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CRITIQUE (Page 4:489)
CRITIQUE, s. m. (Belles - lett.) auteur qui s'adonne à la critique. On comprend sous ce nom divers genres d'écrivains dont les travaux & les recherches embrassent diverses parties de la Littérature, tels 1° que ceux qui se sont appliqués à rassembler & à faire le dénombrement des ouvrages de chaque auteur; à en faire le discernement, afin de ne point attribuer à l'un ce qui appartient à l'autre; à juger de leur style & de leur maniere d'écrire; à apprendre le succès qu'ils ont eu dans le monde, & le fruit qu'on doit tirer de leurs écrits. Tels ont été Photius, Erasme, le P. Rapin, M. Huet, M. Baillet, &c. 2°. Ceux qui par des dissertations particulieres ont éclairci des points obscurs de l'histoire ancienne ou moderne, tels que Meursius, Ducange, M. de Launoy, & la plûpart de nos savans de l'académie des Belles - lettres. 3°. Ceux qui se sont occupés à recueillir d'anciens manuscrits, à mettre ces collec<pb-> [p. 490]
Critique, Censure, (Page 4:490)
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Les restituteurs de la Littérature ancienne n'avoient qu'une voie, encore très - incertaine; c'étoit de rendre les auteurs intelligibles l'un par l'autre, & à l'aide des monumens. Mais pour nous transmettre cet or antique, il a fallu périr dans les mines. Avoüons - le, nous traitons cette espece de critique avec trop de mépris, & ceux qui l'ont exercée si
Cette partie de la critique comprendroit encore
la vérification des calculs chronologiques, si ces
calculs pouvoient se vérifier; mais le peu de fruit
qu'ont retiré de ce travail les sçavans illustres qui
s'y sont exercés, prouve qu'il seroit desormais aussi
inutile que pénible de revenir sur leurs recherches.
Il faut savoir ignorer ce qu'on ne peut connoître;
or il est vraissemblable que ce qui n'est pas connu
dans l'histoire des tems, ne le sera jamais, &
l'esprit humain y perdra peu de chose. Voyez
Le second point de vûe de la critique, est de la considérer comme un examen éclairé & un jugement équitable des productions humaines. Toutes les productions humaines peuvent être comprises sous trois chefs principaux; les Sciences, les Arts libéraux, & les Arts méchaniques: sujet immense que nous n'avons pas la témérité de vouloir approfondir, sur - tout dans les bornes d'un article. Nous nous contenterons d'établir quelques principes généraux que tout homme capable de sentiment & de réflexion est en état de concevoir; & s'il en est qui manquent de justesse ou de clarté, à quelque sévere examen que nous ayons pû le soûmettre, le lecteur trouvera dans les articles relatifs auxquels nous aurons soin de le renvoyer, de quoi rectifier ou développer nos idées.
Critique dans les Sciences. Les sciences se réduisent à trois points: à la démonstration des vérités anciennes, à l'ordre de leur exposition, à la découverte des nouvelles vérités.
Les vérités anciennes sont ou de fait ou de spéculation. Les faits sont ou moraux ou physiques. Les faits moraux composent l'histoire des hommes, dans laquelle souvent il se mêle du physique, mais toûjours relativement au moral.
Comme l'histoire sainte est révelée, il seroit impie de la soûmettre à l'examen de la raison; mais il est une maniere de la discuter pour le triomphe même de la foi. Comparer les textes, & les concilier entr'eux; rapprocher les évenemens des prophéties qui les annoncent; faire prévaloir l'évidence morale à l'impossibilité physique; vaincre la répugnance de la raison par l'ascendant des témoignages; prendre la tradition dans sa source, pour la présenter dans toute sa force; exclure enfin du nombre des preuves de la vérité tout argument vague, foible ou non concluant, espece d'armes communes à toutes les religions, que le faux zele employe & dont l'impiété se joüe: tel seroit l'emploi du critique dans cette partie. Plusieurs l'ont entrepris avec autant de succès que de zele, parmi lesquels Pascal doit occuper la premiere place, pour la céder à celui qui exécutera ce qu'il n'a fait que méditer.
Dans l'histoire profane, donner plus ou moins d'autorité aux faits, suivant leur degré de possibilité, de vraissemblance, de célébrité, & suivant le poids des témoignages qui les confirment: examiner le caractere & la situation des historiens; s'ils ont été libres de dire la vérité, à portée de la connoître, en état de l'approfondir, sans intérêt de la déguiser: [p. 491]
Les faits purement physiques composent l'histoire naturelle, & la vérité s'en démontre de deux manieres: ou en répetant les observations & les expériences; ou en pesant les témoignages, si l'on n'est pas à portée de les vérifier. C'est faute d'expérience qu'on a regardé comme des fables une infinité de faits que Pline rapporte, & qui se confirment de jour en jour par les observations de nos Naturalistes.
