ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"861"> de la génération, dans les personnes du sexe, est un effet de la pléthore générale & particuliere, de la surabondance d'humeurs qui se forme dans leur corps, lorsqu'elles ont atteint l'âge où il ne prend presque plus d'accroissement: les sucs nourriciers qui étoient employés à cet usage, restent dans la masse du sang, en augmentent le volume, & font, par les lois de l'équilibre dans les solides du corps humain, que cet excès, qui est d'abord distribué dans tous les vaisseaux, est porté, par la résistance générale qu'ils opposent à être dilatés ultérieurement, dans ceux où cette résistance est moindre. Voyez Equilibre (Economie anim.). Tels sont les vaisseaux utérins, par la disposition qui leur est propre dans l'état naturel. Voyez Matrice. Ils sont donc dans le cas de céder de plus en plus, à proportion que la pléthore augmente; mais ils ne cedent que jusqu'au point où le tiraillement de leurs parois devient une cause de réaction nécessaire pour le faire cesser, sans quoi ils perdroient absolument leur ressort: alors le surcroît de sang continuant à y être porté, force les orifices des vaisseaux lymphatiques, pénetre & se loge dans ceux - ci, les remplit à leur tour outre mesure; aussi - bien que les sinus qui en dépendent; ensorte que tous ces derniers vaisseaux ayant cédé au point où ils ne pourroient pas le faire davantage sans se rompre, sont aussi excités à réagir, pour se vuider de l'excès des fluides qu'ils contiennent. Les divisions ultérieures de ces vaisseaux sont forcées à recevoir cet excès, & se dilatent à ce point, que les collatéraux qui s'abouchent dans la cavité de la matrice & du vagin, qui n'y laissent, hors le tems des regles, suinter qu'une petite quantité d'humeur lymphatique, comme salivaire, pour humecter & lubrifier ces cavités, & qui servent dans le tems de la grossesse à établir la communication entre la substance de la matrice & le placenta (voyez Génération), sont dilatés de maniere à laisser passer d'abord une plus grande quantité de cette humeur, & ensuite la colonne de sang qui s'y fait une issue: ainsi ce dernier fluide s'écouie jusqu'à ce que l'excédent qui avoit causé la surabondance d'humeur dans tout le corps, & dans la matrice en particulier, soit évacué, & permette à tous les vaisseaux de joüir de leur force systaltique ordinaire; de maniere que cet écoulement diminue & finit comme il a commencé. Les vaisseaux lymphatiques se resserrent peu - à - peu, au point de ne plus recevoir de globules rouges, & même de ne laisser échapper de la lymphe que de moins en moins, jusqu'à ce que les choses reviennent dans l'état où elles étoient, lorsque les vaisseaux utérins, tant sanguins que lymphatiques, ont commencé à être forcés à recevoir plus de fluides qu'à l'ordinaire.

Cela posé en général concernant la maniere dont se fait l'écoulement du sang menstruci, il se présente naturellement à observer qu'il est donc précédé & suivi d'un flux de matiere lymphatique que l'on peut regarder comme des fleurs blanches, qui paroissent naturellement avant & après les fleurs rouges; mais comme celles - là subsistent très - peu dans l'état de santé, on ne les distingue pas des regles mêmes, tant que l'écoulement de l'humeur blanche est peu considérable par sa quantité & par sa durée, après celui de l'humeur rouge: ainsi dans le cas contraire, où la pléthore est non - seulement assez considérable, assez subsistante pour donner lieu aux menstrues, mais encore pour empêcher qu'après qu'elles sont fixées, les vaisseaux lymphatiques se resserrent tout de suite assez pour ne plus laisser échapper rien de ce qu'elles contiennent; le flux d'humeurs blanches, qui se fait après celui du sang, n'étant pas d'aussi peu de durée qu'à l'ordinaire, & subsistant au - delà, à proportion de la quantité de fluide surabondant qui don<cb-> ne lieu à l'effort, à la contro - nitence de tous les autres vaisseaux du corps pour ne pas s'en charger, & pour la forcer à se jetter sur la partie qui résiste le moins, & à se vuider par les conduits qui en favorisent la vuidange.

