ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"272"> & du saint - esprit. Ainsi soit - il. Levez - vous, & venez par la vertu de votre roi, & par les sept couronnes de vos rois, & par les chaînes sulphurées, sous lesquelles tous les esprits & démons sont arrêtés dans les enfers. Venez, & hâtez - vous de venir devant ce cercle, pour répondre à mes volontés, faire & accomplir tout ce que je desire. Venez donc, tant de l'orient que de l'occident, du midi & du septentrion, & de quelque part que vous soyez. Je vous en conjure par la vertu & par la puissance de celui qui est trois & un, qui est éter nel & co - égal, qui est un Dieu in visible, consubstanciel, qui a créé le ciel, la terre & la mer, & tout ce qu'ils contiennent, par sa parole ».

L'opinion commune, est que les exorcismes & les conjurations magiques sont conçûes en des termes barbares & inintelligibles; celui - ci n'est pas du nombre, on n'y voit que trop clairement le mêlange des objets les plus respectables de notre religion avec les extravagances, pour ne rien dire de plus, de ces vifionnaires. On attribue celui - ci à Arnaud de Villeneuve. Seulement pour en entendre les dernieres paroles, il est bon de la voir que les magiciens faisoient présider quatre de ces esprits aux quatre parties du monde: c'étoient comme les empereurs de l'univers. Celui qui présidoit à l or ent étoit nommé Lucifer, celui de l'occioent Astharoth, celui du midi Leviathan, & celui du septentrion Amaimon; & il y avoit pour chacun d'eux des exorcismes particuliers & un exorcisme général, que M. Blanchard n'a pas jugé à propos de rapporter.

Comme les esprits ne sont pas toûjours d'humeur à obéir, & sont rebelles aux ordres, on a tiré de la cabale un exorcisme plus absurde que tous les autres, qui donne des charges & des dignités aux démons; qui les menace de les dépouiller de leurs emplois, & de les précipiter au fond des enfers, comme s'ils avoient une autre demeure. Il faut observer que, selon les magiciens, le pouvoir de chacun de ces esprits est borné; qu'il seroit inutile de l'invoquer pour une chose qui ne seroit pas de sa portée; & qu'il faut donner à chacun pour sa peine, une récompense qui lui soit agréable: par exemple, Lucifer qu'on évoque le lundi dans un cercle, au milieu duquel est son nom, se contente d'une souris; Nembroth reçoit la pierre qu'on lui jette le mardi; Astharoth est appellé le mercredi, pour procurer l'amitié des grands, & ainsi de suite.

Au reste ces exorcismes des magiciens modernes sont tous accompagnés de profanations des noms de Dieu & de J. C. excès que n'ont pas même connu les payens, qui dans leurs conjurations magiques n'abusoient pas des noms de la divinité, ni des my steres de leur religion. Mém. de l'acad. des Inscript. tome XII. pag. 51. & suiv. (G)

EXORCISTE (Page 6:272)

EXORCISTE, s. m. (Théolog.) dans l'Eglise romaine, c'est un clerc tonsuré qui a reçû les quatre ordres mineurs, dont celui d'exorciste fait partie.

On donne aussi ce nom à l'évêque, ou au prêtre délégué par l'évêque, tandis qu'il est occupé à exorciser une personne possedée du démon. Voy. Exorcisme.

Les Grecs ne considéroient pas les exorcistes comme étant dans les ordres, mais simplement comme des ministres. S. Jerôme ne les met pas non plus au nombre des sept ordres. Cependant le pere Goar, dans ses notes sur l'euchologe, prétend prouver par divers passages de saint Denys & de saint Ignace martyr, que les Grecs ont reconnu cet ordre. Dans l'église latine, les exorcistes se trouvent au nombre des ordres mineurs après les acolythes: & la cérémonie de leur ordination est marquée, tant dans le jv. concile de Carthage, can. 7. que dans les anciens rituels. Ils recevoient le livre des exorcismes de la main de l'évêque, qui leur disoit en même tems: Recevez ce livre, & l'apprenez par mémoire, & ayez le pouvoir d'imposer les mains aux énergumenes, sou baptisés, soit catéchumenes: formule qui est toûjours en usage.