Les anciens avoient soupçonné la pésanteur de
l'air, Toricelli & Pascal l'ont démontrée. Newton
avoit annoncé l'applatissement de la terre, des philosophes
ont passé d'un hémisphere à l'autre pour la
mesurer. Le miroir d'Archimede confondoit notre
raison, & un physicien, au lieu de nier ce phénomene,
a tenté de le reproduire, & le prouve en le
répetant. Voilà comme on doit critiquer les faits.
Mais suivant cette méthode les sciences auront peu
de critiques. Voyez
Ces exemples doivent rendre un critique bien circonspect dans ses décisions. La crédulité est le partage des ignorans; l'incrédulité décidée, celui des demi - sçavans; le doute méthodique, celui des sages. Dans les connoissances humaines, un philosophe démontre ce qu'il peut; croit ce qui lui est démontré; rejeite ce qui y répugne, & suspend son jugement sur tout le reste.
Il est des vérités que la distance des lieux & des
tems rend inaccessibles à l'expérience, & qui n'étant
pour nous que dans l'ordre des possibles, ne
peuvent être observées que des yeux de l'esprit.
Ou ces vérités sont les principes des faits qui les
prouvent, & le critique doit y remonter par l'enchaînement
de ces faits; ou elles en sont des conséquences,
& par les mêmes degrés il doit descendre jusqu'à elles. Voyez
Souvent la vérité n'a qu'une voie par où l'inventeur y est arrivé, & dónt il ne reste aucun vestige: alors il y a peut - être plus de mérite à retrouver la route, qu'il n'y en a eu à la découvrir. L'inventeur n'est quelquefois qu'un aventurier que la tempête a jetté dans le port; le critique est un pilote habile que son art seul y conduit: si toutefois il est permis d'appeller art une suite de tentatives incertaines & de
Le desir de connoître est souvent stérile par trop d'activité. La vérité veut qu'on la cherche, mais qu'on l'attende; qu'on aille au - devant d'elle, mais jamais au - delà. C'est au critique, en guide sage, d'obliger le voyageur à s'arrêter où finit le jour, de peur qu'il ne s'égare dans les ténebres. L'éclipse de la nature est continuelle, mais elle n'est pas totale; & de siecle en siecle elle nous laisse appercevoir quelques nouveaux points de son disque immense, pour nourrir en nous, avec l'espoir de la connoître, la constance de l'étudier.
Lucrece, S. Augustin, Boniface, & le pape Zacharie, étoient debout sur notre hémisphere, & ne concevoient pas que leurs semblables pussent être dans la même situation sur un hémisphere opposé: ut per aquas quoe nunc rerum simulacra videmus, dit Lucrece, (De rer. nat. lib. I.) pour exprimer qu'ils auroient la tête en bas. On a reconnu la tendance des graves vers un centre commun, & l'opinion des Antipodes n'a plus révolté personne. Les anciens voyoient tomber une pierre, & les slots de la mer s'élever; ils étoient bien loin d'attribuer ces deux effets à la même cause. Le mystere de la gravitation nous a été révélé: ce chaînon a lié les deux autres; & la pierre qui tombe & les flots qui s'élevent, nous ont paru soûmis aux mêmes lois. Le point essentiel dans l'étude de la nature, est donc de découvrir les milieux des vérités connues, & de les placer dans l'ordre de leur enchaînement: tels faits paroissent isolés, dont le noeud seroit sensible s'ils étoient mis à leur place. On trouvoit des carrieres de marbre dans le sein des plus hautes montagnes; on en voyoit former sur les bords de l'Océan par le ciment du sel marin; on connoissoit le parallélisme des couches de la terre: mais répandus dans la Physique, ces faits n'y jettoient aucune lumiere; ils ont été rapprochés, & l'on reconnoît les monumens de l'immersion totale ou successive de ce globe. C'est à cet ordre lumineux que le critique devroit sur - tout contribuer.
Il est pour les découvertes un tems de maturité avant lequel les recherches semblent infructueuses. Une vérité attend pour éclore la réunion de ses élémens. Ces germes ne se rencontrent & ne s'arrangent que par une longue suite de combinaisons: ainsi ce qu'un siecle n'a fait que couver, s'il est permis de le dire, est produit par le siecle qui lui succede; ainsi le problème des trois corps proposé par Newton, n'a été résolu que de nos jours, & l'a été par trois hommes en même tems. C'est cette espece de fermentation de l'esprit humain, cette digestion de nos [p. 492]
Cette réduction seroit encore plus considérable dans les sciences abstraites, que dans la science des faits. Les premieres sont comme l'air qui occupe un espace immense lorsqu'il est libre de s'étendre, & qui n'acquiert de la consistance qu'à mesure qu'il est pressé.
