ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"85"> terminant ou terme de l'action de suit: car selon l'ordre de la pensée & des rapports, me est après suit; mais selon l'élocution ordinaire ou construction usuelle, ces sortes de pronoms précedent le verbe. Notre langue a conservé beaucoup plus d'inversions latines qu'on ne pense.

3°. Dit Jesus - Christ, c'est une troisieme proposition qui fait une incise ou sens détaché; c'est un adjoint: en ces occasions la construction usuelle met le sujet de la proposition après le verbe: Jesus - Christ est le sujet, & dit est l'attribut.

Considérons maintenant cette proposition à la maniere des Logiciens: commençons d'abord à en séparer l'incise dit Jesus - Christ; il ne nous restera plus qu'une seule proposition, celui qui me suit: ces mots ne forment qu'un sens total; qui est le sujet de la proposition logique, sujet complexe ou composé; car on ne juge de celui, qu'entant qu'il est celui qui me suit: voilà le sujet logique ou de l'entendement. C'est de ce sujet que l'on pense & que l'on dit qu'il ne marche point dans les ténebres.

Il en est de même de cette autre proposition: Ale - xandre, qui étoit roi de Macédoine, vainquit Darius. Examinons d'abord cette phrase grammaticalement. J'y trouve deux propositions: Alexandre vainquit Darius, voilà une proposition principale; Alexandre en est le sujet; vainquit Darius, c'est l'attribut. Qui étoit roi de Macédoine, c'est une proposition incidente; qui en est le sujet, & étoit roi de Macédoine, l'attribut. Mais logiquement ces mots, Alexandre qui étoit roi de Macédoine, forment un sens total équivalent à Alexandre roi de Macédoine: ce sens total est le sujet complexe de la proposition; vainquit Darius, c'est l'attribut.

Je crois qu'un Grammairien ne peut pas se dispenser de connoître ces différentes sortes de propositions, s'il veut faire la construction d'une maniere raisonnable.

Les divers noms que l'on donne aux différentes propositions, & souvent à la même, sont tirés des divers points de vûe sous lesquels on les considere: nous allons rassembler ici celles dont nous venons de parler, & que nous croyons qu'un Grammairien doit connoître.

                  Table des divers noms que l'on donne aux propositions, aux sujets, & aux attributs.

Proposition direce énoncée par 1. Simple tant au pluriel qu'au singulier. le mode indicatif. 2. Multiple, lotsqu'on applique le mê Elle marque un jugement. me attribut à différens individus. Les propositions Le sujet 3. Complexe. & les énoncia - est, ou 4. Enoncé par plusieurs mots qui for I. tions sont com - ment un sens total, & qui sont équi<-> Division.Proposition oblique exprimée posées d'un su - valens à un nom. par quelqu'autre mode du verbe. jet & d'un attri Elle marque non un jugement, mais quel - but. que considération particuliere de l'es - L'attribut Simple, prit. On l'appelle énonciation est, ou Composé, c'est - à - dire, énoncé par plu<->

Proposition absolue ou com - sieurs mots. plette , II. Division.Proposition relative ou par - L'ensemble des propositions Lapériode De membres seulement. tielle. correlatives ou partielles est compo - D'incises seulement. On les appelle aussi correlatives. forme la période. see, ou De membres & d'incises.

III. Proposition explicative. V. Proposition explicite. Division. Proposition déterminative. Division. Proposition implicite ou elliptique. IV. Proposition principale. VI. Proposition considérée grammaticalement. Division. Proposition incidente. Division. Proposition considérée logiquement.

Il faut observer que les Logiciens donnent le nom de proposition composée à tout sens total qui résulté du rapport que deux propositions grammaticales ont entr'elles; rapports qui sont marqués par la valeur des différentes conjonctions qui unissent les propositions grammaticales.

Ces propositions composées ont divers noms selon la valeur de la conjonction ou de l'adverbe conjonctif, ou du relatif qui unit les simples propositions partielles, & en fait un tout. Par exemple, ou, aut, vel, est une conjonction disjonctive ou de division. On rassemble d'abord deux objets pour donner ensuite l'alternative de l'un ou celle de l'autre. Ainsi après avoir d'abord rassemblé dans mon esprit l'idée du soleil & celle de la terre, je dis que c'est ou le soleil qui tourne, ou que c'est la terre: voilà deux propositions grammaticales relatives dont les Logiciens ne font qu'une proposition composée, qu'ils appellent proposition disjonctive.

