ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"222"> On ne dit ici rien davantage de cette méthode, parce qu'il seroit difficile de donner en peu de paroles une idée assez claire de cette suite de dénombremens & d'exclusions, en quoi elle consiste: il la faut voir dans le livre même: d'ailleurs depuis que les méthodes de l'Algebre sont devenues familieres & ont été perfectionnées, elle n'est plus d'usage, & ne peut être que de simple curiosité. (O)

EXCOMMUNICATION (Page 6:222)

EXCOMMUNICATION, s. f. (Hist. anc.) séparation de communication ou de commerce avec une personne avec laquelle on en avoit auparavant. En ce sens, tout homme exclus d'une société ou d'un corps, & avec lequel les membres de ce corps n'ont plus de communication, peut être appellé excommunié; & c'étoit une peine usitée en certains cas parmi les Payens, & qui étoit infligée par leurs prêtres. On défendoit à ceux qu'on excommunioit, d'assister aux sacrifices, d'entrer dans les temples; on les livroit aux démons & aux Eumenides avec des imprécations terribles: c'est ce qu'on appelloit sacris interdicere, diris, devovere, execrari. La prêtresse Théano, fille de Menon, fut loüée de n'avoir pas voulu dévoüer Alcibiade aux furies, quoique les Athéniens l'eussent ordonné; & les Eumolpides, qui en ce point obéirent au peuple, furent très - blâmés, parce qu'on n'en devoit venir à cette peine qu'aux dernieres extrémités. Elle passa chez les Romains, mais avec la même reserve; & nous n'en voyons guere d'exemples que celui du tribun Ascius, qui n'ayant pû empêcher Crassus de porter la guerre chez les Parthes, courut vers la porte de la ville par laquelle ce général devoit sortir pour se mettre à la tête des troupes; & là jettant certaines herbes sur un brasier, il prononça des imprécations contre Crassus. La plus rigoureuse punition qu'infligeassent les druides chez les Gaulois, c'étoit, dit César liv. VI. d'interdire la communion de leurs mysteres à ceux qui ne veulent point acquiescer à leur jugement. Ceux qui sont frappés de cette foudre, passent pour scélérats & pour impies; chacun fuit leur rencontre & leur entretien. S'ils ont quelqu'affaire, on ne leur fait point justice, ils sont exclus des charges & des dignités, ils meurent sans honneur & sans crédit. On pouvoit pourtant, par le repentir & après quelques épreuves, être rétabli dans son premier état; cependant si l'on mouroit sans avoir été réhabilité, les druides ne laissoient pas d'offrir un sacrifice pour l'ame du défunt. (G)

Excommunication (Page 6:222)

Excommunication, (Théologie.) peine ecclésiastique par laquelle on sépare & prive quelqu'un de la communication ou du commerce qu'il étoit auparavant en droit d'avoir avec les membres d'une société religieuse. Voyez Communion.

L'excommunication, en général, est une peine spirituelle fondée en raison, & qui opere les mêmes effets dans la société religieuse, que les châtimens infligés par les lois pénales produisent dans la société civile. Ici les législateurs ont senti qu'il falloit opposer au crime un frein puissant; que la violence & l'injustice ne pouvoient être réprimécs que par de fortes barrieres; & que dès qu'un citoyen troubloit plus ou moins l'ordre public, il étoit de l'intérêt & de la sûreté de la société, qu'on privât le perturbateur d'une partie des avantages, ou même de tous les avantages dont il joüissoit à l'abri des conventions qui font le fondement de cette société: de - là les peines pécuniaires ou corporelles, & la privation de la liberté ou de la vie, selon l'exigence des forfaits. De même dans une société religieuse, dès qu'un membre en viole les lois en matiere grave, & qu'à cette infraction il ajoûte l'opiniâtreté, les dépositaires de l'autorité sacrée sont en droit de le priver, proportionnellement au crime qu'il a commis, de quelques-uns ou de tous les biens spirituels auxquels il participoit antérieurement.