M. Fleury parle d'une espece de gens chez les Juifs, qui couroient le pays, faisant prosession de chasser les démons par des conjurations qu'ils attribuoient à Salomon: on leur donnoit aussi le nom d'exorcistes. Il en est fait mention dans l'évangile, dans les actes des apôtres, & dans Josephe. S. Justin martyr, dans son dialogue contre Tryphon, reproche aux Juifs que leurs exorcistes se servoient, comme les gentils, de pratiques superstitieuses dans leurs exorcismes, employant des parfums & des ligatures: ce qui fait voir qu'il y avoit aussi parmi les payens des gens qui se mêloient d'exorciser les démoniaques. Lucien en touche quelque chose.

Dans l'église catholique il n'y a plus que des prêtres qui fassent la fonction d'exorcistes, encore ce n'est que par commission particuliere de l'évêque. Cela vient, dit M. Fleury, de qui nous empruntons ceci, de ce qu'il est rare qu'il y ait des possédés, & qu'il se commet quelquefois des impostures, sous prétexte de possession du démon; ainsi il est nécessaire de les examiner avec beancoup de prudence. Dans les premiers tems, les possessions étoient fréquentes. sur - tout entre les payens; & pour marquer un plus grand mépris de la puissance des démons, on donnoit la cha ge de les chasser à un des plus bas ministres de l'eglise: c'étoit eux aussi qui exorcisoient les catéchumenes. Leurs fonctions, suivant le pontifical, sont d'avertir le peuple, que ceux qui ne communioient point, fissent place aux autres; de verser l'eau pour le ministere; d'imposer les mains sur les possédés. Il leur attribue même la grace de guérir les maladies. Institution au droit ecclés. tom. I. chap. vj. pag. 62. (G)

EXORDE (Page 6:272)

EXORDE, exordium, s. m. (Belles - Lettres.) premiere partie du discours, qui sert à préparer l'auditoire & à l'instruire de l'état de la question, ou du moins à la lui faire envisager en général.

Ce mot est formé du latin ordiri, commencer, par une méthaphore tirée des Tisserands, dont on dit, ordiri telam, c'est - à - dire commencer la toile en la mettant sur le métier, & disposant la chaîne de maniere à pouvoir la travailler.

L'exorde dans l'art oratoire, est ce qu'on nomme dans une piece de théatre prologue, en musique piélude, & dans un traité dialectique préface, avantpropos, en latin proemium.

Cicéron définit l'exorde une partie du discours, dans laquelle on prépare doucement l'esprit des auditeurs aux choses qu'on doit leur annoncer par la sune. L'exorde est une partie importante, qui demande à être travaillée avec un extrème soin: aussi les orateurs l'appellent - ils difficillima pars orationis.

On distingue deux sortes d'exordes; l'un modéré, où l'orateur prend, pour ainsi dire, son tour de loin; l'autre véhément, où il entre brusquement & tout - à - coup en matiere: dans le premier on prépare & l'on conduit les auditeurs par degrés, & comme insensiblement, aux choses qu'on va leur proposer; dans le second l'orateur étonne son auditoire, en paroissant lui - même transporté de quelque passion subite. Tel est ce début d'Isaïe, imité par Racine dans Athalie:

Cieux, écoutez; terre, prête l'oreille. ou celui - ci de Cicéron contre Catilina:

