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On nous en a fait un autre auquel nous sommes beaucoup plus sensibles. Les habitans du Valais, suivant ce qu'on nous écrit, se plaignent de l'article Crétins, imprimé dans le IV. Volume, & assûrent que cet article est absolument faux. La promesse que nous avons faite de rendre une prompte & exacte justice à toutes les personnes qui auroient quelque sujet de se plaindre, nous oblige à plus forte raison envers une nation estimable, que nous n'avons jamais eu intention d'offenser. Néanmoins, quand l'article Crétins seroit aussi fondé que nous croyons aujourd'hui qu'il l'est peu, il ne seroit nullement injurieux aux peuples du Valais; le Crétinage seroit une pure bisarrerie de la nature, qui n'auroit lieu, comme nous l'avons dit, que dans une petite partie de la nation, sans influer en aucune maniere sur le reste, & qui par - là n'en seroit que plus remarquable. Quoi qu'il en soit, nous prions nos Lecteurs de regarder absolument cet article comme non avenu, jusqu'à ce qu'on nous fournisse les moyens de nous rétracter plus en détail. Plusieurs raisons doivent faire excuser la faute où nous sommes tombés à ce sujet. L'article dont il s'agit a été tiré d'un mémoire dont l'extrait original nous a été communiqué par un de nos savans les plus respectables, trompé le premier ainsi que nous, par ceux qui le lui ont envoyé. Le mémoire avoit été lu à la Société de Lyon (c), qui en a publié l'analyse il y a quelques années dans un de nos ouvrages périodiques, & nous n'avons pas oüi dire que cette analyse imprimée ait excité alors aucunes plaintes. Tout sembloit donc concourir à nous induire en erreur. Comment pouvions - nous penser qu'une compagnie de gens de Lettres, très - à - portée par le peu de distance des lieux de vérifier aisément les faits, n'eût pas pris cette précaution si naturelle, avant que de les publier? Il nous paroît difficile de croire, comme on nous l'assûre, que l'auteur du mémoire, en le lisant à ses confreres de Lyon, se soit uniquement proposé de tendre un piége à leur négligence; mais s'il a formé ce projet, il n'a par malheur que trop bien réussi. Nous pouvons du moins assûrer que cet évenement imprévû nous rendra desormais très - circonspects sur tout ce qui nous viendra de pareilles sources. Peut - être ne devons - nous point faire servir à notre justification le silence que la nation intéressée a cru devoir garder jusqu'au moment où l'article Crétins a paru dans l'Encyclopédie; nous sentons, avec autant de reconnoissance que de regret, tout ce qu'il y a de flateur pour nous dans la sensibilité que les habitans du Valais nous témoignent.
Après ces éclaircissemens nécessaires, il ne nous reste plus qu'à rendre les honneurs funebres à deux collegues que nous avons perdus, M. l'Abbé Lenglet & M. l'Abbé Mallet. C'est un devoir aussi juste que triste, auquel nous nous sommes engagés, & que nous serons fideles à remplir. Nous attendons les mémoires dont nous avons besoin pour payer le même tribut à feu M. du Marsais qui nous a été enlevé au mois de Juin dernier, & dont la perte n'est pas moins grande pour les Lettres que pour l'Encyclopédie.
(a) Voyez les mots[p. iij]Accompagnement , page 75. col. 2. vers la fin;Basse , page 119. col. 2. & sur - tout la fin du metChiffrer . (b) Voyez la brochure citée, page 46, 64, & sur - tout depuis la page 110 jusqu'à la fin. (c) Cette Société est différente de l'Académie des Sciences & Belles - Lettres de la même ville.
Pendant la guerre de 1701, & depuis pendant la Régence, les correspondances étrangeres qu'il entretenoit, le mirent à portée de faire parvenir au gouvernement des avis utiles, qui lui mériterent une pension dont il a joüi jusqu'à sa mort. Un des plus importans qu'il donna fut par malheur un de ceux dont les circonstances empêcherent le plus de profiter. Il avoit fort connu en Allemagne & en Hollande un Général étranger, qui dans la derniere guerre de 1741, commandoit l'Armée & avoit la confiance d'un de nos principaux Alliés. Il découvrit au Ministere les raisons qui devoient rendre cet étranger suspect, & l'évenement justifia tout ce qu'il en avoit dit.