L'emploi du critique dans cette partie seroit donc de ramener les idées aux choses, la Métaphysique & la Géométrie à la Morale & à la Physique; de les empêcher de se répandre dans le vuide des abstractions, & s'il est permis de le dire, de retrancher de leur surface pour ajoûter à leur solidité. Un métaphysicien ou un géometre qui applique la force de son génie à de vaines spéculations, ressemble à ce luteur que nous peint Virgile:
Alternaque jactat Brachia protendens, & verberat ictibus auras. AEn. lib. V.
M. de Fontenelle qui a porté si loin l'esprit d'ordre, de précision, & de clarté, eût éte un critique supérieur, soit dans les sciences abstraites, soit dans celle de la nature; & Bayle (que nous considérons ici seulement comme littérateur) n'avoit besoin pour exceller dans sa partie, que de plus d'indépendance, de tranquillité, & de loisir. Avec ces trois conditions essentielles à un critique, il eût dit ce qu'il pensoit, & l'eût dit en moins de volumes.
Critique dans les Arts libéraux ou les beaux Arts.
Tout homme qui produit un ouvrage dans un genre
auquel nous ne sommes point préparés, excite aisément
notre admiration. Nous ne devenons admirateurs
difficiles que lorsque les ouvrages dans le même
genre venant à se multiplier, nous pouvons établir des points de comparaison, & en tirer des regles
plus ou moins séveres, suivant les nouvelles
productions qui nous sont offertes. Celles de ces productions
où l'on a constamment reconnu un mérite
supérieur, servent de modeles. Il s'en faut beaucoup
que ces modeles soient parfaits; ils ont seulement
chacun en particulier une on plusieurs qualités
excellentes qui les distinguent. L'esprit faisant alors
ce qu'on nous dit d'Apelle, se forme d'une multitude
de beautés éparses un tout idéal qui les rassemble.
C'est à ce modele intellectuel au dessus de
toutes les productions existantes, qu'il rapportera
les ouvrages dont il se constituera le juge. Le criti<cb->
Dans l'Architecture & l'Harmonie, le type intellectuel que le critique est obligé de se former, exige une étude d'autant plus profonde des possibles, & pour en déterminer le choix, une connoissance d'autant plus précise du rapport des objets avec nos organes, que les beautés physiques de ces deux arts n'ont pour arbitre que le goût, c'est - à - dire ce tact de l'ame, cette faculté innée ou acquise de saisir & de préférer le beau, espece d'instinct qui juge les regles & qui n'en a point. Il n'en a point en harmonie: la résonnance du corps sonore indique les proportions; mais c'est à l'oreille à nous guider dans le mêlange des accords. Il n'en a point en Architecture: tant qu'elle s'est bornée à nos besoins, elle a pû se modeler sur les productions naturelles; mais dès qu'on a voulu joindre la décoration à la solidité, l'imagination a créé les formes, & l'oeil en a fixé le choix. La premiere cabane, qui ne fut - elle même qu'un essai de l'industrie éclairée par le besoin, avoit si l'on veut pour appuis quelques pieux enfoncés dans la terre, ces pieux soûtenoient des traverses, & celles>ci port>ient des chevrons chargés d'un toît. Mais de bonne - foi peut - on tirer de ce modele brute les proportions des colonnes, de l'entablement & du fronton?
Le sentiment du beau physique, soit en Architecture, soit en Harmonie, dépend donc essentiellement du rapport des objets avec nos organes; & le point essentiel pour le critique, est de s'assûrer du témoignage de ses sens. Le critique ignorant n'en doute jamais. Le critique subalterne consulte ceux qui l'environnent, & croit bien voir & bien entendre lorsqu'il voit & entend comme eux. Le critique supérieur consulte le goût des différens peuples; il les trouve divisés sur des ornemens de caprice; il les voit réunis sur des beautés essentielles qui ne vieillissent jamais, & dont les débris ont le charme de la nouveauté; il se replie sur lui - même, & par l'impression plus ou moins vive qu'ont faite sur lui ces beautés, il s'assûre ou se défie du rapport de ses organes. Dès - lors il peut former son modele intellectuel de ce qui l'affecte le plus dans les modeles existans, suppléer au défaut de l'un par les beautés de l'autre, & se disposer ainsi à juger non - seulement des faits par les faits, mais encore par les possibles. Dans l'Architecture, il dépouillera le gothique de ses ornemens puériles, mais il adoptera la coupe hardie, majestueuse, & legere de ses voûtes, qu'il revêtira des beautés simples & mâles du grec: dans celui - ci, il joindra la frise iomque à la colonne dorique, la base dorique au chapiteau corinthien, à ce chapiteau si élégant, si noble, & si contraire à la vraissemblance. Il aura recours au compas & au calcul pour proportionner les hauteurs aux bases, & les supports aux fardeaux; mais dans le détail des ornemens, il jugera d'un coup - d'oeil les rapports de l'ensemble, sans exiger qu'on fasse du triglif un quarré long, du metope un quarré parfait, &c. bisarrerie [p. 493]
Il usera de la même liberté dans la composition de son modele en Harmonie; il tirera du phénomene donné par la nature, l'origine des accords; il les suivra dans leur génération, il observera leurs progrès, il développera leur mêlange, il appliquera la théorie à la pratique; & soûmettant l'une & l'autre au jugement de l'oreille, il sacrifiera les détails à l'ensemble, & les regles au sentiment. L'Harmonie ainsi réduite à la beauté physique des accords, & bornée à la simple émotion de l'organe, n'exige donc, comme l'Architecture, qu'un sens exercé par l'étude, éprouvé par l'usage, docile à l'expérience, & rebelle à l'opinion.
