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CONGELATION (Page 3:864)
CONGELATION, s. f. terme de Physique, c'est la
fixation d'un fluide, ou la privation de sa mobilité
naturelle par l'action du froid; ou enfin c'est le changement
d'une substance fluide en un corps concret,
solide & dur, qu'on appelle glace. Voyez
Les Cartésiens définissent la congelation, le repos
o'i l'immobilité d'un fluide durci par le froid. Cette
définition suit assez naturellement de l'idée qu'ils ont
de la fluidité, puisqu'ils supposent que c'est le mouvement
continuel des parties du fluide entre elles
qui la constitue. Voyez
En effet, l'opinion de ces Philosophes sur la congelation est, que l'eau ne se congele que parce que
ses parties perdent leur mouvement naturel, & adherent
fortement les unes avec les autres. Voy.
Les principaux phénomenes de la congelation sont 1°. Que l'eau & tous les fluides, excepté l'huile, se dilatent en se congelant, c'est - à - dire qu'ils occupent plus d'espace, & qu'ils sont spécifiquement plus legers qu'auparavant.
L'augmentation du volume de l'eau par la congelation fournit matiere à beaucoup d'expériences; & il est à propos d'examiner ici, & de suivre la nature dans cette opération.
Le vaisseau B D (
2°. Que non - seulement les fluides perdent de leur pesanteur spécifique dans la congelation, mais qu'ils perdent aussi de leur poids absolu; de sorte qu'après
3°. Que l'eau glacée n'est pas aussi transparente que quand elle est fluide, & que les corps se voyent moins nettement.
4°. Que l'eau s'évapore presqu'autant quand elle est glacée que quand elle est fluide.
5°. Que l'eau ne se congele point dans le vuide, & qu'elle demande pour se glacer la présence & le contact immédiat de l'air.
6°. Que l'eau bouillie & refroidie se congele aussi vîte que celle qui n'a pas bouilli.
7°. Que quand la surface de l'eau est couverte d'huile d'olive, elle ne se congele pas si promptement que quand il n'y en a point; & que l'huile de noix l'empêche de se glacer à un froid violent, ce que l'huile d'olive ne feroit point.
8°. Que l'esprit - de - vin, l'huile de noix, & l'huile de térébenthine, se congelent rarement.
9°. Que la surface de l'eau qui se congele paroît toute ridée; que ces rides sont quelquefois paralleles, & d'autres fois comme des rayons qui viennent tous d'un centre, & tendent à la circonférence.
Les théories & les hypotheses différentes par lesquelles on explique ce phénomene sont en grand nombre: les principes que différens auteurs ont posés là - dessus se réduisent à ceux - ci; savoir, ou que c'est quelque matiere étrangere qui s'introduit dans les interstices du fluide, & que par son moyen le fluide se fixe & augmente de volume, &c. ou que quelque matiere naturellement contenue dans le fluide en est chassée, & que le fuide est fixé par la privation de cette matiere, &c.
Selon d'autres, c'est une altération qui arrive aux particules qui composent le fluide, ou d'autres parties que le fluide contient.
Tous les systèmes connus sur la congelation peuvent se réduire à quelques - uns de ces principes: les Cartésiens qui l'attribuent au repos des parties du fluide qui étoient auparavant en mouvement, expliquent la congelation par la matiere subtile qui s'échappe de dedans les pores de l'eau; ils soùtiennent que c'est l'activité de cette matiere éthérée ou subtile qui mettoit auparavant en mouvement les particules des fluides, & que dès que cette matiere s'échappe il n'y a plus de fluidité.
Quelques autres philosophes de la même secte attribuent le changement de l'eau en glace, à une diminution de la force & de l'efficacité ordinaire de la matiere subtile, causée par le changement de la température de l'air; car cette matiere subtile ainsi altérée, n'aura plus assez d'énergie pour mertre en mouvement les parties du fluide comme de coûtume.
Les Gassendistes, & les autres philosophes corpusculaires, attribuent avec assez peu de clarté la congelation de l'eau à l'introduction d'une multitude de particules frigorifiques, qui s'introduisant en foule dans le fluide, & s'y distribuant de tous côtés, s'insinuent dans les plus petits interstices qui se trouvent entre les particules de l'eau, empêchent leur mouvement accoûtumé, & les fixent en un corps dur & solide qu'on appelle glace. C'est de l'introduction de ces particules que vient l'augmentation du volume de l'eau, & son plus grand froid, &c.
Ils supposent cette introduction des particules frigorifiques
essentielle à la congelation, comme ce qui
la caractérise & la distingue de la coagulation: la derniere
est produite indifféremment par un mêlange
chaud ou froid, tandis que la premiere ne doit son
origine qu'à un mêlange froid, Voyez
Il est fort difficile de déterminer de quel genre sont les particules frigorifiques, & de quelle maniere elles produisent leur effet: c'est aussi cette difficulté qui a fait produire plusieurs systemes.
