ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

RECHERCHE Accueil Mises en garde Documentation ATILF ARTFL Courriel

Previous page

"536">

Quand les cuirs ont été bien désaignés & égouttés, on les alune, c'est - à - dire que l'on fait bouillir dans de l'eau trois livres d'alun & cinq livres de sel par peau, dans une chaudiere (fig. 7.) qui peut bien contenir douze seaux, d'où on en tire deux seaux que l'on met dans une baignoire, où un ouvrier presque nud foule trois cuirs à la fois pendant une heure, dans lequel tems on renouvelle l'eau quatre fois; après quoi on retire les cuirs de la baignoire, on les couche pliés en quatre la chair en - dehors dans une cuve. On fait la même opération aux autres peaux; & lorsque toute la fonte est faite, & toutes les peaux ainsi étalées dans la cuve, on jette cette eau alunée par - dessus les cuirs; ce qui s'appelle mettre les cuirs en retraite pour prendre de la nourriture.

Le lendemain on les retient & change de cuve, après quoi on fait réchauffer la même eau & on les y trempe pendant trois ou quatre jours l'été, & plus pendant l'hyver; on les refoule de nouveau, & le lendemain on les met égoutter & sécher à l'air pendus par la culée. Cette opération faite, on les detire; & quand ils sont à moitié secs, on les dresse, c'est - à - dire que l'on les passe à la baguette (Voyez Baguette & la fig. 5.), après quoi on les met en pile.

Il ne s'agit plus pour lors que de les mettre en suif; pour cet effet on les roule encore avec la baguette de fleur & de chair, c'est - à - dire des deux côtés, & on les étend sur des perches G G G dans une étuve, pour les préparer à prendre ce suif. Dans cet état on les met sur une table bien étalés, & on les frotte de suif chaud avec un guippon, beaucoup sur la chair, & légerement sur la fleur; chaque peau prend environ sept à huit livres de suif. On reporte les peaux suiffrées sur une autre table, où on les empile jusqu'à ce que la même opération ait été faite à tous les cuirs. Voyez la fig. 1. Cela fait, deux ouvriers (fig. 3. & 4.) les tiennent suspendus les uns après les autres au - dessus d'une grille de fer C, sous laquelle il y a des charbons allumés, afin que la chaleur fasse pénétrer le suif dans le cuir; ensuite on les remet à l'étuve pendant une demi - heure, toûjours la chair en - dessus, après quoi on les met sécher sur des perches. Le lendemain l'ouvrier y applique sa marque, les pese, & en marque le poids.

Les instrumens dont se servent les Hongrieurs pour la fabrique du cuir d'Hongrie, sont une broüette pour porter les peaux à la riviere & les en rapporter; un couteau ordinaire pour en ôter les cornes; un chevalet & une faux emmanchée d'un manche de bois; un queux pour aiguiser la faux; un banc pour les égoutter; une chaudiere pour faire bouillir le suif; des seaux pour en puiser l'eau; une baignoire pour fouler les cuirs; des cuves pour leur faire prendre nourriture; des perches pour les étendre; la baguette E pour les couler; une table pour les suiffrer; une grille de fer pour leur faire prendre le suif; un guippon pour y appliquer le suif; & un fourneau pour faire chauffer l'alun & le suif. Voyez chacun de ces articles à leur lettre.

Cuirs de balles (Page 4:536)

Cuirs de balles, termes d'Imprimeur, ce sont des peaux de mouton crues dont la laine a été séparée, & qui sont préparés pour l'usage des Imprimeries. On taille dans ces peaux des coupons d'environ deux piés & demi de circonférence, lesquels servent à monter les balles. On a soin de les entretenir humides, au moyen d'une autre peau de cette espece qui les double, & que l'on appelle doublure. Voyez Balles & Laine.

Cuir (Page 4:536)

Cuir (monnoie de), Commerce: l'histoire est remplie de faits où les évenemens & les occasions pressantes ont forcé des princes, des généraux d'armées, ou des gouverneurs, de faire frapper des monnoies de cuir.