Telles sont encore les propositions conditionnelles qui résultent du rapport de deux propositions par la conjonction conditionnelle si ou pourvû que: si vous étudiez bien, vous deviendrez savant; voilà une proposition composée qu'on appelle conditionnelle. Ces propositions sont composées de deux propositions particulieres, dont l'une exprime une condition d'où dépend un effet que l'autre énonce. Celle où est la condition s'appelle l'antécédent, si vous étudiez bien; celle qui énonce l'effet qui suivra la condition, est appellée le conséquent, vous deviendrez savant.

Il est estimé parce qu'il est savant & vertueux. Voilà une proposition composee que les Logiciens appellent causale, du mot parce que qui sert à exprimer la cause de l'effet que la premiere proposition énonce. Il est estimé, voilà l'effet; & pourquoi? parce qu'il est savant & vettueux, voilà la cause de l'estime.

La fortune peut bien ôter les richesses, mais elle ne peut pas ôter la vertu: voilà une proposition composée qu'on appelle adversative ou discrétive, du latin discretivus (Donat), qui sert à séparer, à distinguer, parce qu'elle est composée de deux propositions dont la seconde marque une distinction, une séparation, une sorte de contrariété & d'opposition, par rapport à la premiere; & cette séparation est marquée par la conjonction adversative mais.

Il est facile de démêler ainsi les autres sortes de propositions composées; il suffit pour cela de connoître la valeur des conjonctions qui lient les propositions particulieres, & qui par cette liaison forment un tout qu'on appelie proposition composée. On fait ensuite aisément la construction détaillée de chacune des propositions particulieres, qu'on appelle aussi partielles ou correlatives.

Je ne parle point ici des autres sortes de propositions, comme des propositions universelles. des particulieres, des singulieres, des indéfinies, des affirmatives, des négatives, des contradictioires, &c. Quoique ces connoissances soient très - utiles, j'ai crû ne devoir parler ici de la proposition, qu'autant qu'il est nécessaire de la connoître pour avoir des principes sûrs de construction. [p. 86]

Deux rapports généraux entre les mots dans la construction: I. rapport d'identité: II. rapport de détermination. Tous les rapports particuliers de construction se réduisent à deux sortes de rapports généraux.

I. Rapport d'identité. C'est le fondement de l'accord de l'adjectif avec son substantif, car l'adjectifne fait qu'énoncer ou déclarer ce que l'on dit qu'est le substantif; ensorte que l'adjectif c'est le substantif analysé, c'est - à - dire considéré comme étant de telle ou telle façon, comme ayant telle ou telle qualité: ainsi l'adjectif ne doit pas marquer, par rapport au genre, au nombre, & au cas, des vûes qui soient différentes de celles sous lesquelles l'esprit considere le substantif.

Il en est de même entre le verbe & le sujet de la proposition, parce le verbe énonce que l'esprit considere le sujet comme étant, ayant, ou faisant quelque chose: ainsi le verbe doit indiquer le même nombre & la même personne que le sujet indique; & il y a des langues, tel est l'hébreu, où le verbe indique même le genre. Voilà ce que j'appelle rapport ou raison d'identité, du latin idem.

II. La seconde sorte de rapport qui regle la construction des mots, c'est le rapport de détermination.

Le service des mots dans le discours, ne consiste qu'en deux points:

1°. A énoncer une idée; lumen, lumiere; sol, soleil.

2°. A faire connoître le rapport qu'une idée a avec une autre idée; ce qui se fait par les signes établis en chaque langue, pour étendre ou restreindre les idées & en faire des applications particulieres.

L'esprit conçoit une pensée tout d'un coup, par la simple intelligence, comme nous l'avons déjà remarqué; mais quand il s'agit d'énoncer une pensée, nous sommes obligés de la diviser, de la présenter en détail par les mots, & de nous servir des signes établis, pour en marquer les divers rapports. Si je veux parler de la lumiere du soleil, je dirai en latin, lumen solis, & en françois de le soleil, & par contraction, du soleil, selon la construction usuelle: ainsi en latin, la terminaison de solis détermine lumen à ne signifier alors que la lumiere du soleil. Cette détermination se marque en françois par la préposition de, dont les Latins ont souvent fait le même usage, comme nous l'avons fait voir en parlant de l'article, templum de marmore, un temple de marbre. Virg. &c.