Quelques uns ont dit que c'etoit l'air commun qui dans la congelation s'introduisoit dans l'eau, & qui s'embarrassoit avec les particules de ce fluide, empêchoit leur mouvement, & formoit cette quantité de builes qu'on apperçoit dans la glace; que de cette façon il augmentoit le volume de l'eau, & par ce moyen la rendoit spécisiquement plus légere. Mais M. Boyle a combattucette opinion, en prétendant que l'eau gele dans les vaisseaux fermés hermétiquement, & dans lesquels l'air ne peut aucunement s'introduire > cependant il y a autant de bulles que dans celle qui s'est congelée en plein air: il ajoûte que l'huile se condense en se gelant; d'où il conclud que l'air ne peut point être la cause de sa congelation.
D'autres, & c'est le plus grand nombre, veulent
que la matiere de la congelation soit un sel, soutenant
qu'un froid excessif peut bien rendre les parties de
l'eau immobiles, mais qu'il ne se formera jamais de
glace sans sel. Les particules salines, disent - ils, dissoutes
& combinées dans une juste proportion, sont
la cause principale de la congelation, car la congelation a beaucoup de rapport avec la crystallisation.
Voyez
Ils supposent que ce sel est du genre du nitre, & que l'air chargé, comme tout le monde en convient, d'une grande quantité de nitre, fournit ce sel.
Il est très - facile d'expliquer comment les particules d> nitre peuvent faire perdre à l'eau sa fluidité. On suppose que les particules de ce sel sont des aiguiiles roides & pointuës; qu'elles entrent facilement dans les parties ou globules de l'eau; ces particules ainsi hérissées de pointes venant à se mêler, elles s'embarrassent les unes dans les autres, leur mouvement diminue peu - à - peu, & il se détruit enfin totalement.
Cet effet n'est produit que dans le plus sort de l'hyver: en voici la raison; c'est que dans ce tems, les
pointes du nitre qui agissent pour diminuer le mouvement
ont plus de force que la puissance ou que le
principe qui met les fluides en mouvement, ou qui
les dispose à se mouvoir. Voyez
L'expérience si connue de la glace artificielle confirme cette opinion. On prend du salpêtre commun, on le mêle avec de la neige ou de la glace pilée, on fait fondre ce mêlange sur le feu, en plongeant une bouteille pleine d'eau dans ce mêlange; tandis qu'il se sond, l'eau contenue dans la bouteille & contiguë à ce mélange se congelora, quand même on feroit l'expérience dans un air chaud. On conclut de cette expérience, que les pointes du sel, par la pesanteur du mêlange & de l'atmosphere, sont introduites dans l'eau au - travers des pores du verre. Il paroit évident que cet effet est uniquement dû au sel, puisque nous sommes assûrés que les particules d'eau ne peuvent point passer par les pores du verre. Dans les congelations artificielles, à quelqu'endroit qu'on applique le mêlange, soit au fond, aux côtés ou vers la surface de l'eau contenue dans le verre, il s'y formera une petite lame de glace. Ce phénomene suit, de ce qu'il y a toûjours dans tout le mêlange une suffisante quantité de particules salines, capable d'empêcher l'action de la matiere ignée, au lieu que dans les congelations naturelles l'eau doit se congeler à sa surface, parce que les particules salines y sont en plus grande quantité.
L'auteur de la nouvelle conjecture pour expliquer la nature de la glace, fait plusieurs objections contre ce système. Il ne paroît point, dit - il, que le nitre entre dans la composition de la glace; car si cela étoit, on rendroit difficilement raison des principaux phé<cb->
L'eau ne se congele que pendant l'hyver, parce
qu'alors ses parties plus intimement unies ensemble
s'embarrassent réciproquement l'une & l'autre, &
perdent le mouvement qu'elles avoient auparavant.
L'air, ou pour mieux dire l'altération de son élasticité & de sa force, sont la cause de son union plus
étroite aux particules de l'eau. L'expérience démontre
qu'il y a une quantité prodigieuse d'air grossier
répandu entre les globules de l'eau: on convient que
chaque particule d'air a une vertu élastique. L'auteur soutient que les petits ressorts de l'air grossier
qui est mêlé avec l'eau, sont beaucoup plus forts &
beaucoup plus tendus dans l'hyver que dans tout autre
tems. Quand d'un côté ces ressorts viennent à se
débander, tandis que de l'autre l'air continue à peser
sur la surface de l'eau, les parties de l'eau pressées
& rapprochées les unes des autres par cette
double force, perdront leur fluidité & formeront un
corps solide, qui restera tel jusqu'à ce que les petits
ressorts de l'air, relâchés par une augmentation de
chaleur, permettent aux parties du fluide de reprendre
leurs premieres dimensions, & laissent assez d'espace
entre les globules du fluide pour qu'ils puissent
se mouvoir entr'eux. Mais ce système a son foible, &
le principe sur lequel il est fondé peut être démontré
>ux. Le froid n'augmente point le ressort ni l'élasticité
de l'air, au contraire il les diminue. L'air se raréfie
par la chaleur, & se condense par le froid; & il
est démontré en Aërométrie, que la force élastique
de l'air raréfié, est à la force de ce même air, qui est
dans un état de condensation, comme son volume,
quand il est raréfié, est à son volume quand il est condensé.
