ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"139"> l'autorité publique. Sulpitius avoit aussi déjà commencé un ouvrage fort succinct sur la même matiere. Il y en a un fragment dans le digeste de inst. act.

Du reste, les jurisconsultes qui jusqu'alors sembloient n'avoir eu qu'un même esprit, commencerent sous le regne d'Auguste à se diviser d'opinions, & formerent deux sectes, qui prirent les noms de leurs chefs, qui firent beaucoup de bruit dans la jurisprudence: l'une commencée par Labeo, & renouvellée par Proculus, & ensuite par Pegasus, fut appellée la secte des Proculéiens ou des Pégasiens; l'autre formée d'abord par Atteius Capito, & renouvellée par deux de ses disciples successivement, fut appellée Sabi<-> nienne ou Cassienne.

Adrien étant parvenu à l'empire, commença par faire un grand nombre de bonnes lois; il fit ensuite recueillir en un corps d'ouvrage tout ce qu'il y avoit de plus équitable dans les édits des préteurs. Cette compilation fut appellée édit perpétuel, pour la distinguer des édits qui n'étoient par eux - mêmes que des lois annuelles. Voyez ci - après Edit perpétuel.

Un auteur dont le nom n'est pas connu, fit une autre compilation appellée édit provincial, c'est - à - dire à l'usage des provinces: c'étoit à peu - près la même chose que l'édit perpétuel, si ce n'est que l'auteur en ôta ce qui ne convenoit qu'à la ville de Rome, & ajoûta plusieurs réglemens particuliers pour les provinces.

Ces deux compilations ne subsistent plus; on en trouve seulement quelques fragmens dans le digeste.

Les lois n'ayant pas prévû tous les cas qui se présentoient, Adrien introduisit une nouvelle forme pour les décider: c'étoit par des rescrits ou lettres par lesquels il marquoit sa volonté. Ces rescrits rendirent le droit fort arbitraire.

Quelquefois au lieu d'un simple rescrit, les empereurs donnoient un jugement appellé decret. Ils faisoient aussi de leur propre mouvement de nouveiles lois, qui furent appellées édits ou constitutions, constitutiones principum. Ce nom de constitu<-> tions fut dans la suite commun à toutes les décisions émanées des empereurs.

Les empereurs manifestoient encore leurs volontés en plusieurs autres manieres, selon les différentes occasions; savoir, par des discours, crationes prin<-> cipum, qu'ils prononçoient à leur avenement, ou lorsqu'ils proposoient quelque chose au sénat; par des pragmatiques, pragmaticoe sanctiones, qui étoient des réglemens ou statuts accordés à la priere d'une communauté, d'une ville, ou d'une province; par des lettres signées du prince, appellées sacrae adno<-> tationes, qui contenoient quelque grace ou libéralité en faveur d'un particulier; enfin par des lettres appellées mandata principum, que le prince adressoit de son propre mouvement aux gouverneurs & magistrats des provinces, à la différence des rescrits qui étoient des réponses aux lettres de ces officiers.

Quoique les empereurs usassent ainsi en plusieurs manieres du droit de législation, cela n'empêche pas que l'on ne fît encore quelquefois des senatusconsultes. On en trouve trois remarquables du tems d'Adrien; savoir les senatusconsultes Apronien, Julien, & Tertullien. Il en fut fait aussi plusieurs sous les successeurs d'Adrien.

Ces princes ne s'appliquerent pas tous également à faire des lois: cela dépendit beaucoup de la durée & de la tranquillité de leur regne, & du goût qu'ils avoient pour la justice.

Antonin le Pieux fit plusieurs constitutions, dont quelques - unes sont rapportées dans le code, d'autres citées dans le digeste & dans les institutes.

Marc - Aurele & Lucius - Verus qui regnerent conjointement, firent beaucoup de lois, lesquelles fu<cb-> rent rassemblées en vingt livres par Papyrius - Justus, du tems de Marc - Aurele; mais il ne nous en reste que quatre, rapportées dans le code. Il y en a quelques autres citées dans le digeste.

C'est du tems de Marc - Aurele que vivoit le célebre Gaïus ou Caïus: ce jurisconsulte fut auteur d'un grand nombre d'ouvrages sur le droit, dont aucun n'est parvenu en entier jusqu'à nous; on en trouve seulement plusieurs fragmens dans le digeste. Il fit entre autres choses des institutes, que l'on donnoit à lire à ceux qui vouloient s'initier dans la science du Droit: ce fut peut - être ce qui donna à Justinien l'idée de faire ses institutes, dans lesquels il a employé plusieurs endroits de ceux de Caïus. La plus grande partie de ces derniers se trouve perdue. Nous n'en avons que ce qui fut conservé dans l'abrégé qu'en fit Anien par ordre d'Alaric, roi des Visigoths en Espagne, & ce qu'un jurisconsulte moderne, nommé Jacques Oiselius, en a recherché dans le digeste & ailleurs. Voyez Institutes.