Mais cet écoulement étant de trop, respectivement à ce qui se passe en santé, doit donc à cet égard être mis au nombre des lésions de fonctions: c'est la maladie des fleurs blanches. Si la cause qui la produit, c'est - à - dire la surabondance d'humeurs, se renouvelle continuellement au degré suffisant pour retenir les vaisseaux lymphatiques utérins toûjours trop dilatés, les fleurs blanches seront continuelles: si celle - là n'est qu'accidentelle, son effet cessera bientôt avec elle: si elle a lieu souvent par intervalles, les fleurs blanches reviendront aussi de tems en tems; & elles disposeront la partie, dont les vaisseaux souvent forcés perdront peu - à - peu leur ressort, à rendre l'écoulement plus fréquent & ensuite continuel, par l'habitude que contracteront les humeurs à s'y porter, comme dans la partie du corps la plus foible.

Par conséquent cet écoulement devra être attribué au seul vice des solides, au relâchement excessif des vaisseaux utérins, puisqu'on peut concevoir dans ce cas que les fleurs blanches peuvent avoir lieu sans qu'il précede aucune pléthore; & que la portion ordinaire des fluides distribuée à ces vaisseaux suffit pour en fournir la matiere, attendu que la force retentrice leur manque: d'où il s'ensuit souvent que la diminution de la masse des humeurs, qui se fait par cette voie, est suffisante pour en emporter le sur abondant à mesure qu'il se forme; ce qui fait qu'il ne se ramasse point de sang dans la substance de la matrice; & que la matiere des menstrues manquant, elles n'ont pas lieu, & sont suppléées par les fleurs blanches, quant à la diminution du volume des humeurs.

Mais si au vice des solides de cette partie, se joint une dissolution des fluides en général, les fleurs blanches seront bien plus abondantes, attendu que dans ce cas le défaut de consistance des humeurs rendra l'evacuation encore plus facile; elle deviendra véritablement colliquative, & sera suivie de tous les mauvais effets que l'on peut aisément se représenter. C'est par cette raison que, selon l'observation d'Eugalinus, les regles manquent aux femmes scorbutiques, & sont suppléées par des fleurs blanches ordinairement fort abondantes.

Les différentes qualités dominantes de la matiere de ce flux contre nature, doivent être imputées d'abord à la masse des humeurs qui la fournit; mais elle en contracte aussi de particulieres, par le plus ou moins de séjour qu'elle fait dans les cavités des parties où s'en fait l'épanchement: ainsi la chaleur de ces cavités dispose cette matiere retenue à se corrompre, par une sorte de putréfaction qui la rend d'autant plus acre, plus jaune, plus fétide, qu'elle étoit plus bilieuse en sortant des vaisseaux utérins. De cette acrimonie s'ensuit la disposition à procurer des érosions, des exulcérations aux parois de ces cavités. Plus la matiere des fleurs blanches est abondante & continuelle, moins elles séjournent dans ces cavités; moins elle contracte de nouvelles qualités, moins elle est disposée à devenir de mauvaise odeur, & à procurer les symptomes qui viennent d'être mentionnés.

Ces qualités vitieuses de la matiere des fleurs blanches, ne sont donc qu'accidentelles; elles ne doivent pas la faire regarder comme excrémentitielle, selon l'idée qu'en avoient les anciens. Cette matiere n'appartient pas plus au genre d'humeurs de cette derniere qualité, que le sang menstruel lui - même. Voyez Menstrues Il y a cependant une exception à faire concernant une autre sorte d'écoulement contre nature, sans être virulent, dont la différence & même [p. 862] l'existence n'ont guere été remarquées, que l'on pourroit regarder comme des fausses fleurs blanches, entant qu'il leur ressemble, sans avoir la même source, ou comme une gonorrhée bénigne, puisqu'il n'est autre chose qu'une excrétion trop abondante de l'humeur prostatique de la mucosité des lacunes du vagin, une sorte de catarrhe des organes qui servent à séparer l'humeur excrémentitielle destinée à lubrifier ce canal.