Mais dès que la mélodie vient donner de l'ame &
du caractere à l'Harmonie, au jugement de l'oreille
se joint celui de l'imagination, du sentiment, de
l'esprit lui - même. La Musique devient un langage
expressif, une imitation vive & touchante: dès - lors
c'est avec la Poésie que ses principes lui sont communs,
& l'art de les juger est le même. Des sons articulés
dans l'une, dans l'autre des sons modulés,
dans toutes les deux le nombre & le mouvement,
concourent à peindre la nature. Et si l'on demande
quelle est la Musique & la Poésie par excellence,
c'est la poésie ou la musique qui peint le plus & qui
exprime le mieux. Voyez
Dans la Sculpture & la Peinture, c'est peu d'étudier la nature en elle - même, modele toûjours imparfait; c'est peu d'étudier les productions de l'art, modeles toûjours plus froids que la nature. Il faut prendre de l'un ce qui manque à l'autre, & se former un ensemble des différentes parties où ils se surpassent mutuellement. Or, sans parler des sources où l'artiste & le connoisseur doivent puiser l'idée du beau, relative au choix des sujets, au caractere des passions, à la composition & à l'ordonnance; combien la seule étude du physique dans ces deux arts ne suppose - t - elle pas d'épreuves & d'observations? que d'études pour la partie du dessein! Qu'on demande à nos prétendus connoisseurs où ils ont observé, par exemple, le méchanisme du corps humain, la combinaison & le jeu des nerfs, le gonflement, la tension, la contraction des muscles, la direction des forces, les points d'appui, &c. Ils seront aussi embarrassés dans leur réponse, qu'ils le sont peu dans leurs décisions. Qu'on leur demande où ils ont observé tous les reflets, toutes les gradations, tous les contrastes des couleurs, tous les tons, tous les coups de lumiere possibles, étude sans laquelle on est hors d'état de parler du coloris. Un peintre aussi connu par les sacrifices qu'il a faits à la perfection de son art; que par la force & la vérité qui caractérisent ses ouvrages, M. de la Tour vouloit exprimer dans un de ses tableaux l'application d'un homme absorbé dans l'étude. Il a imaginé de le peindre éclairé par deux bougies, dont l'une fond & s'éteint sans qu'il s'en apperçoive. Combien, de l'aveu même de l'artiste, pour saisir cet accident il a fallu voir couler de bougies? Or si un homme accoûtumé à épier & à surprendre la nature a tant de peine à l'imiter, quel est le connoisseur qui peut se flatter de l'avoir assez bien vûe pour en critiquer l'imitation? C'est une chose étrange que la hardiesse avec laquelle on se donne pour juge de la belle nature dans quelque situation que le peintre ou le sculpteur ait pû l'imaginer & la saisir. Celui - ci après avoir employé la moitié de sa vie à l'étude de son art, n'ose se fier aux modeles que sa mémoire a recueillis, & que son imagination lui retrace; il a cent fois recours à la nature pour se corriger d'après elle: il vient un critique plein de confian<cb->
Nous savons qu'il est des amateurs versés dans l'étude des grands maîtres, qui en ont saisi la maniere, qui en connoissent la touche, qui en distinguent le coloris: c'est beaucoup pour qui ne veut que joüir, mais c'est bien peu pour qui ose juger: on ne juge point un tableau d'après des tableaux. Quelque plein qu'on soit de Raphael, on sera neuf devant le Guide. Bien plus, les Forces du Guide, malgré l'analogie du genre, ne seront point une regle sûre pour critiquer le Milon du Puget, ou le Gladiateur mourant. La nature varie sans cesse: chaque position, chaque action différente la modifie diversement: c'est donc la nature qu'il faut avoir étudiée sous telle & telle face pour en juger l'imitation. Mais la nature elle - même est imparfaite; il faut donc aussi avoir étudié les chefs - d'oeuvres de l'art, pour être en état de critiquer en même tems & l'imitation & le modele.
Cependant les difficultés que présente la critique dans les Arts dont nous venons de parler, n'approchent pas de celles que réunit la critique littéraire.