Le célebre Papyrien vécut sous l'empire de Septime Severe, & sous celui de Caracalla & Geta. Ses ouvrages furent tant estimés, que Théodose le jeune voulut que les juges donnassent la préférence aux décisions de ce jurisconsulte, lorsque les autres seroient partagés entre eux. On trouve plusieurs fragmens de ses ouvrages dans le digeste.

On y en trouve aussi plusieurs d'Ulpien, l'un des principaux disciples de Papyrien, & du jurisconsulte Paulus qui vivoit dans le même tems qu'Ulpien. Le surplus des ouvrages de Paulus qui étoient en grand nombre, n'est point parvenu jusqu'à nous, à l'exception de celui qui a pour titre, receptarum sententia<-> rum libri quinque.

Nous ne parlerons pas ici de ce qui peut être personnel aux autres jurisconsultes Romains, soit parce qu'on en a déjà fait mention à l'article du digeste, soit parce que l'on aura encore occasion d'en parler à l'article des réponses des jurisconsultes.

Nous ne ferons pas non plus mention ici de quelques constitutions faites par les autres empereurs, qui régnerent jusqu'à Constantin, quoiqu'il y ait quelques - unes de ces constitutions insérées dans le code, ces lois ne formant qu'une legere partie du droit romain, si l'on excepte celle de Maximien, dont il y a près de six cents constitutions insérées dans le code.

L'empereur Constantin fit aussi un très - grand nombre de constitutions, dont il y en a environ 200 insérées dans le code de Justinien.

Mais avant la confection de ce code, il en fut fait deux autres du tems de Constantin par deux jurisconsultes nommés Grégorius & Hermogénien, d'où ces deux compilations furent appellées codes grégo<-> rien & hermogénien. Ces deux codes comprenoient les constitutions des empereurs, depuis Adrien jusqu'à Dioclétien & Maximien; mais ces compilations ne furent point revêtues de l'autorité publique.

Les successeurs de Constantin firent la plûpart diverses lois. Théodose le jeune est celui dont il est parlé davantage par rapport au nouveau code qu'il fit publier en 438, & qui fut appellé de son nom co<-> de théodosien. On y distribua en seize livres les constitutions des empereurs sur les principales matieres du droit. L'empereur ordonna qu'il ne seroit fait aucune autre loi à l'avenir, même par Valentinien III. son gendre: ce qui ne fut pourtant pas exécuté.

En effet depuis la publication de son code, il donna lui - même plusieurs nouvelles constitutions, pour suppléer ce qui n'avoit pas été prévû dans le code; elles furent appellées novelles, du latin novelloe con<-> stitutiones. Cujas en a rassemblé jusqu'à 51, qu'il a mises en tête du code théodosien.

Valentinien III. gendre de Théodose, fit aussi [p. 140] quelques novelles, une entre autres pour confirmer celles de Théodose. Il avoit déjà fait un grand nombre de constitutions, conjointement avec Théodose: mais elles précéderent. Il y a aussi quelques novelles de Marcien.

Le code théodosien & les novelles dont on vient de parler, furent donc la principale loi, observée dans tout l'empire jusqu'à la publication des livres de Justinien.

Alors ce code ayant cessé d'être observé, se perdit; & il n'a été recouvré & rétabli dans la suite, que sur l'abrégé qu'Anien en avoit fait, & par le moyen des recherches de différens jurisconsultes.

Nous voici enfin parvenus au dernier état du droit romain, c'est - à - dire aux compilations des lois faites par ordre de Justinien, & par les soins de Tribonien & autres jurisconsultes.

La premiere de ces compilations qui parut en 528, fut le code, lequel fut formé des trois codes précédens, grégorien, hermogénien, & théodosien: cette édition du code fut depuis appellée codex primoe proelectionis, à cause d'une autre rédaction qui en fut faite quelques années après.

En 533, on publia les institutes de Justinien, divisés en quatre livres, qui sont un précis de toute la jurisprudenee romaine.

L'année suivante, on publia le digeste ou pandectes, qui son une compilation de toutes les décisions des anciens jurisconsultes, dont les ouvrages composoient plus de 2000 volumes. Voy. Digeste & Pandectes.

En 534, Tribonien donna une nouvelle rédaction du code, qui fut appellé codex repetitoe proelectio<-> nis. Voyez ce qui en est dit au mot Code.

Justinien pourvût aux cas qui n'avoient pas été prévûs dans le code ni dans le digeste par des constitutions particulieres appellées novelles, dont le nombre est controversé entre les auteurs: quelques-uns en comptent jusqu'à 168.

Ces novelles ayant été la plûpart composées en grec, un auteur dont le nom est inconnu, en fit une traduction latine qui fut surnommée l'authentique, comme étant la version des véritables novelles.

On a aussi donné le nom d'authentiques à des extraits des novelles, qu'Irnérius a insérés en différens endroits du code auxquels ces extraits ont rapport.

