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Feu, Cautere (Page 6:631)
Le feu actuel ou le cautere actuel n'est à proprement parler que le feu même uni & communiqué à tels corps ou à telles matiere, solides capables de le retenir en plus ou moins grande quantité, & pendant un espace de tems plus ou moins long.
Ses effets sur le corps de l'animal varient selon la différence de ses degrés.
1°. L'irritation des solides, la raréfaction des humeurs, sont le résultat d'une legere brûlure.
2°. Cette brûlure est - elle moins foible? La sérosité s'extravase; les liens qui unissoient l'épiderme à la peau sont détruits; & cette cuticule soûlevée, nous appercevons des phlictenes.
3°. Une impression plus violente altere & consume le tissu des solides: par elle les fluides sont absorbés; leurs particules les plus subtiles s'exaltent & s'évaporent; de maniere que dans le lieu qui a subi le contact du feu, on n'entrevoit qu'une masse noirâtre que nous nommons escarre, & qui n'est autre chose qu'un débris informe des solides brûlés & des liquides dessechés ou concrets.
C'est cette escarre que nous nous proposons toûjours de solliciter dans l'usage & dans l'emploi que
De la nature des sucs qui s'écoulent & qui forment la matiere suppurée, dépen lent une heureuse réunion & une prompte cicatrice: des liqueurs qui sont le fruit d'une fermentation tumultueuse, & dont l'acreté, ainsi que l'exaltation de leurs principes, démontrent plûtôt en elles une faculté destructive qu'une faculté régénérante, ne nous prouvent que le retardement de l'accroissement que nous desirons; elles le favorisent, il est vrai, mais indirectement, c'est - à - dire en dissipant les engorgemens qui s'opposent à l'épanchement de cette lymphe douce & balsamique, qui, parfaitement analogue à toutes les parties du corps de l'animal, & répandue sur les chairs, en hâte la reproduction par une assimüation inévitable. Tant que ces matieres qui ont leur source dans les humeurs qui gorgent les cavités & les interstices des vaisseaux, subsistent & fluent: toute régénération est donc impossible. Dès qu'elles font place à ce suc, dont toutes les qualités extérieures nous attestent l'étroite affinité qui regne entre ses molécules & les parties qui constituent le fond même sur lequel il doit être versé, & que ce même suc peut suinter des tuyaux lymphatiques dans la plaie, sans aucune contrainte & sans aucun mélange d'un fluide étranger capable de le vicier & de combattre ses effets, la réunion que nous attendons est prochaine.
Elle sera dûe non - seulement à la juxta - position & à l'exsication de la seve nourriciere charriée vers les extrémités des capillaires dégagés, conséquemment aux mêmes mouvemens des solides & des fluides, qui dans la substance engorgée formoient le pus, mais encore à un leger prolongement des canaux. J'observe d'une part que le jour que les liquides se sont frayés n'est pas tel que le diametre des vaisseaux dilacérés soit dans un état naturel: l'issue des liqueurs n'est donc pas absolument libre. Or la résistance qu'elles épiouvent, quelque foible qu'elle puisse être, les oblige de heurter contre les parois de ces mêmes vaisseaux, qui, vû la déperdition de substance, ont cessé d'être gênés, comprimés, & soûtenus par les parties qui les avoisinoient: ainsi leurs fibres cédant aux chocs & aux coups multipliés & réitérés qu'elles essuient, se trouvent nécessairement & facilement distendues dans le vuide: cette augmentation de longueur ne peut être telle néanmoins qu'elle procure l'entiere réunion; aussi je remarque d'un autre côté que les liquides consomment l'ouvra<pb-> [p. 632]
Les moyens de cette reproduction nous indiquent 1°. comment les cicatrices, sur - tout celles qui sont considérables, forment toûjours des brides; ils nous apprennent 2°. pourquoi elles sont plus basses que le niveau de la peau; 3°. par eux nous pouvons expliquer comment, dans cette substance régénérée, on ne voit au lieu d'un ensemble de tuyaux exactement cylindriques & parfaitement distincts, qu'un amas de petites cavités dont les parois, irrégulierement adhérentes les unes aux autres, ne présentent, pour ainsi dire, qu'un corps spongieux, mais assez dense, dont la solidité accroît à mesure qu'il s'éloigne du fond, & que les fluides y sont plus rares, ce qui rend la cicatrice extérieurement plus dure & plus compacte; 4°. enfin ils nous dévoilent sensiblement les effets des cicatrices multipliées.