Quousque tandem abutere, Catilina, patientiâ nostrâ

Les exordes brusques sont plus convenables dans les cas d'une joie, d'une indignation extraordinai<pb-> [p. 273] res, ou de quelqu'autre passion extrèmement vive: hors de - là, ils seroient déplacés: cependant nous avons des exemples de panégyriques d'orateurs fameux, qui entrent en matiere dès la premiere phrase, & pour ainsi dire, dès le premier mot, sans qu'aucune passion l'exige: tel est celui de Gorgias, qui commence son éloge de la ville & du peuple d'Elis par ces mots: Elis, beata civitas: & celui de saint Grégoire de Nazianze, à la loüange de saint Athanase: Athanasium laudans virtutem laudabo. Les exordes brusques & précipités étoient plus conformes au goût & aux moeurs des Grecs qu'au goût & aux moeurs des Romains.

Les qualités de l'exorde sont, 1°. la convenance, c'est - à - dire le rapport & la liaison qu'il doit avoir avec le reste du discours, auquel il doit être comme la partie est au tout, ensorte qu'il n'en puisse être détaché ni adapté dans une occasion différente, & peut - être contraire. Les anciens orateurs paroissent avoir été peu scrupuleux sur cette regle; quelquefois leurs exordes n'ont rien de commun avec le reste du discours, si ce n'est qu'ils sont placés à la tête de leurs harangues.

2°. La modestie ou une pudeur ingénue, qui intéresse merveilleusement les auditeurs en faveur de l'orateur, & lui attire leur bienveillance. C'est ce que Cicéron loue le plus dans l'orateur Crassus: fuit enim in L. Crasso pudor quidam, qui non modo non obesset ejus orationi, sed étiam probitatis commendatione prodesset; & il raconte de lui - même, qu'au commencement de ses harangues, un trouble involontaire agitoit son esprit, & qu'un tremblement universel s'emparoit de ses membres. Un air simple & naturel porte un caractere de candeur, qui fraie le chemin à la persuasion.

3°. La briéveté, c'est - à - dire qu'un exorde ne doit point être trop étendu, & encore moins chargé de détails mutiles; ce n'est pas le lieu d'approfondir la matiere, ni de se livrer à l'amplification: il ne doit pas non plus être tiré de trop loin, rels que ceux de ces deux plaidoyers burlesques de la comédie des plaideurs, où les prétendus avocats remontent jusqu'au cahos, à la naissance du monde, & à la fondation des empires, pour parler du vol d'un chapon.

4°. Enfin le style doit en être périodique, noble, grave, mesuré; c'est la partie du discours qui demande à être la plus travaillée, parce qu'étant écoutée la premiere, elle est aussi plus exposée à la critique. Aussi Cicéron a - t - il dit: vestibula aditusque ad causam facias illustres.

L'exorde est regardé par tous les Rhéteurs, comme une partie essentielle du discours; cependant autrefois devant l'aréopage, on parloit sans exorde, sans mouvemens, sans péroraison, selon Julius Pollux; mais il faut se souvenir que le tribunal de l'aréopage, si respectable d'ailleurs, n'étoit pas un juge sans appel sur le bon goût & sur les regles de l'éloquence. Voyez Aréopage. (G)

EXOSTOSE (Page 6:273)

EXOSTOSE, E)CWZWSIS2, (Med.) est une tumeur extraordinaire qui vient à un os, & qui est fréquente dans les maladies vénériennes. Voyez Os.

Les scorbutiques & les écroüelleux sont aussi fort sujets aux exostoses. Pour guérir les exostoses, il faut combattre la cause intérieure par les spécifiques, ou par les remedes généraux, s'il n'y a point de spécifique connu contre le principe de la maladie. Les causes d'exostose peuvent être détruites, & le vice local subsister; on le voit journellement dans le gonflement des os par le virus vénérien. Il y a des exostoses qui suppurent, & dont la situation permet qu'on en fasse l'ouverture & l'extirpation: on peut employer dans ce cas tous les moyens dont on a parlé dans l'article de la carie & de l'exfoliation. Voyez ces mots.

