ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"689"> neur qui est le plus simple aprês le précédent, vient de la progression de la basse fondamentale par tierces majeures, progression aussi indiquée par la nature, mais moins naturelle néanmoins que la progression par quintes. V. Harmonie. En effet, si on forme cette basse fondamentale ut mi, on pourra mettre au - dessus ce chant sol sol #, qu'on trouvera former un semi - ton mineur. 3°. enfin le genre enharmonique le moins naturel des trois, a son origine dans une basse ut mi sol #, dont les deux extrèmes ut, sol #, qui donnent le quart de ton enharmonique, forment une progression non naturelle. (O)

Diatonique enharmonique. On appelle ainsi un chant qui procede par une suite de semi - tons tous majeurs, qui se succedent immédiatement; ce chant est diatonique parce que chaque semi - ton y est majeur (V. Diatonique & Chromatique); & il est enharmonique, parce que deux semi - tons majeurs de suite forment un ton trop fort d'un quart de ton enharmonique. Pour former cette espece de chant il faut faire une basse fondamentale qui monte alternativement de quinte & de tierce, comme fa ut mi si, & cette basse donnera le chant fa mi mi ré #, où tous les semi - tons sont majeurs. Une partie du trio des Parques de l'opéra d'Hyppolite est dans ce genre; mais il n'a jamais pû être exécuté à l'opéra; il l'avoit été ailleurs par des musiciens très - habiles & de bonne volonté, & M. Rameau assure que l'effet en est surprenant. (O)

Chromatique enharmonique. On appelle ainsi un chant qui procede par une suite de semi - tons mineurs, qui se succedent immédiatement. Ce chant est chromatique, parce que chaque semi - ton y est mineur (V. Chromatique); il est enharmonique, parce que les deux semi - tons mineurs consécutifs forment un ton trop foible d'un quart de ton enharmonique. Pour former cette espece de chant, il faut avoir une basse fondamentale composée de tierces mineures & majeures en cette sorte, ut ut la ut # ut #, & mettre au - dessus ce chant mi mi mi mi mi #; on trouvera par le calcul que mi mi, mi, mi, mi # forment des semitons mineurs. M. Rameau nous apprend qu'il avoit fait dans ce genre de musique un tremblement de terre au second acte des Indes galantes en 1735, mais qu'il fut si mal servi qu'il fut obligé de le changer en une musique commune. Voyez mes E émens de Musique. p. 91. 92, 93, & 116. (O)

ENHARNACHER, HARNACHER (Page 5:689)

ENHARNACHER, HARNACHER, (Manege, Maréchall.) mettre les harnois sur le corps d'un cheval expressions synonymes. V. Harnacher. (e)

ENHENDE (Page 5:689)

ENHENDE, adj. terme de Blason. On appelle croix enhendée celle dont le pié est enhendé, c'est - à - dire refendu, du mot espagnol enhendido, qui signifie la même chose. Ces croix à refente sont communes en Allemagne.

ENHUCHE (Page 5:689)

ENHUCHE. (Marine) Voyez Huche.

ENHYDRUS (Page 5:689)

ENHYDRUS, s. m. (Hist. natur. Minéralogie) Ce mot est composé de E)N, in, & de U(DWR, aqua: quelques naturalistes désignent par ce mot une atite ou pierre d'aigle qui contient de l'eau. L'enhydrus est donc une pierre qui ressemble parfaitement aux autres pierres d'aigle qui sont ferrugineuses: elle est de différentes grandeurs & varie pour la figure, est composée de plusieurs couches ou enveloppes appliquées les unes sur les autres; les couches extérieures sont d'un jaune d'ochre; la couche qui tapisse l'intérieur est presque toujours noirâtre, & plus compacte que les couches extérieures. Lorsqu'on casse cette pierre, on trouve qu'elle a une cavité comme les autres oetites; avec cette différence, qu'il en sort une liqueur qui est ordinairement épaisse, & quelquefois blanchâtre comme de la creme, dont elle a à peu - près la consistance: mais ce cas est rare; elle est plus communément d'un blanc bleuâtre ou limpide, lorsqu'elle n'a point été salie par la matiere ochracée dont la pierre est composée; cette liqueur est souvent entierement insipide, cependant elle a quelquefois un goût ferrugineux & astringent, & même nauséeux. Il y a de ces pierres en Angleterre & ailleurs. ( - )