Sa mémoire étoit prodigieuse, sa conversation animée & pleine d'anecdotes, son style extrèmement négligé; heureusement la plûpart des matieres qu'il a traitées étant de pure érudition, les vices de la diction peuvent s'y pardonner plus aisément. Il écrivoit comme il parloit, avec beaucoup de rapidité, & par cette raison il paroissoit mieux parler qu'il n'écrivoit: son peu de fortune ne lui laissoit pas toûjours le tems de revoir ses écrits avant que de les publier; cette raison doit faire excuser les méprises qui s'y trouvent.
Sur la fin de sa vie il s'adonna, dit - on, à la pierre philosophale, y altéra sa santé, & s'y seroit ruiné s'il avoit pû l'être.
L'amour de l'indépendance, ce sentiment si naturel & si nuisible, étoit sa grande passion, & lui sit refuser constamment tous les postes avantageux que ses talens & ses connoissances auroient pû lui procurer, soit dans les pays étrangers, soit dans sa propre patrie; mais la liberté qu'il vouloit pour sa personne, se montroit souvent trop à découvert dans ses écrits, & lui attira quelques disgraces de la part du Ministere; il les recevoit sans murmure, & même sans chagrin, & consentoit à les souffrir, pourvû qu'on lui permît de les mériter.
Quelquefois assez vis, quelquefois aussi indifférent sur ses propres intérêts, il a voulu que son travail pour l'Encyclopédie fût absolument gratuit. Outre plusieurs articles qu'il a revûs dans les trois derniers volumes, il nous en a donné en entier quelques - uns; les plus considérables sont Constitution de l'Empire & Diplomatique; dans ce dernier il attaque avec plusieurs savans l'authenticité des titres & des chartes du moyen âge. Les deux Bénédictins Auteurs de la nouvelle Diplomatique, lui ont répondu dans la préface de leur second Volume. Nous n'entrerons point dans cette question, & nous ne sommes point étonnés de voir M. l'Abbé Lenglet combattu par de savans Religieux, qui peuvent être aussi fondés qu'intéressés à défendre l'opinion contraire.
Après avoir fait ses études avec succès au collége des Barnabites de Montargis, fondé par les Ducs d'Orléans, il vint à Paris, & fut choili par M. de la Live de Bellegarde Fermier général, pour veiller à l'instruction de ses enfans. Les principes de goût & les sentimens honnêtes qu'il eut soin de leur inspirer, produisirent les fruits qu'il avoit lieu d'en attendre. C'est aux soins de cet instituteur, secondés d'un heureux naturel, que nous devons M. de la Live de Jully, Introducteur des Ambassadeurs, & Honoraire de l'Académie royale de Peinture, qui cultive les beaux Arts avec succès, amateur sans ostentation, sans injustice, & sans tyrannie.
M. l'Abbé Mallet passa de cet emploi pénible dans une carriere non moins propre à faire connoître ses talens; il entra en Licence en 1742 dans la Faculté de Théologie de Paris. Les succès par lesquels il s'y distingua ne furent pas équivoques. C'est l'usage en Sorbonne à la fin de chaque Licence de donner aux Licentiés les places, à - peu - près comme on le pratique dans nos colléges: les deux premieres de ces places sont affectées de droit aux deux Prieurs de Sorbonne; les deux suivantes (par un arrangement fondé sans doute sur de bonnes raisons) sont destinées aux deux plus qualifiés de la Licence: le mérite dénué de titres n'a dans cette liste que la cinquieme place; elle fut donnée unanimement à M. l'Abbé Mallet.
Pendant sa Licence il fut aggrégé à la Maison & Société rovale de Navarre. Les hommes illustres qu'elle a produits, Gerson, Duperron, Launoi, Bossuet, & tant d'autres, étoient bien propres à exciter l'émulation de M. l'Abbé Mallet, & avoient déterminé son choix en faveur de cette Maison célebre.
Tout l'invitoit à demeurer à Paris; le séjour de la Capitale lui offroit des ressources
assûrées, & le succès de sa Licence des espérances flateuses. Déjà la Maison de Rohan
l'avoit choisi pour élever les jeunes Princes de Guemené Montbason; mais sa mere & sa
famille avoient besoin de ses secours: aucun sacrifice ne lui coûta pour s'acquitter de ce
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