Dans l'histoire, aux lumieres profondes que nous avons exigées du critique pour la partie de l'érudition, se joint pour la partie purement littéraire, l'étude moins étendue, mais non moins refléchie, de la majestueuse simplicité du style, de la netteté, de la décence, de la rapidité de la narration; de l'apropos & du choix des réflexions & des portraits, ornemens puériles dès qu'on les affecte & qu'on les prodigue; enfin de cette éloquence mâle, précise, & naturelle, qui ne peint les grands hommes & les grandes choses que de leurs propres couleurs, qualités qui mettent si fort Tacite & Saluste au - dessus de Tite Live & de Quinte - Curce. Ce n'est que de cet assemblage de connoissances & de goût que se forme un critique supérieur dans le genre historique: que seroit - ce si le même homme prétendoit embrasser en même tems la partie de l'Eloquence & celle de la Morale?
Ces deux genres, soit que renfermés en eux - mêmes, ils se nourrissent de leur propre substance, soit qu'ils se pénetrent l'un l'autre & s'animent mutuellement, soit que répandus dans les autres genres de littérature comme un feu élémentaire, ils y portent la vie & la fécondité; ces deux genres dans tous les cas, ont pour objet de rendre la vérité sensible & la vertu aimable.
C'est un talent donné à peu de personnes, & que peu de personnes sont en état de critiquer. L'esprit n'en est qu'un demi - juge. Il connoît l'art de convaincre, non celui de persuader; l'art de séduire, non celui d'émouvoir. L'esprit peut critiquer unrhéteur subtil; mais le coeur seul peut juger un philosophe éloquent. Le critique en éloquence & en morale doit donc avoir en lui ce principe de sensibilité & de droiture, qui fait concevoir & produire avec force les vérités dont on se pénetre: ce principe de noblesse & d'élévation qui excite en nous l'enthousiasme de la vertu, & qui seul embrasse tous les possibles dans l'art d'intéresser pour elle. Si la vertu pouvoit se rendre visible aux hommes, a dit un philosophe, elle paroîtroit si touchante & si belle, que personne ne pourroit lui résister: c'est ainsi que doit la concevoir & celui qui la peint & celui qui en critique la peinture.
La fausse éloquence est également facile à profes<pb-> [p. 494]
Par la même raison un critique en Morale doit avoir en lui, sinon les vertus pratiques, du moins le germe de ces vertus. Il n'arrive que trop souvent que les moeurs d'un homme éclairé sont en contradiction avec ses principes, quelquefois avec ses sentimens. Il n'est donc pas essentiel au critique en Morale d'être vertueux, il suffit qu'il soit né pour l'être; mais alors, quel métier que celui du critique? avoir à se condamner sans cesse en approuvant les gens de bien! Cependant il ne seroit pas à souhaiter que le critique en Morale fût exempt de passions & de foiblesses: il faut juger les hommes en homme vertueux, mais en homme; se connoître, connoître ses semblables, & savoir ce qu'ils peuvent avant d'examiner ce qu'ils doivent; se mettre à la place d'un pere, d'un fils, d'un ami, d'un citoyen, d'un sujet, d'un roi lui - même, & dans la balance de leurs devoirs peser les vices & les vertus de leur état; concilier la nature avec la société, mesurer leurs droits & en marquer les limites, rapprocher l'intérêt personnel du bien général, être enfin le juge non le tyran de l'humanité: tel seroit l'emploi d'un critique supérieur dans cette partie; emploi difficile & important, sur - tout dans l'examen de l'Histoire.
C'est - là qu'il seroit à souhaiter qu'un philosophe
aussi ferme qu'éclairé, osât appeller au tribunal de
la vérité, des jugemens que la flaterie & l'intérêt
ont prononcé dans tous les siecles. Rien n'est
plus commun dans les annales du monde, que
les vices & les vertus contraires mis au même rang.
La modération d'un roi juste, & l'ambition effrénée
d'un usurpateur; la sévérité de Manlius envers son
fils, & l'indulgence de Fabius pour le sien; la soûmission
de Socrate aux lois de l'aréopage, & la hauteur
de Scipion devant le tribunal des comices, ont eu
leurs apologistes & leurs censeurs. Par - là l'Histoire,
dans sa partie morale, est une espece de labyrinthe
où l'opinion du lecteur ne cesse de s'égarer; c'est un
guide qui lui manque: or ce guide seroit un critique
capable de distinguer - la vérité de l'opinion, le droit
de l'autorité, le devoir de l'intérêt, la vertu de la
gloire elle - même; en un mot de réduire l'homme,
quel qu'il fût, à la condition de citoyen; condition
qui est la base des lois, la regle des moeurs, & dont
aucun homme en société n'eut jamais droit de s'affranchir.