ENJABLER (Page 5:689)

ENJABLER, v. act. terme de Tonnellier. C'est enfoncer les futailles ou y mettre des fonds, en arrêtant les douves d'enfonçures dans la rainure qui regne tout autour du jable en - dedans. Voyez Jable.

ENJALER (Page 5:689)

ENJALER une ancre, (Marine.) c'est attacher à l'ancre deux pieces de bois qu'on appelle jas, & les empater ensemble vers l'organeau. Le jas sert à contrebalancer dans l'eau la patte de l'ancre pour la faire tomber sur le bon côté: quelques matelots disent enj auler une ancre. Voyez Jas. (Z)

ENJAMBEMENT (Page 5:689)

ENJAMBEMENT, s. m. (Poésie.) construction vicieuse, principalement dans les vers alexandrins. On dit qu'un vers enjambe sur un autre, lorsque la pensée du poëte n'est point achevée dans le même vers, & ne finit qu'au commencement ou au milieu du vers suivant. Ainsi ce défaut existe toutes les fois qu'on ne peut point s'arrêter naturellement à la fin du vers alexandrin, pour en faire sentir la rime & la pensée, mais qu'on est obligé de lire de suite & promptement l'autre vers, à cause du sens qui est demeuré suspendu. Les exemples n'en sont pas rares: en voici un seul.

Craignons qu'un Dieu vangeur ne lance sur nos têtes La foudre inévitable.

Il y a ici un enjambement, parce que le sens ne permet pas qu'on se repose à la fin du premier vers.

Ce n'est pas assez d'éviter l'enjambement d'un vers à l'autre, il faut de plus éviter d'enjamber du premier hémistiche au second; c'est - à - dire, que si l'on porte un sens au - delà de la moitié du vers, il ne faut pas l'interrompre avant la fin, parce qu'alors le vers paroît avoir deux repos & deux césures, ce qui est très - desagréable. Il est encore bien moins permis d'enjamber d'une stance à l'autre. Voyez les auteurs sur la vérsification françoise.

Mais si l'enjambement est défendu dans les vers alexandrins, comme nous venons de le dire, il est autorisé dans les vers de dix syllabes, & il y produit même quelquefois un agrément, parce que cette espece de vers faite pour la poésie familiere souffre quelques licences, & ne veut pas être assujettie à une trop grande gêne.

Les poëtes du siecle passé ne s'embarrassoient guere de laisser enjamber leurs vers les uns sur les autres; c'est à Malherbe le premier à qui l'on doit la correction de ce défaut de la versification. Par ce sage écrivain, par ce guide fidele, dit Despréaux,

Les Stances avec grace apprirent à marcher, Et le vers sur le vers n'osa plus enjamber. Article de M. le Cbevalier de Jaucourt.

ENIGME (Page 5:689)

ENIGME, s. m. & plus souvent f. (Littér. Poésie.) c'étoit chez les anciens une sentence mystérieuse, une proposition qu'on donnoit à deviner, mais qu'on cachoit sous des termes obscurs, & le plus souvent contradictoires en apparence. L'énigme parmi les modernes, est un petit ouvrage ordinairement en vers, où sans nommer une chose, on la décrit par ses causes, ses effets & ses propriétés, mais sous des termes & des idées équivoques pour exciter l'esprit à la découvrir.