En effet, le traité des maladies des os contient beaucoup d'observations importantes sur la nature, les causes & les moyens curatifs de l'exostose en particulier. L'auteur décrit ainsi la maniere d'attaquer les exostoses qui n'ont point fondu par le traitement de la vérole, ou de toute autre cause interne.

On doit découvrir la tumeur de l'os en faisant une incision cruciale; on emporte une partie des angles, on panse à sec, on leve l'appareil le lendemain, & on se sert du trépan perforatif; on fait plusieurs trous profonds & assez près les uns des autres, observant qu'ils occupent toute la tumeur qu'on veut emporter. On se sert ensuite d'un ciseau ou d'une gouge bien coupante, & d'un maillet de plomb avec lequel on frappe modérément, pour couper tout ce qui a été percé par le perforatif. Ces trous affoiblissent l'os; il se coupe plus facilement, sans courir aucun risque de l'éclater en le coupant avec le ciseau. C'est un moyen dont se servent les Menuisiers pour éviter que leur bois ne s'éclate en travaillant avec le ciseau.

Si la tumeur est considérable, & qu'il faille répéter les coups de ciseau ou de maillet, on peut remettre le reste de l'opération au lendemain, parce que les coups réitérés pourroient ébranler la moelle au point de causer par la suite un abcès. Quand on a tout enlevé, on panse l'os comme il a été dit; & pour que l'exfoliation soit prompte, on applique dessus la dissolution du mercure faite par l'eau - forte ou par l'esprit de nitre; c'est un des meilleurs remedes qu'on puisse employer: on ne préfere le feu que lorsque la carie est profonde, qu'elle est avec vermoulure ou excroissance de chair considérable. (Y)

EXOTÉRIQUE & ESOTERIQUE (Page 6:273)

EXOTÉRIQUE & ESOTERIQUE, adj. (Hist. de la Philosophie.) Le premier de ces mots signifie extérieur, le second, intérieur.

Les anciens philosophes avoient une double doctrine; l'une externe, publique ou exotérique; l'autre interne, secrete ou ésotérique. La premiere s'enseignoit ouvertement à tout le monde, la seconde étoit reservée pour un petit nombre de disciples choisis. Ce n'étoit pas differens points de doctrine que l'on enseignoit en public ou en particulier, c'étoit les mêmes sujets, mais traités différemment, selon que l'on parloit devant la multitude ou devant les disciples choisis. Les philosophes des tems postérieurs composerent quelques ouvrages sur la doctrine cachée de leurs prédécesseurs, mais ces traités ne sont point parvenns jusqu'à nous; Eunape, dans la vie de Porphyre, lui en attribue un, & Diogene de Laërce en cite un de Zacynthe. Voyez Eclectisme.

Les Grecs appelloient du même nom les secrets des écoles & ceux des mysteres, & les philosophes n'étoient guere moins circonspects à révéler les premiers, qu'on l'étoit à communiquer les seconds. La plûpart des modernes ont regardé cet usage comme un plaisir ridicule, fondé sur le mystere, ou comme une petitesse d'esprit qui cherchoit à tromper. Des motifs si bas ne furent pas ceux des philosophes: cette méthode venoit originairement des Egyptiens, de qui les Grecs l'emprunterent; & les uns & les autres ne s'en servirent que dans la vûe du bien public, quoiqu'elle ait pû par la suite des tems dégénérer en petitesse.

Il n'est pas difficile de prouver que cette méthode venoit des Egyptiens, c'est d'eux que les Grecs tirerent toute leur science & leur sagesse. Hérodote, Diodore de Sicile, Strabon, Plutarque, tous les anciens auteurs en un mot, sont d'accord sur ce point: tous nous assûrent que les prêtres égyptiens, qui étoient les dépositaires des sciences, avoient une double philosophie; l'une secrete & sacrée, l'autre publique & vulgaire.

Pour juger quel pouvoit être le but de cette conduite,

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