ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"282"> matiques. Voyez Rectification. Ainsi l'acide nitreux devient d'autant plus volatil, qu'il est plus surchargé de phlogistique; & le même phlogistique uni dans le soufre avec l'acide vitriolique, donne à ce mixte une volatilité que l'acide vitriolique seul n'a pas. 5°. Les principes qui se séparent des mixtes dans la distillation, en acquérant l'expansion vaporeuse, ont besoin d'un degré de chaleur beaucoup plus considérable que celui qui suffiroit pour les réduire en vapeur s'ils étoient purs & rassemblés en masse; ainsi dans l'analyse chimique le degré de l'eau bouillante n'enleve aux végétaux & aux animaux qu'une eau surabondante, instrument nécessaire de la végétation & de la nutrition, mais qui n'entre point dans la combinaison des mixtes dont ils sont composés. V. Analyse végétale & animale. Ainsi l'air qu'un degré de chaleur très - au - dessous de celui que nous appellons froid, rend expansible, est cependant l'un des derniers principes que le feu sépare de la mixtion de certains corps. 6°. L'ordre de la vaporisation des corps ne paroît suivre dans aucun rapport l'ordre de leur pesanteur spécifique.

Qu'on se rappelle maintenant la théorie que nous avons donnée de l'expansibilité. Nous avons prouvé que la cause de l'expansibilité des corps est une force par laquelle la chaleur tend à écarter leurs molecules les unes des autres, & que cette force ne differe que par le degré de celle qui change l'aggrégation solide en aggrégation fluide, & qui dilate les parties de tous les corps dont elle ne détruit pas l'aggrégation. Cela posé, le point de vaporisation de chaque corps, est celui où la force répulsive produite par la chaleur commence à surpasser les obstacles ou la somme des forces qui retenoient les parties des corps les unes auprès des autres. Ce fait général comprend tous ceux que nous venons de rapporter. En effet, ces forces sont, 1°. la pression exercée sur la surface du fluide par l'atmosphere ou par tout autre corps: 2°. la pesanteur de chaque molécule: 3°. la force d'adhésion ou d'affinité qui l'unit aux molécules voisines, soit que celles - ci soient de la même nature ou d'une nature différente. L'instant avant la vaporisation du corps, la chaleur faisoit équilibre avec ces trois forces. Donc si on augmente l'une de ces forces, soit la force comprimante de l'atmosphere, soit l'union qui retient les parties d'un même corps auprès les unes des autres sous une forme aggrégative, soit l'union chimique qui attache les molécules d'un principe aux molécules d'un autre principe plus fixe, la vaporisation n'aura lieu qu'à un degré de chaleur plus grand. Si la force qui unit deux principes est plus grande que la force qui tend à les séparer, ils s'éleveront ensemble, & le point de leur vaporisation sera relatif à la pesanteur des deux molécules élémentaires unies, & à l'adhérence que les molécules combinées du mixte ont les unes aux autres, & qui leur donne la forme aggrégative; & comme les molécules du principe le plus volatil sont moins adhérentes entr'elles que celles du principe plus fixe, il doit arriver naturellement qu'en s'interposant entre celles - ci. elles en diminuent l'adhérence, que l'union aggrégative soit moins forte, & qu'ainsi le terme de vaporisation du mixte soit mitoyen entre les termes auxquels chacun des principes pris solitairement commence à s'élever. Des trois forces dont la somme détermine le degré de chaleur nécessaire à la vaporisation de chaque corps, il y en a une, c'est la pesanteur absolue de chaque molécule, qui ne sauroit être appréciée, ni même fort sensible pour nous. Ainsi la pression sur la surface du fluide étant à - peu - près constante, puisque c'est toûjours celle de l'atmosphere, avec lequel il faut toûjours que les corps qu'on veut élever par le moyen de la chaleur communiquent actuellement (voyez Distillation), l'ordre de vaporisation des corps doit être principalement relatif à l'union qui attache les unes aux autres les molécules des corps; c'est ce qui est effectivement conforme à l'expérience, comme on peut le voir à l'article Distillation. Enfin cet ordre ne doit avoir aucun rapport avec la pesanteur spécifique des corps, puisque cette pesanteur n'est dans aucune proportion, ni avec la pesanteur absolue de chaque molécule, ni avec la force qui les unit les unes aux autres.