Voyez
Je ne sais pas si c'est trop la peine de faire mention de l'hypothese de quelques auteurs, dans laquelle ils expliquent d'où vient l'augmentation du volume & la diminution de la gravité spécifique de l'eau convertie en glace. Ils soutiennent que les particules de l'eau dans leur état naturel, approchent de la figure cubique, & qu'ainsi il n'y a que très - peu d'interstices entre les parties des fluides; mais que ces petits cubes sont changés par la congelation en autant de spheres, qui laissent entr'elles beaucoup d'espace vuide. Les particules cubiques sont certainement beaucoup moins propres à constituer un fluide, que les particules sphériques; de même que les particules sphériques sont bien moins disposées à former un corps solide que ne le sont les cubiques; c'est ce que la nature de la fluidité & de la solidité nous suggere assez facilement.
Au fond, pour nous faire une théorie de la congelation, nous devons recourir, soit aux particules frigorifiques des Philosophes corpusculaires, considérées sous le jour & avec tous les avantages que leur a donné la philosophie de Newton, soit à la matiere subtile des Cartésiens, avec tous les correctifs de M. Gauteron, dans les mémoires de l'Académie royale des Sciences, année 1709.
Nous joindrons ici l'un & l'autre système, pour laisser au lecteur la liberté du choix. Je commence par le premier. Lorsqu'une quantité de particules [p. 866]
Les observations qu'on a faites sur les sels avec les microscopes, font voir que les particules de quelques sels, avant qu'ils soient réduits en un corps solide, paroissent très - fines, & ont la figure de petits coins; c'est pourquoi elles se soutiennent dans l'eau lorsqu'elles sont élevées, quoiqu'elles soient spécifiquement plus pesantes que l'eau.
Ces petites pointes des sels introduites dans les pores de l'eau, & qui sont en quelque façon soutenues par ce moyen, même dans l'hyver (quand la chaleur du soleil n'a pas assez de force pour teni> les sels suspendus dans le fluide, pour émousser leurs pointes ou pour les entretenir dans un mouvement continuel); ces petites pointes, dis - je, venant à perdre leur arrangement & devenant plus libres de s'approcher les unes des autres, elles forment alors des crystaux de la maniere que nous l'avons expliqué ci - dessus, qui s'introduisant par leurs extrémités dans les plus petites parties de l'eau, la convertissent de cette façon en un corps solide, qui est la glace.
Outre cela, il y a encore une grande quantité de particules d'air dispersées çà & là, tant dans les pores des particules de l'eau, que dans les interstices formés par les globules sphériques. Les particules salines s'introduisant dans les particules d'eau, en chassent les petites bules d'air; celles - ci s'unissant plusieurs ensemble, forment un plus grand volume & acquerent par cette union une plus grande force d'expansion que quand elles étoient dispersées. De cette façon elles augmentent le volume, & diminuent la pesanteur spécifique de l'eau convertie en glace.
Nous pouvons concevoir de - là comment l'eau
impregnée de soufre, de sels & de terres, qui ne se
dissolvent que difficilement, peut être changée en
métaux, minéraux, gommes & autres fossiles; les
parties de ces différens mixtes formant avec l'eau
une espece de ciment, ou s'introduisant dans les
pores des particules de l'eau, se trouvent changées
en différentes substances. Voyez
Quant au second système, comme on suppose
que la matiere éthérée est généralement la cause du
mouvement des fluides (Voyez
Il est vrai que le nitre de l'air étant plus grossier quand il fait froid que quand il fait chaud, devroit perdre de sa vîtesse; mais aussi le produit de sa masse par sa vîtesse, qui reste la même, augmentant, il aura un plus grand mouvement ou une plus grande quantité de mouvement. Il n'en faut pas davantage pour que le sel agisse avec plus de force sur les parties des fluides. C'est aussi probablement pour cette raison, que l'évaporation est si considérable dans un tems de gélée.
Ce nitre aërien doit être cause de la concrétion des fluides: ce n'est point l'air ni le nitre qu'il contient qui donne le mouvement aux fluides, puisque c'est la matiere subtile: donc quand cette matiere subtile perd de sa force, tout le fluide perd en même tems une partie de son mouvement.
Mais la matiere éthérée, assez foible d'elle - même dans l'hyver, doit de nouveau perdre beaucoup de sa force, agissant contre un air condensé & chargé de molécules de sel assez considérables; elle doit donc perdre de sa force dans le tems froid, & pour cela elle a moins d'aptitude à entretenir le mouvement des fluides; en un mot lorsqu'il gele, on peut regarder l'air comme la glace impregnée de sel, avec laquelle nous faisons glacer nos liqueurs en été. Probablement ces liqueurs se congelent à cause de la diminution du mouvement de la matiere éthérée par son action contre la glace & le sel mêlés ensemble: alors l'air malgré sa grande chaleur n'est point en état d'empêcher la concrétion. Chambers. (M)
Congelation, (Page 3:866)
Le terme de la congelation, en parlant d'un thermometre,
est le point où la liqueur s'arrête dans le
tuyau lorsqu'on plonge la boule dans une eau mêlée
de glace. Voyez
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