ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"133"> servation de soi - même, & l'utilité particuliere; il conclut de - là que tous les hommes ont la volonté, les forces, & le pouvoir de se faire du mal les uns aux autres, & que l'état de nature est un état de guerre contre tous; il attribue aux rois une autorité sans bornes, non - seulement dans les affaires d'état, mais aussi en matiere de religion. Lambert Verthuisen, philosophe des Provinces - unies, fit une dissertation pour justifier la maniere dont les lois naturelles sont présentées dans le traité du citoyen; mais ce ne fut qu'en abandonnant les principes d'Hobbes, ou en tâchant d'y donner un sens favorable. Hobbes donna encore au public un autre ouvrage intitulé le viathan, dont le précis est que sans la paix il n'y a point de sûreté dans un état; que la paix ne peut subsister sans le commandement, ni le commandement sans les armes; que les armes - ne valent rien, si elles ne sont mises entre les mains d'une personne, &c. Il soûtient ouvertement, que la volonté du souverain fait non - seulement ce qui est juste ou injuste, mais même la religion; qu'aucune révélation divine ne peut obliger la conscience, que quand le souverain, auquel il attribue une puissance arbitraire, lui a donné force de loi.

Spinoza a eu depuis les mêmes idées de l'état de nature, qu'il fonde sur les mêmes principes.

On ne s'engagera pas ici à refuter le système pernicieux de ces deux philosophes, dont on apperçoit aisément les erreurs.

Le baron de Puffendorf ayant conçû le dessein de former un système du droit de la nature & des gens, suivit l'esprit & la méthode de Grotius; il examina les choses dans leurs sources, & profita des lumieres de ceux qui l'avoient précédé; il y joignit ses propres découvertes, & donna d'abord un premier traité sous le titre d'élémens de jurisprudence universelle. Cet ouvrage, quoiqu'encore imparfait, donna une si haute idée de l'auteur, que l'électeur palatin Charles - Louis l'appella l'année suivante dans son université d'Heidelberg, & fonda pour lui une chaire de professeur en droit de la nature & des gens.

M. de Barbeyrac; dans la préface qu'il a mise en tête de la traduction du traité du droit de la nature & des gens de Puffendorf, fait mention d'un autre professeur allemand, nommé Buddoeus, qui avoit été professeur en droit naturel & en morale à Hall en Saxe, & qui est auteur d'une histoire du droit naturel.

M. Burlamaqui auteur des principes du droit natu<-> rel, dont on parlera dans un moment, étoit auparavant professeur en droit naturel & civil à Geneve; ce qui donne lieu de remarquer en passant que dans plusieurs états d'Allemagne & d'Italie on a reconnu l'utilité qu'il y avoit d'établir une école publique du droit naturel & des gens, qui est la source du droit civil, public, & privé: il seroit à souhaiter que l'étude du droit naturel & des gens, & celle du droit public, fussent partout autant en recommandation: revenons à Puffendorf que nous avions quitté pour un moment.

Les élémens de jurisprudence universelle ne sont pas son seul ouvrage sur le droit naturel; il donna deux ans après son traité du droit de jure naturoe & gentium, qui a été traduit par Barbeyrac, & accompagné de notes; Puffendorf a aussi donné un abregé de ce traité, intitulé des devoirs de l'homme & du ci<-> toyen. Quoique son grand traité soit également intitulé du droit de la nature & des gens, il s'étend néanmoins beaucoup plus sur le droit des gens que sur le droit naturel: on en a déjà donné l'analyse au mot Droit des Gens, auquel nous renvoyons le lecteur.

L'ouvrage le plus récent, le plus précis, & le plus méthodique que nous ayons sur le droit naturel, est celui que nous ayons déjà annoncé de J. J. Burlama<cb-> qui conseiller d'état, & ci - devant professeur en droit naturel & civil à Geneve, imprimé à Geneve en 1747, in - . Il est intitulé principes du droit naturel, divisé en deux parties.

La premiere a pour objet les principes généraux du droit; la seconde les lois naturelles: chacune de ces deux parties est divisée en plusieurs chapitres, & chaque chapitre en plusieurs paragraphes.

Dans la premiere partie, qui concerne les principes généraux du droit, après avoir défini le droit na<-> turel, il cherche les principes de cette science dans la nature & l'état de l'homme; il examine ses différentes actions, & singulierement celles qui sont l'objet du droit; il explique que l'entendement est naturellement droit, que sa perfection consiste dans la connoissance de la vérité, que l'ignorance & l'erreur sont deux obstacles à cette connoissance.

De - là il passe à la volonté de l'homme, à ses instincts, inclinations, passions, à l'usage qu'il fait de sa liberté par rapport au vrai & aux choses mêmes évidentes, par rapport au bien & au mal, & aux choses indifférentes.

L'homme est capable de direction dans sa conduite; il est comptable de ses actions, elles peuvent lui être imputées.

