ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"915"> celle des paroles. La signification du corps prise séparément, est imparfaite, celle des paroles l'est aussi; mais la signification qui résulte de l'un & de l'autre, est entiere: c'est ce qui fait qu'une des plus essentielles qualités du mot doit être de ne rien énoncer qui ne se puisse vérifier dans la figure.

Ce sont - là à - peu - près les principes dont il ne faut pas s'écarter pour faire une bonne devise; ils sont extraits du livre du P. Bouhours, intitulé, Entretiens d'Ariste & d'Eugene, où cette matiere est traitée fort au long, & dans lequel on trouvera un très - grand nombre de devises composées suivant ces principes: ils sont beaucoup plus étendus dans cet ouvrage qu'ils ne sont ici, mais on croit en avoir rapporté les plus essentiels.

DEUNX (Page 4:915)

DEUNX, s. m. (Hist. anc.) c'est une division de la livre romaine, qui contient onze onces, ou bien onze douziemes de quelque mesure, c'est - à - dire la mesure entiere moins une once. Voyez Once. (G)

DEVOIR (Page 4:915)

DEVOIR, s. m. (Droit nat. Relig. nat. Morale.) en latin ossicium. Le devoir est une action humaine exactement conforme aux lois qui nous en imposent l'obligation.

On peut considérer l'homme, ou comme créature de Dieu, ou comme doüé par son Créateur de certaines facultés, tant du corps que de l'ame, desquelles l'effet est fort différent, selon l'usage qu'il en fait; ou enfin comme porté & nécessité même par sa condition naturelle, à vivre en société avec ses semblables.

La premiere relation est la source propre de tous les devoirs de la loi naturelle, qui ont Dieu pour objet, & qui sont compris sous le nom de religion naturelle. Il n'est pas nécessaire de supposer autre chose: un homme qui seroit seul dans le monde, devroit & pourroit pratiquer ces devoirs, du moins les principaux, d'où découlent tous les autres.

La seconde relation nous fournit par elle - même tous les devoirs qui nous regardent nous - mêmes, & que l'on peut rapporter à l'amour propre, ou, pour ôter toute équivoque, à l'amour de soi - même. Le Créateur étant tout sage, tout bon, s'est proposé sans contredit, en nous donnant certaines facultés du corps & de l'ame, une fin également digne de lui, & conforme à notre propre bonheur. Il veut donc que nous fassions de ces facultés un usage qui réponde à leur destination naturelle. De - là nait l'obligation de travailler à notre propre conservation, sans quoi nos facultés nous seroient fort inutiles; & ensuite de les cultiver & perfectionner autant que le demande le but pour lequel elles nous ont été données. Un homme qui se trouveroit jetté dans une île deserte, sans espérance d'en sortir & d'y avoir jamais aucun compagnon, ne seroit pas plus autorisé par - là à se tuer, à se mutiler ou à s'ôter l'usage de la raison, qu'à cesser d'aimer Dieu & de l'honorer.

La troisieme & derniere relation est le principe des devoirs de la loi naturelle, qui se rapportent aux autres hommes. Quand je pense que Dieu a mis au monde des êtres semblables à moi, qu'il nous a tous faits égaux; qu'il nous a donné à tous une forte inclination de vivre en société, & qu'il a disposé les choses de telle maniere qu'un homme ne peut se conserver ni subsister sans le secours de ses semblables, j'infere de - là que Dieu, notre créateur & notre pere commun, veut que chacun de nous observe tout ce qui est nécessaire pour entretenir cette société, & la rendre également agréable aux uns & aux autres.

Ce principe de la sociabilité est, je l'avoue, le plus étendu & le plus fécond; les deux autres même viennent s'y joindre ensuite, & y trouvent une ample matiere de s'appliquer: mais il ne s'ensuit point de - là qu'on doive les confondre & les faire dépendre de la sociabilité, comme s'ils n'avoient pas leur force propre & indépendante. Tout ce qu'on doit dire, c'est qu'ici, comme par - tout ailleurs, la sagesse de Dieu a mis une très - grande liaison entre toutes les choses qui servent à ses fins.

La nature humaine ainsi envisagée, nous découvre la volonté du Créateur, qui est le fondement de l'obligation où nous sommes de suivre les regles renfermées dans ces trois grands principes de nos devoirs. L'utilité manifeste que nous trouvons ensuite dans leur pratique, c'est un motif, & un motif tres puissant pour nous engager à les remplir.

