fourneaux de décoction, &c. car il
n'est point de fourneau où il ne se fasse qu'une seule
opération; & de la sorte tous les fourneaux seroient
des polychrestes. Au reste il seroit peut - être bon que
cela fût; la manie d'en faire de particuliers pourroit
cesser.
J'ai dit qu'on avoit étendu la nécessité de faire ser<cb->
vir un fourneau à plusieurs opérations de différens genres,
& ce sont sans doute celles d'un même genre
qui y ont conduit; la preuve en est que les premiers
fourneaux qui ont été employés dans ce dessein, ont
pris le nom de polychrestes, que l'enthousiasme a ensuite
converti en celui de catholiques ou universels.
Cependant celui de Beccher, qui est le plus en droit
de prétendre à cette prérogative, n'atteindra jamais
à cette universalité; & les enthousiastes du polychrestisme seront obligés de convenir qu'il laisse les
autres bien loin derriere lui, comme plus précaires;
tels que les athanor & fourneau de fusion de Cramer: mais il y a toute apparence qu'il ne rond pas
des corps d'aussi difficile susion que celui de M. Pott.
Des fourneaux philosophiques. On donne ce nom
aux fourneaux qui sont particulierement consacrés au
grand oeuvre, quoiqu'il s'entende aussi de tous ceux
qui sont du ressort de la chimie philosophique, ainsi
qu'on peut s'en convaincre par le titre de nouveaux
fourneaux philosophiques, donné par Glauber au traité
qu'il a fait sur cette matiere. Ces sortes de fourneaux different peu des autres, & ils peuvent être
employés à la plûpart des mêmes usages; de même
que les autres peuvent presque tous être employés
à la confection de la pierre philosophale (voy. Philosophie hermétique), en les ajustant toutefois
à ce sujet.
Nous n'avons donné qu'un exemple de fourneaux
philosophiques, à moins qu'on ne comprenne au même
rang les fourneaux à lampe (fig. 64 & 65.) les
fourneaux de Geber (fig. 5 & 98), qui sont aussi des
fourneaux philosophiques; c'est celui de la Roquetaillade, plus connu sous le nom de Rupescissa, que
la coûtume pédantesque de son tems lui avoit fait
prendre: la coupe de ce fourneau que nous avons
prise seule, se trouve pag. 48. de son livre in - 4° intitulé
liber lucis; ouvrage qui, pour le dire en passant,
n'a point été mis au nombre de ceux de ce cordelier,
dans la notice que nous en a donné Bayle.
Voyez son diction. critiq. art. Roquetaillade, note E.
Ce chimiste appelle ce fourneau son athanor: athanor
à la vérité, est un nom qu'Abulcasis donne indifféremment
à toutes sortes de fourneaux chimiques,
comme on peut le voir dans son liv. II. où il traite
du vinaigre distillé. Mais il est bon de savoir que ceux
qui ont traité de la pierre philosophale, ont entendu
particulierement sous ce nom le fourneau qui leur
servoit à cet usage, où ils convertissent, par ex. leur
mercure préparé en lait de la Vierge, c'est - à - dire le
dissolvent, le coagulent, & l'exaltent. Ce fourneau
des arcanes, ce fourneau d'Hermès & des philosophes,
ce fourneau enfin qui portera tel beau nom
qu'il plaira à MM. les adepres de lui donner, doit
être construit de façon qu'il puisse fournir trois degrés
de chaleur à la volonté de l'artiste, & sans que
le feu frappe immédiatement la matiere du grandoeuvre,
ni le vaisseau qui la contient; il faut qu'il ne
donne précisément qu'une vapeur chaude qu'on soit
le maître de modérer. Il faut donc qu'il ait un foyer
& même une grille de cendrier, en cas qu'on veuille
le chauffer avec le charbon, comme cela se fait
d'ordinaire; car on peut avoir recours au ventre de
cheval ou au feu de lampe; l'ouvroir y est nécessaire: c'est pour éloigner le vaisseau du feu, qu'on a
fait le soyei élevé, & pour reverbérer la chaleur
qu'on a mis un dôme; ensorte que ce fourneau est fait
de quatre pieces. Ce dôme est concave, parce que
le ciel a cette figure (ou paroît l'avoir); ce qui lui a
fait donner le beau nom d'Uraniscus. Il a des trous
autour pour regîtres; celui du milieu sert à observer
le degré de chaleur: Libavius qui a représenté ce
fourneau, pag. 166. de son alchimie, dit l'avoir fait
exécuter en terre, s'en être servi, y avoir vû ce noir
qu'on appelle la tête du corbeau, & y avoir fait tou<pb->
Next page
The Project for American and French Research on the Treasury of the
French Language (ARTFL) is a cooperative enterprise of Analyse et
Traitement Informatique de la Langue Française (ATILF) of the
Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), the Division
of the Humanities, the Division of the Social Sciences, and Electronic
Text Services (ETS) of the University of Chicago.
PhiloLogic Software, Copyright © 2001 The University of Chicago.