Un auteur inconnu a changé l'ordre des novelles, & lés a divisées en neuf collections, ce qui a gâté les novelles plûtôt que de les éclaircir. Voyez Novelles.

Justinien donna aussi treize édits, qui se trouvent à la suite des novelles dans la plûpart des éditions du corps de droit; mais comme c'étoient des réglemens particuliers pour la police de quelques provinces de l'empire, ces édits ne sont proprement d'aucun usage parmi nous.

Théodose le jeune & Valentinien III. avoient établi une école de droit à Constantinople. Justinien, pour faciliter l'étude du droit, établit encore deux autres écoles, une à Rome, & l'autre à Beryte.

Les compilations faites par Justinien, furent suivies avec quelques novelles qu'y ajoûterent Justin II. & Tibere II. son successeur.

Mais Phocas ayant ordonné que l'on se servît de la langue greque dans les écoles & les tribunaux, fit traduire en grec les livres de Justinien. Les institutes furent traduits par Théophile en forme de paraphrase, & l'on n'enseigna plus d'autres institutes.

L'empereur Basile fit commencer un abrégé du corps de droit de Justinien, divisé par livres & par titres, mais sans diviser les titres par lois: il n'y en eut que quarante livres faits de son tems. Léon son fils surnommé le Philosophe, fit continuer ce travail, & le publia en 60 livres sous le titre de basili<cb-> ques. L'ouvrage fut revû & mis dans un meilleur ordre par Constantin Porphyrogenete, qui le publia de nouveau en 910; & depuis ce tems les lois de Justinien cesserent d'être suivies, & les basiliques furent le droit observé dans l'empire d'Orient jusqu'à sa destruction. Ces basiliques n'étant point parvenues jusqu'à nous en entier, les jurisconsultes du seizieme siecle, entre autres Cujas, ont travaillé à les rassembler; & en 1647, Fabrot en a donné une édition en sept volumes in - folio, contenant le texte grec, avec une traduction latine. Il y a cependant encore plusieurs lacunes considérables, qui n'ont pu être remplies.

L'usage du droit romain fut entierement aboli dans l'empire d'orient, lorsque Mahomet II. se fut emparé de Constantinople en 1453.

Pour ce qui est de l'empire d'occident, les incursions des Barbares avoient empêché le droit de Justinien de s'établir en Italie & dans les Gaules, même du tems de Justinien; le droit romain que l'on y suivoit étoit composé du code théodosien, des institutes de Caïus, des fragmens d'Ulpien, & des sentences de Paul.

Charlemagne étant devenu empereur d'occident, ordonna que l'on suivroit le code théodosien en Italie & en Allemagne, & dans les provinces de France où on étoit dans l'usage de suivre le droit romain.

Le code théodosien & les autres ouvrages qui composoient ce que l'on appelloit alors la loi romai<-> ne, perdirent beaucoup de leur autorité sous la seconde race de nos rois à cause des capitulaires, & ce fut sans doute alors que ces lois qui n'étoient plus observées se perdirent.

Les compilations de Justinien étoient pareillement perdues, ou du moins presqu'entierement oubliées.

Les pandectes de Justinien ayant été retrouvées dans le pillage de la ville d'Amalfi, vers le milieu du xij, siecle, l'empereur Lothaire en fit présent aux habitans de Pise, & ordonna que ces pandectes seroient suivies dans tout l'empire.

Au commencement du xv. siecle, les Florentins s'étant rendus maîtres de la ville de Pise, & ayant compris dans leur butin les pandectes, elles furent depuis ce tems surnommées pandectes florentines.

Dès que le digeste eut été retrouvé à Pise, Irnerius que Lothaire avoit nommé professeur de droit à Boulogne, obtint de l'empereur que tous les ouvrages de Justinien seroient cités dans le barreau, & auroient force de loi dans l'empire au lieu du code théodosien.

A - peu - près dans le même tems les lois de Justinien furent aussi adoptées en France au lieu du code théodosien, dans les provinces qui suivent le droit écrit; en effet, on voit que dès le tems de Louis le Jeune il fut fait une traduction françoise du code de Justinien, & Placentin enseignoit à Montpellier les compilations du même empereur.

Il y a apparence qu'on les enseignoit aussi dès - lors dans d'autres villes, car on voit qu'un grand nombre d'ecclésiastiques & de religieux quittoient la théologie pour étudier la loi mondaine; c'est ainsi qu'on appelloit alors le droit civil, tellement que le concile de Tours, en 1180, défendit aux religieux profès de sortir de leurs cloîtres pour étudier en Medecine ou en Droit civil.

Cette défense n'ayant pas été observée, Honorius III. la renouvella en 1225 par la decrétale sem<-> per specula, qui défend à toutes personnes d'enseigner ni écouter le droit civil à Paris, ni dans les villes & autres lieux aux environs. Les motifs allégués dans cette decrétale sont qu'en France & dans quelques provinces, les laïcs ne fe servoient point des lois romaines, & qu'il se présentoit peu de causes ecclésiastiques qui ne pussent être décidées par les canons.

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