Dans cette espece de subordination qui se rencontre entre les trois grands principes de la loi naturelle, que je viens d'établir, s'il se trouve, comme il arrive quelquefois, qu'on ne puisse pas en même tems s'acquitter des devoirs qui émanent de chacun, voici, ce me semble, la maniere dont on doit régler entre eux la préférence en ces cas - là. 1°. Les devoirs de l'homme envers Dieu l'emportent toûjours sur tous les autres. 2°. Lorsqu'il y a une espece de conflit entre deux devoirs d'amour de soi - même, ou deux devoirs de sociabilité, il faut donner la préférence à celui qui est accompagné d'un plus grand degré d'utilité; c'est - à - dire qu'il faut voir si le bien que l'on se procurera, ou que l'on procurera aux autres en pratiquant l'un de ces deux devoirs, est plus considérable que le bien qui reviendra ou à nous ou à autrui de l'omission de ce devoir, auquel on ne sauroit satisfaire sur l'heure sans manquer à l'autre. 3°. Si, toutes choses d'ailleurs égales, il y a du conflit entre un devoir d'amour de soi - même, & un devoir de sociabilité, soit que ce conflit arrive par le fait d'autrui, ou non, alors l'amour de soi - même doit l'emporter; mais s'il s'y trouve de l'inégalité, alors il faut donner la préférence à celui de ces deux sortes de devoirs qui est accompagné d'un plus grand degré d'utilité. Entrons maintenant dans le détail des trois classes générales sous lesquelles j'ai dit que tous nos devoirs étoient renfermés: ce sera faire avec le lecteur un cours abrégé de Morale dans un seul article, il auroit tort de s'y refuser.

Les devoirs de l'homme envers Dieu, autant qu'on peut les découvrir par les seules lumieres de la raison, se réduisent en général à la connoissance & au culte de cet être souverain. Voyez Dieu. Voyez aussi Culte.

Les devoirs de l'homme par rapport à lui - même, découlent directement & immédiatement de l'amour de soi - même, qui oblige l'homme non - seulement à se conserver autant qu'il le peut, sans préjudice des lois de la religion & de la sociabilité, mais encore à se mettre dans le meilleur état qu'il lui est possible, pour acquérir tout le bonheur dont il est capable; étant composé d'une ame & d'un corps, il doit prendre soin de l'une & de l'autre.

Le soin de l'ame se réduit en général à se former l'esprit & le coeur; c'est - à - dire à se faire des idées droites du juste prix des choses qui excitent ordinairement nos idées; à les bien régler, & à les conformer aux maximes de la droite raison & de la religion: e est à quoi tous les hommes sont indispensablement tenus. Mais il y a encore une autre sorte de culture de l'ame, qui, quoiqu'elle ne soit pas absolument nécessaire pour se bien acquitter des devoirs cemmuns à tous les hommes, est très - propre à orner & perfectionner nos facultés, & à rendre la vie plus douce & plus agréable: c'est celle qui consiste dans l'étude des Arts & des Sciences. Il y a des connoissances nécessaires à tout le monde, & que chacun doit acquérir; il y en a d'utiles à tout le monde; il y en a qui ne sont nécessaires ou utiles qu'à certaines personnes, c'est - à - dire à ceux qui ont embrassé un cer<pb-> [p. 916] tain art ou une certaine science. Il est clair que chacun doit rechercher & apprendre non - seulement ce qui est nécessaire à tous les hommes, mais encore à son métier ou à sa profession.

Les devoirs de l'homme par rapport aux soins du corps, sont d'entretenir & d'augmenter les forces naturelles du corps, par des alimens & des travaux convenables; d'où l'on voit clairement les excès & les vices qu'il faut éviter à cet égard. Le soin de se conserver renferme les justes bornes de la légitime défense de soi - même, de son honneur & de ses biens. Voyez Défense de soi - même, Honneur

Je passe aux devoirs de l'homme par rapport à autrui, & je les déduirai plus au long. Ils se réduisent en général à deux classes: l'une de ceux qui sont uniquement fondés sur les obligations mutuelles, où sont respectivement tous les hommes considérés comme tels: l'autre de ceux qui supposent quelque établissement humain, soit que les hommes l'ayent eux - mêmes formé, ou qu'ils l'ayent adopté, ou bien un certain état accessoire, c'est - à - dire un état où l'on est mis en conséquence de quelque acte humain, soit en naissant, ou après être né: tel est, par exemple, celui où est un pere & son enfant, l'un par rapport à l'autre; un mari & sa femme; un maître & son serviteur; un souverain & son sujet.

Les premiers devoirs sont tels que chacun doit les pratiquer envers tout autre, au lieu que les derniers n'obligent que par rapport à certaines personnes, & posé une certaine condition, ou une certaine situation. Ainsi on peut appeller ceux - ci des devoirs conditionnels, & les autres des devoirs absolus.

Le premier devoir absolu, ou de chacun envers tout autre, c'est de ne faire de mal à personne. C'estlà le devoir le plus général: car chacun peut l'exiger de son semblable en tant qu'Homme, & doit le pratiquer; c'est aussi le plus facile, car il consiste simplement à s'empêcher d'agir, ce qui ne coûte guere, à moins qu'on ne se soit livré sans retenue à des passions violentes qui résistent aux plus vives lumieres de la raison: c'est enfin le plus nécessaire; car sans la pratique d'un tel devoir, il ne sauroit y avoir de société entre les hommes. De ce devoir suit la nécessité de réparer le mal, le préjudice, le dommage que l'on auroit fait à autrui. Voyez Dommage.