C'est sur ce principe, également sondé sur le droit naturel & sur le droit positif, que l'excommunication restreinte à ce qui regarde la religion, a eu lieu parmi les Payens & chez les Hébreux, & qu'elle l'a encore parmi les Juifs & les Chrétiens.

L'excommunication étoit en usage chez les Grecs, les Romains & les Gaulois, comme on l'a vû par l'article précédent; mais plus cette punition étoit terrible; plus les lois exigeoient de prudence pour l'infliger; au moins Platon dans ses lois, liv. VII. la recommande - t - il aux prêtres & aux prêtresses.

Parmi les anciens Juifs on séparoit de la communion pour deux causes, l'impureté légale, & le crime. L'une & l'autre excommunication étoit décernée par les prêtres, qui déclaroient l'homme souillé d'une impureté légale, ou coupable d'un crime. L'excommunication pour cause d'impureté cessoit lorsque cette caule ne subsistoit plus, & que le prêtre déclaroit qu'elle n'avoit plus lieu. L'excommunication pour cause de crime ne finissoit que quand le coupable reconnoissant sa faute, se soûmettoit aux peines qui lui étoient imposées par les prêtres ou par le sanhédrin. Tout ce que nous allons dire roulera sur cette derniere sorte d'excommunication.

On trouve des traces de l'excommunication dans Esdras, liv. I. c. x. v. 8. Un Caraïtè cité par Selden, liv. I. c. vij. de synedrüs, assûre que l'excommunication commença à n'être mise en usage chez les Hébreux que lorsque la nation eut perdu le droit de vie & de mort sous la domination des princes infideles. Basnage, hist. des Juifs, liv. V. ch. xviij. art. 2. croit que le sanhédrin ayant été établi sous les Machabées, s'attribua la connoissance des causes ecclésiastiques & la punition des coupables; que ce fut alors que le mélange des Juifs avec les nations infideles, rendit l'exercice de ce pouvoir plus fréquent, afin d'empêcher le commerce avec les Payens, & l'abandon du Judaïsme. Mais le plus grand nombre des interpretes présume avec fondement que les anciens Hébreux ont exercé le même pouvoir & infligé les mêmes peines qu'Esdras, puisque les mêmes lois subsistoient; qu'il y avoit de tems en tems des transgresseurs, & par conséquent des punitions établies. D'ailleurs ces paroles si fréquentes dans les Livres saints écrits avant Esdras, anima quoe fuerit rebellis adversus Dominum, peribit, delebitur; (& selon l'hébreu) exscindetur de populo suo, ne s'entendent pas toûjours de la mort natureile, mais de la séparation du commerce ou de la communication in sacris.

On voit l'excommunication constamment établie chez les Juifs au tems de Jesus - Christ, puisqu'en S. Jean, ch. jx. v. 22. xij. v. 42. xvj. v. 2. & dans S. Luc, chap. vj. v. 22. il avertit ses apôtres qu'on les chassera des synagogues. Cette peine étoit en usage parmi les Esséniens. Josephe parlant d'eux dans son histoire de la guerre des Juifs, liv. II. chap. xij. dit « qu'aussi - tôt qu'ils ont surpris quelqu'un d'entr'eux dans une faute considérable, ils le chassent de leur corps; & que celui qui est ainsi chassé, fait souvent une fin tragique: car comme il est lié par des sermens & des voeux qui l'empêchent de recevoir la nourriture des étrangers, & qu'il ne peut plus avoir de commerce avec ceux dont il est séparé, il se voit contraint de se nourrir d'herbages, comme une bête, jusqu'à ce que son corps se corrompe, & que ses membres tombent & se détachent. Il arrive quelquefois, ajoûte cet historien, que les Esséniens voyant ces excommuniés prêts à périr de misere, se laissent toucher de compassion, les retirent & les reçoivent dans leur société, croyant que c'est pour eux une pénitence assez sévere que d'avoir été réduits à cette extrémité pour la punition de leurs fautes ». Voyez Esséniens.