On coupoit un morceau de cuir noir en cercle, & on passoit au centre une espece de clou d'or ou d'argent, & au lieu de le river, on le frappoit au marteau à l'opposition de la tête avec un poinçon à fleur - de - lis, & l'on attachoit un prix selon les occurrences à cette espece de monnoie.

On en trouve dans les cabinets des curieux. Il y en eut de frappées sous Louis IX. le royaume ayant été épuisé alors d'argent par les malheurs qui suivirent l'entreprise de la Terre - Sainte. Voyez Croisade.

Cuir à rasoir (Page 4:536)

Cuir à rasoir, (Perruq.) est une bande de cuir préparé, appliquée sur un morceau de bois qui lui sert de manche, & à l'aide de laquelle on donne le fil aux rasoirs, & on en adoucit le tranchant en les frottant dessus, après qu'ils ont été repassés sur la pierre.

On fait à présent de ces sortes de cuirs qui sont quarrés, & ont quatre faces moins unies les unes que les autres, sur lesquelles on passe successivement le rasoir, en commençant par la surface la moins polie, & finissant par la plus douce, afin d'adoucir le rasoir par degrés.

CUIRASSE (Page 4:536)

CUIRASSE, s. f. (Littér. Art milit.) en latin lo - rica. On la définit dans le dictionnaire de l'académie Françoise, la principale partie de l'armure qui est ordinairement de fer fort battu, & qui couvre le corps par - devant & par - derriere, depuis les épaules jusqu'à la ceinture.

Dans le fameux tableau de Polygnote de la prise de Troie, dont Pausanias nous a laissé la description, on voyoit sur un autel la représentation d'une cuirasse d'airain composée de deux pieces, l'une desquelles couvroit le ventre & l'estomac, l'autre couvroit le dos & les épaules; la partie antérieure étoit concave, & les deux pieces se joignoient ensemble par deux agrafes.

Chez les Grecs & les Romains on connoissoit de trois sortes de cuirasses. Il y en avoit qui n'étoient faites que de toile & de drap battu & piqué: quelques - unes étoient de cuir, & les autres de fer. Pour ce qui est des premieres, Pline (lib. VIII. c. xlviij.) assûre qu'elles étoient composées de plusieurs doubles, battus & piqués ensemble: telle étoit la cuirasse d'Alexandre, au rapport de Dion de Nicée; & celle de Galba, dont il est fait mention dans Suétone, qui parlant de la sédition qu'excita à Rome la révolte d'Othon, dit: Loricam tamen induit linteam, quam haud dissimulant parùm adversus tot mucrones profuturam. Saumaise, dans ses observations sur Lampridius, remarque qu'on avoit autrefois inventé cette armure pour le soulagement des soldats: on peut ajoûter qu'il y a bien de l'apparence que ces cuirasses de lin & de toile n'empêchoient pas qu'on ne mît par - dessus des cuirasses de fer; on peut même croire que les anciens avoient donné aux premieres le nom de subarmale, mais il n'étoit pas toûjours nécessaire d'avoir d'autres cuirasses que celles de lin & de toile, puisqu'il y en avoit de si bien faites, qu'elles étoient à l'épreuve des traits. Nicétas, dans la vie de l'empereur Isaac I. rapporte que l'empereur Conrad combattit long - tems sans bouclier, couvert seulement d'une cuirasse de linge.

La seconde espece de cuirasse étoit de cuir, & c'est celle que Varron appelle pectorale corium. Tacite (hist. liv. I. ch. lxxjx.) nous apprend que les chefs des Sarmates s'en servoient quelquefois: Id principibus ac nobillissimo cuique tegmen, ferreis laminis aut proedurio corio concertum.

Cependant le fer étoit la matiere la plus ordinaire des cuirasses. Les Perses appelloient les soldats qui portoient ces sortes de cuirasses, clibanarios, du mot clibanum, qui signifioit une tuile de fer, apparemme parce que ces cuirasses étoient faites d'une plaque fort épaisse de ce métal: mais leur trop grande pe<pb-> [p. 537] santeur fit qu'on les changea bientôt pour des cuirasses composées de lames de fer, couchées les unes sur les autres, & attachées sur du cuir ou de la toile. A celles - ci on substitua dans la suite la cotte de maille & l'haubergeon; terme qui ne signifie qu'une armure plus ou moins longue, faite de chaînettes de fer ou de mailles entrelacées. Il paroît par ce que rapportent les anciens, que la cuirasse ne passoit pas la ceinture, quoique la frange dont elle étoit bordée descendît jusqu'aux genoux.