Tout ce qui peut augmenter la pléthore générale dans les femmes, & sur - tout celle de la matrice en particulier, en y attirant, en y déterminant un plus grand abord d'humeurs: tout ce qui peut affoiblir le ressort des vaisseaux de cette partie, doit être mis au nombre des causes procatartiques des fleurs blanches; comme la vie sédentaire, d'où suit trop peu de dissipation; l'excès d'alimens, la bonne chere, d'où suit une confection trop abondante de bon sang; la transpiration, ou toute autre évacuation ordinaire, supprimée, d'où résulte la surabondance des fluides; le tempérament luxurieux; les fortes passions, effets de l'amour; le coït trop fréquent, ou toute autre irritation des parties génitales, qui, par les tensions spasmodiques qu'ils y causent, gênent le retour du sang, le retiennent dans les vaisseaux utérins, causent la dilatation forcée trop fréquente de ceux - ci, d'où la perte de leur ressort, & les autres effets mentionnés en parlant des causes immédiates de la maladie dont il s'agit; les grossesses multipliées, les fausses - couches répetées, qui contribuent aussi beaucoup, sur - tout dans les personnes cachectiques, à déterminer vers la matrice une trop grande quantité d'humeurs, à affoiblir le ton de ses vaisseaux, par conséquent à établir la disposition aux fleurs blanches, &c.

Il suit de tout ce qui vient d'être dit des différentes causes de cette maladie, que toutes les personnes du sexc, dans quelqu'état qu'elles vivent, mariées ou non - mariées, jeunes ou vieilles, sont susceptibles de contracter les différens vices qui établissent la cause des fleurs blanches. Fernel dit qu'il a vû des filles de sept à huit ans affectées de cette maladie: l'observation commune apprend aussi que des femmes y sont sujettes pendant la grossesse, & d'autres dans l'âge le plus avancé; ainsi elle peut arriver avant le tems des regles, elle en est quelquefois l'annonce: mais elle n'a lieu le plus souvent qu'après que la disposition au flux menstruel est bien établie, & elle succede assez communément à la suppression de ce flux, soit que celle - ci ait lieu par maladie, ou qu'elle soit naturelle par l'effet de l'âge. Les fleurs blanches sont souvent un supplément aux menstrues, nécessaire & même salutaire; mais dans l'un & dans l'autre cas, l'exercice, la vie laborieuse, comme on le voit à l'égard des femmes de campagne, dispense la plûpart de celles qui s'y adonnent encore plus utilement, de ces incommodités dans tout le tems de leur vie.

L'écoulement d'une humeur quelconque qui n'est pas du pus, sur - tout lorsqu'elle est blanchâtre, suffit pour caractériser la maladie des fleurs blanches, dans les personnes à l'égard desquelles il n'y a lieu de soupçonner aucune maladie vénérienne. Il n'y a donc que la gonorrhée, c'est - à - dire la chaudepisse proprement dite, de cause virulente, ou le flux prostatique, avec lequel on puisse les confondre; mais outre que cette sorte de flux vérolique est ordinairement beaucoup moins abondant encore que l'écoulement le moins considérable des fleurs blanches, il y a un moyen de les distinguer sûrement, proposé par Baglivi, prax. medic. lib. II. cap. viij. sect. 3. qui n'étoit pas inconnu à Ambroise Paré, quoique les auteurs intermédiaires n'en fassent pas mention. Voyez les oeuvres d'Amb. Paré, liv. XXIV. chap. lxiij. Il consiste, ce moyen, à observer si l'écoulement équivoque paroît continuer dans le tems des regles, ou non; la cessation est une preuve qu'il n'est autre chose que les fleurs blanches, & sa continuation assûre que c'est une gonorrhée. La raison en est évidente: celle - ci dépend d'une source (c. à d. les glandes prostates, ou les lacunes muquenses du vagin, ou les ulceres formés dans le canal de l'urethre, les glandes & les parties voisines) indépendante du flux menstruel, au lieu que la matiere des fleurs blanches est fournie par les mêmes vaisseaux que celle des menstrues.

