ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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EQUIVOQUE (Page 5:896)

EQUIVOQUE, s. f. (Gramm.) double sens d'une phrase, produit par sa mauvaise construction.

Les équivoques sont des expressions louches, qui rendent le discours réellement obscur, & embarrassent l'esprit du lecteur pour en découvrir le véritable sens. Les langues qui demandent de la clarté, & la langue françoise en particulier, sont ennemies de ces sortes d'ambiguités de construction. Il est vrai que toute la lecture de la période en fait d'ordinaire comprendre le sens, dès que l'on y donne un peu plus d'attention; mais il vaudroit mieux que cela n'arrivât point: car c'est aux paroles à faire entendre le sens, & non pas au sens à faire entendre les paroles. Si l'on vous relit deux fois, dit M. de Vaugelas, que ce soit pour vous admirer, & non pas pour chercher ce que vous avez voulu dire. Le même critique a justement remarqué que la plûpart des équivoques se forment dans notre langue par les pronoms relatifs, possessifs, & démonstratifs. Exemple du pronom relatif: c'est le fils de cette femme qui a fait tant de mal. On ne sait si ce qui se rapporte à sils ou à femme; desorte que si l'on veut qu'il se rapporte à fils, il faut mettre lequel au lieu de qui. Exemple du pronom possessif: il a toûjours aimé cette personne au milieu de son adversité. Ce son est équivoque; car on ne sait s'il se rapporte à cette personne ou à il, qui est celui qu'on a aimé. Il en est de même du pronom démonstratif.

Les équivoques se font encore, quand un mot qui est entre deux autres se peut rapporter à tous les deux, comme dans cette période d'un célebre auteur: je passerai par - dessus ce qui ne sert de rien; mais aussi veux - je bien particulierement traiter ce qui me semblera nécessaire. Le bien se rapporte à particulierement, & non pas à veux - je; c'est pourquoi pour écrire nettement il falloit mettre, aussi veux - je traiter bien particulierement, & non pas, aussi veux - je bien particulierement traiter.

Les équivoques se font enfin, quand on met quelques mots entre ceux qui ont du rapport ensemble, & que néanmoins les derniers mots se peuvent rapporter aux mots qui sont entre deux; un exemple le va faire entendre: l'orateur arrive à son but, qui est de persuader, d'une façon toute particuliere. L'intention de celui qui s'exprime ainsi, est que ces mots, d'une façon toute particuliere, se rapportent à ceux - ci, arrive à son but; mais comme ils sont placés, il semble qu'ils se rapportent à persuader: il faudroit donc dire, l'orateur arrive d'une façon toute particuliere à son but, qui est de persuader.

Quoique ce précis, tiré de M. de Vaugelas, puisse ici suffire, il seroit bon d'étudier toutes les observations de cet auteur, de même que celles de nos meilleurs critiques, sur les équivoques de construction; car c'est le défaut dans lequel tombent les plus grands écrivains, parce qu'il est très - difficile de l'éviter, si on n'y donne une grande attention, & si on ne relit souvent ses ouvrages à tête reposée; mais il ne faut pas en même tems porter ses timides scrupules jusqu'à l'excès, énerver son style, & prendre l'ombre d'une équivoque pour une équivoque réelle.

Equivoque se dit aussi dans notre langue d'un terme à double - sens, dont abusent seulement ceux qui cherchent à joüer sur les mots. Voyez Pointe ou Jeu de mots. Article de M. le Chevalier de Jaucourt.

