ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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DUCHÉ - PAIRIE (Page 5:155)

DUCHÉ - PAIRIE, (Jurisprud.) est tout à la fois un des grands offices de la couronne, un fief de dignité relevant de la couronne, & une justice seigneuriale du premier ordre avec titre de pairie. Ce n'est pas ici le lieu de traiter de tout ce qui appartient aux pairs & à la pairie en général, ainsi nous nous bornerons à ce qui est propre aux duchés - pai<-> ries, considérées sous les trois différens points de vûe que l'on a annoncés, c'est - à - dire comme office, fief, & justice.

On dit d'abord que les duchés - pairies sont de grands offices de la couronne. Les duchés, dont l'usage venoit des Romains, étoient dans les commencemens de la monarchie des gouvernemens de provinces que le roi confioit aux principaux seigneurs de la nation, que l'on appelloit d'abord princes, ensuite barons & ducs ou pairs. Ces ducs réunissoient en leur personne le gouvernement militaire, celui des finances, & l'administration de la justice. Ils jugeoient souve<cb-> rainement au nom du roi, avec les principaux de la ville où ils faisoient leur résidence, les appels des centeniers, qui étoient les juges royaux ordinaires. Un duché comprenoit d'abord douze comtés ou gouvernemens particuliers; cette répartition fut depuis faite différemment. Le titre de duc étoit si déchu sur la fin de la premiere race, que pendant la seconde, & bien avant dans la troisieme, celui qui avoit un duché se faisoit appeller comte; dans la suite les titres de ducs & de duchés reprirent le dessus. Les ducs cesserent de rendre la justice en personne, lorsqu'on institua les baillis & sénéchaux; de sorte que présentement la fonction des ducs & pairs, comme grands officiers de la couronne, est d'assister au lacre du roi & autres cérémonies considérables, & de rendre la justice au parlement avec les autres personnes dont il est composé.

L'office de duc & pair est de sa nature un office viril; il y a cependant eu quelques duchés - pairies érigées sous la condition de passer aux femelles à défaut de mâles: ces duchés sont appellés duchés - pairies mâles & femelles: il y en a même eu quelques - uns érigés pour des femmes ou filles, & ceux - ci ont été appellés simplement duchés femelles.

Anciennement les femmes qui possédoient une du<-> ché - pairie, faisoient toutes les fonctions attachées à l'office de pair. Blanche de Castille mere de S. Louis, pendant son absence, prenoit séance au parlement. Mahaut comtesse d'Artois étant nouvellement créée pair, signa l'ordonnance du 3 Octobre 1303: elle assista en personne au parlement de 1314, pour y juger le procès du comte de Flandres & du roi Louis Hutin; elle assista au sacre de Philippe V. dit le Long, en 1316, où elle fit les fonctions de pair, & y soûtint avec les autres la couronne du roi son gendre. Une autre comtesse d'Artois fit fonction de pair en 1364 au sacre de Charles V. Au parlement tenu le 9 Décembre 1378, pour le duc de Bretagne, la duchesse d'Orléans s'excusa par lettres de ce qu'elle ne s'y trouvoit pas. Présentement les femmes qui possedent des duchés - pairies, ne siégent plus au parlement: il en est de même en Angleterre, où il y a aussi des pairies femelles.

Les duchés - pairies considérées comme fiefs, sont des seigneuries ou fiefs de dignité qui relevent immédiatement de la couronne. Ces sortes de seigneuries tiennent le premier rang entre les offices de dignité.

Les premieres érections des duchés - pairies remontent au moins jusqu'au tems de Louis le Jeune; d'autres les sont remonter encore plus haut; c'est ce qui sera discuté plus amplement au mot Pairie.

Toutes les terres érigées en pairies n'ont pas le titre de duché: il y a aussi des comtés - pairies. Il y a eu plusieurs de ces comtés - pairies laïques, tels que le comté de Flandres, de Champagne, de Toulouse, & autres qui sont présentement réunis à la couronne.

Il y a encore trois comtés - pairies qui ont rang de duchés; savoir, le comté de Beauvais, celui de Châlons, & celui de Noyon, qui forment les trois dernieres des six anciennes pairies ecclésiastiques.

Les autres seigneuries, soit comtés, marquisats, baronies ou autres qui sont érigées à l'instar des pai<-> ries, ne sont point des pairies proprement dites; & si quelques - unes en portent le titre, c'est abusivement, n'ayant d'autre prerogative que de ressortir immédiatement au parlement, comme les duchés & comtés pairies dont on a parlé.