Mais il n'est pas aussi aisé de distinguer le flux catarrheux du vagin, dont il a été question ci - devant sous le nom de fausses - fleurs blanches, c'est - à - dire la gonorrhée simple, qui n'a aussi rien de commun avec les menstrues, de celui qui est produit par une cause virulente: on ne peut guere s'assûrer de n'être pas trompé à cet égard, quand on a affaire avec des personnes d'une vertu équivoque, dont on peut presque toûjours suspecter la confession; cependant si on peut observer la matiere de l'écoulement dans sa source ou sur le linge, on peut aussi y appliquer la maniere de faire la différence entre une gonorrhée virulente, à l'égard des hommes, & ce qui n'est qu'un flux de l'humeur prostatique. Voyez Gonorrhée.

On peut juger de l'intensité des causes qui ont donné lieu aux fleurs blanches, par celle des symptomes qui accompagnent ou qui sont les suites de cette affection: ainsi dans celle qui n'est qu'une extension du flux lymphatique, ordinairement, & après les regles, extension qui consiste en ce qu'il dure assez pour être rendu bien sensible pendant un jour ou deux, il ne s'ensuit le plus souvent aucune lésion de fonctions marquée: elle est souvent dans ce cas, comme il a été dit, un supplément avantageux au défaut de l'évacuation naturelle du sang surabondant; ou au moins elle peut durer long - tems, toute la vie, sans qu'on en soit, pour ainsi dire, incommodé, lorsque le sujet est d'ailleurs d'un bon tempérament.

Dans les sujets cachétiques, les fleurs blanches ainsi périodiques & faisant comme partie du flux menstruel, annoncent le peu de consistence de la masse des humeurs, la sérosité surabondante, le sang mal travaillé; ce qui est le plus souvent un effet des vices contractés dans les premieres voies par le défaut de sucs digestifs de bonne qualité, par une suite des obstructions du foie, de la rate, &c. en un mot, par de mauvaises digestions.

Lorsque les fleurs blanches sont continuelles, ou qu'elles reviennent souvent irrégulierement, elles sont accompagnées des symptomes de la cachexie, de la pâleur du visage, quelquefois de la bouffissure de cette partie, sur - tout aux paupieres, du dégoût, de l'abattement des forces; parce que cette maladie est un symptome elle - même du vice dominant dans les solides & dans les fluides, c'est - à - dire du relâchement de l'atonie dans ceux - là, & de la cacochymie dans ceux - ci. Voyez Débilité, Équilibre, Fibre, Cachexie, Cacochymie, Chlorose .

Lorsque la matiere des fleurs blanches est fort séreuse, & qu'elle détrempe continuellement la matrice & le vagin, elles rendent ordinairement les femmes stériles, parce qu'elles éteignent & noyent, pour ainsi dire, la liqueur séminale, selon que le dit le judicieux Hippocrate, Aphor. xlij. sect. 5. Il s'ensuit aussi très - souvent un relâchement si considérable des parois de ce canal, que le poids de la matrice qui tend à la faire tomber vers l'orifice extérieur des parties génitales, fait replierce canal sur lui - même, & établit la maladie qu'on appelle chûte de matrice, prolapsus uteri. Voyez Matrice.

Si la matiere des fleurs blanches coule moins abondamment, est d'une qualité bilieuse, séjourne dans

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