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Un avocat célebre m'a fait ici une difficulté. Le notaire, dit - il, doit être impartial pour les contractans: or il cesseroit de l'être si, contre les vûes & l'intérêt du propriétaire, il instruisoit le preneur de toutes les précautions dont la loi lui permet l'usage pour affermir sa location. Tant pis pour lui s'il ignore ces précautions; que ne s'instruit - il avant que de conclure? que ne va - t - il consulter un avocat, qui seul est capable de le diriger?
Il n'est pas difficile de répondre à cette difficulté: on avoue bien que le notaire doit être impartial, c'est un principe des plus certains; mais peut - on le croire impartial, quand il n'avertit pas un locataire de l'insuffisance d'un bail qui ne lui assûre point un logement sur lequel il compte, & qui est souvent d'une extrème conséquence pour sa prosession, sa fabrique, ou son commerce? Peut - on le croire impartial, quand il cache les moyens de remédier à cet inconvénient, & qu'il n'exige pas les renonciations autorisées par la loi? On veut que le moindre particulier, avant que d'aller chez un notaire, fasse une consultation d'avocat pour les affaires les plus simples: on veut donc que les citoyens passent la moitié de leur vie chez les gens de pratique. On sent que l'intérêt fait parler en cela contre l'évidence & la justice; que sur la difficulté dont il s'agit, un notaire peut aussi - bien qu'un avocat donner des instructions suffisantes; & l'on sent encore mieux qu'il le doit, en qualité d'officier public, chargé par état d'un ministere de confiance, qui suppose nécessairement un homme integre & capable, lequel se doit également à tous ceux qui l'employent, & dont la fonction est de donner aux actes l'authenticité, la forme & la perfection nécessaire pour les rendre valides.
Le notaire en faisant un bail doit donc assûrer autant qu'il est possible, l'exécution de toutes les clauses qui intéressent les parties; il doit les interroger pour démêler leurs intentions, leur expliquer toute l'étendue de leurs engagemens; & en un mot puisque la promesse de faire jouir, faite par le propriétaire, ne suffit pas pour l'obliger, s'il ne renonce expressément au privilége qu'il a de ne la pas tenir, il est de la religion du notaire d'insérer cette renonciation dans tous les baux, jusqu'à ce qu'une législation plus éclairée abroge tout - à - fait la prérogative bourgeoise, & donne à un bail quelconque toute la force qu'il doit avoir par sa destination, en suivant l'intention des parties contractantes.
Au surplus notre jurisprudence paroît encore plus déraisonnable, en ce qu'elle attribue à l'acquéreur d'une maison le droit d'expulser un locataire malgré la renonciation du vendeur au droit bourgeois: car enfin sur quoi fondé peut - on accorder l'expulsion dans ce dernier cas? L'acquéreur supposé ne peut pas avoir plus de droit que n'en avoit le premier maître; l'un ne peut avoir acquis que ce que l'autre a pû vendre: or l'ancien propriétaire ayant cedé la jouisiance de sa maison pour un nombre d'années, ayant même renoncé, comme on le suppose, au droit d'occuper par lui - même & d'expulser son locataire pour quelque cause que ce puisse être, cette jouissance ne lui appartient plus, & il n'en sauroit
Au surplus, si l'usage que nous suivons facilite la vente & l'achat des maisons dans les villes, comme quelques - uns me l'ont objecté bien legerement, quelle gêne & quelle inquiétude ne jette - t - il pas dans toutes les locations, lesquelles au reste sont infiniment plus communes, & dès - là beaucoup plus intéressantes. D'ailleurs, si le privilége bourgeois étoit une fois aboli, on n'y penseroit plus au bout de quelques années, & les maisons se vendroient comme auparavant, comme on vend tous les jours les maisons de campagne & les terres, sans qu'il y ait jamais eu de privilége contre le droit des locataires.
De tout cela il résulte que le prince législateur étant proprement le pere de la patrie, tous les sujets étant réputés entre eux comme les enfans d'une même famille, le chef leur doit à tous une égale protection: qu'ainsi toute loi qui favorise le petit nombre des citoyens au grand dommage de la société, doit être censée loi injuste & nuisible au corps national; loi qui par conséquent demande une prompte réforme. Telle est la prérogative dont il s'agit, & dont il est aisé de voir l'injustice & l'inconséquence.