Les suites de la cautérisation des parties dures sont à peu - près les mêmes que celles qui ont fixé notre attention relativement aux parties molles.
Le feu appliqué sur les os, desseche en un instant les fibres osseuses, il crispe, il oblitere les vaisseaux qui rampent entr'elles; les sucs nécessaires que ces vaisseaux charrient, sont aussi - tôt exaltés & dissipés, & toute la portion soûmise à l'instrument brûlant, jaunit, noircit; elle cesse d'être vivante, & répond precisément à ce que nous venons de nommer escarre. Ici elle n'est jamais aussi profonde. La chûte en est plus lente & plus tardive, parce que les vaisseaux de la substance osseuse ne sont point en aussi grande quantité, & que les sucs y sont moins abondans. Quoi qu'il en soit, les bornes de l'exsication sont celles de la partie ruinée qui doit être détachée de la partie saine, & non morte. C'est à la surface de celle - ci que les oscillations redoublées qui commencent à ébranler la premiere, se font sentir. Ces oscillations sont suivies de la rupture des canaux à leurs extrémités, la séparation desirée se trouve alors ébauchée; mais ces canaux dilacérés, qui laissent échapper une humeur qui s'extravase, végétant, pullulant eux - mêmes, se propageant & s'unissant insensiblement, fournissent - ils une chair véritable? l'exfoliation sera bien - tôt accomplie, vû l'accroissement de cette même chair qui soûlevera & détachera entierement enfin le corps étranger, & qui acquierra une consistance aussi ferme & aussi solide que celle dont joüissoit le corps auquel elle succede.
Ces effets divers que je ne pouvois me dispenser de détailler, parce qu'ils ont été jusqu'ici également inconnus aux écuyers qui ont écrit, aux maréchaux qui pratiquent, & aux demi - savans qui dogmatisent, sont la base sur laquelle nous devons asseoir tous les principes en matiere de cautérisation.
Il est des cas où elle est salutaire, il en est où elle est nuisible, il en est où elle est inutile.
Ceux dans lesquels l'énergie du feu est évidente, sont, quant aux parties dures, les caries, puisque l'exfoliation qu'il procure n'est autre chose que la chûte de la portion viciée de l'os; & quant aux par<cb->
Elle est incontestablement nuisible, lorsque l'oedeme reconnoît pour cause une cachexie ou une mauvaise disposition intérieure; elle est toûjours pernicieuse dans tous les cas où l'inflammation est marquée sensiblement. Tout habile praticien la rejette, quand il prévoit qu'elle peut offenser des vaisseaux considérables; & il la bannit à jamais relativement aux parties tendineuses, aponévrotiques & nerveuses, attendu les accidens mortels qui peuvent en être les suites. [p. 633]
Son insussisance enfin est réelle, & son inutilité manifeste, dès que l'action du feu n'a pas lieu immédiatement sur la partie malade. Elle ne produit & ne peut donc rien produire d'avantageux, par exemple, dans les luxations, dans les entorses, dans toutès les extensions forcées des tendons, des muscles, des ligamens, & des fibres nerveuses, dans les courbes, dans les éparvins, dans les suros, dans les fusées, dans les osselets, &c. dans de semblables occasions en effet, nous ne portons jamais le cautere sur le siége du mal. J'ajoûterai que dans la plûpart d'entr'elles nous ne pourrions outre - percer le cuir & parvenir à ce siége, sans un péril certain & éminent, & sans rendre l'animal la victime d'une opération non moins préjudiciable & non moins superflue dans une multitude d'autres cas que je ne spécifierai point, la doctrine que j'ai établie & les vérités que je consacre ici, suffisant sans doute à la révélation de toutes les erreurs de la Chirurgie vétérinaire à cet égard.
Parmi les matieres propres à l'oeuvre de la cautérisation, les métaux nous ont parû mériter la préférence. Nos instrumens sont ou de fer, ou de cuivre, ou d'argent. Les escarres qui résultent de l'application des cauteres formés de ce dernier métal, sont moins considérables: mais la dépense que ces cauteres occasionneroient, oblige nos maréchaux à employer plus généralement le cuivre & le fer. Nous donnons à ces métaux des formes diverses. Il est des cauteres plats; il en est à noeud ou à bouton; il en est de cutellaires; il en est dont l'extrémité se termine en S, &c. Ceux dont on fait fréquemment usage, sont les cutellaires, les essiformes, & les cauteres à boutons.