Equivoque (Page 5:896)

Equivoque, (Morale.) discours ou proposition à double - sens; l'un naturel, qui paroît être celui qu'on veut faire entendre, & qui est effectivement entendu de ceux qui écoutent; l'autre détourné, qui n'est entendu que de la personne qui parle, & qu'on ne soupçonne pas même pouvoir être celui qu'elle a intention de faire entendre. C'est un expédient imaginé pour ne point dire lavérité & ne point mentir en même tems; mais cet expédient n'est réellement qu'une tromperie condamnable dans ceux qui s'en servent, parce qu'ils manquent à la bonne - foi. Il n'y a, dit très - bien un de nos auteurs modernes, que la subtilité d'une éducation scholastique qui puisse persuader que l'équivoque soit un moyen de sauver du naufrage sa sincérité; car dans le monde ce moyen n'empêche pas de passer pour menteur & pour mal - honnête homme, & il donne de plus un ridicule d'esprit très - méprisable.

Cependant, n'est - il jamais permis de se servir de termes ambigus, ou même obscurs? Je réponds avec Grotius & Puffendorf, qu'on ne doit jamais y avoir recours, à moins que ce moyen ne soit nécessaire, par exemple, à l'instruction de ceux qui sont confiés à nos soins, ou à éluder une question importante ou captieuse, qu'on n'a pas droit de nous faire; ou à nous procurer quelqu'avantage innocent sans nuire à un tiers. Du reste, toutes les fois qu'on est dans l'obligation de découvrir clairement sa pensée à quelqu'un, il n'y a pas moins de crime à le tromper par une équivoque que par un mensonge. Enfin, de l'aveu même des Payens, c'est un lâche artifice & une insigne fourberie, que d'avoir recours aux équivoques lorsqu'il s'agit de contrat ou de quelqu'affaire d'intérêt. En un mot, les équivoques sont si blâmables en général, qu'on ne peut apporter trop de reserve à spécifier les cas fort rares où elles seroient innocentes. Article de M. le Chevalier de Jaucourt.

Equivoque (Page 5:896)

Equivoque, adj. (Medecine.) est aussi l'épithete que donnent les Medecins aux signes qui ne constituent pas essentiellement le caractere d'une maladie, & qui ne la distinguent pas d'une autre. Equivoque en ce sens est opposé à univoque, qui est l'épithete des signes qui conviennent uniquement à une maladie, tirés des symptomes qui en sont inséparables. Voyez Signe. (d)

EQUULEUS (Page 5:896)

EQUULEUS, voyez Equiculus.

E R

ERABLE (Page 5:896)

ERABLE, s. m. acer, (Hist. nat. Bot.) genre de plante à fleur en rose, composée de plusieurs pétales disposés en rond. Il sort du calice un pistil qui devient dans la suite un fruit composé de deux, & quelquefois de trois capsules, qui sont terminées chacune par un feuillet membraneux, & qui renferment une semence arrondie. Tournef. inst. rei herb. Voyez Plante. (I)

Erable (Page 5:896)

Erable, (Jardinage.) c'est un arbre de différente grandeur, selon les diverses especes de son genre. Plusieurs de ces érables croissent naturellement en Europe, quelques - uns dans le Levant, & le plus grand nombre en Amérique. Il est peu d'arbres qui rassemblent autant de variété, d'agrément & d'utilité que ceux - ci, qui croissent avec plus de vîtesse & d'uniformité, qui s'accommodent mieux des plus mauvaises expositions, & qui exigent moins de soins & de culture; qui résistent mieux à toutes les intempéries des saisons, & que l'on puisse pour la plûpart multiplier avec plus de facilité.