On mettoit la cotte - d'armes sur la cuirasse; la cotte - d'armes a passé de mode, la cuirasse subsiste toûjours. Autrefois le droit de la porter étoit un titre d'honneur, dont on étoit privé, lorsqu'ayant douze métairies on manquoit au service que l'on devoit au Roi, comme il est décidé dans les capitulaires, où la cuirasse est appellée brunia.

Il n'y a plus guere à - présent que les officiers généraux & les officiers de cavalerie qui portent des cuirasses; elles doivent être au moins à l'épreuve du pistolet. A l'égard des brigadiers, gendarmes, chevaux - legers, & cavalerie, ils portent un plastron de fer qui leur couvre le devant seulement. Ils doivent la porter dans tous les exercices, revûes, marches, &c. Il est au moins à l'épreuve du pistolet. Il est ordonné aux officiers & ingénieurs de porter des cuirasses, à peine d'être cassés. Extrait de l'hist. de l'acad. des Inscript. & Belles - Lettres, tome II. Article de M. le Chevalier de Jaucourt.

CUIRE (Page 4:537)

CUIRE, en termes de Cuisine, c'est donner aux viandes, aux légumes, & au poisson, une sorte de préparation qui les rend communément plus tendres & plus propres à être broyées sous les dents, en les exposant à l'action du feu, soit qu'ils la souffrent immédiatement, soit qu'on les fasse bouillir dans de l'eau, ou dans d'autres liqueurs.

Cuire (Page 4:537)

Cuire, en terme de Doreur, c'est mettre une piece rougir sur le feu, pour la rendre plus maniable & plus douce. Voyez la fig. 7. Pl. du Doreur.

Cuire des cheveux (Page 4:537)

Cuire des cheveux, terme de Perruquier, c'est mettre des cheveux au four après les avoir roulés autour des moules ou bilboquets, & enfermés dans une pâte de son faite en forme de pâté. Cette opération sert à leur faire prendre la frisure. Voy. Cheveux & Perruque.

Cuire (Page 4:537)

Cuire, en terme de Rafineur, c'est l'action de pétrifier le sucre en clairée, en le faisant bouillir un tems suffisant. On met dans la chaudiere à cuire (Voyez Chaudiere à cuire) un peu de beurre avec la clairée, pour empêcher que le bouillon ne s'éleve par - dessus les bords de la chaudiere. Quand la clairée a bouilli pendant trois quarts - d'heure environ, le rafineur la jugeant cuite par la preuve qu'il en prend (Voyez Preuve), on la transporte dans les rafraîchissoirs. On remet de nouvelle clairée dans la chaudiere à cuire; on la fait cuire comme la premiere, avec laquelle on la transporte quand elle l'est; on la mouve bien pour mêler le grain de la premiere qui est descendu au fond avec celui de la seconde cuite en attendant la troisieme, ce qui se fait jusqu'à ce qu'on ait rassemblé un nombre de cuites suffisant pour l'empli qu'on se propose de faire. Voyez Empli. On observe à chaque cuite qu'on fait, d'éteindre les feux dès que le rafineur l'ordonne, avec du charbon bien mouillé & deux ou trois pucheurs d'eau (Voyez Pucheur), afin que le feu ne reprenne point que la cuite ne soit tirée. Voyez Pucher.

Cuire le verre (Page 4:537)

Cuire le verre, terme de Peinture sur verre, c'est après que les pieces ont été peintes, les mettre dans la poêle du fourneau, & les y laisser jusqu'à ce que les couleurs soient bien cuites & bien incorporées. Voyez Verre & Peinture sur verre. Ce mot se dit aussi de la fonte des soudes, & autres matieres qu'on employe dans les verreries. Dict. de Comm.

CUIRÉ (Page 4:537)

CUIRÉ, adj. (Coffreterie.) se dit d'une malle dont les joints ont été radoubés tant en - dedans qu'en - dehors, avec une toile épaisse enduite de colle - forte, avant que d'être couverte de cuir.