Au reste il n'est pas dit un mot du privilége bourgeois dans la coûtume de Paris. La pratique ordinaire que nous suivons sur cela, vient originairement des Romains, dont la gloire plus durable que leur empire a long - tems maintenu des usages que la sagesse & la douceur du Christianisme doivent, ce me semble, abolir.
Quoi qu'il en soit, les instituteurs de ce privilége, tant ceux qui l'ont introduit dans le droit romain, que ceux qui ébloüis par ce grand nom l'ont ensuite adopté parmi nous; tous, dis - je, ont été des gens distingués, des gens en place, des gens en un mot qui possédoient des maisons; lesquels entraînés par le mouvement imperceptible de l'intérêt, ont écouté avec complaisance les allégations du propriétaire qui leur étoient favorables, & qui en conséquence leur ont paru décisives: au lieu qu'à peine ont - ils prêté l'oreille aux représentations du locataire, qui tendoient à restraindre leurs prérogatives, & qu'ils ont rejettées presque sans examen. De sorte que ces rédacteurs, éclairés sans doute & bien intentionnés, mais séduits pour lors par un intérêt mal - entendu, ont déposé dans ces momens le caractere d'impartialité, si nécessaire dans la formation des lois: c'est ainsi qu'ils ont établi sur la matiere présente des regles qui répugnent à l'équité naturelle, & qu'un législateur philosophe & desintéressé, un Socrate, un Solon, n'auroit jamais admises.
J'ai voulu savoir s'il y avoit dans les pays voisins un privilége bourgeois pareil au nôtre, j'ai sû qu'il n'existoit dans aucun des endroits dont j'ai eu des [p. 321]
Au surplus, j'ai insinué ci - devant que les propriétaires n'avoient dans le privilége bourgeois qu'un intérêt mal - entendu; nouvelle proposition que je veux démontrer sensiblement: il suffit d'observer pour cela que si cette prérogative étoit abrogée, & que les locataires fussent pour toûjours délivrés des sollicitudes & des pertes qui en sont les suites ordinaires, ils donneroient volontiers un cinquantieme en sus des loyers actuels. Dans cette supposition qui n'est point gratuite, ce seroit une augmentation de trente livres par année sur une maison de quinze cents livres de loyer, ce seroit soixante francs d'augmentation sur une maison de trois mille livres; ce qui feroit en cinquante ans cinq cents écus sur l'une, & mille écus sur l'autre: or peut - on évaluer l'avantage du privilége dont il s'agit, & dont l'usage est même assez rare par les raisons qu'on a vûes; peuton, dis - je, évaluer cet avantage à des sommes si considérables, indépendamment des pertes que le propriétaire essuie de son côté par les embarras & les frais de procédures, dédommagement des locataires, &c.?
Sur cela, c'est aux bons esprits à décider si l'usage du privilége bourgeois n'est pas véritablement dommageable à toutes les parties intéressées, & par conséquent, comme on l'a dit, à toute la société.
Mais je soûtiens de plus, que quand il y auroit du desavantage pour quelques propriétaires dans la suppression de ce privilége, ce ne sercit pas une raison suffisante pour arrêter les dispensateurs de nos lois; parce qu'outre que la plus grande partie des sujets y est visiblement lésée, cette partie est en même tems la plus foible, & cependant la plus laborieuse & la plus utile. C'est elle qui porte presque seule la masse entiere des travaux nécessaires pour l'entretien de la société, & c'est conséquemment la partie qu'il faut le plus ménager, pour l'intérêt même des propriétaires: vérité que notre jurisprudence reconnoît bien dans certains cas; par exemple, lorsqu'elle permet au locataire de retroceder un bail, malgré la clause qui l'assujettit à demander pour cela le consentement du maître. C'est que les juges instruits par l'expérience & par le raisonnement, ont senti que l'intérêt même du propriétaire exigeoit cette tolérance, le plus souvent nécessaire pour la sûreté des loyers.