Toutes les especes d'érables que l'on connoît, semblent faites pour la température de ce climat; elles y réussissent à souhait; elles s'y soûtiennent contre quantité d'obstacles qui arrêtent beaucoup d'autres arbres, & elles remplissent tout ce qu'on en peut attendre. Dans les terres seches & legeres, dans les lieux élevés & arides, dans les terrains les plus superficiels, on voit les érables profiter, grossir & s'élever aussi - bien que s'ils étoient dans les meilleures terres de vallée. Les différentes especes de cet arbre offrent à plusieurs égards une variété dont on peut tirer grand parti pour l'embellissement des jardins; la verdure de leur feuillage fait autant de différentes [p. 897] nuances qu'il y a d'especes d'érables: la forme & la largeur des feuilles varient également; elles paroissent de bonne heure au printems, & ne tombent que fort tard en automne: il y a aussi quelques especes qui donnent des fleurs d'une assez belle apparence. On peut distinguer les différentes especes d'érables, en grands & en petits arbres. Les grands érables forment de belles tiges bien droites; ils ont l'écorce unie & la feuille fort grande: on peut les préférer à beaucoup d'autres arbres pour faire des avenues, des bosquets, & du couvert. Les petits érables ont un accroissement plus lent, le bois plus menu, & la feuille plus petite: ils sont très - propres à former des palissades & des haies à hauteur d'appui; à quoi ils conviennent souvent d'autant mieux, qu'ils ont le mérite singulier de croître à l'ombre & sous les autres arbres.

Voici les différentes especes d'érables les plus connues jusqu'à présent.

L'érable - sycomore, grand arbre qui croît naturellement dans quelques forêts de l'Europe & de l'Amérique septentrionale, & plus ordinairement dans les pays de montagnes. Sa tige est fort droite, son écorce est unie & roussâtre: sa feuille est large, lisse, découpée en cinq parties principales, d'un verd - brun en - dessus, & blanchâtre en - dessous: ses fleurs viennent en grappes longues & pendantes; elles sont d'une couleur herbacée, qui n'a nulle belle apparence: la graine qui en provient est à - peu - près de la forme d'un pepin d'orange; elle est renfermée dans une double écaille, qui est terminée par une aîle legere. Cet arbre est très - propre à faire des allées & du couvert sur les lieux élevés & dans les plus mauvais terrains; il s'y soûtient contre les grandes chaleurs & les longues sécheresses, même dans les provinces méridionales de ce royaume, où l'on n'a pas eu de meilleure ressource que de recourir au sycomore pour remplacer avec succès différentes especes d'autres arbres qui avoient péri successivement dans une partie du cours d'Aix en Provence, soit à caase de la grande chaleur de ce climat, soit par rapport à la mauvaise qualité du sol. Cet arbre réussit également dans les bonnes terres de la plaine & sur les croupes des montagnes exposées au nord; il ne redoute aucune mauvaise qualité de l'air. M. Miller assûre que le sycomore soûtient mieux qu'aucun autre arbre les vapeurs de la mer. Mais un autre avantage particulier à cet arbre, c'est qu'il résiste parfaitement à la continuité & à la violence des vents; ensorte que pour se garantir de leur impétuosité, & défendre à cet égard les bâtimens, les plantations & tout espace que l'on veut abriter, c'est cet arbre que l'on doit y employer par préférence. Le sycomore devient en peu de tems un gros & grand arbre; il se garnit d'un feuillage épais, qui donne beaucoup d'ombre & de fraîcheur: il est si robuste, que les hyvers les plus rigoureux de ce climat ne lui portent aucun préjudice, même dans sa premiere jeunesse, & qu'il soûtient le froid excessif qui se fait dans le Canada, où cet arbre est fort commun, & où l'on en tire la seve par incision, dont on fait de bon sucre. Le bois du sycomore est sec, leger, sonore, brillant, & d'une qualité fort approchante de celle du bois de hêtre: il n'est pas sujet à se tourmenter, à se déjetter ni à se fendre; on l'employe aux petits ouvrages des Tourneurs, Menuisiers, Sculpteurs, Armuriers, Ebénistes & Luthiers. Il est propre aux mêmes usages que le bois du tilleul & du hêtre: c'est le meilleur de tous les bois blancs. On peut multiplier cet arbre de graine, de branches couchées, ou par le moyen de la greffe, sur les autres érables, & même en plantant les racines qu'on auroit retranchées du tronc d'un sycomore. Mais cet arbre a quelques petits défauts; ses feuilles sont d'un verd trop brun, & elles sont sujettes à être gâtées par les insectes. Il est vrai que sa verdure est fort brune, & même encore plus foncée lorsque l'arbre commence à pousser; ce qui étant entierement opposé au verd naissant & tendre de presque tous les autres arbres, c'est un contraste de verdure dont on pourra tirer parti. On convient aussi que les hannetons attaquent souvent les feuilles du sycomore; mais ils ne l'endommagent pas assez, pour que l'arbre fasse un aspect desagréable.

