ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"450"> fait le cylindre. A mesure qu'une ligne change pour son levier, toutes les autres changent pour le leur: ainsi chaque levier a douze lignes de lames de 64 pouces de diametre qui pasfent sous lui, & qui font entr'elles une ligne de 768 pouces de long. C'est sur cette ligne que sont placées toutes les lames suffisantes pour l'action du levier durant tout le jeu.

Il ne reste plus qu'à faire voir comment tous ces différens mouvements ont servi à produire l'effet qu'on s'est proposé dans cet automate, en les comparant avec ceux d'une personne vivante.

Est - il question de lui faire tirer du son de sa flûte, & de former le premier ton, qui est le d'en - bas? On commence d'abord à disposer l'embouchûre; pour cet effet on place sur le cylindre une lame dessous le levier qui répond aux parties de la bouche, servant à augmenter l'ouverture que font les levres. Secondement, on place une lame sous le levier qui sert à faire reculer ces mêmes levres. Troisiemement, on place une lame sous le levier qui ouvre la soûpape du réservoir du vent qui vient des petits soufflets qui ne sont point chargés. On place en dernier lieu une lame sous le levier qui fait mouvoir la languette pour donner le coup de langue; de façon que ces lames venant à toucher dans le même tems les quatre leviers qui servent à produire les susdites opérations, la flûte sonnera le d'en - bas.

Par l'action du levier qui sert à augmenter l'ouverture des levres, on imite l'action de l'homme vivant, qui est obligé de l'augmenter dans les tons bas. Par le levier qui sert à faire reculer les levres, on imite l'action de l'homme, qui les éloigne du trou de la flûte en la tournant en - dehors. Par le levier qui donne le vent provenant des soufflets qui ne sont chargés que de leur simple panneau, on imite le vent foible, que l'homme donne alors, vent qui n'est pareillement poussé hors de son réservoir que par une légere compression des muscles de la poitrine. Par le levier qui sert à faire mouvoir la languette, en débouchant le trou que forment les levres pour laisser passer le vent, on imite le mouvement que fait aussi la langue de l'homme, en se retirant du trou pour donner passage au vent, & par ce moyen lui faire articuler une telle note. Il résultera donc de ces quatre opérations différentes, qu'en donnant un vent foible, & le faisant passer par une issue large dans toute la grandeur du trou de la flûte, son retour produira des vibrations lentes, qui seront obligées de se continuer dans toutes les particules du corps de la flûte, puisque tous les trous se trouveront bouchés, & par conséquent la flûte donnera un ton bas; c'est ce qui se trouve confirmé par l'expérience.

Veut - on lui faire donner le ton au - dessus, savoir le mi? aux quatre premieres opérations pour le on en ajoûte une cinquieme; on place une lame sous le levier, qui fait lever le troisieme doigt de la main droite pour déboucher le sixieme trou de la flûte, & on fait approcher tant - soit - peu les levres du trou de la flûte en baissant un peu la lame du cylindre qui tenoit le levier élevé pour la premiere note, savolr le : ainsi donnant plûtôt aux vibrations une issue, en débouchant le premier trou du bout, la flûte doit sonner un ton au - dessus; ce qui est aussi confirmé par l'expérience.

Toutes ces opérations se continuent à peu - près les mêmes dans les tons de la premiere octave, où le même vent suffit pour les former tous; c'est la différente ouverture des trous, par la levée des doigts, qui les caractérise: on est seulement obligé de placer fur le cylindre des lames sous les leviers, qui doivent lever les doigts pour former tel ou tel ton.

Pour avoir les tons de la seconde octave, il faut changer l'embouchûre de situation, c'est - à - dire, placer une lame dessous le levier, qui contribue à faire avancer les levres au - delà du diametre du trou de la flûte, & imiter par - là l'action de l'homme vivant, qui en pareil cas tourne la flûte un peu en - dedans. Secondement il faut placer une lame sous le levier, qui, en faisant rapprocher les deux levres, diminue leur ouverture; opération que fait pareillement l'homme quand il serre les levres pour donner une moindre issue au vent. Troisiemement, il faut placer une lame sous le levier qui fait ouvrir la soûpape du réservoir, qui contient le vent provenant des soufflets chargés du poids de deux livres; vent qui se trouve poussé avec plus de force, & semblable à celui que l'homme vivant pousse par une plus sorte compression des muscles pectoraux. De plus, on place des lames sous les leviers nécessaires pour faire lever les doigts qu'il faut. Il s'ensuivra de toutes ces différentes opérations, qu'un vent envoyé avec plus de force, & passant par une issue plus petite, redoublera de vïtesse & produira par conséquent les vibrations doubles; & ce sera l'octave.