Le second devoir général absolu des hommes, est que chacun doit estimer & traiter les autres comme autant d'êtres qui lui sont naturellement égaux, c'est - à - dire qui sont aussi - bien hommes que lui, car il s'agit ici d'une égalité naturelle ou morale. Voyez Egalité.

Le troisieme devoir général respectif des hommes considérés comme membre de la société, est que chacun doit contribuer autant qu'il le peut commodément à l'utilité d'autrui. On peut procurer l'avantage d'autrui d'une infinité de manieres différentes, & dont plusieurs sont indispensables. On doit même aux autres des devoirs, qui sans être nécessaires pour la conservation du genre humain, servent cependant à la rendre plus belle & plus heureuse. Tels sont les devoirs de la compassion, de la libéralité, de la bénéficence, de la reconnoissance, de l'hospitalité, en un mot, tout ce que l'on comprend d'ordinaire sous le nom d'humanité ou de charité, par opposition à la justice rigoureuse, proprement ainsi nommée, dont les devoirs sont le plus souvent fondés sur quelque convention. Mais il faut bien remarquer que dans une nécessité extrème, le droit imparfait que donnent les lois de la charité, se change en droit parfait; de sorte qu'on peut alors se faire rendre par force, ce qui, hors un tel cas, devroit être laissé à la conscience & à l'honneur de chacun. Voyez Compassion, Libéralité, Reconnoissance, Hospitalité, Humanité

Les devoirs conditionnels de l'homme envers ses semblables, sont tous ceux où l'on entre de soi même avec les autres par des engagemens volontaires, exprès, ou tacites. Le devoir général que la loi naturelle prescrit ici, c'est que chacun tienne inviolablement sa parole, ou qu'il effectue ce à quoi il s'est engagé par une promesse ou par une convention. Voyez Promesse, Convention.

Il y a plusieurs établissemens humains sur lesquels sont fondés les devoirs conditionnels de l'homme par rapport à autrui. Les principaux de ces établissemens sont l'usage de la parole, la propriété des biens, & le prix des choses.

Afin que l'admirable instrument de la parole soit rapporté à son légitime usage, & au dessein du Créateur, on doit tenir pour une maxime inviolable de devoir, de ne tromper personne par des paroles, ni par aucun autre signe établi pour exprimer nos pensées. On voit par - là combien la véracité est nécessaire, le mensonge blâmable, & les restrictions mentales, criminelles. Voyez Véracité, Mensonge, Restriction mentale

Les devoirs qui résultent de la propriété des biens considérée en elle - même, & de ce à quoi est tenu un possesseur de bonne foi, sont ceux - ci, 1°. chacun est indispensablement tenu envers tout autre, excepté le cas de la guerre, de le laisser joüir paisiblement de ses biens, & de ne point les endommager, fairepérir, prendre, óu attirer à soi, ni par violence, ni par fraude, ni directement, ni indirectement. Par - là sont défendus le larcin, le vol, les rapines, les extorsions, & autres crimes semblables qui donnent quelque atteinte aux droits que chacun a sur son bien. Voyez Larcin, &c. Si le bien d'autrui est tombé entre nos mains, sans qu'il y ait de la mauvaise foi, ou aucun crime de notre part, & que la chose soit encore en nature, il faut faire ensoite, autant qu'en nous est, qu'elle retourne à son légitime maître. Voyez Propriété, Possesseur.

Les devoirs qui concernent le prix des choses, se déduisent aisément de la nature & du but des engagemens libres où l'on entre, il est donc inutile de nous y arrêter. Voyez Engagement.

Parcourons maintenant en peu de mots les devoirs des états accessoires, & commencons par ceux du mariage qui est la premiere ébauche de la société, & la pépiniere du genre humain. Le but de cette étroite union demande que les conjoints partagent les mêmes sentimens d'affection, les biens & les maux qui leur arrivent, l'éducation de leurs enfans, & le soin des affaires domestiques; qu'ils se consolent & se soulagent dan leurs malheurs; qu'ils ayent une condescendance & une déférence mutuelle; en un mot, qu'ils mettent en oeuvre tout ce qui peut perpétuer d'heureuses chaînes, ou adoueir l'amertume d'un hymen mal assorti. Voyez Mariage, Mari, Femme

Du mariage viennent des enfans; de - là naissent des devoirs réciproques entre les peres & meres & leurs enfans. Un pere & une mere doivent nourrir & entretenir leurs enfans également & aussi commodément qu'il leur est possible, former le corns & l'esprit des uns & des autres sans aucune préférence, par une bonne éducation qui les rende utiles à leur patrie, gens de bien & de bonnes moeurs. Ils doivent leur faire embrasser de bonne heure une profession honnête & convenable, établir & pousser leur fortune suivant leurs moyens, &c. Voyez Pere, Mere.

Les enfans de leur côté sont tenus de chérir, d'honorer, de respecter des peres & meres auxquels ils ont de si grandes obligations; leur obéir,

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