La distinction des divers états de l'homme entre aussi dans la connoissance du droit naturel; il faut considérer son érat primitif par rapport à Dieu, par rapport à la société ou à la solitude; à l'égard de la paix & de la guerre, certains états sont accessoires & adventifs, tels que ceux qui résultent de la naissance & du mariage. L'état de foiblesse où l'homme est à sa naissance, met les enfans dans la dépendance naturelle de leurs pere & mere: la position de l'homme par rapport à la propriété des biens & par rapport au gouvernement, lui constituent encore divers autres états accessoires.

Il ne seroit pas convenable que l'homme vêcût sans aucune regle: la regle suppose une fin; celle de l'homme est de tendre à son bonheur; c'est le système de la providence; c'est un desir essentiel à l'homme & inséparable de la raison, qui est la regle prinsitive de l'homme.

Les regles de conduite qui en dérivent, sont de faire un juste discernement des biens & des maux; que le vrai bonheur ne sauroit consister dans des choses incompatibles avec la nature & l'état de l'homme; de comparer ensemble le présent & l'avenir; de ne pas rechercher un bien qui apporte un plus grand mal; de souffrir un mal leger lorsqu'il est suivi d'un bien plus considérable; donner la préférence aux biens les plus parfaits; dans certains cas se déterminer par la seule possibilité, & à plus forte raison par la vraissemblance; enfin prendre le goût des vrais biens.

Pour bien connoître le droit naturel, il faut entendre ce que c'est que l'obligation considérée en général. Le droit pris en tant que faculté produit obligation: les droits & obligations sont de plusieurs sortes; les uns sont naturels, les autres sont acquis, quelques - uns sont tels que l'on ne peut en user en toute rigueur, d'autres ausquels on ne peut renoncer: on les distingue aussi par rapport à leurs objets; savoir, le droit que nous avons sur nous - mêmes, qui est ce que l'on appelle liberté; le droit de propriété ou domaine sur les choses qui nous appartiennent; le droit que l'on a sur la personne & sur les actions des autres, qui est ce qu'on appelle empire ou autorité; enfin le droit que l'on peut avoir sur les choses appartenantes à autrui, qui est aussi de plusieurs sortes.

L'homme étant de sa nature un être dépendant, doit prendre pour regle de ses actions la loi, qui n'est autre chose qu'une regle prescrite par le souverain: [p. 134] les véritablés fondemens de la souveraineté sont la puissance, la sagesse, & la bonté jointes ensemble. Le but des lois n'est pas de gêner la liberté, mais de diriger convenablement toutes les actions des hommes.

Tels sont en substance les objets que M. Burlamaqui envisage dans la premiere partie de son traité; dans la seconde, qui traite spécialement des lois naturelles, il définit la loi naturelle une loi que Dieu impose à tous les hommes, qu'ils peuvent découvrir & connoître par les seules lumieres de leur raison, en considérant avec attention leur nature & leur état.

Le droit naturel est le système, l'assemblage, ou le corps de ces mêmes lois.

La jurisprudence naturelle est l'art de parvenir à la connoissance des lois de la nature, de les développer, & de les appliquer aux actions humaines.

On ne peut douter qu'il y ait des lois naturelles, puisque tout concourt à nous prouver l'existence de Dieu; lequel ayant droit de prescrire des lois aux hommes, c'est une suite de sa puissance, de sa sagesse, & de sa bonté, de leur donner des regles pour se conduire.

Les moyens qui servent à distinguer ce qui est juste ou injuste, ou ce qui est dicté par la loi naturelle, sont 1°. l'instinct ou un certain sentiment intérieur qui porte à de certaines actions ou qui en détourne: 2°. la raison qui sert à vérifier l'instinct; elle développe les principes, & en tire les conséquences: 3°. la volonté de Dieu, laquelle étant connue à l'homme devient sa regle suprème.

L'homme ne peut parvenir à la connoissance des lois naturelles, qu'en examinant sa nature, sa constitution, & son état.

Toutes les lois naturelles se rapportent à trois objets; à Dieu, à soi, ou à autrui.

La religion est le principe de celles qui se rapportent à Dieu.

L'amour de soi - même est le principe des lois naturelles, qui nous concernent nous - mêmes.

L'esprit de société est le fondement de celles qui se rapportent à autrui.

Dieu a suffisamment notifié aux hommes les lois naturelles; les hommes peuvent encore s'aider les uns les autres à les connoître. Ces lois sont l'ouvrage de la bonté de Dieu, elles ne dépendent point d'une institution arbitraire; leur effet est d'obliger tous les hommes à s'y conformer; elles sont perpétuelles & immuables, & ne souffrent aucune dispense.