Selon les rabbins, l'excommunication consiste dans [p. 223] la privation de quelque droit dont on joüissoit auparavant dans la communion ou dans la société dont on est membre. Cette peine renferme ou la privation des choses saintes, ou celle des choses communes, ou celle des unes & des autres tout à - la - fois; elle est imposée par une sentence humaine, pour quelque faute ou réelle ou appareute, avec espérance néanmoins pour le coupable de rentrer dans l'usage des choses dont cette sentence l'a privé. Voyez Selden, liv. I. ch. vij. de synedrüs.

Les Hébreux avoient deux sortes d'excommunications, l'excommunication majeure, & l'excommunication mineure: la premiere éloignoit l'excommunié de la société de tous les hommes qui composoient l'Eglise: la seconde le séparoit seulement d'une partie de cette société, c'est - à - dire de tous ceux de la synagogue; ensorte que personne ne pouvoit s'asseoir aupres de lui plus près qu'à la distance de quatre coudées, excepté sa femme & ses enfans. Il ne pouvoit être pris pour composer le nombre de dix personnes nécessaire pour terminer certaines affaires. L'excommunié n'étoit compté pour rien, & ne pouvoit ni boire ni manger avec les autres. Il paroît pourtant par le talmud, que l'excommunication n'excluoit pas les excommuniés de la célébration des fêtes, ni de l'entrée du temple, ni des autres cérémonies de religion. Les repas qui se faisoient dans le temple aux fêtes solennelles, n'étoient pas du nombre de ceux dont les excommuniés étoient exclus; le talmud ne met entr'eux & les autres que cette distinction, que les excommuniés n'entroient au temple que par le côté gauche, & sortoient par le côté droit; au lieu que les autres entroient par le côté droit, & sortoient par le côté gauche: mais peut - être cette distinction ne tomboit - elle que sur ceux qui étoient frappés de l'excommunication mineure.

Quoi qu'il en soit, les docteurs juifs comptent jusqu'à vingt - quatre causes d'excommunication, dont quelques - unes paroissent très - legeres, & d'autres ridicules; telles que de garder chez soi une chose nuisible; telles qu'un chien qui mord les passans, sacrifier sans avoir éprouvé son couteau en présence d'un sage ou d'un maître en Israël, &c. L'excommunication encourue pour ces causes, est précedée par la censure qui se fait d'abord en secret; mais si celle - ci n'opere rien, & que le coupable ne se corrige pas, la maison du jugement, c'est - à - dire l'assemblée des juges, lui dénonce avec menaces qu'il ait à se corriger: on rend ensuite la censure publique dans quatre sabbats, où l'on proclame le nom du coupable & la nature de sa faute; & s'il demeure incorrigible, on l'excommunie par une sentence conçûe en ces termes: qu'un tel soit dans la séparation ou dans l'excommunication, ou qu'un tel soit séparé.

On subissoit la sentence d'excommunication ou durant la veille ou dans le sommeil. Les juges ou l'assemblée, ou même les particuliers, avoient droit d'excommunier, pourvû qu'il y eût une des 24 causes dont nous avons parlé, & qu'on eût préalablement averti celui qu'on excommunioit, qu'il eût à se corriger; mais dans la regle ordinaire c'étoit la maison du jugement ou la cour de justice qui portoit la sentence de l'excommunication solennelle. Un particulier pouvoit en excommunier un autre; il pouvoit pareillement s'excommunier lui - même, comme, par exemple, ceux dont il est parlé dans les Actes, ch. xxiij. v. 12. & dans le second livre d'Esdras, ch. x. v. 29. qui s'engagent eux - mêmes, sous peine d'excommunication, les uns à observer la loi de Dieu, les autres à se saisir de Paul mort ou vif. Les Juifs lançoient quelquefois l'excommunication contre les bêtes, & les rabbins enseignent qu'elle fait son effet jusque sur les chiens.