Il suit de cette théorie, que si on comparo l'expansibilité des corps sous le troisieme point de vûe que nous avons annoncé, c'est - à - dire si l'on compare le degré d'expansion que chaque corps reçoit par l'application d'un nouveau degré de chaleur, & le rapport qui en résultera de son volume à son poids; cet ordre d'expansibilité des corps considéré sous ce point de vûe, sera très - différent de l'ordre de leur vaporisation. En effet, aussi - tôt qu'un corps a acquis l'état d'expansion, les liens de l'union chimique ou aggrégative qui retenoient ses molécules sont entierement brisés, ces molécules sont hors de la sphere de leur attraction mutuelle; & cette derniere force, qui dans l'ordre de vaporisation devoit être principalement considérée, est entierement nulle & n'a aucune part à la détermination de l'ordre d'expansibilité. La pesanteur propre à chaque molécule devient donc la seule force, qui, avec la pression extérieure toùjours supposée constante, fait équilibre avec l'action de la chaleur. La résistance qu'elle lui oppose est seulement un peu modifiée par la figure de chaque molécule, & par le rapport de sa surface à sa masse, s'il est vrai que le fluide auquel nous attribuons l'écartement produit par la chaleur agisse sur chaque molécule par voie d'impulsion; or cette force & la modification qu'elle peut recevoir n'étant nullement proportionnelles à l'union chimique ou aggrégative des molécules, il est évident que l'ordre d'expansibilité des corps ne doit point suivre l'ordre de vaporisation, & que tel corps qui demande, pour devenir expansible, un beaucoup plus grand degré de chaleur qu'un autre, reçoit pourtant d'un même degré de chaleur une expansion beaucoup plus considérable; c'est ce que l'expérience vérifie d'une maniere bien sensible dans la comparaison de l'expansibilité de l'eau & de celle de l'air. On suppose ordinairement que l'eau est environ huit cents fois plus pesante spécifiquement que l'air; admettons qu'elle le soit mille fois davantage, il s'ensuit que l'air pris au degré de chaleur commun de l'atmosphere, & réduit à n'occuper qu'un espace mille fois plus petit, seroit aussi pesant que l'eau. Appliquons maintenant à ces deux corps le même degré de chaleur, celui où le verre commence à rougir. Une expérience fort simple rapportée dans les leçons de Physique de M. l'abbé Nollet, prouve que l'eau à ce degré de chaleur occupe un espace quatorze mille fois plus grand. Cette expérience consiste à faire entrer une goutte d'eau dans une boule creuse, garnie d'un tube, dont la capacité soit environ 14000 fois plus grande que celle de la goutte d'eau, ce qu'on peut connoître aisément par la comparaison des diametres; à faire ensuite rougir la boule sur des charbons, & à plonger l'extrémité du tube dans un vase plein d'eau: cette eau monte & remplit entierement la boule, ce qui prouve qu'il n'y reste aucun air, & que par conséquent la goutte d'eau en remplissoit toute la capacité. Mais par une expérience toute semblable, on connoît que l'air au même degré de chaleur qui rougit le verre, n'augmente de volume que dans le rapport de trois à un. Et comme cet air par son expansion remplit déjà un volume mille fois plus grand que celui auquel il faudroit le réduire pour le rendre spécifiquement aussi pesant que l'eau, il faut multiplier le nombre de 3, [p. 283] ou, ce qui est la même chose, diviser celui de 14000 par mille, ce qui donnera le rapport des volumes de l'eau à celui de l'air, à poids égal, comme 14 à 3; d'où l'on voit combien l'expansibilité du corps le plus difficilement expansible, surpasse celle du corps qui le devient le plus aisément.

L'application de cette partie de notre théorie à l'air & à l'eau, suppose que les particules de l'eau sont beaucoup plus legeres que celles de l'air, puisqu'étant les unes & les autres isolées au milieu du fluide de la chaleur, & ne résistant guere à son action que par leur poids, l'expansion de l'eau est si supérieure à celle de l'air: cette supposition s'accorde parfaitement avec l'extrème différence que nous remarquons entre les deux fluides, par rapport au degré de leur vaporisation: les molécules de l'air, beaucoup plus pesantes, s'élevent beaucoup plûtôt que celles de l'eau, parce que leur adhérence mutuelle est bien plus inférieure à celle des parties de l'eau, que leur pesanteur n'est supérieure. Plus on supposera les parties de l'eau petites & legeres, plus le fluide sera divisé sous un poids égal en un grand nombre de molécules; plus l'élément de la chaleur, interposé entre elles, agira sur un grand nombre de parties, plus son action s'appliquera sur une grande surface, les poids qu'il aura à soûlever restant les mêmes, & par conséquent plus l'expansibilité sera considérable. Mais il ne s'ensuit nullement delà, que le corps ait besoin d'un moindre degré de chaleur, pour être rendu expansible. Si l'on admet, avec Newton, une force attractive qui suive la raison inverse des cubes de ces distances: comme il est démontré que cette attraction ne seroit sensible qu'à des distances très - petites, & qu'elle seroit infinie au point de contact; il est évident, 1°. que l'adhérence résultante de cette attraction, est en partie relative à l'étendue des surfaces par lesquelles les molécules attirées peuvent se toucher, puisque le nombre des points de contact est en raison des surfaces touchantes: 2°. que moins le centre de gravité est éloigné des surfaces, plus l'adhésion est forte: en effet, cette attraction qui est infinie au point de contact, ne peut jamais produire qu'une force finie, parce que la surface touchante n'est véritablement qu'un infiniment petit; la molécule entiere est par rapport à elle un infini, dans lequel la force se partage en raison de l'inertie du tout: si cette molécule grossissoit jusqu'à un certain point, il est évident que tout ce qui se trouveroit hors des limites de la sphere sensible de l'attraction cubique, seroit une surcharge à soûtenir pour celle - ci, & pourroit en rendre l'effet nul: si au contraire la molécule se trouve toute entiere dans la sphere d'attraction, toutes ses parties contribueront à en augmenter l'effet, & plus le centre de gravité sera proche du contact, moins cette force qui s'exerce au contact sera diminuée par la force d'inertie des parties de la molécule les plus éloignées: or plus les molécules, dont un corps est formé, seront supposées petites, moins le centre de gravité de chaque molécule est éloigné de leur surface, & plus elles ont de superficie, relativement à leur masse.