Souvent l'énigme est une suite de comparaisons qui caractérisent une chose, par des noms tirés de plusieurs sujets différens entre eux qui ressemblent à celui de l'énigme chacun à sa maniere, & par des rapports particuliers. Quelquefois pour la rendre plus difficile à deviner, on l'embarrasse, en mêlant le style simple au style figuré, en empruntant des métaphores, ou en personnifiant exprès le sujet de l'énigme afin de donner le change. [p. 690] En général, pour constituer la bonté de nos énigmes modernes, il faut que les traits employés ne puissent s'appliquer tous ensemble qu'à une seule chose, quoique séparément ils conviennent à plusieurs.

Je ne m'arrêterai pas à rapporter les autres regles qu'on prescrit dans ce jeu littéraire, parce que mon dessein est bien moins d'engager les gens de Lettres à y donner leurs veilles, qu'à les détourner de semblables puérilités. Qu'on ne dise point en faveur des énigmes, que leur invention est des plus anciennes, & que les rois d'Orient se sont fait très - long tems un honneur d'en composer & d'en résoudre: je répondrois que cette ancienneté même n'est ni à la gloire des énigmes, ni à celle des rois orientaux.

Dans la premiere origine des langues, les hommes furent obligés de joindre le langage d'action à celui des sons articulés, & de ne parler qu'avec des images sensibles. Les connoissances aujourd'hui les plus communes étoient fi subtiles pour eux, qu'elles ne pouvoient se trouver à leur portée qu'autant qu'elles se rapprochoient des sens. Ensuite, quand on étudia les propriétés des êtres pour en tirer des allusions, on vit paroître les paraboles & les énigmes, qui devinrent d'autant plus à la mode, que les sages ou ceux qui se donnoient pour tels, crurent devoir cacher au vulgaire une partie de leurs connoissances. Par - là, le langage imaginé pour la clarté fut changé en mysteres: le style dans lequel ces prétendus sages renfermoient leurs instructions, étoit obscur & énigmatique, peut - être par la difficulté de s'exprimer clairement; peut - être aussi à dessein de rendre les connoissances d'autant plus estimables qu'elles seroient moins communes.

On vit donc les rois d'Orient mettre leur gloire dans les propositions obscures, & se faire un mérite de composer & de résoudre des énigmes. Leur sagesse confistoit en grande partie dans ce genre d'étude. Un homme intelligent, dit Salomon, parviendra à comprendre un proverbe, à pénétrer les paroles des sages & leurs sentences obscures. C'étoit chez eux l'usage pour éprouver leur sagacité, de se présenter ou de s'envoyer les uns aux autres des énigmes, & d'y attacher des peines & des récompenses.

Entre plusieurs exemples que je pourrois alléguer, je n'en rapporterai qu'un seul, tiré de l'Ecriture - sainte, & je me servirai de la traduction des théologiens de Louvain, quoiqu'en vieux langage, parce que je n'ai présentement que cette traduction sous les yeux. Voici les propres paroles du Texte sacré, chap. xjv du livre des Juges, vers. 12 & suivans.

Samson dit: Je vous proposerai quelques propositions: que si vous me baillez la solution dedans les sept jours du convive, je vous donnerai trente fines chemises, & autant de robes.

Vers. 13. Mais si vous ne pouvez me bailler la solution, vous me donnerez trente fines chemises, & autant de robes. Lesquels lui répondirent: Propose ta proposition, afin que l'oyons.

Vers. 14. Et il leur dit: De celui qui mangeoit est sorti la viande, & du fort est venu la douceur. Et ne purent par trois jours donner la solution de la proposition.

Vers. 15. Et quand le septieme jour fut venu, ils dirent à la femme de Samson: Flatte ton mari, & lui persuade qu'il te déclare quelle chose signifie la proposition.

Vers. 17. Et ainsi tous les jours du convive, elle plearoit devant lui; & finalement au septieme jour, tomme elle le molestoit, il lui exposa: laquelle incontinent le fit savoir à ceux de son peuple.

Vers. 18. Et iceux lui dirent au septieme jour devant le soleil couchant: Quelle chose est plus douce que le miel, & quelle chose est plus forte que le lion? Lors Samson leur dit: Si vous n'eussiez labouré avec ma génisse, vous n'eussiez point trouvé ma proposition.