Les anciens législateurs qui ont admis la prérogative
bourgeoise, ne comprenoient pas sans doute
que l'utilité commune des citoyens devoit être le
fondement de leurs lois, & devoit l'emporter par
conséquent sur quelques intérêts particuliers. Ils ne
considéroient pas non plus qu'au même tems qu'ils
étoient propriétaires, plusieurs de leurs proches &
de leurs amis étoient au contraire dans le cas de la
location, que plusieurs de leurs descendans y seroient
infailliblement dans la suite, & qu'ils travailloient
sans y penser contre leur patrie & contre leur postérite.
Article de M.
EXPULSIF (Page 6:321)
EXPULSIF, adj. terme de Chirurgie; espece de bandage dont on se sert pour chasser en - dehors le pus du fond d'un ulcere fistuleux ou caverneux, & donner occasion à la cavité de se remplir de bonnes
On observe dans ce bandage, que les circonvolutions de la bande s'appliquent de façon qu'elles compriment du fond de l'ulcere vers son ouverture. (Y)
EXPULSION (Page 6:321)
EXPULSION, s. f. (Jurisp.) en terme de Palais,
signifie la force que l'on employe pour faire sortir
quelqu'un d'un endroit où il n'a pas droit de rester.
Le procès - verbal d'expulsion est le récit de ce qui se
passe à cette occasion: il est ordinairement fait en
vertu d'un jugement ou ordonnance qui permet l'expulsion. On expulse un locataire ou fermier qui est à
fin de bail & qui ne veut pas sortir, ou faute de payement
des loyers & fermages: le jugement qui permet
l'expulsion autorise ordinairement aussi à mettre les
meubles sur le carreau. On expulse aussi un possesseur
intrus, qui est condamné à quitter la joüissance
d'un héritage. Voyez
Expulsion (Page 6:321)
EXSPECTATION (Page 6:321)
EXSPECTATION, s. f. (Medecine.) c'est un terme emprunté du latin par les Medecins, qui, en général, ne l'employent même que rarement: il est presque affecté à la doctrine de Stahl & de ses sectateurs, dans les écrits desquels on le trouve souvent, soit qu'ils l'adoptent sous certaines significations, soit qu'ils le rejettent sous d'autres.
En effet, ce mot peut être pris dans différentes acceptions, qui ont cependant cela de commun, qu'elles servent toutes à désigner le genre de conduite du malade ou du medecin dans le cours de la maladie, qui consiste en ce que l'un ou l'autre évite, plus ou moins, d'influer sur l'évenement qui la termine, laisse agir la nature, ou attend ses opérations pour se déterminer à agir.
On peut donc distinguer plusieurs sortes d'exspectations: la premiere peut être considérée, par rapport au malade, entant qu'elle a lieu, ou parce qu'il n'y a pas d'autre parti à prendre, ou parce qu'il prend celui - là de propos délibéré, c'est - à - dire, dans le premier cas, lorsqu'il n'est pas à portée de recevoir des secours de l'art, ou qu'il n'est pas en état, en disposition de s'en fournir par quelque cause que ce soit: dans le second cas, lorsqu'il est dans l'idée que les secours sont inutiles ou nuisibles, & qu'il s'obstine à ne vouloir point en recevoir. Comme il y a bien des maladies qui se sont guéries par la nature seule livrée à elle - même, une telle conduite, toute hasardeuse & imprudente qu'elle est, peut être par conséquent suivie d'un heureux succès dans bien des occasions; c'est par cette considération que Stahl n'a pas craint d'établir dans une dissertation, qu'il existe une medecine interne, c'est - à - dire des moyens de guérir les maladies indépendamment d'aucun secours de l'art; ergo existit medicina sine medico, conclud cet auteur.
L'exspectation de cette premiere espece peut aussi être considérée, par rapport au medecin, comme ayant lieu dans le cas où il affecte de ne point employer des remedes, des médicamens, dans le traitement des maladies, ou pour mieux dire, lorsqu'il ne les traite point, & qu'il se borne à être spectateur oisif des efforts de la nature, à en attendre les effets.
L'exspectation ainsi conçue à l'égard du malade &
du medecin, est une attente pure & simple; elle n'est
autre chose qu'une véritable inaction, de laquelle on
ne peut aucunement dire qu'elle soit une méthode de
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