Le cautere cutellaire est un demi - croissant, dont le contour intérieur tient lieu de côte au tranchant non assilé, formé par le contour extérieur. Cette portion de métal est toûjours emmanchée par sa partie la plus large & près de la côte, d'une tige, ou postiche, ou de même métal, à laquelle on donne plus ou moins de longueur. Ce manche est dans le même plan que la lame, & dans la même direction que le commencement de la courbure au départ du manche.
Le cautere essiforme est fait d'une lame de métal contournée & enroulée de telle sorte, qu'en la présentant de champ sur une surface, elle y imprime le caractere S. Cette lame enroulée a environ une demi - ligne d'épaisseur, & l'S qu'elle trace est d'environ huit ou neuf lignes. Elle est ordinairement tirée d'une longue tige qui lui sert de manche, & dans le cas où elle seroit d'un autre métal, on lui en adapteroit une d'environ un pié de longueur.
Le cautere à bouton n'est proprement qu'une tige de fer terminée en une pointe courte, à quatre pans à - peu - près égaux: quelquefois ce bouton est de figure conoïde, & tel que celui que les Chirurgiens appellent bouton à olive.
Il est encore des cauteres destinés à passer des sétons.
Voyez
Les Maréchaux se servent du couteau pour donner le feu en croix, en étoile, en maniere de raies plus ou moins étendues, différemment disposées, & qui représentent tantôt une patte d'oie, tantôt des feuilles de fougere ou de palme, tantôt la barbe d'une plume. Quelquefois ils l'appliquent en forme de roue, ils impriment alors très - léeerement des especes de raies dans l'intérieur du cercle qu'ils ont marqué. Il en est qui au lieu de ces raies, y dessinent avec un cautere terminé en pointe, un'pot de fleur: les armoiries du maître auquel appartiennent l'animal, une couronne, un oiseau, une rose ou autres fleurs quelconques, &c. soins inutiles, qui ne suffisent que trop souvent pour élever un aspirant au grade de maître, & qui, relativement à l'art, seront toûjours envisagés par ceux qui en connoîtront les vrais prin<cb->
Les cauteres à bouton sont employés dans les cas où
le maréchal veut donner quelques grains d'orge, ou
semences de feu, c'est - à - dire, quand il se propose d'en
introduire, par exemple, quelques pointes sur des
lignes déjà tracées avec le cautere cutellaire. Ces
boutons lui sont encore d'un grand secours, lorsqu'il s'agit d'ouvrir un abcès, de percer une tumeur,
mais il est blâmable de ne pas considérer avec assez
d'attention les circonstances dans lesquelles l'instrument
tranchant seroit préférable. Voyez
Quant aux cauteres essiformes, ils sont véritablement
efficaces, eu égard aux seymes, en les appliquant
transversalement, & de façon que l'S placée
à l'origine de la solution de continuite, y réponde
par son milieu; ses deux extrémités s'étendent également sur chaque portion de l'ongle disjoint & séparé.
Voyez
Je ne peux me refuser ici à l'obligation de ne pas omettre quelques maximes qui ont rapport au manuel de la cautérisation.
La nécessité de s'assûrer parfaitement du cheval
sur lequel on doit opérer, ne peut être révoquée en
doute. Les uns le renversent & le couchent à terre,
les autres l'assujettissent dans le travail; il en est qui
se contentent de se mettre, par le moyen des entraves
& des longes, à l'abri des atteintes qu'ils pourroient
en recevoir. Toutes ces précautions différentes dépendent
du plus ou du moins de sensibilité & de docilité de
l'animal, du tems que demande l'opération, & des
douleurs plus ou moins vives qu'elle peut susciter.