L'excommunication qui arrivoit pendant le som<cb-> meil, étoit lorsqu'un homme voyoit en songe les juges qui par une sentence juridique l'excommunioient, ou même un particulier qui l'excommunioit; alors il se tenoit pour véritablement excommunié, parce que, selon les docteurs, il se pouvoit faire que Dieu, ou par sa volonté, ou par quelqu'un de ses ministres, l'eût fait excommunier. Les effets de cette excommunication sont tous les mêmes que ceux de l'excommunication juridique, qui se fait pendant la veille.

Si l'excommunié frappé d'une excommunication mineure, n'obtenoit pas son absolution dans un mois après l'avoir encourue, on la renouvelloit encore pour l'espace d'un mois; & si après ce terme expiré il ne cherchoit point à se faire absoudre, on le soûmettoit à l'excommunication majeure, & alors tout commerce lui étoit interdit avec les autres; il ne pouvoit ni étudier ni enseigner, ni donner ni prendre à loüage. Il étoit réduit à - peu - près dans l'état de ceux auxquels les anciens Romains interdisoient l'eau & le feu. Il pouvoit seulement recevoir sa nourriture d'un petit nombre de personnes; & ceux qui avoient quelque commerce avec lui durant le tems de son excommunication, étoient soûmis aux mêmes peines ou à la même excommunication, selon la sentence des juges. Quelquefois même les biens de l'excommunié étoient confisqués & employés à des usages sacrés, par une sorte d'excommunication nommée cherem, dont nous allons dire un mot. Si quelqu'un mouroit dans l'excommunication, on ne faisoit point de deuil pour lui, & l'on marquoit, par ordre de la justice, le lieu de sa sépulture, ou d'une grosse pierre ou d'un amas de pierres, comme pour signifier qu'il avoit mérité d'être lapide.

Quelques critiques ont distingué chez les Juifs trois sortes d'excommunications, exprimées par ces trois termes, nidui, cherem, & schammata. Le premier marque l'excommunication mineure, le second la majeure, & le troisieme signifie une excommunication au - dessus de la majeure, à laquelle on veut qu'ait été attachée la peine de mort, & dont personne ne pouvoit absoudre. L'excommunication nidui dure 30 jours. Le cherem est une espece de réaggravation de la premiere; il chasse l'homme de la synagogue, & le prive de tout commerce civil. Enfin le schammata se publie au son de 400 trompettes, & ôte toute espérance de retour à la synagogue. On croit que le maranatha dont parle S. Paul, est la même chose que le schammata; mais Selden prétend que ces trois termes sont souvent synonymes, & qu'à proprement parler les Hébreux n'ont jamais eu que deux sortes d'excommunications, la mineure & la majeure.

Les rabbins tirent la maniere & le droit de leurs excommunications, de la maniere dont Débora & Barac maudissent Meroz, homme qui, selon ces docteurs, n'assista pas les Israélites. Voici ce qu'on en lit dans le Livre des juges, ch. v. v. 23. Maudissez Meroz, dit l'ange du Seigneur: maudissez ceux qui s'asseyeront auprès de lui, parce qu'ils ne sont pas venus au secours du Seigneur avec les forts. Les rabbins voyent évidemment, à ce qu'ils prétendent, dans ce passage, 1° les malédictions que l'on prononce contre les excommuniés; 2° celles qui tombent sur les personnes qui s'asseyent auprès d'eux plus près qu'à la distance de quatre coudées; 3° la déclaration publique du crime de l'excommunié, comme on dit dans le texte cité, que Meroz n'est pas venu à la guerre du Seigneur; 4° enfin la publication de la sentence à son de trompe, comme Barac excommunia, dit - on, Meroz au son de 400 trompettes: mais toutes ces cérémonies sont récentes.

Ils croyent encore que le patriarche Hénoch est l'auteur de la formule de la grande excommunication dont ils se servent ençore à - présent, & qu'elle leur

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