A mesure qu'on monte dans les tons supérieurs de cette seconde octave, il faut de plus - en - plus serrer les levres; pour que le vent; dans un même tems, augmente de vîtesse.

Dans les tons de la troisieme octave, les mêmes leviers qui vont à la bouche agissent comme dans ceux de la seconde, avec cette différence que les lames sont un peu plus élevées, ce qui fait que les levres vont tout - à - fait sur le bord du trou de la flûte, & que le trou qu'elles ferment devient extrèmement petit. On ajoûte seulement une lame sous le levier qui fait ouvrir la soûpape, pour donner le vent qui vient des soufflets les plus chargés, savoir du poids de quatre livres; par conséquent le vent poussé avec une plus forte compression, & trouvant une issue encore plus petite, augmentera de vîtesse en raison triple: on aura done la triple octave.

Il se trouve des tons dans toutes ces différentes octaves plus difficiles à rendre les uns que les autres; on est pour lors obligé de les ajuster en plaçant les levres sur une plus grande ou plus petite corde du trou de la flûte, en donnant un vent plus ou moins fort, ce que fait l'homme dans les mêmes tons où il est obligé de ménager son vent & de tourner la flûte plus ou moins en - dedans ou en - dehors.

On conçoit facilement que toutes les lames placées sur le cylindre sont plus ou moins longues, suivant le tems que doit avoir chaque note, & suivant la différente situation où doivent se trouver les doigts pour les former; ce qu'on ne détaillera point ici pour ne point donner à cet article trop d'étendue. On fera remarquer seulement que dans les enflemens de son il a fallu, pendant le tems de la même note, substituer imperceptiblement un vent foible à un vent fort, & à un plus fort un plus foible, & varier conjointement les mouvemens des levres, c'est - à - dire, les mettre dans leur situation propre pour chaque vent.

Lorsqu'il a fallu faire le doux, c'est - à - dire imiter un écho, on a été obligé de faire avancer les levres sur le bord du trou de la flûte, & envoyer un vent suffisant pour former un tel ton, mais dont le retour par une issue aussi petite qu'est celle de son entrée dans la flûte, ne peut frapper qu'une petite quantité d'air extérieur; ce qui produit, comme on l'a dit ci - dessus, ce qu'on appelle écho.

Les différens airs de lenteur & de mouvement ont été mesurés sur le cylindre par le moyen d'un levier, dont une extrémité armée d'une pointe pouvoit, lorsqu'on frappoit dessus, marquer ce même cylindre. A l'autre bras du levier étoit un ressort qui faisoit promptement relever la pointe. On lâchoit le mouvement qui faisoit tourner le cylindre avec une vîtesse déterminée pour tous les airs: dans le même [p. 451] tems une personne joüoit sur la flûte l'air qu'on vouloit mesurer; un autre battoit la mesure sur le bout du levier qui pointoit le cylindre, & la distance qui se trouvoit entre les points étoit la vraie mesure des airs qu'on vouloit noter; on subdivisoit ensuite les intervalles en autant de parties que la mesure avoit de tems. (O)

* Combien de finesses dans tout ce détail! Que de délicatesse dans toutes les parties de ce méchanisme! Si cet article, au lieu d'être l'exposition d'une machine exécutée, étoit le projet d'une machine à faire, combien de gens ne le traiteroient - ils pas de chimere? Quant à moi, il me semble qu'il faut avoir bien de la pénétration & un grand fonds de méchanique pour concevoir la possibilité du mouvement des levres de l'automate, de la ponctuation du cylindre, & d'une infinité d'autres particularités de cette description. Si quelqu'un nous propose donc jamais une machine moins compliquée, telle que seroit celle d'un harmonometre, ou d'un cylindre divisé par des lignes droites & des cercles dont les intervalles marqueroient les mesures, & percé sur ces intervalles de petits trous dans lesquels on pourroit insérer des pointes mobiles, qui s'appliquant à discrétion sur telles touches d'un clavier que l'on voudroit, exécuteroit telle piece de Musique qu'on desireroit à une ou plusieurs parties; alors gardons - nous bien d'accuser cette machine d'être impossible, & celui qui la propose d'ignorer la Musique; nous risquerions de nous trom per lourdement sur l'un & l'autre cas.


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