C'est aussi par la grandeur, la figure, la nature & le
siége du mal, que nous devons nous regler & nous
décider sur le choix des cauteres, qui d'ailleurs ne
doivent point être chauffés au feu de la forge, mais
à un feu de charbon de bois, toûjours moins acre
que celui des charbons fossiles. S'il s'agit de cautériser
à l'effet de procurer une exfoliation, il faut garantir
avec soin les parties qui avoisinent lorsque
nous nous disposons à brûler: nous méditons, par
exemple, de porter un bouton de feu sur l'os angulaire,
voyez
M. de Soleysel fixe à vingt - sept jours la durée de l'effet du feu; il en compte neuf pour l'augmentation, neuf pour l'état, & neuf pour le déclin. On pourroit demander à ses sectateurs, ou à ceux de ses copistes qui existent encore, ce qu'ils entendent véritablement par ce terme d'effet, & ce à quoi ils le bornent. Le restreignent - ils, comme ils le devroient, à la simple brûlure, c'est - à - dire à la simple production de l'escarre? l'étendent - ils à tous les accidens qui doivent précéder la suppuration qui occasionne la chûte du sequestre? comprennent - ils dans ces mêmes effets, l'établissement de cette suppuration loüable qui nous annonce une prompte régénération, & la terminaison de la cure? Dans les uns ou dans les autres de ces sens, ils ne peuvent raisonnablement rien déterminer de certain. Le feu est appliqué sur des parties malades, tuméfiées, dont l'état differe toûjours; les dispositions intérieures de chaque cheval sur lequel on opere, varient à l'infini: or comment assigner un terme précis aux changemens qui doivent arriver, & décider positivement du tems
Quant à l'usage des cauteres à bouton, relativement aux tumeurs, nous devons, dans les circonstances où nous le croyons nécessaire, l'appliquer de maniere que nous puissions faire évanoüir toute dureté, tout engorgement, & que rien ne puisse s'opposer à la suppuration régénérante qui part des tuyaux sains, & de laquelle nous attendons de bonnes chairs, & une cicatrice solide & parfaite. Il est essentiel néanmoins de ne pénétrer jusqu'à la base de la tumeur, que lorsque cette même tumeur n'est pas située sur des parties auxquelles on doit redouter de porter atteinte. S'il en étoit autrement, je ne cautériserois point aussi profondément; & dans le cas, par exemple, d'une tumeur skirrheuse placée sur une partie tendineuse, osseuse, &c. je me contenterois d'introduire le bouton de feu moins avant, sauf, lorsque le séquestre seroit absolument détaché, à détruire le reste des duretés, si j'en apperçevois, par des pansemens méthodiques & avec des cathérétiques convenables, c'est - à - dire avec des médicamens du genre de ceux dont je vais parler.
Feu mort, rétoire, cautere potentiel, caustiques, termes synonymes. Nous appellons en général des uns & des autres de ces noms, toute substance qui appliquée en maniere de topique sur le corps vivant, & fondue par la lymphe dont elle s'imbibe, ronge, brûle, consume, détruit les solides & les fluides, & les change, ainsi que le feu même, en une matiere noirâtre, qui n'est autre chose qu'une véritable escarre.
C'est par les divers degrés d'activité de ces mixtes, que nous en distinguons les especes.
Les uns agissent seulement sur la peau, les autres n'agissent que sur les chairs dépouillées des tégumens; il en est enfin qui operent sur la peau & sur les chairs ensemble.
Les premiers de ces topiques comprennent les médicamens que nous appellons proprement rétoires, & qui dans la Chirurgie sont particulierement désignés par le terme de vésicatoires. Les seconds renferment les cathéretiques; & ceux de la troisieme espece, les escarrotiques ou les ruptoires.
Le pouvoir des unes & des autres de ces substances résulte uniquement, quand elles sont simples, des sels acres qu'elles contiennent; & quand elles sont composées, des particules ignées qui les ont pénétrées, ou de ces particules ignées & de leurs particules salines en même tems.
Les suites de l'application des caustiques naturels & non - préparés, doivent donc se rapporter à l'action stimulante de ces remedes, c'est - à - dire à l'irritation qu'ils suscitent dans les solides, & à la violence des mouvemens oscillatoires qu'ils provoquent; mouvemens en conséquence desquels les fibres agacées sollicitent & hâtent elles - mêmes leur propre destruction, en heurtant avec force & à coups redoublés contre les angles & les pointes des sels dont ces mixtes sont pourvûs, & qui ont été dissous par l'humidité de la partie vivante.
A l'égard des caustiques composés, c'est - à - dire de ceux qui, par le moyen des préparations galéniques & chimiques, ont subi quelqu'altération, non - seulement ils occasionneront les mêmes dilacérations & les mêmes ruptures ensuite de la dissolution de leurs sels, s'il en est en eux, mais ils consumeront le tissu des corps sur lesquels on leur proposera de s'exercer immédiatement; leurs particules ignées suffisamment développées, & d'ailleurs raréfiées par la cha<pb-> [p. 635]
Les vésicatoires, de la classe de ceux que l'on distingue par la dénomination de rubéfians ou de phénigmes, n'excitant qu'une legere inflammation dans les tégumens du corps humain, seroient totalement impuissans sur le cuir du cheval; mais l'impression des épispastiques, auxquels on accorderoit un certain intervalle de tems pour agir, seroit très - sensible. Les particules acres & salines de ceux - ci sont doüées d'une telle subtilité, qu'elles enfilent sans peine les pores, quelle que soit leur ténuité: elles s'insinuent dans les vaisseaux sudorifiques, elles y fermentent avec la sérosité qu'ils contiennent; & les tuniques de ces canaux cedant enfin à leurs efforts, & à un engorgement qui augmente sans cesse par la raréfaction & par le nouvel abord des liqueurs, laissent échapper une humeur lymphatique qui soûleve l'épiderme, & forme un plus ou moins grand nombre de vessies qui se montrent à la superficie de la peau. Les alongemens par lesquels cette membrane déliée se trouvoit unie aux vaisseaux qui ont été dilacérés, demeurent flottans, & s'opposent à la sortie de la sérosité dans laquelle ils nagent; mais cette humeur triomphe néanmoins de ces obstacles après un certain tems, puisqu'elle se fait jour, & qu'elle suinte sous la forme d'une eau rousse & plus ou moins limpide.