La détermination qui se fait en latin par la terminaison de l'accusatif, diliges Dominum Deum tuum ,ou Dominum Deum tuum diliges; cette détermination, dis - je, se marque en françois par la place ou position du mot, qui selon la construction ordinaire se met après le verbe, tu aimeras le Seigneur ton Dieu. Les autres déterminations ne se font aujourd'hui en françois que par le secours des prépositions. Je dis aujourd'hui, parce qu'autrefois un nom substantif placé immédiatement après un autre nom substantif, le déterminoit de la même maniere qu'en latin; un nom qui a la terminaison du génitif, détermine le nom auquel il se rapporte, lumen solis, liber Petri, al tens Innocent III. (Villehardouin.) au tems d'Innocent III. l'Incarnation notre Seigneur (Idem), pour l'Incarnation de notre Seigneur; le service Deu (Id.), pour le service de Dieu; le frere l'empereor (Baudoin, id. p. 163.), pour le frere de l'empereur: & c'est de là que l'on dit encore l'hôtel - Dieu, &c. Voyez la préface des antiquités gauloises de Borel. Ainsi nos peres ont d'abord imité l'une & l'autre maniere des Latins: premierement, en se servant en ces occasions de la préposition de; templum de marmore, un temple de marbre: secondement, en plaçant le substantif modifiant immédiatement après le modifié; frater imperatoris, le frere l'empereor; domus Dei, l'hôtel - Dieu. Mais alors le latin désignoit par une terminaison particuliere l'effet du nom modifiant; avantage qui ne se trouvoit point dans les noms françois, dont la terminaison ne varie point. On a enfin donné la préférence à la premiere maniere qui marque cette sorte de détermination par le secours de la préposition de: la gloire de Dieu.

La syntaxe d'une langue ne consiste que dans les signes de ces différentes déterminations. Quand on connoît bien l'usage & la destination de ces signes, on sait la syntaxe de la langue: j'entens la syntaxe nécessaire, car la syntaxe usuelle & élégante demande encore d'autres observations; mais ces observations supposent toûjours celles de la syntaxe nécessaire, & ne regardent que la netteté, la vivacité, & les graces de l'élocution; ce qui n'est pas maintenant de notre sujet.

Un mot doit être suivi d'un ou de plusieurs autres mots déterminans, toutes les fois que par lui - même il ne fait qu'une partie de l'analyse d'un sens particulier; l'esprit se trouve alors dans la nécessité d'attendre & de demander le mot déterminant, pour avoir tout le sens particulier que le premier mot ne lui annonce qu'en partie. C'est ce qui arrive à toutes les prépositions, & à tous les verbes actifs transitifs: il est allé à; à n'énonce pas tout le sens particulier: & je demande où? on répond, à la chasse, à Versailles, selon le sens particulier qu'on a à désigner. Alors le mot qui acheve le sens, dont la préposition n'a énoncé qu'une partie, est le complément de la préposition; c'est - à - dire que la préposition & le mot qui la détermine, font ensemble un sens partiel, qui est ensuite adapté aux autres mots de la phrase; ensorte que la préposition est, pour ainsi dire, un mot d'espece ou de sorte, qui doit ensuite être déterminé individuellement: par exemple, cela est dans; dans marque une sorte de maniere d'être par rapport au lieu: & si j'ajoûte dans la maison, je détermine, j'individualise, pour ainsi dire, cette maniere spécifique d'être dans.

Il en est de même des verbes actifs: quelqu'un me dit que le Roi a donné; ces mots a donné ne font qu'une partie du sens particulier, l'esprit n'est pas satisfait, il n'est qu'ému, on attend, ou l'on demande, 1° ce que le Roi a donné,à qui il a donné. On répond, par exemple, à la premiere question, que le Roi a donné un régiment: voilà l'esprit satisfait par rapport à la chose donnée; régiment est donc à cet égard le déterminant de a donné, il détermine a donné. On demande ensuite, à qui le Roi at - il donné ce régiment? on répond à monsieur N. ainsi la préposition à, suivie du nom qui la détermine, fait un sens partiel qui est le déterminant de a donné par rapport à la personne, à qui. Ces deux sortes de relations sont encore plus sensibles en latin où elles sont marquées par des terminaisons particulieres. Reddite (illa) quoe sunt Coesaris, Coesari: & (illa) quoe sunt Dei, Deo.

Voilà deux sortes de déterminations aussi nécessaires & aussi directes l'une que l'autre, chacune dans son espece. On peut, à la vérité, ajoûter d'autres circonstances à l'action, comme le tems, le motif, la maniere. Les mots qui marquent ces circonstances ne sont que des adjoints, que les mots précedens n'exigent pas nécessairement. Il faut donc bien distinguer les déterminations nécessaires d'avec celles qui n'influent en rien à l'essence de la proposition grammaticale, ensorte que sans ces adjoints on perdroit à la vérité quelques circonstances de sens; mais la proposition n'en seroit pas moins telle proposition.

A l'occasion du rapport de détermination, il ne sera pas inutile d'observer qu'un nom substantif ne

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