Concluons que la petitesse des parties doit d'abord retarder la vaporisation, puis augmenter l'expansibilité, quand une fois les corps sont dans l'état de vapeur.

Je ne dois pas omettre une conséquence de cette théorie sur l'ordre d'expansibilité des corps, comparé à l'ordre de leur vaporisation: c'est qu'un degré de chaleur qui ne suffiroit pas pour rendre un corps expansible, peut suffire pour le maintenir dans l'état d'expansibilité. En effet, je suppose qu'un ballon de verre ne soit rempli que d'eau en vapeur, & qu'on plonge ce ballon dans de l'eau froide: comme le froid n'a point une force positive pour rapprocher les parties des corps (voyez Froid), il en doit être de cette eau comme de l'air, qui, lorsqu'il ne communique point avec l'atmosphere, n'éprouve aucune condensation en se refroidissant. L'attraction des parties de l'eau ne peut tendre à les rapprocher, puisqu'elles ne sont point placées dans la sphere de leur action mutuelle: leur pesanteur, beaucoup moindre que celle des parties de l'air, ne doit pas avoir plus de force pour vaincre l'effort d'un degré de chaleur, que l'air soûtient sans se condenser. La pression extérieure est nulle; l'eau doit donc rester en état de vapeur dans le ballon, quoique beaucoup plus froide que l'eau bouillante, ou du moins elle ne doit perdre cet état que lentement & peu - à - peu, à mesure que les molécules qui touchent immédiatement au verre adhérent à sa surface refroidie, & s'y réunissent avec les molécules qui leur sont contigues, & ainsi successivement, parce que toutes les molécules, par leur expansibilité même, s'approcheront ainsi les unes après les autres de la surface du ballon, jusqu'à ce qu'elles soient toutes condensées. Il est cependant vrai que dans nos expériences ordinaires, dès que la chaleur est au - dessus du degré de l'eau bouillante, les vapeurs aqueuses redeviennent de l'eau; mais cela n'est pas étonnant, puisque la pression de l'atmosphere agit toûjours sur elles pour les rapprocher, & les remet par - là dans la sphere de leur action mutuelle, quand l'obstacle de la chaleur ne subsiste plus.

On voit par - là combien se trompent ceux qui s'imaginent que l'humidité qu'on voit s'attacher autour d'un verre plein d'une liqueur glacée, est une vapeur condensée par le froid: cet effet, de même que celui de la formation des nuages, de la pluie, & de tous les météores aqueux, est une vraie précipitation chimique par un degré de froid qui rend l'air incapable de tenir en dissolution toute l'eau dont il s'étoit chargé par l'évaporation dans un tems plus chaud; & cette précipitation est précisément du même genre que celle de la crême de tartre, lorsque l'eau qui la tenoit en dissolution s'est refroidie. Voyez Humidité & Pluie.

On sent aisément combien une table qui représenteroit, d'après des observations exactes, le résultat d'une comparaison suivie des différentes substances, & l'ordre de leur expansibilité, pourroit donner de vûes aux Physiciens, sur - tout si on y marquoit toutes les différences entre cet ordre & l'ordre de leur vaporisation. Je comprendrois dans cette comparaison des différentes substances par rapport à l'expansibilité, la comparaison des différens degrés d'expansibilité entre l'air, qui contient beaucoup d'eau, & l'air qui en contient moins, ou qui n'en contient point du tout. Musschenbroek a observé que l'air chargé d'eau a beaucoup plus d'élasticité qu'un autre air, & cela doit être, du - moins lorsque la chaleur est assez grande pour réduire l'eau même en vapeur; car il pourroit arriver aussi qu'au - dessous de ce degré de chaleur, l'eau dissoute en l'air & unie à chacune de ses molécules, augmentât encore la pesanteur par laquelle elles résistent à la force qui les écarte. D'ailleurs comme on n'a point encore connu les moyens que nous donnerons à l'article humidité, pour savoir exactement combien un air est plus chargé d'eau qu'un autre air (voyez Humidité); on n'a point cherché à mesurer les différens degrés d'expansibilité de l'air, suivant qu'il contient plus ou moins d'eau, sur - tout au degré de la température moyenne de l'atmosphere: il seroit cependant aisé de faire cette comparaison par un moyen assez simple; il ne s'agiroit que d'avoir une cloche de verre assez grande pour y placer un barometre, & d'ôter toute communication entre l'air renfermé sous la cloche & l'air extérieur; la cire, ou mieux encore, le

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