A la vûe de l'inertie des cathérétiques appliqués sur les tégumens, & de leur activité sur les chairs vives, on ne sauroit douter de la difficulté que leurs principes salins ont de se dégager, puisqu'il ne faut pas moins qu'une humidité aussi considérable que celle dont les chairs sont abreuvées, pour les mettre en fonte, pour briser leurs entraves, pour les extraire, & pour les faire joüir de cette liberté sans laquelle ils ne peuvent consumer & détruire toutes les fangosités qui leur sont offertes.
Ceux qui composent une partie de la substance des ruptoires, sont sans doute moins enveloppés, plus acres, plus greffiers, plus divisés & plus susceptibles de dissolution, dès qu'ils corrodent la peau même, & que de concert avec les particules ignées qu'ils renferment, ils privent de la vie la partie sur laquelle leur action est imprimée; ce que nous observons aussi dans les cathérétiques, qui, de même que les ruptoires, ne peuvent jamais être envisagés comme des caustiques simples, & qui brûlent plus ou moins vivement toutes celles que la peau ne garantit pas de leurs atteintes.
Les ouvrages qui ont eu pour objet la medecine des chevaux, contiennent plusieurs formules des médicamens rétoires: celui qui a été le plus usité, est un onguent décrit par M. de Soleysel. L'insecte qui en fait la base, est le méloé; il est désigné dans le système de la Nature, par ces mots, antennoe filiformes, elytra dimidiata, aloe nulloe. Linnaeus, Fauna suecica, n°. 596. l'appelle encore scaraboeus majalis unctuosus. Quelques auteurs le nomment proscaraboeus, cantharus unctuosus; le scarabé des Maréchaux. Il est mou, & d'un noir - foncé; il a les piés, les antennes, le ventre, un peu violets, & les fourreaux coriaces. On le trouve dans les mois d'Avril & de Mai, dans les terreins humides & labourés, ou dans les blés. On en prend un certain nombre que l'on broye dans suffisante quantité d'huile de laurier, & au bout de trois mois on fait fondre le tout: on coule, on jette le marc, & on garde le reste comme un remede très - précieux, & qui doit, selon Soleysel, dissiper des suros, des molettes, des vessigons, &c. mais qui est très - inutile & très - impuissant, selon moi, dans de pareilles circonstances.
Il est encore d'autres rétoires faits avec le soufre en poudre, du beurre vieux, de l'huile de laurier,
Les cathérétiques que nous employons le plus communément, sont l'alun brûlé, le cuivre brûlé, le verdet, l'iris de Florence, la sabine, l'arsenic blanc, le sublimé corrosif, l'arsenic caustique, le précipité blanc, l'onguent brun, l'onguent égyptiac, le baume d'acier ou le baume d'aiguille, &c.
Les ruptoires, que nous ne mettons presque toûjours en oeuvre que comme cathérétiques, sont l'eau ou la dissolution mercurielle, l'esprit de vitriol, l'esprit de sel, l'esprit de nitre, le beurre d'antimoine, l'huile de vitriol, l'eau - forte, la pierre infernale. Je dis que nous ne les appliquons communément que sur les chairs découvertes de la peau: il est rare en effet que dans les cas où il est question d'ouvrir des tumeurs, nous ne préférions pas le cautere actuel, dont les opérations sont toûjours plus promptes, & dont les malades que nous traitons ne font point effrayés, à ces médicamens potentiels, qui peuvent d'ailleurs perter le poison dans le sang par l'introduction de leurs corpuscules, & qui demandent, eu égard à ce danger, beaucoup de circonspection & de sagacité dans le choix, dans les préparations, & dans l'application que l'on en fait. (e)
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