Depuis l'érection des grandes seigneuries en pai<-> ries, le titre de duc & pair est toûjours attaché à la possession d'une duché - pairie; car la pairie qui étoit d'abord personnelle est devenue réelle.

L'edit du mois de Mai 1711, concernant les ducs & pairs, ordonne entr'autres choses, que par les ter<pb-> [p. 156] mes d'hoirs & successeurs, & par les termes d'ayans cause, inserés tant dans les lettres d'érection précédemment accordées, que dans celles qui pourroient l'être à l'avenir, ne s'entendront que des enfans mâles de celui en faveur de qui l'érection aura été faite, & des mâles qui en seront descendus de mâle en mâle en quelque ligne & degré que ce soit.

Que les clauses générales insérées ci - devant dans quelques lettres d'érection de duchés - pairies en faveur des femelles, & qui pourroient l'être en d'autres à l'avenir, n'auront aucun effet qu'à l'égard de celle qui descendra & sera de la maison & du nom de celui en faveur duquel les lettres auront été accordées, & à la charge qu'elle n'épousera qu'une personne que le roi jugera digne de posséder cet honneur, & dont il aura agréé le mariage par des lettres patentes qui seront adressées au parlement de Paris, & qui porteront confirmation du duché en sa personne & descendans mâles, &c.

Ce même édit permet à ceux qui ont des duchés<-> pairies, d'en substituer à perpétuité le chef - lieu avec une certaine partie de leur revenu, jusqu'à 15000 livres de rente, auquel le titre & dignité desdits du<-> chés & pairies demeurera annexé, sans pouvoir être sujet à aucunes dettes ni détractions de quelque nature qu'elles puissent être, après que l'on aura observé les formalités prescrites par les ordonnances pour la publication des ordonnances; à l'effet de quoi l'édit déroge à l'ordonnance d'Orléans, à celle de Moulins, & à toutes autres ordonnances & coûtumes contraires.

Il permet aussi à l'aîné des mâles descendans en ligne directe de celui en faveur duquel l'érection des duchés & pairies aura été faite, ou à son défaut ou refus, à celui qui le suivra immédiatement, & ensuite à tout autre mâle de degré en degré, de les retirer des filles qui se trouveront en être propriétaires, en leur remboursant le prix dans six mois sur le pié du denier 25 du revenu actuel, & sans qu'ils puissent être reçûs en ladite dignité qu'après en avoir fait le payement réel & effectif.

L'edit ordonne encore, que ceux qui voudront former quelque contestation au sujet des duchés - pai<-> ries, &c. seront tenus de représenter au roi, chacun en particulier, l'intérêt qu'ils prétendent y avoir, afin d'obtenir du roi la permission de poursuivre l'affaire au parlement de Paris, &c.

La haute, moyenne, & basse justice qui est attachée aux duchés pairies, est une justice seigneuriale.

Les fourches patibulaires de ces justices sont à six piliers.

Anciennement lorsqu'une seigneurie étoit érigée en duché, c'étoit ordinairement à condition que l'appel de sa justice ressortiroit sans moyen au parlement. Il y a cependant quelques - unes des anciennes pairies ecclésiastiques qui ne ressortissent pas immédiatement au parlement, comme Langres, &c. Les érections de duchés étant devenues plus fréquentes, on met ordinairement dans les lettres, que c'est sans distraction de ressort du juge royal: ou si l'on déroge au ressort, c'est à condition d'indemniser les officiers de la justice royale; & jusqu'à ce que cette indemnité soit payée, la distraction de ressort n'a aucun effet.

Les nouveaux réglemens enregistrés au parlement sont envoyés par le procureur général aux officiers des duchés - pairies ressortissantes nuement au parlement, pour y être enregistrées, de même que dans les siéges royaux.

Ces justices des duchés - pairies n'ont pas néanmoins la connoissance des cas royaux; elle demeure toûjours reservée au juge royal, auquel la pairie ressortissoit avant son érection.

Depuis la déclaration du 17 Février 1731, on ne peut plus faire aucune insinuation au greffe des du<cb-> chés - pairies, non plus que dans les autres justices seigneuriales.

On tenoit autrefois des grands jours pour les du<-> chés, en vertu de la permission qui en étoit accordée par des lettres patentes du roi. On permettoit même quelquefois de tenir ces grands jours à Paris; ces grands jours ont été supprimés & retablis par différentes déclarations, & enfin supprimés deffinitivement. Voyez Grands jours & Pairies. (A)

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