Voyez
Le critique doit aller plus loin contre le préjugé; il doit considérer non - seulement chaque homme en
Quelle que soit la difficulté de ce genre de critique, elle seroit bien compensée par son utilité: quand il seroit vrai, comme Bayle l'a prétendu, que l'opinion n'influât point sur les moeurs privées, il est du moins incontestable qu'elle décide des actions publiques. Pat exemple, il n'est point de préjugé plus généralement ni plus profondément enraciné dans l'opinion des hommes, que la gloire attachée au titre de conquérant; toutefois nous ne craignons point d'avancer que si dans tous les tems les Philosophes, les Historiens, les Orateurs, les Poëtes, en un mot les dépositaires de la réputation & les dispensateurs de la gloire, s'étoient réunis pour attacher aux horreurs d'une guerre injuste le même opprobre qu'au larcin & qu'à l'assassinat, on eût peu vû de brigands illustres. Malheureusement les Philosophes ne connoissent pas assez leur ascendant sur les esprits: divisés, ils ne peuvent rien; réunis, ils peuvent tout à la longue: ils ont pour eux la vérité, la justice, la raison, & ce qui est plus fort encore, l'intérêt de l'humanité dont ils défendent la cause.
Montagne moins irrésolu, eût été un excellent critique dans la partie morale de l'Histoire: mais peu ferme dans ses principes, il chancelle dans les conséquences; son imagination trop féconde, étoit pour sa raison ce qu'est pour les yeux un crystal à plusieurs faces, qui rend douteux l'objet véritable à force de le multiplier.
L'auteur de l'esprit des lois est le critique dont l'Histoire auroit besoin dans cette partie: nous le citons quoique vivant; car il est trop pénible & trop injuste d'attendre la mort des grands hommes pour parler d'eux en liberté.
Quoique le modele intellectuel d'après lequel un critique supérieur juge la Morale & l'Eloquence, entre essentiellement dans le modele auquel doit se rapporter la Poésie, il s'en faut bien qu'il suffise à la perfection de celui - ci: combien le modele de la Poésie en général n'embrasse - t - il pas de genres différens & de modeles particuliers? Bornons - nous au poëme dramatique & à l'épopée.
Dans la comédie, quel usage du monde, quelle connoissance de tous les états! combien de vices, de passions, de travers, de ridicules à observer, à analyser, à combiner, dans tous les rapports, dans toutes les situations, sous toutes les faces possibles! combien de caracteres! combien de nuances dans le même caractere! combien de traits à recueillir, de contrastes à rapprocher! quelle étude pour former le seul tableau du Misantrope ou du Tartuffe! quelle étude pour être en état de le juger! Ici les regles de l'art sont la partie la moins importante: c'est à la vérité de l'expression, à la force des touches, au choix des situations & des oppositions, que le critique doit s'attacher; il doit donc juger la comédie d'après les originaux; & ses originaux ne sont pas dans l'art, mais dans la nature. L'avare de Moliere n'est point l'avare de Plaute; ce n'est pas même tel avare en [p. 495]
Dans la tragédie, à l'observation de la nature se
joignent dans un plus haut degré que dans la comédie,
l'imagination & le sentiment; & ce dernier y
domine. Ce ne sont plus des caracteres communs ni
des évenemens familiers que l'auteur s'est proposé
de rendre; c'est la nature dans ses plus grandes proportions,
& telle qu'elle a été quelquefois lorsqu'elle
a fait des efforts pour produire des hommes &
des choses extraordinaires. Voyez
Le même modele intellectuel auquel un critique supérieur rapporte la tragédie, doit s'appliquer à la partie dramatique de l'épopée: dès que le poëte épique fait parler ses personnages, l'épopée ne différant plus de la tragédie que par le tissu de l'action, les moeurs, les sentimens, les caracteres, sont les mêmes que dans la tragédie, & le modele en est commun. Mais lorsque le poëte paroît & prend la place de ses personnages, l'action devient purement épique: c'est un homme inspiré aux yeux duquel tout s'anime; les êtres insensibles prennent une ame; les abstraits, une forme & des couleurs; le soufle du génie donne à la nature une vie & une face nouvelle; tantôt il l'embellit par ses peintures, tantôt il la trouble par ses prestiges & en renverse toutes les lois; il franchit les limites du monde; il s'éleve dans les espaces immenses du merveilleux; il crée de nouvelles spheres: les cieux ne peuvent le contenir; & il faut avoüer que le génie de la Poésie considéré sous ce point'de vûe, est le moins absurde des dieux qu'ait adoré l'antiquité payenne. Qui osera le suivre dans son enthousiasme, si ce n'est celui qui l'éprouve? Est - ce à la froide raison à guider l'imagination dans son ivresse? Le goût timide & tranquille viendra - t - il lui présenter le frein? O vous qui voulez voir ce que peut la Poésie dans sa chaleur & dans sa force, laissez bondir en liberté ce coursier fougueux; il n'est jamais si beau que dans ses écarts; le manége ne feroit que rallentir son ardeur, & contraindre l'aisance noble de ses mouvemens: livré à lui même, il se précipitera quelquefois; mais il con<cb->
Il suit des principes que nous venons d'établir, qu'il n'y a de critique universellement supérieur que le public, plus ou moins éclairé suivant les pays & les siecles, mais toûjours respectable en ce qu'il comprend les meilleurs juges dans tous les genres, dont les opinions préponderantes l'emportent, & se réunissent à la longue pour former l'avis général. Le public est comme un fleuve qui coule sans cesse, & qui dépose son limon. Le tems vient où ses eaux pures sont le miroir le plus fidele que puissent consulter les Arts.