CUIRET (Page 4:537)

CUIRET, terme de Chapelier, c'est un petit morceau de cuir qu'on met entre la chantrelle & la corde de l'arçon, dont ces ouvriers se servent pour faire voguer l'étoffe. Voyez Chapeau, & la fig. 17. Pl. du Chapelier. Voyez aussi l'article Chamoiseur, où ce terme a une acception toute différente.

CUISINE (Page 4:537)

CUISINE, s. f. (Art méchan.) cet art de flatter le goût, ce luxe, j'allois dire cette luxure de bonne chere dont on fait tant de cas, est ce qu'on nomme dans le monde la cuisine par excellence; Montagne la définit plus brievement la science de la gueule; & M. de la Mothe le Vayer, la Gastrologie. Tous ces termes désignent proprement le secret réduit en méthode savante, de faire manger au - delà du nécessaire; car la cuisine des gens sobies ou pauvres, ne signifie que l'art le plus commun d'apprêter les mets pour satisfaire aux besoins de la vie.

Le laitage, le miel, les fruits de la terre, les légumes assaisonnés de sel, les pains cuits sous la cendre, furent la nourriture des premiers peuples du monde. Ils usoient sans autre rafinement de ces bienfaits de la nature, & ils n'en étoient que plus forts, plus robustes, & moins exposés aux maladies. Les viandes bouillics, grillées, rôties, ou les poissons cuits dans l'eau, succéderent; on en prit avec modération, la santé n'en souffrit point, la tempérance régnoit encoe, l'appétit seul regloit le tems & le nombre des repas.

Mais cette tempérance ne fut pas de longue durée; l'habitude de manger toûjours les mêmes choses, & à - peu - près apprêtées de la même maniere, enfanta le dégoût, le dégoût fit naître la curlosité, la curiosité fit faire des expériences, l'expérience amena la sensualité; l'homme goûta, essaya, diversifia, choisit, & parvint à se faire un art de l'action la plus simple & la plus naturelle.

Les Asiatiques, plus voluptueux que les autres peuples, employerent les premiers, dans la préparation de leurs mets, toutes les productions de leurs climats; le commerce porta ces productions chez leurs voisins; l'homme courant apres les richesses, n'en aima la joüissance que pour fournir à sa volupté, & pour changer une simple & bonne nourriture en d'autres plus abondantes, plus variées, plus sensuellement apprêtées, & par conséquent plus nuisibles à la santé: c'est ainsi que la délicatesse des tables passa de l'Asie aux autres peuples de la terre. Le Perses communiquerent aux Grecs cette branche de luxe, à laquelle les sages législateurs de Lacédémone s'opposerent toûjours avec vigueur.

Les Romains devenus riches & puissans, secouerent le joug de leurs anciennes lois, quitterent leur vie frugale, & goûterent l'art de la bonne chere: Tunc coquus (dit Tite - Live, l. xxxjx.) vilissimum antiquis mancipium, estimatione & usu, in pretio esse, & quod ministerium fuerat, ars haberi coepta; vix tamen illa quoe tunc conspiciebantur, semina erant futuroe luxurioe. Ce n'étoit - là que de legers commencemens de la sensualité de la table, qu'ils pousserent bientôt au plus haut période de dépense & de corruption. Il faut lire dans Séneque le portrait qu'il en fait; je dis dans Séneque, parce que sa sévérité, ou sa bile si l'on veut, nous apprend bien des choses sur cette matiere, que des esprits plus indulgens pour les défauts de leur siecle, passent ordinairement sous silence. On ne voyoit, nous dit - il, que des Sibarites couchés mollement sur leurs lits, contemplant la magnificence de leurs tables, satisfaisant leurs oreilles

Next page


The Project for American and French Research on the Treasury of the French Language (ARTFL) is a cooperative enterprise of Analyse et Traitement Informatique de la Langue Française (ATILF) of the Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), the Division of the Humanities, the Division of the Social Sciences, and Electronic Text Services (ETS) of the University of Chicago.

PhiloLogic Software, Copyright © 2001 The University of Chicago.