L'érable - sycomore panaché: c'est une variété de l'espece précédente, dont cet arbre ne differe que par la couleur de ses feuilles, qui sont plus ou moins bigarrées de jaune & de verd, & qui font un agrément singulier. On sait que ce mêlange de couleur, qui n'est qu'un accident occasionné par la foiblesse ou la maladie de l'arbre, ou par la mauvaise qualité du terrain, ne se soûtient dans la plûpart des autres arbres panachés, qu'en les multipliant par la greffe, ou en couchant leurs branches, & nullement en semant leurs graines, attendu que les plantes qui en naissent, rentrent dans l'état naturel. Mais il en est autrement du sycomore panaché, dont on peut conserver la diversité de couleur, non - seulement en couchant ses branches ou en le greffant sur le sycomore ordinaire, mais encore en semant sa graine, qui produit des plants dont la plûpart sont panachés.

L'érable plane, grand arbre qui fait une belle tige très droite, dont l'ecorce est lisse & blanchâtre. Sa feuille a beaucoup de ressemblance avec celle du platane, ce qui lui a fait donner le nom d'érable plane: mais elle n'est ni si grande ni si épaisse, ni d'un verd si tendre que celle du platane. Ses fleurs viennent en bouquets de couleur jaune, qui ont quelqu'apparence; elles commencent à paroître avant les feuilles, à lafin d'Avril. La graine qui en provient est plate & terminée par une aîle, comme celle du sycomore. Après le platane, c'est l'un des plus beaux arbres que l'on puisse employer pour l'embellissement des jardins; il a toutes les bonnes qualités du sycomore, avec lequel il a tant d'analogie & de ressemblance, qu'on peut faire à l'érable plane l'application de tout ce que l'on vient de dire du sycomore; mais il n'a pas, comme celui - ci, le défaut d'avoir des feuilles d'un verd trop rembruni, ni d'être sujet aux attaques de quelques insectes, qui au contraire ne portent aucune atteinte aux feuilles de l'érable plane, dont la verdure tendre & agréable se soûtient avec égalité pendant toute la belle saison, & ne passe que fort tard en automne. Son feuillage étant encore plus fourni que celui du sycomore, il fait un meilleur couvert, & de plus belles allées en palissade sur tige, pour lesquelles l'érable plane est des plus convenables; mais il faut donner à ces arbres un quart de distance moins qu'aux tilleuls, parce que cette espece d'érable prend plus de hauteur que d'extension. Cet arbre croît encore plus promptement que le sycomore: j'ai vû souvent des plants venus de semence en terrain sec, s'élever jusqu'à douze piés en trois ans. Les Anglois lui donnent le nom d'érable de Norwege, parce que vraissemblablement il leur est venu de ce pays - là, où il est fort commun. Mais comme la plûpart des Jardiniers de Paris, & ceux des provinces à plus forte raison, confondent cet arbre avec le sycomore, il est à - propos de rapporter ici quelques caracteres apparens, qui puissent les faire distinguer l'un de l'autre. L'érable plane a l'écorce blanchâtre sur le vieux bois, les boutons rougeâtres pendant l'hyver, la feuille plate, mince, & d'un verd tendre; les fleurs jaunes, disposées en bouquets relevés, & la graine applatie: le sycomore au contraire a la tige plus grosse, la tête plus étendue, l'écorce roussâtre, les boutons jaunes en hyver, la feuille plus épaisse, plus brune, & un peu repliée en - dessus; les fleurs d'un - petit jaune verdâtre, bien moins apparentes,

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