A l'égard des particuliers qui n'ont que des prétentions pour titres, la liberté de se tromper avec confiance est un privilége auquel ils doivent se borner, & nous n'avons garde d'y porter atteinte.
On peut nous opposer que l'on nait avec le talent de la critique. Oui, comme on naît poëte, historien, orateur, c'est - à - dire avec des dispositions à le devenir par l'exercice & l'étude.
Enfin l'on peut nous demander, si sans toutes les qualités que nous exigeons, les Arts & la Littérature n'ont pas eu d'excellens juges. C'est une question de fait sur les Arts; nous nous en rapportons aux artistes. Quant à la Litterature, nous osons répondre qu'elle a eu peu de critiques supérieurs, & moins encore qui ayent excellé en différentes parties.
On n'entreprend point d'en marquer les classes. Nous avons indiqué les principes; c'est au lecteur à les appliquer: il sait à quel poids il doit peser Cicéron, Longin, Petrone, Quintilien, en fait d'éloquence; Aristote, Horace, & Pope, en fait de Poésie: mais ce que nous aurons le courage d'avancer, quoique bien sûrs d'être contredits par le bas peuple des critiques, c'est que Boileau, à qui la versification & la langue sont en partie redevables de leur pureté, Boileau, l'un des hommes de son siecle qui avoit le plus étudié les anciens, & qui possedoit le mieux l'art de mettre leurs beautés en oeuvre; Boileau n'a jamais bien jugé que par comparaison. De - là vient qu'il a rendu justice à Racine, l'heureux imitateur d'Euripide, & qu'il a méprisé Quinault, & loüé froidement Corneille, qui ne ressembloient à rien, sans parler du Tasse qu'il ne connoissoit point ou qu'il n'a jamais bien senti. Et comment Boileau qui a si peu imaginé, auroit - il été un bon juge dans la partie de l'imagination? Comment auroit - il été un vrai connoisseur dans la partie du pathétique, lui à qui il n'est jamais échappé un trait de sentiment dans tout ce qu'il a pû produire? Qu'on ne dise pas que le genre de ses oeuvres n'en étoit pas susceptible. Le sentiment & l'imagination favent bien s'épancher quand ils abondent dans l'ame. L'imagination qui dominoit dans Malebranche, l'a entraîné malgré lui dans ce qu'il appelloit la recherche de la vérité, & il n'a pû s'empêcher de s'y livrer dans le genre d'écrit où il étoit le plus dangereux de la suivre. C'est ainsi que les fables de la Fontaine (cet auteur dont Boileau n'a pas dit un mot dans son Art poétique) sont semées de traits aussi touchans que délicats, de ces traits qui [p. 496]
Les critiques qui n'en ont pas eu le germe en eux - mêmes,
trop foibles pour se former des modeles intellectuels,
ont tout rapporté aux modeles existans;
c'est ainsi qu'on a jugé Virgile, Lucain, le Tasse, &
Milton, sur les regles tracées d'après Homere: Racine & Corneille sur les regles tracées d'après Euripide & Sophocle. Les premiers ont réuni les suffrages
de tous les siecles. On en conclut qu'on ne peut
plaire qu'en suivant la route qu'ils ont tenue: mais
chacun d'eux a suivi une route différente; qu'ont
fait les critiques? Ils ont fait, dit l'auteur de la Henriade, comme les Astronomes, qui inventoient tous les
jours des cercles imaginaires, & créoient ou anéantissoient
un ciel ou deux de crystal à la moindre difficulté. Combien l'esprit didactique, si on vouloit l'en croire,
ne retréciroit - il pas la carriere du génie?
Vos exemplaria graca
Nocturnâ versate manu, versate diurnâ.
Mais avec Horace il vous dira aussi,
O imitatores, servum pecus.
Il ajoûtera,
Dans le poëme épique, passez - vous du merveil<cb->
C'est ainsi que le critique supérieur laisse au génie toute sa liberté; il ne lui demande que de grandes choses, & il l'encourage à les produire. Le critique subalterne l'accoûtume au joug des regles, il n'en exige que l'exactitude, & il n'en tire qu'une obéissance froide & qu'une servile imitation. C'est de cette espece de critique, qu'un auteur que nous ne saurions assez citer en fait de goût, a dit, ils ont laborieusement écrit des volumes sur quelques lignes que l'imagination des poëtes a créées en se jouant.