Un savant Jurisconsulte met cette énigme au rang des gageures, en matiere de jeux d'esprit; & il pourroit bien avoir raison, car il y a une stipulation de part & d'autre, de trente fines chemises, & autant de robes. Cependant les Philistins agirent de mauvaise foi, en obligeant la femme de Samson de tirer de la bouche de son mari l'explication de l'énigme, & à la leur apprendre, au lieu de la deviner par eux - mêmes.

Au reste, dans notre siecle, l'énigme proposée par Samson ne seroit point dans les regles, parce qu'elle ne rouloit pas sur une chose ordinaire, ou un évenement commun, mais sur un fait particulier; c'est - à - dire sur un de ces cas qu'il est ordinairement presque impossible de deviner.

Quoi qu'il en soit, dans ce tems - là on n'étoit pas si scrupuleux; on ne cherchoit qu'à attraper ceux à qui on présentoit des énigmes à expliquer: & c'est un fait si vrai, que l'intelligence des énigmes, ou des sentences obscures, devint un proverbe parmi les Hébreux, pour signifier l'adresse à tromper, comme on le peut conclure du portrait que Daniel fait d'Antiochus Epiphanés. « Lorsque les iniquités se seront accrues, dit - il, il s'élevera un roi qui aura l'impudence sur le front, & qui comprendra les sentences obscures».

Le voile mystérieux de cette sorte de sagesse la rendit, comme il arrivera toûjours, le plus estimé de tous les talens: c'est pourquoi dans un pseaume, où il s'agit d'exciter fortement l'attention, le psalmiste débute en ces termes: « Vous peuples, écoutez ce que je vais dire. Que tous les habitans de la terre, grands & petits, riches & pauvres, prêtent l'oreille; ma bouche publiera la sagesse....je decouvrirai sur la harpe mon énigme».

Outre les causes que nous avons rapportées, qui contribuerent à conserver long - tems les énigmes en vogue, je croirois volontiers que l'usage des hyérogliphes y concourut aussi pour beaucoup: en effet, quand on vint à oublier la signification des hyérogliphes, on perdit peu - à - peu, quoique très - lentement, l'usage des énigmes.

Enfin elles reparurent, lorsqu'on devoit le moins s'y attendre; je veux dire, dans le xvij. siecle: & ce n'est pas, ce me semble, par cet endroit qu'il mérite le plus qu'on le vante. Il est vrai qu'on habilla pour lors en Europe les énigmes avec plus d'art, de finesse & de goût, qu'elles ne l'avoient été dans l'Asie: on les soûmit, comme tous les autres poëmes, à des lois & à des regles étroites, dont le pere Menestrier même a publié un traité particulier. Mais quelque décoration qu'on ait donnée aux énigmes, elles ne seront presque jamais que de folles dépenses d'esprit, des jeux de mots, des écarts dans le langage & dans les idées.

Les gens de lettres un peu distingués du siecle passé, qui ont eu la foiblesse de donner dans cette mode, & de se laisser entraîner au torrent, seroient bien honteux aujourd'hui de lire leurs noms dans la liste de toutes sortes de gens oisifs, & de voir qu'un tems a été qu'ils se faisoient un honneur de deviner des énigmes; & plus encore d'annoncer à la France, qu'ils avoient eu assez d'esprit pour exprimer, sous un certain verbiage, sous un jargon mystérieux & des termes équivoques, une flûte, une fleche, un éventail, une horloge.

Mais il faut bien se garder de confondre de telles inepties, avec les énigmes d'un autre genre; j'entends ces fameux problèmes de la Géométrie transcendante, qui, sur la fin du même siecle, exercerent des génies d'un ordre supérieur. La solution de ces dernieres sortes d'énigmes peut avoir de grands usages; elle demande du moins beaucoup de sagacité, & prouve qu'ons'est rendu familiere la connoissance

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