Pour appliquer les lois naturelles aux actions, c'est - à - dire en porter un jugement juste, on doit consulter sa conscience, qui n'est autre chose que la raison; & lorsqu'il s'agit d'imputer à quelqu'un les suites d'une mauvaise action, il faut qu'il ait eu connoissance de la loi & du fait, & qu'il n'ait pas été contraint par une force majeure à faire ce qui étoit contraire au droit naturel.

L'autorité des lois naturelles vient de ce qu'elles ont Dieu pour auteur; la fonction de ces mêmes lois, c'est - à - dire ce qui tend à obliger les hommes de s'y soûmettre, est que l'observation de ces lois fait le bonheur de l'homme & de la société; c'est une vérité que la raison nous démontre, & dans le fait il est constant que la vertu est par elle - même le principe d'une satisfaction intérieure, comme le vice est un principe d'inquiétude & de trouble; il est également certain que la vertu produit de grands avantages extérieurs, & le vice de grands maux.

La vertu n'a cependant pas toûjours extérieurement des effets aussi heureux qu'elle devroit avoir pour celui qui la pratique: on voit souvent les biens & les maux de la nature & de la fortune distribués inégalement, & non selon le mérite de chacun, les maux produits par l'injustice tomber sur les innocens comme sur les coupables, & quelquefois la vertu même attirer la persécution.

Toute la prudence humaine ne suffit pas pour remédier à ces desordres: il faut donc qu'une autre considération engage encore les hommes à observer les lois naturelles; c'est l'immortalité de l'ame & la croyance d'un avenir, où ce qui peut manquer dans l'état présent à la sanction des lois naturelles s'exécutera dans la suite, si la sagesse divine le trouve à propos.

C'est ainsi que notre auteur établit l'autorité du droit naturel sur la raison & la religion, qui sont les deux grandes lumieres que Dieu a données à l'homme pour se conduire.

L'avertissement qui est en tête de l'ouvrage, annonce que ce traité n'est que le commencement d'un ouvrage plus étendu, ou d'un système complet sur le droit de la nature & des gens, que l'auteur se proposoit de donner au public; mais qu'ayant été traversé dans ce dessein par d'autres occupations & par la foiblesse de sa santé, il s'est déterminé à publier ce premier morceau. Quoique ce soit un précis excellent du droit naturel, on ne peut s'empêcher de desirer que l'auteur acheve le grand ouvrage qu'il avoit commencé, où l'on verroit la matiere traitée dans toute son étendue.

On peut encore voir sur cette matiere, ce que dit l'auteur de l'esprit des lois en plusieurs endroits de son ouvrage, qui ont rapport au droit naturel. (A)

Droit Papyrien (Page 5:134)

Droit Papyrien, est la même chose que le code Papyrien. Voyez au mot Code.

Droit particulier (Page 5:134)

Droit particulier, est opposé au droit commun & général; ainsi les coûtumes locales ou les statuts d'une ville ou d'une communauté forment leur droit particulier.

Droit perpétuel (Page 5:134)

Droit perpétuel, jus perpetuum, est le nom que les empereurs Dioclétien & Maximien donnerent à l'édit perpétuel ou collection des édits des préteurs faite par Salvius Julianus. Voyez Edit perpétuel. (A)

Droit politique (Page 5:134)

Droit politique, qu'on appelle aussi quelquefois politique simplement, ce sont les regles que l'on doit suivre pour le gouvernement d'une ville, d'une province, ou d'un état, ce qui rentre dans l'idée du droit public. Voyez Droit Public & Droit des Gens. (A)

Droit de Pologne (Page 5:134)

Droit de Pologne, est composé de trois sortes de lois; savoir, 1°. des lois particulieres du pays, qui ont été faites par Casimir le Grand, Ladislas Jagello, Sigismond I. & Sigismond II. rois de Pologne; il y a aussi quelques statuts & coûtumes particulieres pour certaines provinces ou villes. 2°. Au défaut de ces lois municipales on a recours au droit saxon. 3°. S'il s'agit d'un cas qui ne soit pas prévû par le droit saxon, ou sur lequel ce droit ne s'explique pas clairement, les juges n'ont pas le pouvoir de décider selon leurs lumieres, ils sont obligés de se conformer au droit romain. Voyez l'histoire de la Jurispru<-> dence romaine, par M. Terrasson, & ci - après Droit Saxon, Loi des Saxons . (A)

Droit de Portugal (Page 5:134)

Droit de Portugal, est de deux sortes; savoir, le droit royal composé des ordonnances des rois de Portugal, & le droit romain auquel on a recours pour suppléer ce que les lois du pays n'ont pas prévû. (A)

Droit positif (Page 5:134)

Droit positif, est celui qui est fondé sur une loi qui dépend absolument de la volonté de celui dont elle est émanée: on l'appelle ainsi par opposition au droit naturel propre aux hommes, lequel n'est autre chose que la lumiere de la droite raison sur ce qui regarde la justice, ou qui consiste dans une loi fondée sur la raison; ainsi sous la loi écrite la défense de manger certains animaux étoit de droit

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