Qu'on ne soit donc plus surpris, si à mesure que le goût devient plus difficile, l'imagination devient plus timide & plus froide, & si presque tous les grands génies depuis Homere jusqu'à Lucrece, depuis Lucrece jusqu'à Milton & à Corneille, semblent avoir choisi, pour s'élever, les tems où l'ignorance leur laissoit une libre carriere. Nous ne citerons qu'un exemple des avantages de cette liberté. Corneille eût sacrifié la plûpart des beautés de ses pieces, & eût même abandonné quelques - uns de ses plus beaux sujets, tels que celui des Horaces, s'il eût été aussi severe dans sa composition qu'il l'a été dans ses examens; mais heureusement il composoit d'après lui, & se jugeoit d'après Aristote. Le bon goût, nous dira - t - on, est donc un obstacle au génie? Non, sans doute; car le bon goût est un sentiment courageux & mâle qui aime sur - tout les grandes choses, & qui échauffe le génie en même tems qu'il l'éclaire. Le goût qui le gêne & qui l'amollit, est un goût craintif & puérile qui veut tout polir & qui affoiblit tout. L'un veut des ouvrages hardiment conçus, l'autre en veut de scrupuleusement finis; l'un est le goût du critique supérieur, l'autre est le goût du critique subalterne.
Mais autant que le critique supérieur est au - dessus du critique subalterne, autant celui - ci l'emporte sur le critique ignorant. Ce que celui - ci sait d'un genre, est à son avis tout ce qu'on en peut savoir; renfermé dans sa sphere, sa vûe est pour lui la mesure des possibles; dépourvû de modeles & d'objets de comparaison, il rapporte tout à lui même; par - là tout ce qui est hardi lui paroît hasardé, tout ce qui est grand lui paroît gigantesque. C'est un nain contrefait qui juge d'après ses proportions une statue d'Antinoüs ou d'Hercule. Les derniers de cette derniere classe sont ceux qui attaquent tous les jours ce que nous avons de meilleur, qui louent ce que nous avons de plus mauvais, & qui font, de la noble profession des Lettres, un métier aussi lâche & aussi méprisable qu'eux - mêmes (M. de Voltaire dans les Mensonges imprimés). Cependant comme ce qu'on méprise le plus, n'est pas toûjours ce qu'on aime le moins, on a vû le tems où ils ne manquoient ni de lecteurs ni de Mecenes. Les magistrats eux - mêmes cédant au goût d'un certain public, avoient la foiblesse de laisser à ces brigands de [p. 497]
Nous parlons ici de ce qui est arrivé dans les différentes époques de la Littérature, & de ce qui arrivera sur - tout, lorsque le beau, le grand, le sérieux en tout genre, n'ayant plus d'asyle que dans les bibliotheques & auprès d'un petit nombre de vrais amateurs, laisseront le public en proie à la contagion des froids romans, des farces insipides, & des sottises polémiques.
Quant à ce qui se passe de nos jours, nous y tenons de trop près pour en parler en liberté; nos loüanges & nos censures paroîtroient également suspectes. Le silence nous convient d'autant mieux à ce sujet, qu'il est fondé sur l'exemple des Fontenelle, des Montesquieu, des Buffon, & de tous ceux qui leur ressemblent. Mais si quelque trait de cette barbarie que nous venons de peindre, peut s'appliquer à quelques - uns de nos contemporains, loin de nous retracter, nous nous applaudirons d'avoir présenté ce tableau à quiconque rougira ou ne rougira point de s'y reconnoître. Peut - être trouvera - t - on mauvais que dans un ouvrage de la forme de celui - ci, nous soyons entrés dans ce détail; mais la vérité vient toûjours à - propos dès qu'elle peut être utile. Nous avoüerons, si l'on veut, qu'élle eût pû mieux choisir sa place; mais par malheur elle n'a point à choisir.
Qu'il nous soit permis de terminer cet article par un souhait que l'amour des Lettres nous inspire, & que nous avons fait autrefois pour nous - mêmes. On voyoit à Sparte les vieillards assister aux exercices de la jeunesse, l'animer par l'exemple de leur vie passée, la corriger par leurs reproches, & l'instruire par leurs leçons. Quel avantage pour la république littéraire, si les auteurs blanchis dans de sçavantes veilles, après s'être mis par leurs travaux au - dessus de la rivalité & des foiblesses de la jalousie, daignoient présider aux essais des jeunes gens, & les guider dans la carriere; si ces maîtres de l'art en devenoient les critiques; si, par exemple, les auteurs de Rhadamiste & d'Alzire vouloient bien examiner les ouvrages de leurs éleves qui annonceroient quelque talent: au lieu de ces extraits mutilés, de ces analyses seches, de ces décisions ineptes, où l'on ne voit pas même les premieres notions de l'art, on auroit des jugemens éclairés par l'expérience &
Disce puer virtutem ex me, verumque laborem.
Cet article est de M.
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